IX
Nicolas
Je suis affalé dans mon plumard, une bouteille d'alcool à moitié vide sur la table de chevet. Je n'arrive plus à retenir mes larmes. Il a fallut qu'elle revienne pour que tout soit plus dur, pour que mes regrets m'explosent à la gueule. Elle me manque mais elle ne veut plus de moi. Putain... et elle a couché avec ce fils de pute. Je cligne rapidement des yeux parce qu'ils me brûlent à force de chialer. J'essaie de me calmer depuis plusieurs heures déjà mais je n'y arrive pas. La douleur est telle une lame aiguisée qui me poignarde à chacune de mes larmes. J'ai absolument tout perdu... Ma vie est une pure connerie, une pure désillusion. J'aurais dû crever dans cet incendie de merde, ça m'aurait épargné un peu au moins. Et elle m'aimerait toujours si j'étais mort ce jour-là...
Dès que je ferme les yeux, les siens m'apparaissent. J'y lis encore la déception, la haine et la tristesse que je lui cause. Elle me hait. Putain ma Sarah me hait. Alors pour m'éviter cette souffrance, je garde les yeux ouverts. C'est lâche mais tellement plus supportable.
Des morceaux de verre jonchent le sol de ma chambre. C'est déjà la sixième bouteille que j'explose sur ce mur. Si j'avais les couilles de le faire, je me charcuterais les veines pour en finir au plus vite. Je serais au moins paisible, loin de ce monde de merde. Pourquoi donner la vie à certaine personnes si c'est pour en faire un enfer? Ça n'a tellement pas de sens. Quand on dit que ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, j'ai envie de gerber. C'est de la bêtise en plein.
Ma vie de base n'était pas si mal mais la souffrance accumulée m'a enlevé le goût de survivre. Le jour où la faucheuse m'embarquera, je lui donnerai une tape dans le dos, heureux de la suivre. Putain mais qu'est-ce qui me retient encore ici? Je n'ai même plus Sarah... Je suis seul. Elle est là la triste vérité. Je finis par m'endormir, épuisé de pleurer.
*****
J'ouvre un oeil. Le referme. Le ré-ouvre en entendant du bruit dans le salon. Ce n'est pas Dean sinon il m'aurait versé un seau d'eau glacée sur la gueule. Ce n'est pas Sandra sinon elle aurait ma bite dans sa bouche. Je grogne en tentant de me lever, j'ai mal partout. Putain quel con! J'ai renversé la bouteille d'alcool dans mon pieu. Tant pis, je m'en branle.
Je prends la batte de base-ball en fer à côté de mon pieu, prêt à défoncer la gueule du connard qui s'est introduit chez moi. J'ouvre la porte d'un geste brusque, la batte en l'air.
Je me fige quand je découvre Sarah, les yeux écarquillés, un sac poubelle noir à la main.
- Tu m'as foutu la frousse, dit-elle en plaquant une main sur sa poitrine.
- Qu'est-ce que tu fiches?
Elle rougit et baisse les yeux. Elle ne me laissera jamais l'embrasser pourtant j'en ai super envie. Elle est belle à se damner.
- Euh... je nettoie... Euh... Faut avouer que c'est vachement crade chez toi hein...
C'est à mon tour d'écarquiller les yeux. Putain mais qu'est-ce qu'elle fout à ramasser mon merdier? Je lui prends le sac des mains et le balance dans un coin de la pièce sous son regard choqué.
- J'ai pas b'soin que tu nettoies.
Je me dirige dans la petite cuisine, cherche les bouteilles que j'ai achetées ce matin chez Mossen. J'ouvre chaque placard, deviens fou quand je n'en trouve aucune. Je claque la porte du placard, m'agrippe au plan de travail. Je tente de calmer mes mains qui tremblent, mon coeur qui va imploser dans sa cage. Mais qu'est-ce qu'elle vient foutre ici?
- Je les ai vidées dans l'évier...
Je me retourne abruptement vers elle. Elle se crispe légèrement mais ne baisse plus les yeux. Pourtant la rage qui émane de moi doit se lire dans mon regard.
- Je ne le fais pas pour t'emmerder...
- Ben là clairement tu m'emmerdes! La coupé-je, excédé.
Elle se renfrogne et me lance un regard noir.
- Tu ne veux pas de mon aide? Parce que si tu préfères que je te laisse avec ta Sandra, tu me le dis!
Je grogne en me massant les tempes. Putain j'ai mal au crâne et sa prise de tête n'y arrange rien du tout, bien au contraire.
- T'as bien baisé avec ce bâtard.
Elle rit doucement mais je devine qu'elle se fout de ma gueule.
- T'as bien baisé toutes les filles de la terre, alors tais-toi, crache-t'-elle avant de quitter la pièce.
Je jure des insanités avant de la suivre. Elle a jeté ses gants roses par terre et ouvre la porte quand je la rattrape.
