2. Ladies and Nukes (3/3)
« Et voilà, il ne reste plus que vingt et un adversaires sur le terrain ! C'est presque la fin de la Fosse ! Vous pouvez acclamer haut et fort les champions restants ! Il semblerait que les combattants cybernétiques se soient tous liés face à l'arme terrienne pour l'expulser du match et se réserver une finale sans biosciences ! Malgré ses compétences exceptionnelles, elle semble submergée en nombre ! Va-t-elle réussir à ... »
Le présentateur s'arrêta brusquement au milieu de sa phrase. Les combattants, les commentateurs, le public, les spectateurs du bar, et même l'équipe de censure cessèrent un instant de respirer, médusés par les images qu'ils avaient sous les yeux.
Un des robots venait d'appliquer à la lettre ce qu'O'Connor aurait appelé « le protocole d'urgence Helvetarien », c'est-à-dire l'emploi d'une grenade à hydrogène pour réduire à néant un adversaire trop puissant.
Un robot de Syrat Tech. venait d'en lancer une devant la fille en combinaison, provoquant une mini explosion nucléaire dans l'arène qui avait déchiqueté d'un seul coup trois robots et deux cyborgs autour. Il fallait croire que les universités et les sponsors de cybernétique organique n'avaient vraiment pas l'intention de devoir faire face à la concurrence des biosciences. Au risque d'être éliminé pour non-respect des règles de l'Affrontement.
On venait de passer à quinze finalistes au lieu de vingt, dans un nuage radioactif et une pluie de particules nucléaires. Alors que les caméras proches de la scène étaient totalement brouillées, il ne restait plus qu'une vue d'ensemble depuis le drone au-dessus de l'arène pour nous donner un aperçu de ce qui s'était passé. Des carcasses de mastodontes calcinés étaient éparpillés ça-et là, dans un cercle de quinze mètres autour du centre de l'explosion, et le présentateur était déjà en train de décrire ce nouveau type de grenades à hydrogène dont nous venions tous de constater les effets dévastateurs.
O'Connor ne fit aucun commentaire sur la grenade, contrairement à son habitude. Il resta hébété face à l'écran, en pensant au corps qui devait être à présent complètement ruiné, inutilisable, quelque part sous les cendres. Ou peut-être en regrettant déjà le poster de Mai Valis qu'il venait de perdre.
De l'autre côté, Banmian ne semblait pas particulièrement satisfait de son pari. Il gardait le regard fixé sur l'image de l'explosion que la régie passait en boucle en attendant que le nuage radioactif ne se dissipe.
— Qu'est-ce qui se passe, Banmian ? Tu n'as pas l'air enchanté d'avoir eu raison pour la copine d'O'Connor.
— Je n'ai pas encore raison, répondit-il simplement.
Une forme féminine apparut dans la brume, et un corps blanchâtre couvert de suie et de sable se révéla soudainement, avant d'être intégralement flouté à l'écran par l'équipe de censure. Putain je n'avais même pas eu le temps d'apercevoir un téton avec cette merde de brouillage.
O'Connor poussa un hurlement de loup en tapant du pied sur sa chaise et frappa le comptoir avec sa pinte, pendant que les autres hommes de la salle se mirent à taper sur leurs tables en sifflant comme des gosses.
— Putain, il me la faut cette nana ! Capitaine, j'en veux une comme ça ! Résistante aux bombes H ! Au nom de la Paix Helvetarienne, faut qu'on aille faire un tour sur Terre pour en chercher une à Mandalay !
— Une gonzesse nukeproof... soufflais-je en me laissant peu à peu emballer par l'idée.
Bordel, cette fois c'était une sérieuse demi-molle...
« C'est... c'est incroyable ! Le projet Deera a totalement résisté à l'énergie dévastatrice d'une bombe atomique ! Mais qu'est-ce que ? Qu'est-elle en train de faire ? On dirait que... qu'elle s'enfonce peu à peu dans le sol ! »
Merde, c'était vrai. Malgré le brouillage de la censure, on voyait clairement que ses jambes étaient en train de s'enfoncer dans le sable, comme si... elle passait au travers de la matière.
Le présentateur semblait incapable de poursuivre son discours. Il bégayait alors qu'on lui soufflait quelque chose à l'oreille. Ce n'était pas le protocole ordinaire. Une caméra se braqua sur les gradins, d'où l'hologramme du Sir Dee était représenté parmi les universitaires invités. Non, quelque chose d'anormal était en train de se produire. L'hologramme du concepteur en chef disparut soudainement des gradins, comme s'il avait été appelé.
« On nous signale une erreur technique ! Quoi ? Non ! Nous allons être obligés de rendre l'antenne quelques instants ! Ne... Ne quittez pas, chers téléspectateurs, le spectacle va reprendre ! Bientôt... très bientôt ! Je... milles excuses, nous devons vraiment rendre l'antenne quelques minutes ! »
Et l'image à l'écran passa de l'arène au logo de la chaîne qui diffusait l'Affrontement. Les clients se mirent à huer dans le bar et je me retournais vers eux avec méfiance.
— Eh ma nana ! Rendez-moi ma nana ! beugla O'Connor à l'écran.
Je me penchais vers Banmian qui était en train de siroter sa vodka, laissant le monde se déchainer autour de lui paisiblement.
— Comment tu as su ?
— A son regard. Ses yeux disaient « Liberté ».
O'Connor se pencha sur le comptoir pour nous écouter, visiblement vexé que le mécano décérébré ait mieux cerné la poupée terrienne que lui.
— Et alors ? Rien ne disait qu'elle allait pouvoir le faire ! Tu savais qu'elle passait à travers la matière, toi ?
Banmian releva les yeux vers l'écran.
— Non. Je savais seulement qu'elle était déterminée.
De longues minutes passèrent, durant lesquelles toute la tension retombée se transforma en frustration. Je sentis les regards posés sur nous devenir plus haineux et belliqueux. Oh ils pouvaient, ça ne me dérangeait pas. Moi aussi j'étais frustré, moi aussi j'avais envie de décoller quelques mâchoires. Sauf que moi je savais le faire.
Quelque chose vibra soudainement dans la poche de mon gilet pare-balle et je sortis mon interface de communication pour regarder le nouveau message qui venait de s'afficher. Je remarquais immédiatement cinq autres types dans la pièce qui venaient de recevoir des messages. J'ouvris le mien. C'était l'Agence Intergalactique des Chasseurs de Primes, une des nombreuses associations avec lesquelles nous travaillons.
— Dis-moi, Banmian... « A son regard », t'aurais pas une idée de là où elle a pu aller ?
— Je ne crois pas, non...
Je posais mon interface sur le comptoir, à la vue de mes deux coéquipiers.
— Il semblerait que les organisateurs de l'Affrontement aient perdu le contrôle. L'Agence des Chasseurs a envoyé un contrat. 50 000 pour la ramener à l'université de Mandalay.
Les cinq chasseurs du bar se levèrent presque simultanément. Eux aussi avaient reçu le contrat... Ce serait donc « premier arrivé, premier servi ». Comprenant immédiatement vers qui mon regard se portait, O'Connor se mit à faire craquer ses doigts.
— On prend le contrat alors ?
— Yep. