\Chapitre 14/

- RAY !

Avant d'hurler ce nom dans l'oreille de Lana, je faisais un étrange rêve. Pas comme dans les films, plutôt un où je me faisais courser par la reine des neiges, avant de me jeter dans un puit et d'atterrir sur une piste de bowling où mon frère dansait autour d'une barre, Hidji et Ray le regardant fixement. Je courais vers Ray, mais il s'envolait sur un nuage. Je flottais jusqu'à lui alors qu'il mangeait des petits gâteaux avec une licorne, et comme j'avais faim je tendais la main pour me servir, mais une aile recouverte de plumes colorées me donnait une petite tape. Un grand perroquet se prélassait désormais à la place de Ray, riant aux éclats. L'oiseau ne m'accordait pas un regard, pourtant je savais qu'il me parlait. "Oublié ?" répétait-il en boucle.

Je ne crois pas que les rêves est réellement un sens, mais ça n'empêche pas mon cerveau de m'envoyer des messages à travers. "Oublié", comme disait le piaf, c'est exactement ça. J'ai oublié la raison première de ma venue. Un gothique au cheveux bicolores, un oiseau bavard et une amie un peu trop mignonne ont réussi à me distraire... Quoique, l'amie à elle toute seule aurait expédié cette mission en quelques secondes. Mais ce n'est pas le sujet : je dois retrouver Ray !

Aussi prête que Dora partant sauver Babouche d'un dragon pailleté, je me lève rapidement, oubliant la silhouette frêle installée contre mon épaule. Résultat, Lana bascule et se cogne la tête sur le parquet glacé, se réveillant du même coup. L'esprit encore embrumé par ma longue sieste, je bafouille quelques excuses avant de disparaître. Je monte les escaliers de secours quatre à quatre pour arriver dans le grand hall, malheureusement au pire moment : une foule déchaînée suit les quatre stars du groupe Glitch qui crient leur titre "Come in my bed" dans les micros, bousculant tout le monde sur leur passage.

En apercevant Missi, la petite chanteuse rousse au visage parfait et à la voix d'ange, je perds tous mes moyens et m'arrête au milieu des escaliers, les yeux accrochés à son sourire. Les chanteurs et leurs fans entrent dans le bar : comme si ça n'était pas déjà la salle la plus animée du Nuage... Dès que Missi sort de mon champs de vision, je retrouve mes neurones ainsi que l'idée de retrouver Ray. Je file vers les cuisines d'un air décidé, prête à fouiller le Nuage entier pour retrouver mon ami.

Après dix minutes de recherches - que j'ai passées à fouiller placards et armoires, endroits où je ne trouverai personne d'autre que des idiots bourrés se mangeant mutuellement les lèvres -, j'entre finalement dans le bar, que Glitch n'a toujours pas quitté. Au contraire, ils organisent déjà des jeux d'alcool avec toutes les personnes présentes, renversant la moitié des verres sur les serveurs habitués à ce genre de comportement.

Parmi les personnes trempées jusqu'aux os ne parvenant même plus à se déplacer dans la foule, j'aperçois Clarisse et joue des coudes pour la rejoindre.

- Hey ! me salue-t-elle avec un sourire soulagé. Avant que tu me dises quoique ce soit, sortons d'ici. Je suis censée garder le bar à cette heure ci, mais vu le bazar qu'il y a ça ne servirait à rien d'essayer de les surveiller.

La blonde me traîne dans un petite pièce où elle chasse trois personnes commençant à peine leur plan, avant de claquer la porte.

- Toi aussi, tu es venue chercher Ray ?

- Bien sûr ! je confirme. Le truc, c'est que je ne sais vraiment pas où le trouver... J'ai l'impression qu'il n'est même pas là.

- À vrai dire, c'est logique. S'il était ici, il aurait pu sortir, non ?

- À moins qu'il soit enfermé quelque part...

- Non, ne commence pas à inventer des scénarios impossibles. Je sais que tu adores ça, mais ce n'est vraiment pas le moment. J'ai essayé d'écouter les discussions, pour voir si quelqu'un parlait de l'incident avec la police, mais comme d'habitude ça ne parlait que de ragots sur internet. Je ne dis pas que ce n'était pas intéressant, mais...

- Chut. On a pas vraiment le temps de discuter, il faut qu'on trouve minimum un indice avant de rentrer chez nous. Je n'ai pas envie d'être venue ici avec tant d'espoirs pour rien... Imagine qu'on ne retrouve jamais Ray ?

- J'ai dit pas de scénarios impossibles, on arrête de croire que tout a une mauvaise fin. Et puis même si ça se finit mal, on aura qu'à créer une suite !

Je marmonne un "mouais" peu convaincu, provoquant un soupir chez Clarisse. Elle jette un coup d'œil à sa montre, me regarde puis se tourne à nouveau vers sa montre d'un air effaré :

- Il est six heures du matin !

- Déjà ?! Comment c'est possible ? Je suis venue vers vingt-deux heures !

- Personnellement, je ne devrais pas m'en étonner, avoue mon amie. Je suis arrivée à deux heures du matin et j'ai passé des heures à hurler devant Glitch, donc forcément...

- Et moi, j'ai dormi longtemps... Enfin, on. Euh... attends, mais... Lana !

- Hein ?

Comment je fais pour me distraire aussi facilement à chaque fois ? J'ai décidément pas les idées en place ! J'attrape Clarisse par le poignet et la tire à l'extérieur sans plus d'explications, direction les arrières-salles. Glitch a déserté le bar entre temps, et je les entrevois dans le salon de striptease en traversant le hall. Une grande silhouette toute habillée de noire m'interpelle depuis les escaliers, et je reconnais très vite Marlin, une cigarette à la main :

- Tu cherches Lana, hein ? Elle vient à peine de sortir.

