Chapitre 61
-Ash ?
Je me frotte les yeux et sonde la pièce, il fait sombre mais c'est peut-être le matin, les tentures sont fermées
-Ash ? Répétais-je en tapotant du plat de la main l'endroit où normalement, il devrait être en train dormir
Mais comme je m'y attendait, je ne rencontre que du vide, il n'y a rien, il n'est plus la
En triple vitesse, je me lève, attrape mes chaussons et sors en courant dans le couloir
Je cours mais c'est difficile avec cette saleté de robe de chambre qui se prend dans mes pieds à chaque pas que je fais !
Alors je l'a remonte le long de mes jambes, un peu plus haut que les genoux et la tient fermement dans mes poings
Je n'ose imaginer l'image que je dois renvoyer, les cheveux en batailles, à moitié dénudée et les joues rouges à force de courir comme une folle à travers les couloirs
Je suis bonne pour l'internement
J'arrive bientôt devant son bureau et d'un grand geste ouvre la porte
Dès que je le vois, assit à son bureau, comme à son habitude, le nez plongé dans ses papiers, je sens tout mon corps se relâcher
-Soledad ? Tu n'arrives plus à dormir ?demande-t-il en relevant la tête
-je...j'ai cru que tu étais parti
-je ne serais pas parti sans te dire au revoir, j'avais juste quelques documents à signer et je ne voulais pas te réveiller
-j'ai eu peur, chuchotais-je
-je suis désolé de t'avoir inquiéter, me répond-y-il en contournant son bureau pour venir me serrer dans ses bras
-je ne veux pas que tu t'en ailles
- je serai vite rentré
Je décide de ne plus insisté, il ne changera pas d'avis, il partira, sans moi
Je colle mon nez dans son cou et inspire à fond
-que fais-tu ?
-je te sens, je veux mémoriser ton odeur
-hé, il m'attrape part les épaules et plonge ses yeux vert dans les miens, je vais revenir, je te le jure
-je sais, répondis-je les larmes aux yeux
-je vais revenir alors ne pleure pas
**
Voilà, le moment que je redoutais le plus est finalement arrivé, nous sommes tous regroupés à l'entrée du château
Ash est en train de parler à son père un peu plus loin, ils chuchotent et d'ici, je ne peux rien entendre
Je ne pleure plus, ça ne sert à rien, il m'a juré qu'il reviendrait, il tiendra parole
Il arrive bientôt à ma hauteur et m'étudie comme s'il voulait retenir chaque détails de mon visage, comme si c'était la dernière fois qu'il me voyait
-tu...tu m'as fait une promesse
-et je tiendrai cette promesse, on se retrouvera mon ange, je te le jure
-je t'aime, chuchotais-je juste pour lui, la tête baissé
-je t'aime aussi
Avec deux de ses doigts, il relève mon menton et dépose un baiser léger comme une plume sur mes lèvres en me souriant
-que fais-tu ? Si il nous voit il va
-je m'en moque, je t'aime et je veux qu'il comprenne bien que s'il tente quoi que ce soit durant mon absence, il le regrettera
Cette fois c'est moi qui prend l'initiative, ce baiser est plus sauvage que le premier, je met tout dedans, mon amour, ma peur, ma détresse, tout
Quand nous nous détachons l'un de l'autre, nous sommes à bout de souffle et l'air qui s'échappe de nos bouches forme de la buée entre nous deux
-je te confie le château en mon absence, tu me promets de faire attention à toi ?
-ne t'inquiète pas, tout ira bien et dans deux mois, on se retrouvera
-alors à dans deux mois ? Chuchote-t-il à mon oreille
-oui, a dans deux mois
Il m'embrasse rapidement la joue et monte dans le carrosse, pas une seule fois il ne se retourne et je lui en suis reconnaissante, s'il l'avait fait, je ne suis pas sure que j'aurais réussit à retenir mes larmes
J'attend de voir la charrette disparaître pour rentrer, il fait froid et je suis littéralement gelée
-mademoiselle ?
