Chapitre 1

Assis sur le toit de sa maison, Jonathan fixait les étoiles sans vraiment les voir. Ses pensées étaient ailleurs. Les genoux repliés contre son torse pour se protéger du froid, il sentait le vent frais lui caresser la joue et ce souffle se répercutait jusque dans ses oreilles, comme une petite mélodie sans musique.

Le calme de la nuit et la solitude l'apaisait, aussi chaque soir il sortait par la fenêtre de sa chambre qui donnait sur le rebord du toit, s'asseyait, et restait une dizaine de minutes seul et silencieux avant de rejoindre son lit.

C'étaient ces moments-là qu'il préférait, ces petits instants volés à la nuit, loin du tumulte de la vie quotidienne. Il en profitait pour retirer ses lunettes, son appareil auditif, et il écoutait la nuit. Le bruit des voitures qui roulaient sur l'autoroute pas loin de sa maison, le chant des cigales dans le jardin du voisin ou le vent dans les arbres. Mais Jonathan entendait bien plus que ça. En se concentrant un peu, il percevait aussi les pas des fourmis qui se baladaient sur le toit, les pépiements des oiseaux dans leurs nids et le bruissement de la brise légère dans les feuilles des arbres.

Oui, Jonathan était différent. Ou plutôt "spécial", comme disait sa mère pour atténuer le fait qu'il sortait de l'habituel. Il en avait souffert toute sa vie, et notamment lors de ses années de collège où, rejeté de ses camarades de classe, il avait été victime de moqueries et de blagues de mauvais goût. Son enfance n'avait pas été facile non plus, et il avait causé bien du souci à ses parents en refusant la plupart des aliments ou en hurlant au moindre son trop bruyant.

Pendant longtemps, le garçon avait subi des tests médicaux pour comprendre ce qui clochait chez lui. Au cours de la cinquième année de sa vie, un médecin découvrit que le garçon était atteint du syndrome de Kentar, une "maladie" qui touchait moins de 0.1% de la population mondiale. Il ne s'agissait pas d'une déformation physique ou mentale, ni même d'une maladie à proprement parler. Il se trouvait en fait que les cinq sens de Jonathan étaient plus développés que la moyenne, ce qui décuplait leur sensibilité.

Ainsi, Jonathan voyait des choses invisibles aux yeux de tous, entendait les bruits les plus infimes, sentait les odeurs et les saveurs plus fortement, et quand il faisait glisser ses doigts sur un bout de tissu, il était capable de sentir sous son épiderme les moindres irrégularités et imperfections. Le garçon souffrait chaque jour de cette particularité qui faisait de lui quelqu'un de différent. Trop différent.

Car ses sens étaient aussi particulièrement fragiles. C'est pour cette raison que, chaque jour et quelle que soit la saison, le jeune garçon était forcé de porter des lunettes de protection spéciales pour protéger ses iris du soleil, et un appareil auditif pour atténuer les sons autour de lui risquant de briser ses tympans. Autant dire qu'il était difficile pour lui de passer inaperçu.

Il était hyper-sensoriel. Et il se détestait pour cela.

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