pdv Revali
J'observe Médolie combattre le monstre par le trou de la serrure. La porte s'ouvre soudainement, suite à sa victoire. Dix minutes, pas mal...
- Dix minutes, j'aurais probablement fait beaucoup mieux, annoncé-je.
Mon rire s'interrompt en apercevant sa blessure au bras. une large entaille barre son aile gauche. La blessure ne m'a pas l'air trop sérieuse, mais...
- Tu devrais faire plus attention, recommandé-je. J'ai observé ta garde, et elle était mauvaise, si tu avais...
- Messire, m'interrompt une voix haut perchée. Messire! remerciez bien fort cette demoiselle, car, sous ses allures étranges, elle se révèle d'une grande noblesse! Elle m'a sauvée de ce monstre horrible!
Je lève les yeux, et aperçois une petite créature se dandinant dans une cage en bois. Je m'empresse de la libérer.
- Ah, et ne me remercie pas, surtout! lancé-je à la créature.
Il s'agit d'une petite Mojo vêtue de pétales de fleurs, et couronnée de feuilles tressées. un épais diadème d'or ceint cette étrange parure. Des pommettes rouges semblent peintes sur sa figure de bois. Elle est plutôt mignonne, tout compte fait.
- Je vous suis grée de m'avoir libéré, monseigneur, murmure-t-elle. Mais tant de questions se bousculent encore en mon esprit troublé. Je suis venue en ces lieux désolés, accompagnée e mon ami le singe, persuadée d'y trouver la cause du mal qui ravage les eaux du marais. Effectivement, je crois bien que c'est ce guerrier-là qui nous empoisonnait, mais je ne sais pourquoi. Mon ami s'est échappé, cet Odolwa m'a faite prisonnière, et... Monseigneur, mademoiselle, Singe est-il sain et sauf? Et mon père s'inquiète-t-il beaucoup pour moi?
Médolie et moi échangeons un regard alarmé.
- Je crois que nous ferions mieux de rentrer au palais immédiatement, annonce précipitamment mon amie. Il nous reste quelques détails à régler. Je pense être en état de voler. Vous n'avez pas le vertige, au moins, votre altesse?
***
Nous nous posons près du palais sur pilotis. Les gardes semblent alarmés et nous crachent des cailloux à la figure. Ils s'interrompent aussitôt en apercevant la princesse Mojo, juchée sur le dos de Médolie.
- Votre Altesse, piaillent-ils. Sa Majesté votre père est si inquiet!
Elle les écarte peu élégamment.
- Eh bien, qu'il vienne me voir lui-même! Ah, quelle ignominie! Comment puis-je le regarder dans les yeux si ce que m'ont confié les deux seigneurs du ciel s'avère vrai?
- Seigneur du ciel, enfin un nom qui me sied parfaitement, confié-je à Médolie.
Cette dernière lève les yeux au ciel, et Hylia merci, s'abstient de faire un commentaire inutile qui ne ferait absolument pas avancer notre intrigue. Nous nous contentons donc de suivre la princesse jusqu'à la salle du trône.
Le spectacle qui s'offre à nous est effrayant. Le roi, sur son trône, s'agite plus que jamais. Ses sujets paradent en forme de processions, sandant "à mort le singe sacrilège!" Au centre de la pièce, siège une énorme marmite bouillante, au-dessus de laquelle le singe est en train de rôtir, cuit à la vapeur. Je cherche à discerner le moindre mouvement dans son petit corps meurtri. Est-ce qu'il est?...
Honnêtement, si je suis ébranlé, je n'en laisse rien paraître. J'ai déjà vu la mort. Avant d'entrer à l'école des Sages, je faisais déjà partie des guerriers du peuple Piaf, initié dès l'enfance à l'archerie. J'ai vu des camarades tomber, des rivaux, des amis, des petites-amies, aussi, et on m'a appris à ne pas les pleurer trop longtemps. Dans toutes les cultures Hyliennes, quelles qu'elles soient, verser trop de larmes est un outrage envers les camarades soldats partis au Saint-Royaume, car chaque instant passé à se morfondre les accable de peine. On nous apprend ainsi à ne pas trop s'attacher à ses prochains, afin de ne pas être trop malheureux. J'ai jusqu'alors respecté cette règle, mais les moeurs de l'Ecole des Sages sont toutes autres. Si mes amis en viennent à trépasser, je ne me sentirais pas capable de refouler mes émotions une fois de plus. Urbosa, ma meilleure amie... La princesse Zelda, Saria, même si elle m'agace parfois, et l'Hylien, même lui je ne veux pas qu'il meure, au fond! Et Médolie...
Je m'égare un peu, je crois. Bref, tout ce charabia inutile et indigne de ma personne pour vous dire que je n'ai pas beaucoup de mal à retenir un soubresaut lorsque j'aperçois le singe inerte.
- Père indigne! hurle la jeune Mojo. Libérez-le immédiatement!
Le roi se redresse de stupeur. Il ose à peine s'approcher de sa fille, tremblant d'émoi, palpitant, n'y croyant même pas.
- Ma... ma fille chérie? tu es en vie?
Puisqu'elle est devant toi, ducon! Même l'hylien est plus futé! Et vous osez appeler ça un roi!
- Comment avez-vous pu vous en prendre à mon pauvre ami de la sorte? Ah, faquin! Heureusement que ces deux nobles seigneurs m'ont prévenue des crimes perpétrés en mon palais! Eh bien, qu'attendez vous?
- Euh, oui, euh, LIBEREZ-LE, vous autres! ordonne le roi Mojo. Ma fille chérie, que je suis heureux de te revoir! Viens donc me conter ce qui t'est arrivé! Ce singe n'était vraiment pour rien dans tes mésaventures?
- Puisque je vous dit que non! s'énerve sa fille. Vous autres, si vous l'aviez écouté, vous m'auriez porté secours plus tôt! Mais non, il eût fallu que vous l'emprisonniez! Sans l'intervention de messires Revali et Médolie, je ne sais ce qu'il serait advenu de moi! Je m'étais rendue au temple afin de remédier à l'empoisonnement des eaux, Singe avec moi, avant de me faire capturer par l'horrible Odolwa! La suite, vous la connaissez mieux que moi!
Il soupire.
- Mon enfant, la colère m'a aveuglée, et m'a fait perpétrer des horreurs. Je sais tout ce que je dois aux deux voyageurs. Chose promise, chose due; mon majordome réside aux jardins intérieurs, et il vous remettra votre bien, avec mes remerciements.
***
Les jardins regorgent de plantes tropicales, de fleurs aux formes étranges, de couleurs et de senteurs nouvelles. Je suis persuadé qu'il n'en existe de pareil en Hyrule. Comment de telles merveilles peuvent-elles pousser en ce monde délaissé par les déesses, cela me dépasse. Et qu'une chose me dépasse, c'est rare. D'habitude, je suis premier en tout. Le majordome nous attend près d'un paravent, la mine sombre. Lorsqu'il nous aperçoit, il reprend aussitôt son allure guindée et s'incline.
- Lord Revali, Lady Médolie, vous voici enfin. Votre exploit est parvenu jusqu'à moi, je suppose qu'il est l'heure de vous remettre mon plus grand bien, le masque de Mojo...
Il essuie discrètement une larme. Son plus grand bien, cette chose? Il ne s'agit que d'une vulgaire sculpture de bois, dans laquelle est enfermé un personnage non moins ridicule: l'inutile Dumoria.
- Pourquoi ne voulez-vous pas vous débarrasser de ce masque? l'apostrophé-je avec la franchise qui me colle au plumage.
Il soupire à nouveau. Il faut croire que ce masque porte un plus lourd secret que prévu...
- J'avais un fils, jadis. Une joyeuse petite peste dingo que j'avais appelé Makus. Il aurait eu votre âge, aujourd'hui. Sa présence dans ma vie était plus douce que la mousse sur l'écorce rugueuse. Il aurait eu votre âge...
- Qu'est-ce qui lui est arrivé? demande gentiment Médolie tandis qu'il essuie une nouvelle larme.
- Un Odolwa... Comme celui que vous avez combattu. Vous le savez sûrement, ces monstres aiment capturer et tuer les enfants qui s'aventurent trop près des marécages. Makus était parti s'amuser à Bois-Cascade... Nous avons retrouvé son corps flottant à la dérive de notre fleuve, déchiqueté en morceaux... Son visage était le seul fragment intact qu'il me restait. Alors, je l'ai sculpté, j'en ai fait un masque, un masque que je ne suis jamais parvenu à éloigner de moi. Imaginez mon désarroi quand cet enfant masqué me l'a volé... et mon soulagement lorsqu'il m'est revenu!
Médolie ne peut retenir un mouvement de recul, et honnêtement, je la comprends. Ce masque après lequel nous courons est en réalité un cadavre?
- Je compatis à votre désespoir, monsieur le majordome, mais...
- Non, nous coupe-t-il d'une voix sourde. Ne prétendez pas comprendre. Vous êtes jeunes. Vous n'avez jamais ressenti la douleur de perdre un être cher, alors ne venez pas me présenter vos paroles de réconfort afin de me soudoyer. Vous perdez votre temps.
Inexplicablement, la colère s'insinue en moi. Jamais ressenti la douleur de perdre un être cher? Pour qui se prend-il, cet avorton? Moi qui ai été forcé de détourner les yeux de la dépouille de tous mes amis, que je n'avais pas le droit de pleurer? Moi qui, il y a une semaine, ai vu l'herbe de la pleine d'Hyrule se teinter de tout le sang de mes camarades?
Moi qui ai entrepris durant deux jours une longue traque dans l'espoir de retrouver les disparus, angoissé à l'idée qu'elle soit morte?
Il n'en sait strictement rien. J'ai tout subi, tout vécu, et je n'ai que dix-sept ans.
- Peut-être, réplique mon amie, mais je sais aussi que dans le visage de Makus est enfermé un de nos amis, à l'innocence et à la pureté comparable à celle de votre enfant, scellé ici par un sortilège puissant. Nous devons le libérer.
Le Majordome pousse un si long soupir que je m'attends à le voir privé d'oxygène. Finalement, il se retourne et nous tend le masque: un visage de bois mort et rabougri, exprimant une souffrance infinie. Je l'accepte.
- Alors soit. Je vous le concède. Mais, jeunes seigneurs du ciel, je vous en conjure, n'oubliez jamais l'histoire de mon fils.
~
- Ah, pas trop tôt! nous apostrophe l'Hylien, tandis que j'atterris avec toute la grâce et la légèreté qui me caractérise, Médolie à mes côtés.
J'en profite pour lui jeter un regard en biais; Saria n'a pas chômé. Toutes les marques causées par l'empoisonnement ont disparu de son corps, mais il comporte également de nouvelles blessures. Alors que j'interroge en haussant les sourcils le pansement qui barre sa face, il explique avec un haussement d'épaules:
- ça, c'est autre chose. je me suis livré à un défi... euh... un peu débile.
- A savoir surfer sur un bouclier dans des escaliers tout en tirant des flèches, soupire Saria.
Elle n'a pas besoin de préciser qu'il s'est salement ramassé.
- Lamentable, me moqué-je. Je suis persuadé que j'y arriverais d'une seule main.
- ça doit être ça, ouais, réplique Link de sa voix agaçante. enfin bref. Avec Saria, nous avons une théorie.
Fier de son petit effet, il bombe le torse. Qu'est-ce qu'il croit, celui-là? Agacé, je l'enjoins d'abréger.
- Eh bien, le masque dans lequel Dumoria était emprisonné se trouvait dans un lieu où résident apparemment des Mojos, soit des créatures végétales comme lui. La logique imposerait donc que Mipha et Ruto se trouvent au Théâtre Zora, à l'ouest d'ici!
- Tu appelles ça une théorie? Raillé-je. Moi, je qualifierai plutôt ça d'évidence. Même Dumoria aurait fait le lien.
- Et Urbosa? Renchérit Médolie. Vous n'avez aucune idée d'où son masque pourrait bien se trouver?
Ils secouent la tête, piteux.
- Termina ne compte aucune cité Gerudo. Impossible de la localiser.
Je soupire. Je ne me suis jamais inquiété pour Urbosa. Elle a toujours compté parmi les Sages Légendaires les plus doués de l'Ecole. Presque aussi douée que moi, c'est dire. Mais là, la savoir enfermée dans un artéfact on ne sait-où à Termina, avec en prime la menace de la Lune qui plane littéralement au-dessus de nous...
Au loin, un loup hurle au crépuscule. fin de la première journée. à présent, ils ne nous reste plus qu'environ soixante heures avant la fin du monde.