-pas maintenant églantine, je suis fatiguée, je pense que je vais retourner me coucher, dis-je lasse, en montant les escaliers les pieds traînant
-dois-je faire apporter le petit déjeuner de mademoiselle dans sa chambre ?me crie-t-elle d'en bas
-non merci, je n'ai pas faim
Je n'ai pas réfléchis, mes pas m'ont tout simplement guidée dans sa chambre, c'est la que je veux être, je veux m'enterrer dans ses draps et y hiberner jusqu'à ce qu'il revienne
Alors comme de toute façon je n'ai rien à faire, je m'endors
**
-mademoiselle, mademoiselle
- je t'ai dit que je n'avais pas faim
-mais mademoiselle le maître vous demande
A l'entente de ce nom, je me redresse d'un coup, toute fatigue ayant quittée mon corps
-le...le maître ?!
-oui, votre père
-oh, lui
-il veut que vous le rejoigniez dans le grand salon
-pourquoi ?
-il ne m'a pas dit mademoiselle
-...très bien, sors moi la robe simple, la bleue, tu veux bien ?
-bien sur mademoiselle. Je vous l'amène tout de suite, que voulez-vous pour votre coiffure ?
-ma coiffure
-des tresses peut-être ?
-rien du tout, un coup de brosse suffira
-mais mademoiselle, vous allez voir le maître et
-et s'il n'est pas content c'est pareil !
J'y ai peut-être été un peu fort parce qu'elle se met aussitôt à trembler et je pense qu'elle ne va pas tarder à pleurer
-ou...oui, comme mademoiselle voudra
Je lui ai fait peur, je me fais vraiment l'effet d'une peau de vache ce matin
-pardonne moi églantine, je suis sur les nerfs aujourd'hui mais ce n'est pas contre toi
Mes paroles semblent fonctionner parce que je la voit se détendre et me sourire avant de me demander
-c'est à cause du départ du maître n'est-ce pas ?
-pourquoi dis-tu cela ? Demandais-je innocemment en farfouillant dans mon tiroir à bijoux
-voyons mademoiselle, votre baiser de ce matin n'a échappé a personne
-personne ?
-absolument personne
-je vois...
-si mademoiselle veux bien se lever, je vais vous passer la robe
**
-le maître vous y attend ne vous inquiétez pas
-je ne m'inquiète pas
-alors cessez de chipoter à vos doigts, dit-elle en me frappant doucement sur la main
-vous entrez avec moi ?
-je ne sais pas si j'y suis autorisée...
-je vous y autorise
-mais le maître
-n'a rien à dire
Elle me regarde en souriant légèrement, j'ai un peu peur et ça doit sans doute se voir sur mon visage
-comme mademoiselle voudra
Elle s'avance doucement vers la porte qu'elle ouvre juste assez pour passer un corps, elle se range ensuite sur le côté pour me laisser la place
-tu viens n'est-ce pas ?
-je serai juste derrière vous mademoiselle
Rassurée, j'entre dans le salon suivie de ma femme de chambre
La pénombre qu'il y règne me choque immédiatement, tous les rideaux sont fermés, il y a juste assez de clarté que pour voir où je marche, en fait, je ne vois pas à trois mètres
-bon sang, tu sens la peur à plein nez, détends-toi
A l'entente de sa voix, je sursaute
Je place les yeux et l'aperçoit, il est assis à son aise sur le grand canapé en face de la cheminée
-vous m'avez fait demander ? Demandais-je en tremblant légèrement
-je voulais parler
-parler ? Vous vous ennuyez tellement que vous vouliez me parlez à moi ?
Ferme la Soledad !
-ne sois pas insolente et assieds toi, dit-il en montrant de la tête le fauteuil en face de lui
-églantine, attends ici s'il te plaît
Je m'avance lentement, en le surveillant du coin de l'œil, je n'ai pas du tout confiance en cet homme
Une fois assise, je garde la tête baissée, je pense que c'est pour ne pas avoir à croiser ses yeux identiques aux miens, seule chose qui prouve qu'il est bien mon géniteur
-tu vas éviter encore longtemps mon regard ?
-...
-d'accord, je pourrais avouer que notre rencontre ne c'est pas passée exactement comme prévu mais il faut me comprendre, je sortais de...combien c'était déjà ? Mille ans ? Peut-être plus ? À partir d'un certain nombre, on ne compte plus, dit-il en rigolant, disons mille ans d'enfermement dans les enfers. Crois moi, si ça avait été quelqu'un d'autre qui avait croisé ma route à ce moment là, je l'aurais tué
-vous m'avez étranglé, j'ai encore les marques
-tout de suite les grands mots ! Tu ne retiens que le négatif, dis-toi plutôt que au moins, tu n'es pas morte, c'est ce qui s'appelle relativiser
Je sers dans mes poings ma robe. Si j'étais plus audacieuse où plus idiote, je lui dirais sans doute d'aller se faire foutre, mais au lieu de ça je demande
-vous vouliez me parler non ?
