Livre quatrième, Chapitre dix-huitième

Alexandre : Comment vas-tu sortir ? Je ne veux pas avoir l'air de parler tout seul. Tu as une solution ?

Ils sont dans l'entrée, la Lune est visible par la fenêtre.

Des sacs de course demeurent encore dans la cuisine, pleins, par manque de temps pour eux.

Reiko : Tout à fait ! Il y a deux solutions.

Alexandre le regarde, attentif.

Il a finalement trouvé le courage de se raser.

Reiko : Soit vous faites semblant de parler à cette boîte noire comme les autres humains toute la soirée, soit je peux...

En un instant, dans un tourbillon d'orbes bleues, il se transforme...

...en chien.

C'est un chien assez grand, un mètre de long sur 60 centimètres de haut, aux poils abondants, blancs, hirsutes.

Un bobtail.

Alexandre : Je n'ai pas envie de rester l'oreille collée au téléphone toute la soirée. En plus, si je regarde dans ta direction ou fais un geste vers toi, on sera grillés. Mais parler à son chien est bizarre aussi. Ça te demande de l'énergie de rester comme ça ?

Reiko : Pas vraiment. Le plus dur est la transformation. Désolé, je ne peux pas me transformer en humain. C'est une formule totalement différente que je ne connais pas. Celle que je viens d'utiliser consiste en se transformer en son animal totem...

L'humain hoche la tête.

Alexandre : Je préfère que tu sois comme ça plutôt que de faire semblant de passer un appel. C'est plus crédible au niveau gestuel, je trouve. Enfin, qu'en penses-tu ?

Reiko : Vous avez raison, je suis totalement d'accord. Et puis l'avantage, aussi, c'est que les autres esprits croient que je suis vivant sous cette forme.

Alexandre : Tu es prêt ?

Reiko : Bien sûr.

Alexandre : Alors allons-y.

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Il est 21h 30, la plupart des commerces de BAY 1 sont encore ouverts.

La zone commerciale est composée de rues entières de boutiques, de restaurants, de magasins de plus ou moins grandes enseignes, de salles de divertissements, cinéma et arcade, et encore de restaurants.

Alexandre : Tu sais où tu vas ?

Reiko : A peu près. Je sais qu'ici, c'est animé, que les gens s'amusent et que ça sent la nourriture, et tout ça toute la nuit. Donc j'ai pensé que c'était une bonne idée pour une soirée. Et puis, même si je ne connais pas tous les commerces, à proprement parler, je connais mon territoire par cœur, nous ne risquons pas de nous perdre.

Alexandre (chuchote) : Tu n'as jamais aucune interaction avec les vivants ? Tu peux te rendre volontairement visible, pourtant.

Reiko : J'ai peur de les effrayer.

Alexandre : Mais la première semaine, tu as fait des courses, non ?

Reiko : Oui. J'ai pris de la nourriture dans un bâtiment dédié. D'ailleurs, vous pouvez m'expliquer pourquoi les gens s'obstinent à se mettre en file pour qu'on scanne leurs objets alors que la sortie est toute proche ?

Le garçon manque de rire.

Mais il n'a pas le temps de répondre à l'esprit.

???: HÉ ! SPEILER !

Il relève la tête, surpris d'apercevoir...

Jin : Qu'est ce que tu fais ici ? Ooooh ! Tu as un chien ?

Alexandre : Je n'« ai » pas de chien. Et vous ? que faites-vous ici ?

Les autres arrivent derrière Jin.

Noah : Ben, on va à la salle d'arcade.

Jin : Tu veux venir ?

Noah : Laisse. Je ne pense pas qu'ils acceptent les chiens.

Elle regarde Reiko.

Noah : Et je ne parle pas de lui.

Tylon : 'Faudra te laisser à l'entrée aussi, alors.

Jin et Gabriel : TYLON ! NOAH !

Alexandre profite de la dispute pour partir.

Reiko : Ce sont vos amis ?

Alexandre : Je ne sais pas.

Reiko : Vous ne préférez pas leur compagnie ?

Alexandre : Certainement pas.

Jin : Hé ! Speiler ! Tu es sûr que tu ne veux pas...

Alexandre : Je ne vais pas le laisser seul, vous ne croyez pas ?

Il tourne donc les talons, prend une rue à gauche et les sème enfin.

Alexandre : Qu'ils sont collants...

La lune est très visible, ce soir.

Reiko : Pourquoi vous suivent-ils ?

Alexandre : Ils veulent probablement créer des liens avec moi. Je ne comprends pas pourquoi. Je n'ai absolument rien de positif. Aucune qualité.