- On va dresser notre campement ici, annoncé-je. Dormez, je prends le premier tour de garde.
Nous installons une bâche qui fait office de tente, dressons des nattes, dressons un feu, dînons d'une nourriture frugale et médiocre achetée à Bourg-Clocher et les autres s'endorment aussitôt que leur tête a touché leur couchette. Je plains sérieusement les filles, qui doivent subir les ronflements de Link. Même moi, j'ai du mal à me concentrer à cause de lui, et Farore sait que je suis capable de la plus grande concentration. La preuve, je vise toujours dans le mille. Il respire si fort que je ne m'entends plus penser.
- Tu es sûr que tu ne veux pas que je prenne le relai? fait une voix dans mon dos.
En un éclair, je fais volte-face, j'arme mon arc et je m'apprête à tirer. Médolie bat en retraite, les mains en l'air, un sourire mi-amusé mi-désolé aux lèvres. Il faut croire que mes réflexes sont un peu trop parfaits... Gêné, je baisse les armes.
- Tu as l'air fatigué, argue-t-elle.
- Non, tu crois? soupiré-je. Entre l'autre abruti d'Hylien qui ronfle comme un hinox et notre journée éreintante... Mais ne t'en fais pas trop pour moi, j'ai connu pire. Dormir c'est pour les faibles.
Elle lève les yeux au ciel ( ai-je déjà précisé qu'ils étaient d'un magnifique rouge rubis? Non? eh bien tant mieux, car c'est un détail futile qui ne gagne pas à être mentionné) mais ne proteste pas. A la place, elle s'assied à mes côtés.
- Insomnies?
Médolie acquiesce. Je la comprends... Impossible de dormir convenablement à côté de Link. Je l'observe du coin de l'œil. Elle a changé, depuis le début de l'année. Elle est moins introvertie, et même si elle n'est toujours pas très sûre d'elle, son courage s'est affirmé. Elle n'hésite pas à faire tout ce qui est en son pouvoir pour aider les autres. Je crois que c'est la bataille de la Plaine qui a contribué à forger cet aspect de la personnalité. Elle nous a tous marqués au fer rouge, et chacun vit comme il peut avec ce douloureux souvenir. Mais une chose est sûre, elle restera à jamais gravée dans nos mémoires.
- Revali, murmure mon amie, il y a quelque chose là bas.
Je fronce les sourcils. En effet, j'aperçois une silhouette solitaire à une quinzaine de mètres de nous, quasiment indistincte dans l'obscurité. Elle reste néanmoins reconnaissable malgré la pénombre: blonde, bonnet et tunique vertes...
- Link, déduit Médolie. Qu'est-ce qu'il fait là bas?
Sans plus attendre, elle court dans sa direction. Un mauvais pressentiment me saisit. Je me retourne, et constate que l'hylien dort paisiblement à côté de Saria! Un frisson me parcourt l'échine. à quoi ca rime? Et sans plus attendre, je rejoins la jeune Piaf.
Elle semble pétrifiée, une expression d'incrédulité ancrée sur son visage. Je pose une aile sur son épaule. Elle ne réagit pas. Et devant elle...
Il ressemble à Link: mêmes vêtements, mêmes cheveux, même silhouette, mêmes traits... Mais ce n'est pas lui. Ses yeux sont deux tunnels sans fond, d'une noirceur incommensurable, et son rictus crispé me rappelle celui du vendeur de masque. Tout en moi me crie de faire demi-tour, d'entraîner Médolie le plus loin possible de cet individu.
Et soudain, sans crier gare... les flammes s'abattent sur nous.
Hellooooo (oui je reviens comme une fleur après plusieurs mois de pause T_T)
Je tiens sincèrement à m'excuser auprès de mes lecteur-ices pour ce temps de pause très long. Pour vous expliquer, je viens de terminer un long projet de roman (je pense faire une annonce à ce sujet) ce qui me permet de me consacrer à ma fanfiction!
je reprends donc l'écriture de la saga Hyrule Warriors avec un rythme régulier (je l'espère?) d'un chapitre par semaine.
Je tiens à remercier @Juju132512, @_Elween_et @Imagineuse qui se sont montrés très investis dans la lecture de cette fanfiction!
Prenez soin de vous
~ Votre dévouée Goldilocks
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