Pourquoi Atlantide est le Disney qui m'a le plus influencée.

S'il y a peut être un long métrage classique Disney qui vient le moins facilement à l'esprit, c'est sans doutes Atlantide. Et pour cause : il est un échec commercial à sa sortie. 

Tout d'abord dans sa forme : Atlantide est sorti en juin 2001 aux Etats Unis, alors que l'interêt du public pour l'animation traditionnelle se détourne progressivement de l'animation traditionnelle pour le numérique - eh oui, Shrek, c'est la même période. Alors un film qui sort en 2D, avec très peu d'effets 3D, ça ne convient pas au ton de l'époque.

Ensuite pour son fond. C'est un dessin animé qui a "heurté" - toutes proportions gardées - son public, par son langage parfois vulgaire, ses blagues à double sens, et ses personnages reprenant des stéréotypes que l'on avait pas l'habitude de voir dans un Disney - Olga la femme fatale, Audrey la mécanicienne au fort caractère... Tout ça ne convient pas à beaucoup de famille qui trouve le film trop "adulte" pour un public enfant.

Et enfin pour le rythme. Dire qu'Atlantide va vite serait un euphémisme : le film cavale, du début à la fin. Les péripéties s'enchainent, laissant très peu de temps au spectateur pour comprendre toute l'intrigue, tous ses tenants et aboutissants, et même - et c'est bien triste - toute sa profondeur. Alors même que la trame narrative est bonne. Des élèments sont amorcés tout au long du film, et tout a plus ou moins de sens, les personnages sont attachants, on arrive à comprendre leur histoire malgré leur nombre et ils ont même l'occasion d'évoluer pendant l'intrigue. Bref : l'exercice d'écriture scénaristique est plutôt bien réussi. (btw je balance ça comme ça : si vous voulez d'excellentes analyse de films avec des conseils d'écriture, la chaîne du Tropeur est juste... du miel pour les oreilles et les yeux).

Mais... Un film n'est réussi que s'il parvient à rapporter - et Dieu que c'est triste. "Produit pour 100 millions de dollars américains, le film n'en a rapporté que 84 millions aux États-Unis, mais totalise toutefois plus de 186 millions de dollars à l'international. Ce mauvais score a stoppé les idées d'adaptation du film telles qu'une série télévisée et une attraction. " (Source : Wikipédia). Le bilan ne laisse aucun appel : pour un Disney, un classique en plus, c'est un raté.

Pourtant, j'aime, j'aimais (et j'aimerai, ouai je fait dans le Cabrel maintenant), ce film. Déjà parce que je trouve injuste la critique technique qui lui a été fait. Aujourd'hui Atlantide n'a pas pris une ride. Le peu d'effets 3D utilisés sont parfaitement intégrés, ils ne jurent pas avec le reste. Et surtout, peut-on s'il vous plaît, parler de cet univers graphique qui nous est proposé ? Que ce soit par des plans très large qui nous laisse découvrir des paysages incroyable, par une lumière parfaitement maîtrisée et réaliste, une culture entière qui a été créée... Tout est là pour nous inciter à la rêverie. Franchement regardez moi les plans de ce film sur internet et osez me dire que ça ne pourrait pas être des toiles numériques.

Pour parler brièvement musique, certes, ça ne chante pas. Mais zut, est ce qu'on peut parler de cette ambiance musicale ? Vraiment : écoutez la bande son d'Atlantide, ça vaut de l'or.

Si vous voulez avoir une critique approfondie de la technique du film, de la trame scénaristique, je vous conseille la vidéo de "Le Clap" sur YouTube, qui dit exactement ce que j'aimerais dire si j'avais un peu plus de temps - voir vidéo ci-dessus.

Maintenant, parce que c'est moi l'autrice ici et que c'est IDWWAFF, passons à la partie analyse personnelle de l'oeuvre.

Atlantide pour moi c'est une ode d'amour à la culture - et une putain de critique du colonialisme. Partons de plus évident pour aller jusqu'à une interprétation très personnelle.

Déjà, on a des blancs, colons, capitaliste, donc intéressé uniquement par l'argent et la gloire, qui viennent piller une civilisation antique et riche sans prendre en compte la dimension culturelle voire religieuse qu'on ces ressources - oui ça rappelle des périodes de notre Histoire dont nous devrions rougir. Les personnages sont caricaturaux et sont faits pour que l'on comprenne bien ces rôles dès le départ... Dès leur chara design en fait. Olga, je suis désolée... C'est Lara Croft (les seins rectangles en moins). (Je vous ai dit que je pouvais disserter pendant un quart d'heure ne serait ce que sur le chara design des personnages ? Je peux déjà parler pendant dix minutes de pourquoi même la forme de leurs doigts sont intéressants, ne me lancez pas.)

Ces ressources sont surtout incarnées par le cœur de l'Atlantide. Ce cœur est super intéressant. Dans les dialogues du film, il devient ce qui est le plus précieux aux yeux des personnages qui en parlent. Pour les colons, c'est un gros joyaux, qui a donc une grosse valeur commerciale. Pour Milo, c'est une forme de batterie - pour lui, le plus important, ce sont les sciences, le progrès. Pour Kida et les autres atlantes, ce que Milo comprend plus tard, c'est leur souffle vital, une divinité, le fondement de leur civilisation : bref, l'incarnation à mon sens de leur culture.

