Chapitre 64

Je suis resté encore quelques minutes avec Stella, pour m'assurer qu'elle allait bien, après la visite impromptue de son connard de frère. Même si elle ne vouait pas me le montrer, elle semblait un peu troublée par leur échange musclé. C'est son frère, après tout. Un gros connard, mais son frère, quand même. Je pense que ça n'a pas dû être facile pour Stella de "s'émanciper" de son joug, me rappelant qu'il est un maniaque du contrôle. Malheureusement, je suis certain qu'il reviendra à la charge. Je préfère ne pas le sous-estimer.

Avant de quitter l'hôpital, j'ai prévenu le docteur Gallagher que je rentrais par mes propres moyens, sans oublier de l'informer de l'amélioration de l'état de Stella. J'ai pu entendre son soulagement à l'autre bout du fil.

Pendant le trajet en bus, j'ai le temps de cogiter sur l'échange houleux entre les Atkins. Le genre de menaces qu'il a proféré à mon égard me rappelle vaguement celles de Ben. Et leur point commun reste toujours le même : Stella. J'en viens à me demander si la vérité qu'elle voulait tellement me dévoiler ne serait pas en rapport avec leurs "mises en garde". Les dernières paroles que Stella a prononcées avant que je quitte sa chambre m'intimaient de ne surtout pas faire confiance à Steve. Honnêtement, elle n'avait pas besoin de me le dire...

Quelques minutes plus tard, je descends du bus, dont l'arrêt se trouve seulement à quelques mètres de l'institut. Plus j'avance et plus je vois poindre les problèmes que j'y ai laissés la veille. Freddie doit certainement toujours m'en vouloir, et Jade... je ne sais même pas si j'ai envie de la revoir. Je vais forcément être forcé de la croiser, mais je ne suis pas dans l'obligation de la côtoyer. Ma priorité est de recoller les pots cassés avec mon meilleur ami. J'espère au moins qu'il acceptera de m'écouter. Peut-être que la nuit lui aura porté conseil.

J'entre dans le bâtiment et me dirige directement vers le bureau de Gallagher. Je veux le remercier de m'avoir permis de voir Stella et de lui venir en aide. S'il avait refusé, elle serait peut-être morte à cette heure-ci, ou toujours dans le coma, dans le meilleur des cas. Je grimpe les marches en fer forgé trois par trois pour atteindre l'étage. J'avance d'un pas décidé mais m'arrête dans mon élan lorsque je vois Jade et Freddie assis à côté de la porte du bureau du directeur. Ils discutent. Ensemble. De manière civilisée. Je secoue la tête pour être sûr de ne pas halluciner. Mon esprit exténué pourrait me jouer des tours. Mais non. Au moment où ma vue se rétablit, ils sont toujours là. Je ne suis même pas parti une journée entière qu'ils sont passés de la haine à... à quoi, justement ? De l'amitié ? Connaissant l'aversion que Freddie ressent pour elle, je suis vraiment abasourdi de les retrouver ensemble.

Ils ne m'ont pas vu. Je décide de tourner les talons. J'aurais le temps de trouver Freddie en tête à tête, sans Jade dans les parages. Malheureusement, la voix de l'actrice m'interpelle. Je m'arrête net et me retourne vers elle. Elle vient en souriant vers moi, bien que son sourire soit timide. Elle doit être embarrassée.

- Hero, on se demandait où tu étais passé, me dit-elle en croisant ses mains vers le bas. J'ai cru comprendre qu'il était arrivé quelque chose à Stella... J'espère que ce n'est pas trop grave.

Son ton se veut compatissant, mais j'ai du mal à y croire. C'est une actrice, après tout. Elle a bien réussi à me faire croire qu'elle était une bonne personne. Je la toise, plissant les yeux.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ? je lui demande, d'un ton mauvais.

Ma réaction la surprend. Elle écarquille les yeux, avant de se reprendre.

- Je sais que tu m'en veux, pour tout ce que j'ai fait, avant et ici, mais j'en ai quelque chose à faire parce que je sais qu'elle est ton amie et qu'elle compte pour toi. Comme tu comptes pour moi, dit-elle en baissant les yeux.

- Tu te rappelles le "petit incident" que Gallagher a mentionné hier, quand on était dans son bureau ? La tentative de suicide ? C'était Stella. J'ai passé la nuit à essayer de la réchauffer parce qu'elle souffrait d'hypothermie et que son corps n'arrivait pas à garder la chaleur, je lui réponds d'une manière agressive.

Je voudrais lui expliquer qu'elle n'a nullement tenté de se suicider, mais je n'ai même pas envie de faire cet effort. Je n'ai même pas envie de parler de Stella avec elle. Jade se tasse un peu plus sur elle-même.

- Voilà pourquoi j'ai dû partir précipitamment, dis-je d'une voix plus forte en lançant un regard à Freddie, par-dessus Jade, en espérant un signe de sa part.

Mais mon ami reste raide comme la justice à fixer un point invisible en face de lui. Je veux qu'il comprenne que je ne l'ai pas planté sans aucune raison valable.

