Bonjour bonjour !

J'espère que vous allez bien, on se retrouve après de longs mois d'absence.

Et je vous dois quelques explications.

Rassurez vous, je ne vais pas vous faire un chapitre en m'excusant vingt fois d'être partie, en promettant d'être plus présente. On sait tous très bien ici que wattpad c'est un lieu de passage, un refuge de quelques instants, de quelques mois, années, pour ceux qui veulent un peu fuir la réalité au travers de leurs bouquins et de ceux des autres, au travers d'internet.

En fait j'aurais pu tout aussi bien décider il y a quelques mois de partir. Je n'en aurais probablement rien dit, car je sais que quelques commentaires gentils m'auraient fait regretter ma décision. Mais j'aurais pu. Je t'explique pourquoi.

Ce n'est pas un manque d'inspiration ou d'envie d'écrire qui a motivé mon retrait pour un temps de wattpad, contrairement à bien des moments. Jusque là j'étais assez insouciante sur le fait  de poster mon contenu. Je savais qu'éventuellement en postant ici, mes oeuvres pourraient être pompées, réutilisées, copiées, mais comme je n'avais depuis bien longtemps plus la prétention de me faire éditer, on va dire que la copie texto de ce que je pouvais écrire me laissait profondément indifférente. Et de toute façon il y a bien trop de fautes et le style est trop ampoulé pour en faire vraiment quelque chose tel que je le poste sur wattpad, de mon point de vue ce n'est pas exploitable. C'est aussi pour ça que je ne prends pas trop le temps de corriger ce que j'écris - ne m'en voulez pas s'il vous plaît.

Sauf pour les articles littéraires, qui, déjà rares sur mon compte, me prennent énormément de temps, autant en réflexion qu'en lecture et relecture de l'oeuvre. Mais encore une fois, qui s'intéresse à ce genre de contenu, puisqu'il n'y a pas assez pour le voler et en faire quelque chose de marchand ?

Jusqu'à il y a quelques mois, voilà ce que je pensais, et voilà pourquoi je postais de temps en temps sans trop me poser de question. Mais voilà, en janvier de cette année, l'intelligence artificielle Chat GPT a commencé à sévèrement faire parler d'elle. Et là j'ai flippé. Et pas la petite flippe.

En fait, j'ai commencé à me dire : mais ce que je fais, ce que je m'amuse à faire là, un robot pourrait le faire. Et le pire c'est que si je continue, je vais alimenter, si ce n'est Chat GPT, une autre intelligence artificielle qui viendra piocher sur le net, puisque ce que je fais étant disponible gratuitement. Enfin doucement, on est bien d'accord, personne ici ne sera probablement assez "intéressant" pour être considéré comme une source suffisamment fiable pour une IA. Mais quand même. Est-ce que ces trucs pourraient écrire dans le style que j'ai, des articles littéraires, des chapitres à ma place ?

J'étais très mal à l'aise avec cette idée. Cette impression d'être remplaçable. Donc j'ai fini par demander à mon frangin de m'aider, et de voir si Chat GPT, en l'aiguillant comme il fallait, pouvait effectivement me remplacer, s'il pouvait imiter ce que je faisais.

Je n'ai pas la prétention de dire que mon travail est assez incroyable pour être unique, probablement que d'autres ont déjà prélevé les idées que je souligne d'une oeuvre pour en faire un compte rendu sarcastique. Mais il n'empêche. Ça restait mes analyses, mon contenu. Et je voulais savoir si tout ce travail que je fournissais était au final vain, puisqu'une intelligence pourrait le faire en moins de dix minutes à ma place.

Ça nous a pris deux jours pour trouver comment l'aiguiller dans la bonne direction, pour qu'il produise ce que l'on voulait. On a pris au pif une oeuvre que je n'avais pas encore analysé, et mon frère a taffé pour lui faire écrire ce que l'on voulait, à partir de ce qu'il savait de l'oeuvre - prélever un point de l'oeuvre pour se concentrer dessus et parler par exemple d'un sujet d'actualité. Parce que c'est ça en fait Idwwaff : prendre pour prétexte une oeuvre pour vous parler d'un concept philo ou d'une actu, ou autre.

Et au bout de deux jours, on l'a fait. Et vraiment, j'ai lu, et j'avais envie de pleurer, parce que c'était exactement ce que j'aurais pu écrire. Exactement le bon ton, il aurait juste fallu rajouter une pointe d'humour un peu plus piquante, qui aurait pris cinq minutes et l'article était prêt à sortir.

Mais vous savez quoi ? Ça à la limite je m'en fous. Je pourrais continuer à écrire en m'en fichant, en me disant que de toute façon toute personne opérant comme ça n'était qu'une coquille vide, un assisté obligé de demander à un ordinateur de produire du contenu à sa place. Non, en fait la raison pour laquelle ça m'a énormément affectée, c'est que ce truc là, ça me retire éventuellement la possibilité de faire plus tard le travail de mes rêves.

J'ai toujours voulu de vivre d'écrit. Je vous l'ai déjà dit : j'ai très vite compris que je ne voulais pas me faire éditer. Non ce que je veux faire, et ce depuis que je suis tombée dans le monde de la politique, c'est être spin doctor.

Un spin doctor, c'est un expert en communication politique et institutionnelle, qui conseille les élus sur la façon de mener leur image médiatique, sur quoi dire publiquement ou non et surtout qui aide les élus dans la rédaction des discours et autres communiqués officiels.

C'est un métier hyper rigoureux qui demande une grande connaissance du domaine médiatique et une maîtrise quasi parfaite du langage politique et institutionnel. Si on me demandait, je dirais pour certains qu'il s'agit d'orfèvres des mots tellement certains discours sont magnifiquement bien écrit.

Et oui, ça me donne la gerbe de me dire que dans quelques années, des équipes entières seront remplacées par des informaticiens et un robot. Vraiment. Chez moi ça a été très difficile de surmonter cette idée. On sait tous que beaucoup de métiers sont amené à disparaître avec le temps. Mais entre le savoir et le vivre en direct, c'est très différent.

Je sais que beaucoup ne comprendrons pas ma réaction, ne comprendrons pas pourquoi ça m'a coupé l'envie d'écrire même ici, sachant que pourtant, mes publications ici ont plus pour but de parler avec vous que de me faire reconnaître pour mon travail, mais j'en ai fait des insomnies tellement ça a été un choc de réaliser ça.

De réaliser qu'un projet qu'on a depuis plus de cinq ans est mort-né à cause d'une invention qui ne répond à aucuns besoins si ce n'est celui d'être plus productif que ne peut l'être un humain.

Merci de votre attention, je serais ravie de lire ce que vous en pensez malgré tout.