- Lâche-moi merde!
- Reste.
Elle se dégage de ma prise et je devine à ses yeux rougis qu'elle a pleuré. Putain pourquoi j'ai pas vu ça en me levant? Je ne supporte pas de la voir pleurer.
- Sarah... Je suis désolé d'accord?
Elle soupire tandis que son regard vide d'émotion me jauge. Comment est-ce qu'on en est arrivé là? Par ma faute... Comme toujours.
- Tu veux de mon aide oui ou non?
Je ferme les yeux pour éviter son regard. Je ne crois pas qu'elle puisse faire quoique ce soit pour moi mais je ne veux pas non plus qu'elle parte. Alors je hoche la tête doucement.
- Je te jure Paige que si tu ne fais pas d'effort tu pourras aller te faire foutre! Je n'ai pas de temps à perdre si tu ne me prouves pas que tu veux t'en sortir.
Je ne réponds pas, la gorge nouée. Putain elle veut m'aider après tout ce que je lui ai dit et fait. Cette fille est barge je crois.
- Alors? Crie-t'-elle. Tu vas te sortir les doigts du cul oui ou non?
- Oui, oui! Hurlé-je avant de m'enfermer dans ma chambre.
Et là je craque. Je craque comme jamais. Des sanglots s'échappent de ma gorge sans que je ne puisse les retenir. Dos à la porte, je sens chacun de mes membres trembler. Elle me déteste mais veut m'aider. Pourquoi? Pourquoi elle fait ça pour moi alors que je ne compte que pour de la merde pour tout le monde?
- Laisse-moi entrer...
Sa voix douce retentit derrière la porte. Et si je lui ouvre, que va-t'-il se passer? Elle me trouvera misérable de chialer comme une meuf, elle me jugera parce que cette piaule est un vrai désastre et que ça pue l'alcool.
- Nicolas, soupire-t'-elle.
Je me laisse glisser contre la porte et je l'entends faire la même chose. Après quelques minutes de silence entrecoupées de mes larmes je me décide à lui parler.
- Pourquoi? Pourquoi tu veux m'aider alors que tu me détestes?
Je l'entends remuer doucement pendant que je retiens mon souffle.
- Tu mérites d'être aidé... Tu as été seul, pendant longtemps. Enfin je sais que Dean et Franck sont là pour toi mais apparement ce n'est pas assez.
Je secoue la tête. C'est pathétique. Je ne mérite que de crever point barre. Elle ne sait pas, elle ne sait rien de ce que j'ai dit ou fait dans la vie depuis qu'elle est partie. Elle ne sait pas à quel point je suis loin du gars qu'elle a connu.
- Et je ne te déteste pas, ajoute-t'-elle doucement.
- Tu devrais.
Je grimace quand je sens mon coeur rater quelques battements quand elle pleure.
- En fait, dit-elle en pleurant, je me dis que si je t'aide que... Que peut-être je comprendrais pourquoi tu n'es jamais venu, pourquoi tu n'as pas tenu tes promesses, pourquoi tu ne m'aimes plus, j'sais pas vraiment en fait.
Je suis surpris en entendant ça. Elle croit vraiment que je ne l'aime plus? Bordel je l'aime comme un dingue, elle m'obsède jour et nuit!
- Qui a dit que je ne t'aimais plus? dis-je d'une vaux rauque.
Elle rit. Putain elle se marre ou je rêve?
- Nicolas, arrêtes. S'il te plait, sanglote-t'elle. Si tu m'aimais tu n'aurais pas couché avec toutes ces filles, et surtout pas avec elle, la rouquine.
Je grimace parce que je sens l'amertume qu'elle met dans sa phrase.
- J'ai essayé de t'oublier. C'est différent et ça n'a rien à voir avec ce que je ressens.
- Hmm...hmm...
Putain comment je peux lui prouver que je l'aime après tout ça? C'est mission impossible.
- Putain honey... Je ne sais pas ce que je peux faire pour te le prouver mais même quand je baisais une autre, c'était toi dans ma tête.
Je me rends compte de ma bourde immédiatement et m'excuse.
- Ouai, c'est pas super sympa de me lâcher ça comme ça...
Elle rit doucement et je l'imite. Putain que je suis con. Je comprends toujours pas pourquoi elle reste alors que j'agis comme un crétin.
- Je suis désolé, répété-je, je suis bourré. Et toi... T'as pensé à moi pendant que...
Je n'arrive même pas à finir ma phrase tant l'imaginer avec un autre me tord les tripes.
- Et ça changerait quoi? Demande-t'-elle énervée.
Je me tais, réfléchis à sa question. Qu'est-ce que ça changerait? En réalité rien. Ce qui est fait est fait, c'est impossible de revenir en arrière. Mais pour moi, ça changerait tout. Ça mettrait un pansement sur mes plaies déjà bien ouvertes.
