35. Porte à porte

Le message politique ne vous échappera pas et ne vous plaira peut-être pas (quoi que, si vous avez lu jusqu'ici j'imagine que si). Vous trouvez peut-être mal venu que je parle de ce sujet, je ne suis pas "concerné". Franchement, je comprends et je suis ouvert aux critiques, mais j'ai besoin de faire quelque chose. Remplacez Voldemort par d'autres noms ici, vous comprendrez.

(Votez Nouveau Front Populaire, demain. C'est ça que ça veut dire)

Tw : mention de racisme et de guerres 

L'appartement de Marlène et Dorcas - qui appartenait en réalité juste à Dorcas, était un endroit chaleureux, spacieux, comme ensoleillé. Même en hiver. Son seul défaut après son prix exorbitant était l'absence d'ascenseur. Neuf étages sans, c'était long (quoi que James s'était demandé à plusieurs reprises pourquoi l'architecte ne s'était pas motivé à aller jusqu'à dix, tant qu'il y était, pour le nombre pair). Le genre de circonstances où il ne fallait pas avoir oublié un truc en bas. Ni avoir de quelconques difficultés à marcher. 

« Ça va, les escaliers ? taquina-il quand son amie apparue sur le pas de la porte, un tote bag rempli de flyer à l'épaule. 

- Ne fais pas le malin, Potter. On va faire du porte à porte, attends toi à en bouffer, des escaliers. »

Elle n'aurait pas pu mieux dire, car après avoir rejoint le groupe qui les accompagnerait iels se retrouvèrent à faire tout l'immeuble de l'un des membres. Et des escaliers, il y en avait. 

« Pour les immeubles dans lesquels on ne peut pas rentrer, on se contentera de mettre des flyers dans la boite aux lettres. éclaircit l'une des filles. Mais parler à quelques personnes reste important, personne sera convaincu∙e par un flyer. »

James doutait que qui que ce soit ne soit convaincu∙e non plus par un groupe de jeunes adultes frappant aux portes comme des enfants à Halloween ou des témoins de Jéhovah mais il garda ses remarques pour lui. Dorcas et lui se mirent à l'arrière du rang improvisé, les papiers multicolores imprimés entre les mains. Là, iels allaient pouvoir discuter en paix. 

« Alors, c'est quoi tes questions ? demanda la jeune fille au bout d'un moment. 

- Ha oui. Je voudrais... changer de filière ?

- Oh ? s'exclama Dorcas, tournant la tête vers lui avec de grand yeux, l'air bien plus intéressée. 

- Ouais... et le cinéma est un peu le seul truc qui m'intéresse. Pas pour en faire mais plutôt pour critiquer, apprendre aux autres... ce genre de trucs. 

- Mm. Dur de savoir ce qu'on veut faire, hein ?

- J'ai l'impression que je trouverais jamais. 

- En tout cas mon école est facile à intégrer si c'est ce que tu veux savoir. C'est comme une fac. T'as juste à postuler, faire une lettre de motivation et tu seras sur liste d'attente en septembre. Il y a pas mal de débouchées, pas non plus des trucs en or mais c'est raisonnable. 

- Tu penses que ça m'irait ? 

- Je pense que ça vaut rien d'essayer. 

- Je suis pas un chat. J'ai qu'une vie, j'ai pas non plus le temps de tester toutes les études du monde, marmonna James. 

- Qui te dis que t'en a qu'une de vie ? 

- Je préfère partir du principe que j'en ai qu'une pour pas passer à coté- »

Il fut coupé dans son élan par le premier grincement de portière, laissant apparaitre à moitié un∙e ado parce que c'était une vielle bâtisse dont les portes possédaient cette sécurité avec une courte chaine pour une porte entrouverte ainsi qu'un judas en verre rond sur la facade. Le garçons avait les yeux cernés, les pupilles dilatées et de longs cheveux en bataille.  De l'air s'échappait de là comme si toutes les fenêtres étaient grandes ouvertes mais James pouvait sentir l'odeur du cannabis.  

« Ouais ? demanda l'ado en question, balayant le groupe du regard. 

- On vient faire campagne pour l'Ordre du Phénix. 

Leurs interlocuteur haussa les épaules. 

- J'ai pas l'âge de voter.