- Elle va bien ? me demande Jade, en évitant de me regarder.

- Elle s'est réveillée de son coma et va beaucoup mieux.

- Donc, tu es allé jouer les héros... sans mauvais jeu de mots, pouffe Freddie, toujours sans me regarder.

Je contourne Jade pour le confronter. Nous devons mettre les choses au clair une bonne fois pour toutes. Freddie est une des personnes les plus importantes à mes yeux, et le voir se comporter ainsi envers moi, même si c'est amplement mérité, me brise le cœur.

- Je n'ai pas eu le choix. C'était une question de vie ou de mort, je me défends contre celui qui décide finalement de me regarder.

Il se lève pour me faire face.

- Tu n'as pas eu le choix... encore une fois... C'est vraiment très répétitif, tu ne trouves pas ? dit-il, feignant d'être pensif. D'abord, tu as été "obligé" de me mentir, et maintenant, ça. Est-ce que tu es capable de prendre une décision tout seul, comme un grand garçon ?

Son ton est moqueur et mauvais.

- Freddie, écoute, je suis vraiment désolé. Je ne sais pas quoi dire d'autre. Je sais que j'aurais dû te dire la vérité, mais je voulais te protéger. Tu es tellement...

- Tellement quoi ? me coupe-t-il, sa colère montant d'un cran.

- ... imprévisible dans tes émotions que j'avais peur de provoquer une mauvaise réaction à ton état, je réponds en prenant soin de bien choisir mes mots pour ne pas le froisser plus qu'il ne l'est déjà.

- Donc, tu penses que je ne suis pas assez stable émotionnellement pour entendre la vérité ? me demande-t-il, outré.

- J'ai encore en mémoire la crise que tu as faite quand je t'ai demandé de mentir pour moi, je lui rappelle. Donc, je ne voulais pas prendre de risque inutile.

- Je suis vraiment touché que tu ais voulu préserver mon petit cœur, ironise-t-il en portant la main sur sa poitrine dans un geste théâtral. Mais je n'avais pas besoin de protection. J'avais besoin d'un ami et tu t'es bien foutu de ma gueule !

- Tu sais très bien que c'est faux ! je réplique. Même si je me faisais passer pour Brody, j'ai toujours été sincère avec toi... Comment peux-tu en douter ?

Il secoue la tête en détournant le regard. Je ne sais vraiment plus quoi dire pour le convaincre de ma bonne foi.

- T'es mon meilleur ami, Freddie. C'est tout ce que je peux te dire...

- Tu as une étrange notion de l'amitié, mon gars ! dit-il, en se mettant à rire de manière cynique. Je me demande quel traitement tu réserves aux personnes que tu détestes... Jade, tu devrais faire gaffe à tes fesses, puisque vous êtes amis... Enfin, vous êtes encore amis ou pas ?

J'entends les pas de Jade s'approcher dans mon dos.

- Freddie, ça suffit... Je pense que tu devrais l'écouter, dit-elle, les bras croisés sur sa poitrine.

Il fait deux pas en arrière en nous pointant du doigt, son expression hilare redevenue mauvaise. Il nous toise, tour à tour.

- Franchement, je n'ai envie d'écouter aucun de vous deux, crache-t-il. Vous savez quoi ? Faites ce que vous avez à faire ici et quand vous partirez, je pourrais enfin respirer !

Il nous tourne le dos pour partir dans la direction opposée lorsque la porte du bureau du docteur Gallagher s'ouvre, ce dernier apparaissant devant nous. Il arbore une mine réprobatrice à l'attention de celui qui n'est plus mon ami, avant de fusiller Jade du regard. Que se passe-t-il ? Et pourquoi sont-ils tous les deux ici ? J'étais tellement focalisé sur Freddie que je ne me suis même pas posé la question de leur présence dans ce couloir.

Mais ma question est supplantée par une autre interrogation lorsque je vois Gibson sortir du bureau, arborant la même expression que Gallagher. Il secoue la tête en la regardant. L'actrice, à côté de moi, baisse la tête, mais ne peut s'empêcher de sourire. Pourquoi Gibbs est-il là ?

Et comme si je n'avais pas encore assez de questions qui me triturent les neurones, une jeune femme brune aux grands yeux bleus apparait devant Freddie. Jade, à côté de moi, lâche un "Oh !" de surprise et porte sa main à sa bouche. De là où je suis, je vois l'anglais se raidir. Je suis complètement paumé. Que quelqu'un m'explique ce qui se passe ici !

La réponse à ma dernière interrogation ne tarde à pas à arriver, sous la forme d'un prénom qui m'est plus que familier :

- Kayla ? souffle Freddie.


******

Petite note de moi : ce soir, ce chapitre est dédié à tous mes lecteurs fantômes qui prennent le temps de lire chaque chapitre au fil des publications. Même si vous ne vous manifestez pas, je sais que vous êtes là, et je ne vous oublie pas pour autant ! Car c'est aussi grâce à vous que l'envie de continuer cette fiction m'habite et vous me motivez de fou ! Alors, merci à vous et j'espère que ce chapitre vous aura plus ^^

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