- Non, finit-elle par dire.
Je plisse les yeux pour faire couler plus rapidement mes larmes, sous le coup de la douleur.
- Je n'ai même pas couché avec si tu veux savoir la vérité.
Quoi? Elle m'a menti? Je me relève, pris d'une impulsion soudaine. Il faut que je la vois quand elle me dit ça. J'ouvre la porte ce qui la fait presque tomber en arrière. Mon regard fou croise le sien, étonné.
- T'as pas couché avec ce crétin?
Elle secoue la tête, retient son souffle en se relevant.
- C'est qui le dernier?
- Ça ne te regarde pas, grogne-t'-elle en fronçant les sourcils. Ses yeux me lancent des éclairs et je sais directement que c''est moi. Sauf qu'elle ne le dira pas.
J'avance vers elle comme une prédateur avancerait vers sa proie. Et c'est ce que nous sommes. Elle est à moi. A aucun autre. Elle recule contre le mur alors que je la regarde avec désir. Sa poitrine se soulève au gré de sa respiration et j'en bande. Putain qu'est-ce que j'aime cette femme.
- C'est moi?
Ses yeux fuient les miens. Elle les ferme comme je l'ai fait plus tôt quand je rapproche mon visage du sien. Je caresse du bout des doigts sa joue, frôle ses lèvres des miennes. Je soupire quand elle me rend mon baiser. Putain elle m'embrasse! Elle pose ses mains dans ma nuque, m'attirant encore plus à elle. Nos lèvres bougent en même temps, nos langues se rencontrent rapidement. Putain Sarah...
Je l'embrasse, la soulève du sol pour la coincer entre le mur et moi. Elle halète dans ma bouche tandis que la température monte entre nous. Elle gémit tandis que nos langues se redécouvrent, que nos lèvres se remémorent qu'elles ont été créées pour être l'une contre l'autre. Ce baiser m'apaise, me dit qu'il reste encore un peu d'espoir pour nous, pour moi. Je l'aime. Je pourrais mourir rien que pour elle. Je l'aime bien plus qu'elle ne le pense, bien plus qu'avant encore.
Elle rompt notre baiser, essouflée autant que moi.
- Nicolas...
Elle semble chercher ses mots pour ne pas me blesser, et je comprends où elle veut en venir.
- On ne peut plus c'est ça?
- Je veux que tu ailles mieux, que tu changes.
Je la fais glisser contre mon torse, doucement, profitant de chaque centimètre carré de sa peau qui me touche.
- Okay, soufflé-je.
C'est soit ça, ou soit elle s'en va. J'en ai conscience.
- Je ne t'ai pas encore pardonné, dit-elle en souriant doucement, et...
Elle ferme les yeux, se crispe contre moi alors que son visage se charge de tristesse.
- Et je ne sais pas si j'y arriverais un jour.
J'essuie de mes mains tremblantes ses larmes, le coeur serré mais quelque part plein d'espoir.
- Fais-moi ramer alors Sarah... Je te veux, toi. Aucune autre et je te le prouverai.
Elle sourit faiblement et je lui vole un baiser. Elle me fait les gros yeux mais je sais qu'elle aime ça, que j'ai envie de me battre pour qu'elle m'aime à nouveau.
*****
Sarah
Je suis rentrée au motel à pieds même si Nicolas a fait la gueule. Hors de question qu'il me ramène alors que l'alcool coule à flot dans ses veines. Je me jette dans mon lit, encore plus perdue. Comment est-ce que je vais l'aider? L'inscrire à un truc d'alcooliques anonymes? Ou le surveiller h ving-quatre? Je ne sais pas du tout. Il me rend folle et je ne sais pas si c'est dans le bon ou dans le mauvaise sens. Ça doit être les deux en même temps, j'en suis certaine.
Je ferme les yeux, touche mes lèvres. Je l'ai embrassé. A la base c'était lui mais je n'ai pas su résister. J'essaie de me déculpabiliser du mieux que je peux mais ce n'est pas simple parce que je me sens faible d'avoir aussi vite céder à l'appel de ses lèvres parfaites, de sa langue douce et chaude, de...Stop! Faut que j'arrête de penser à ce baiser sinon je vais devenir vraiment bonne à enfermer. Tout ce que je peux confirmer, c'est que l'embrasser me fait ressentir exactement la même chose qu'il y a deux ans. Je ne peux pas croire que plus rien n'existe entre nous, c'est impossible. Je l'aime tellement même s'il me fait énormément souffrir. Je n'arrive pas à tourner la page de notre histoire et quand je le vois si meurtri, je ne peux pas me résoudre à le laisser seul, dans cet état. Je veux pouvoir m'accrocher à l'infime espoir que j'ai de le retrouver, de lui pardonner.
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