C'était l'heure de l'école, étrange que quelqu'un de son âge soit seul∙e à la maison, avec du cannabis. James espéra que ce n'était pas un mauvais singe. À cause ou grâce à Sirius, il était toujours vigilant face à un∙e enfant qui agissait en dehors de la norme. Que ce soit trop sage ou trop rebelle, ce n'était jamais bon singe. Il se surpris à chercher des marques sur ses bras, un éclat de tristesse dans son regard. Il ne trouva rien, il ne sut quoi dire à part laisser les autres lui tendre un flyer. 

- Donne ça à tes parents de notre part, alors. 

- Iels voteront Voldemort, soupira le garçon. Je préférais qu'iels vous écoute mais il y a pas de doute, ça sert à rien que je leurs donne ça, sauf si je veux le voir brûler. Reprenez-le vous allez en avoir besoin. »

Il claqua la porte avant qu'un mot de plus ne soit échangé. Toutes leurs réponses moururent contre le polychlorure. 

« Pff, ok, porte suivante. »

James resta bloqué devant celle-ci, pourtant. Un instant de plus que les autres. 

Sans réfléchir il frappa une seconde fois, peu surpris de voir le garçon lui ouvrir de nouveau. Il n'était pas beaucoup moins âgé que lui. Il était sûr de ne pas le connaitre, pourtant il y avait quelque chose de familier chez lui. James mis une seconde de plus à comprendre ce que c'était, pourquoi ce gamin lui faisait tant penser à Sirius. 

« Hey. Tu vas penser que je me mêle de ce qui me regarde pas mais... (il piqua en toute hate un stylo à Dorcas et écrivit sur un flyer) j'ai cet ami qui va à un groupe d'aide pour... les gens qui ont un problème de drogue ou d'alcool. Si jamais tu as besoin... à tout hasard. Appelle ce numéro, iels t'accueilleront. »

Le garçon le fixa un moment, perdu. Il prit quand même le papier, puis ferma la porte sans répondre.

Les autres étaient déjà chez le voisin quand il les rejoignit. Dorcas lui lança un regard étonné, essayant de faire rentrer sa veste en jean dans son sac débordant de papiers. 

« Qu'est-ce que tu foutais ?

- Je sais pas, une intuition. 

- Mouais. Un vague rapport avec Reginald ?

- REGULUS ?! corrigea-t-il plus ou moins. Il avait parlé un peu trop fort, faisant tourner quelques têtes. 

- C'est pareil, dit Dorcas, les bras croisés, levant les yeux au ciel. 

- Non, c'est pas pareil. Je t'interdit de bousiller ce merveilleux prénom d'étoile qu'il a choisit lui-même en horrible prénom de vieux...

- C'est pas si moche Reginald.

- C'est pas son prénom, respecte mon copain ! C'est pas parce que ta copine à un prénom de vieille que-

- Wow. Et voilà que ça se retourne contre moi. T'es dingue de lui, toi. 

- Oh, la fer-

- Je peux faire quelque chose pour vous ? »

Nous étions deux portes plus tard, une jeune femme petite et maigre se tenait dans l'entrée avec un bébé dans les bras, scrutant le groupe. 

« On voudrait vous parler des élections. On fait campagne pour l'Ordre du Phénix. 

- Oh, je ne peux pas voter (elle baissa les yeux vers l'enfant qui s'agitait dans ses bras, le désignant du doigt), elle passe un examen ce jour-là. J'ai attendu des semaines pour l'avoir et, connaissant l'hôpital on peut attendre des heures.

- Vous avez pensé à faire procuration ? C'est important, vous savez. Que votre petite fille ne vive pas dans un monde avec Voldemort au pouvoir.

- Avec tout mon respect, marmonna la femme, ça ne changera pas grand chose. Pour elle.

Parce qu'elle est blanche, complétèrent-iels chacun∙es dans leurs têtes. 

- Ça vous n'en savez rien, intervint Dorcas. Et si elle se découvrait lesbienne ? Si elle développait un handicap ? Physique ou mental ? Vous savez quel sort Voldemort et ses fidèles lui réserverait ? Si elle voyait ses ami∙es ou ses amoureux∙ses noir∙es, arabes, juif∙ves se faire agresser ou virer du pays, penseriez vous que ce monde est fait pour elle ?