-n'est ce pas ce qu'on est en train de faire ?
-ce n'est pas vraiment cela que j'imaginais
-tu voudrais que je te parle de quelque chose, n'est-ce pas ? Mais la question c'est quoi ? Que voudrais-tu entendre ?
-rien de spécial
-tu mens, tu as quelque chose derrière la tête, pour ça, tu lui ressembles
-à Louise ?
J'ai du viser juste parce que son visage se ferme automatiquement mais il n'a pas l'air fâché, juste triste, infiniment triste
Pourtant il se ressaisit vite et son petit sourire moqueur reviens
-c'est une manie chez toi d'appeler tes parents par leur prénoms ?
-...
-je vois qu'on t'a déjà informé... ou peut-être l'as-tu trouvé toute seule ?
-c'est Léonard, le vieux démon qui m'a un peu raconté
-dans ma mémoire, il n'était pas ce qu'on pourrait qualifier de vieux démon
-il l'est pourtant, d'ailleurs c'est bien le seul que j'ai vu
-ça ne m'étonne pas, il n'y a que lui pour faire quelque chose d'aussi stupide
-de quoi parlez-vous ?
-tu ne t'es jamais posé la question de comment nous pouvions garder cette apparence ?
-...
-nous vivons éternellement mais pour ça, il faut faire des concessions
-des concessions ?
-aux cieux ont vit éternellement, on n'a pas ce problème de savoir comment "survivre", mais quand on descend sur la terre, on se met à vieillir, bien sur pas aussi vite que des humains mais le problème est quand même la, on vieillit et on devient mortel
-mourir vous fait donc tellement peur ? Demandais-je le regard perdu dans le vague
-quand on a connu une vie aussi longue que la mienne, oui
-et alors comment restez-vous en vie ?
-on absorbe l'énergie de ce qui nous entoure, n'importe quoi, ça peut être un arbre, un chien ou même un homme, tout ce qui vit
-vous tuez pour rester en vie, chuchotais-je la voix tremblante
-oui, on tue pour survivre comme tout le monde
-c'est faux ! On ne tue pas pour vivre éternellement !
A mes mots, il se met à sourire et ces pensées semblent partir ailleurs, il doit sans doute se remémorer quelque chose
-c'est drôle, la première fois où ta mère a été témoin de ça, elle a eu la même réaction, tu as répété mot pour mot ce qu'elle m'a dit ce jour là
-ma mère devait être une personne incroyable, dis-je doucement en me calmant
À nouveau, il sourit
-mais alors pourquoi as-t-elle perdu son temps avec vous ?
-je ne sais pas... elle disait qu'elle m'aimait...
-personne n'est assez bon pour vous aimez
-elle, elle l'était
-et vous, vous l'aimiez ?
-hein ?!
- savez vous ce que ça signifie au moins aimer quelqu'un ?
-ne sois pas impertinente, bien sûr que je sais ce que ça signifie
-alors vous l'aimiez vraiment
-oui, plus que tout, de toute ma vie je n'ai jamais aimé qu'elle
-me ressemblait-elle ?
-physiquement ? Peut-être le nez, elle l'avait aussi un peu en trompette mais pour le reste absolument pas, elle avait des longs cheveux d'un roux vif, la peau parsemée de taches de rousseur et ses yeux gris étaient toujours remplit de cette fureur, tu vois, la fureur de vivre... non, tu as décidément tout hérité de moi
Berk, rien que cette idée me donnait la gerbe
-et pour ce qui était du caractère ?
-je ne sais pas, pour ce que j'en ai vu, tu es un beau mélange de nous deux
Je baisse la tête, maintenant je devrais lui poser ma vraie question
Le problème c'est que j'ai peur de ce qu'il pourrait m'avouer et peut-être me mentir
Allez soly, lance toi !
-co...comment est-elle...morte ?
-on ne t'en a pas parlé ?
-s...si, mais...
J'ose relever la tête et je le découvre en train de m'observer, le visage fermer, il chipote un fil qui dépasse d'un coussin
-elle a été tué
-par...par moi...
-oui, par toi
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