- Quoi ? Pourquoi ?

- Tu l'as un peu abandonnée sous l'escalier... Lorsqu'elle nous a rejoint, elle avait l'air déçue. Très déçue.

- Je ne sais pas d'où tu sors, mais calme toi tout de suite, intervient alors Clarisse. Je ne me souviens pas t'avoir donné l'autorisation de rabaisser mon amie comme ça.

- Et moi je me souviens pas t'avoir adressé la parole, gamine, siffle Marlin.

- Problème réglé alors ! grince l'adolescente.

- Parfait, tu peux dégager alors, rétorque le frère de Lana.

- Euh, c'est pas vraiment... Clarisse... je marmonne, très mal à l'aise.

- Neila !

Comme si la situation n'était pas déjà assez compliquée comme ça, Hidji débarque aux bras d'une grande rousse et d'un jeune homme croulant sur les deux autres.

- Tu sais quoi ? me crit le nouveau venu. Ton frère c'est qu'un pauvre p*dé ! Dis lui d'aller se faire foutre avec son crush !

Je comprends que mon ami est complètement bourré en lâchant ces mots, mais ils me font quand même mal. Clarisse, déjà agacée par Marlin, s'énerve encore plus :

- C'est toi qui devrais aller te faire foutre ! Tes deux potes bavent déjà sur toi, alors ce sera rapide !

- Ferme-la ! Tu baves sur du putain de p*rno gay, alors évite d'ouvrir ta grande gueule ! 

- Merde, ce sont tes potes Neila ? Me dis pas que Lana traine avec ces cons ! s'inquiète Marlin avec un air dégoûté.

- C'est toujours mieux que d'être avec un pauvre p*do comme toi ! ricane le garçon accroché à Hidji.

- TU ME DÉGOÛTES ! hurle Clarisse en attrapant le col de son ami, si on peut toujours l'appeler comme ça.

- ME TOUCHE PAS ! s'égosille l'intéressé en lui arrachant les cheveux.

Tous les deux commencent à se battre violement, mordant et cognant dans tous les sens. Marlin leur jette sa cigarette dessus et monte les escaliers, semblant décide à je ne sais quoi. Les camardes de Hidji rejoignent la bagarre, frappant n'importe tout en riant. Le congolais est soudain jeté à terre et sa tête heurte le sol avec force. Il perd immédiatement connaissance, mais Clarisse n'en a pas finit. Elle saute sur lui et griffe son visage jusqu'au sang, prise d'un accès de rage incontrôlable.

Finalement effrayés par la tournure des événements, les adolescents accompagnant Hidji fuient vers la salle de concert, laissant mes deux amis couverts de blessures sur le sol. Dans un film, je leur aurais hurler d'arrêter au moment où Clarisse a attrapé Hidji. Mais je suis une lâche. Et maintenant, je ne tiens plus à les observer en sang plus longtemps. Je détale vers le parking de la même manière que la rousse et son ami, mais la panique me fait voir trouble et je finis par trébucher pour m'étaler au sol.

Cette chute me permets de reprendre quelque peu mes esprits, et je réalise que mon visage est en larmes. Ce n'est pas vraiment une surprise... Pourtant, j'aurais aimé que ces Converses roses reconnaissables entre toutes n'apparaissent pas devant moi alors que je ressemble à un chiffon, avec mes cheveux en bataille, ma robe légèrement déchirée par le sol rugueux du parking, mes genoux ensanglantés, mon visage bleuis par les coups reçus dans le bar, les yeux bouffis et l'air au bord de la crise.

Lana reste silencieuse, se rendant peut-être compte qu'encore une fois, elle arrive au pire moment. Elle m'énerve, avec son air gentil et parfait. Son charme naturel. Ses réactions totalement inventées. Ses mensonges. Elle croit que je suis stupide. Malheureusement pour elle, je suis ce genre de personne qui comprend facilement. Ce faux sourire, j'espérais ne jamais en voir. Et j'en ai marre de passer pour la débile de service. Même en parlant de moi, je me présente comme une fille simple et innocente. Ce que Lana prétend être.

- Et j'en ai marre.

- Hm ? s'interroge Lana, son regard inquiet posé sur ma tête obstinément baissée vers le sol.

- C'était bien avant. Pas de prise de tête, juste des petites blagues entre nous, des rires, de vrais rires. C'était simple. Je me disputais avec Paolo, mais c'était drôle. Je me débattais pour comprendre les idées farfelues de Clarisse, mais c'était drôle. Je me faisais taquiner par Hidji pour un rien, mais c'était drôle. Ray n'était pas aussi drôle, mais il était sincère. Contrairement à toi. Tu te fais passer pour quelqu'un d'autre depuis le début. Tu ments, tu nous embrouilles.  Depuis que tu es là, tout est compliqué. T'as tout gâché. On était heureux sans toi, il n'y avait aucun problème. T'aurais jamais dû venir.

Je lève finalement les yeux vers Lana. Bizarrement, elle ne semble ni surprise, ni déçue. On dirait qu'elle... comprend. Malgré tout, je tiens à finir mon monologue :

- Je te déteste.

Ces trois derniers mots la touchent. Beaucoup plus profondément que les autres.



Je sais, c'est nimporte quoi. Ça ne va absolument pas avec le reste de l'histoire. Beaucoup trop... je sais pas, mais j'ai l'impression que c'est trop violent par rapport au reste. Et je meurs d'envie de changer le reste pour l'accorder à ça. Du coup... je pense à une réécriture, et je suis très motivée. Mais du coup je publierai pas pendant plus longtemps que d'habitude :1

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