En effet, plusieurs indice pour comprendre cela : le plus gros, c'est que dès que le coeur est caché, les Atlantes oublient progressivement leur culture. Que ce soit leurs divinités (les anciens rois), leur écriture, leur langue : le cœur est l'incarnation de tout ça. On a une autre métaphore de cet abandon progressif de la culture dans ces fresques immergés que Kida redécouvre aux cotés de Milo : pourquoi ne les a-t-on pas préservées, restaurées ? Parce qu'elles ont perdues leur sens lorsque le cœur a été caché. Malgré tout, les Atlantes gardent toujours cette mémoire collective - car oui, la culture, c'est une mémoire collective - en eux, incarné par le morceau de cristal qu'ils ont tous. C'est aussi pour ça que le Roi donne son cristal à Milo : il s'agit d'une passation, le symbole que désormais Milo fait parti de leur communauté, de leur mémoire collective - et même de leur Histoire.

Maintenant, je vais partir dans une explication barrée, mais qui dans ma tête, fais sens - et j'espère que ça ferait sens aussi pour vous. Dans la monarchie de l'Atlantide, je pense que le Roi et la Reine ont des rôles spécifiques. Si le Roi était l'incarnation de la guerre et de la défense de l'île, la reine était l'incarnation je pense, de la culture, de leurs divinités et du coeur. Cette explication permettrait de comprendre beaucoup de chose. C'est pour ça que le coeur choisit la reine pour s'incarner et révéler son pouvoir. Lorsque la reine meurt, la civilisation de l'Atlantide se retrouve privée de son incarnation de sa culture. 

Et ce n'est pas Kida qui était censée être dans son couple royal l'incarnation de la culture. Son père le dit lui même : elle est une guerrière avant tout intéressée par l'art de la guerre, et non pas par la culture de son peuple. On se retrouve donc sans membre de la famille royale pour la maintenir, et en conséquence la culture des atlantes se meurt. On peut même imaginer que c'est ça, la punition du coeur. Le coeur est censé être un équilibre entre l'usage de sa puissance pour la culture, la vitalité de la civilisation atlante, et la guerre qui permet de se préserver des envahisseurs extérieurs. Le Roi en abusant de son pouvoir pour faire la guerre a fait un choix, et en conséquence le coeur les a privé de leur culture et leur connaissance. La balance a été détruite.

Ce n'est que lorsque Milo arrive que Kida a une chance de rétablir cet équilibre. Elle n'est plus seulement une puissante guerrière, mais elle a l'occasion avec Milo de satisfaire sa curiosité sur sa culture. De la même manière, Milo était au début du film un irascible pacifique. Ce n'est qu'après avoir fréquenté Kida, après s'être épris d'amour pour elle et sa culture, qu'il change et décide de mener un assaut pour récupérer Kida qui est devenu l'incarnation du coeur.

La culture, c'est la base d'une Société. Les civilisations humaines se sont majoritairement basées sur notre capacité à raconter des histoires si fédératrices que des milliers de personne y croit. C'est comme ça que l'on se retrouve aujourd'hui avec des notions comme le récit national : il faut une Histoire unique pour la France, car si l'on commence à expliquer aux gamins nos histoires régionales, l'attachement à la France diminue. C'est pour ça aussi que l'on se passionne pour les cultures - les histoires - des autres peuples, et que l'on se passionne pour des chantiers archéologiques.

Il faut des histoires, des croyances communes, pour qu'une Société tienne. Et d'ailleurs, je suis profondément convaincue que c'est pour cela qu'aux fondements de toute civilisation, nous trouvons des religions.

Les histoires, avec un grand ou un petit H sont importantes pour moi, car je pense que sans elles, nous ne pourrions pas vivre. Notre capacité a conceptualiser et à croire des choses a fait de nous ce que nous sommes aujourd'hui, et elle est à la base de tout, même des sciences dures. La vérité est plurielle, et même les sciences dîtes exactes ont connues des changements de paradigmes et des évolutions qui sont loin d'être des cumuls de connaissances, mais plutôt une évolution de notre manière de voir et de raconter le monde (un exemple """simple""" est celui de la physique quantique).

Et c'est pour ça que je souhaiterais plus tard travailler dans un milieu qui m'offre la chance de défendre ces cultures et ces histoires que j'aime.

Tout ça pour dire, que l'Atlantide m'a appris ces choses que j'ai mis des années à conscientiser, mais qui fait de moi la personne que je suis aujourd'hui. Et si Disney n'avait pas pris ce risque il y a des années, en créant un univers qui me parle encore à vingt ans passés, je n'aurait peut être pas eu si tôt toute ces réflexions qui m'amène à aller contre tout ce qu'on m'a rabâché du collège jusqu'au lycée : la culture a du sens, a de la valeur, et les métiers qui la préserve ont un avenir car c'est elle qui fait de nous des humains.

Voilà, n'hésitez pas à me faire part de vos réflexions, des idées que cet article vous a donné... Je suis  toujours ravie de vous lire ! Quant à moi, j'espère vous revoir avant l'an prochain ! A plus !



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