- Une voix de plus ou de moins ne changera rien. répondit la femme, indifférente. Et puis je vous ai dit, je n'ai pas le temps. 

- S'il vous plait, réfléchissez-y. Dit quelqu'un d'autre en lui tendant un flyer. On ne vous embête pas plus longtemps. »

La porte claqua vite, sans violence mais laissant un vide panique dans le ventre de James. 

C'était-ça alors ? On s'en foutait des autres ? Si le règne de Voldemort ne gâchait pas notre vie ça n'avait pas d'importance ? Sa vie à lui en serait impacté, pourtant. Sans détour. Est-ce que les autres s'en fichaient ? Les actes racistes seraient plus tolérés et par consequent plus présents, il aurait davantage peur de marcher dans la rue, de se faire refuser un poste, une aide sociale, d'entendre qu'il n'était pas d'ici, le pays dans lequel il état pourtant né. On demanderait peut-être à ses parents de retourner vivre au Pakistan, on trouverait une solution pour le forcer à les rejoindre. Pourrait-il encore vivre avec Regulus ? Voldemort n'hésiterait sans doute pas à revenir sur le mariage pour tous, le droit à la PMA. Ils ne pourraient pas se marier, ni avoir d'enfants. Regulus ne pourrait pas transitionner médicalement, peut-être même que ça le tuerait. Et encore, ça, ce n'était que pour lui. Qu'en serait-il de Sirius et Remus, de Dorcas, de Marlène ? De tout ceux qu'il ne connaissait pas qui serait tué au nom d'une idéologie raciste, sexiste, lgbtphobe, en toute impunité ? Les laisser gagner c'était condamné tous∙tes celleux qui étaient différent∙es. Avec lui, pouvait-on garder l'espoir de voir les génocides en Palestine ou au Congo s'arrêter ? Tout cela serait impossible avec Voldemort au pouvoir. Ce serait un enfer pour lui, pour les droit humains. Milles pas en arrière sur tout ce qui avait pourtant été accomplit. James avait envie de le hurler, de projeter ses craintes comme sur une grande pancarte de pub pour que personne ne puisse encore prononcer le moindre propos en sa faveur... Mais c'était trop tard.

Habitations après habitations cette réalité le frappa. C'était trop tard. Même s'il le savait déjà, il s'en désolait, parce que c'était autre chose de la regarder en face. Les plus pauvres comme les plus riches, des jeunes comme les vieux, les blanc∙hes comme les non-blanc∙hes même, trouvaient des excuses aux Mangemorts. 

On a pas encore essayé, alors, au point où on en est...

Et puis je n'aime pas Dumbledore.

Ce sont les riches qui votent Ordre du Phénix, nous, les Mangemorts sont notre seule solution.

Je ne reconnais plus mon pays.

Iels ne sont pas racistes. 

Nous ne sommes plus du temps de Salazar Serpentard, Voldemort est différent. 

Vous, par contre...

Et à chaque fois c'était comme un coup de couteau en plus dans la peau, à l'idée que tant de visages se cachent derrière les votes anonymes qui mèneront les méchants si proches du pouvoir. N'ont-ils rien appris de leurs histoire passée ? Certains étaient nées quand d'autres personnes de ce genre ont été proclamées leader∙euse, on l'étudie dans les livres d'école. N'ont-iels rien retenu ? James se sentait mal. Malvenu mais en même temps en colère. 

C'est vrai ce qu'on disait. Beaucoup d'humain∙es mais peu d'humanité. 

Il l'avait toujours su. Il y avait été confronté toute sa vie mais il lui semblait que quand il était petit ce genre de discours était règlementé. Où étaient passé ses règles ? C'était leurs disparition qui faisait mal. Ça donnait envie de détruire le monde. Il imaginait déjà le jour où il verrait les résultats des élections publiés sur instagram, il les visualisait et les craignait. Putain de monde. 


Au niveau de son appartement il fit mine de rire « C'est mon arrêt ». Mais il n'avait pas la tête à l'humour. Ni à l'amour. Il ne fit qu'un vague sourire à ses amis en rentrant. 

Lui qui était parti chercher des réponses pensait à tout à fait autre chose, la tête pleine de questions. 

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