Reiko : Arrêtez de dire ça. Je vous trouve incroyable et admirable.

Alexandre : Pourquoi ?

Reiko : Vous êtes fort, courageux. Vous savez prendre des risques. Vous êtes très intelligent, vous savez résoudre rapidement une situation et vous comprenez très vite. Vous êtes orateur. Vous êtes assez introverti mais une fois la conversation lancée, vous savez la tenir. Et puis... je vous trouve sympathique.

Alexandre (sourit franchement à Reiko) : Merci... J'ai de la chance te t'avoir à mes côtés.

Ils marchent en silence.

Alexandre : Dis-moi... les autres ne voient pas que tu parles ?

Reiko : Non. Pour eux, j'aboie, comme un vrai chien. Mais vous n'avez pas peur de sembler étrange à leurs yeux ?

Alexandre : Non. J'assume pleinement de converser avec toi. Et puis c'est mieux que de sembler parler dans le vide.

Reiko (amusé) : J'ai du mal à comprendre mais faites comme il vous en semble le mieux.

Alexandre : Où veux-tu aller ?

Reiko : Hum... je ne sais pas...

Alexandre : Tu ne connais pas la fonction de ces commerces ?

Reiko (baisse les yeux) : N... non... Je... je... désolé.

Alexandre s'accroupit face à lui.

Alexandre : Hé... Reiko...

L'esprit relève la tête.

Il jette un regard à gauche, puis a droite, semble chercher un mot, se prend la tête d'une main avant de dire simplement :

Alexandre : Ikke bekymre deg. Slapp av.

Reiko : Heu... heum... d'accord...

Ils continuent leur marche.

Il n'a pas su trouver les mots en français, sur le coup.

Il espère que Reiko les a compris.

Selon sa Oma, les esprits possèdent le don des langues, qui leur permet de se faire comprendre et de comprendre n'importe qui.

La véridicité de ces propos va bientôt être mise à l'épreuve.

Oma

Sa Oma peut être malade... non. Il ne doit pas y penser. Il est avec Reiko, il ne peut pas se permettre de penser à autre chose. Ce serait comme le laisser tout seul.

Il continue de marcher dans les pas du bobtail dont son colocataire a pris la forme.

Alexandre : Tu as faim ?

Le ciel commence à se couvrir.

Reiko : Vous voulez que je trouve quelque part où manger ?

Alexandre (rit, s'agenouille devant Reiko et lui prend la tête entre les mains, désespéré) : Tu es vraiment incroyable, toi. Je te demande si TU sa faim.

Reiko : Les esprits n'ont pas la nécessité de manger... Je ne veux pas vous faire gaspiller de l'argent en m'offrant quelque chose dont je n'ai pas besoin.

Le garçon se relève.

Alexandre (sourit à Reiko) : Nous n'avons que marché, jusqu'à maintenant... Tu ne veux pas te reposer ?

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Ils sont assis sur un banc, à fixer le ciel nuageux.

Alexandre : C'est un beau ciel.

Reiko : La lune n'est plus visible, pourtant...

Alexandre : J'ai aimé passer cette soirée avec toi.

Reiko : Nous n'avons pas fait grand-chose...

Le garçon se rend compte qu'il n'a même pas jeté un œil à une seule enseigne. Que l'esprit aurait pu l'amener n'importe où, ça n'aurait rien changé.

Alexandre (tourne la tête vers Reiko) : Ce n'est rien. Je n'ai pas besoin de plus. Au pire, nous ferons mieux la prochaine fois.

« La prochaine fois », relève Reiko.

La Lune se rend visible, un instant, avant de repasser derrière un nuage.

Reiko reprend sa forme d'esprit, un peu épuisé.

Reiko (sourire serein) : Vous avez raison. C'est une merveilleuse soirée.

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Merci d'avoir lu !

J'essaie de publier régulièrement même si, comme vous l'avez peut-être remarqué samedi, je ne trouve parfois malheureusement pas le temps d'allumer mon PC ^^"

J'essaierai d'inclure plus de dessins, j'en ai mais je n'ai encore pas forcément le temps de les scanner et les publier 😓

Par ailleurs, si vous voulez faire des fanarts de l'histoire pour compenser avec le manque de médias venant de l'auteur, je me ferai un plaisir de les afficher en fin de chapitre (comme ça, si vous en avez l'envie ou le temps ou même les deux ^^)

Enfin... portez vous bien, rendez vous au prochain chapitre ;)

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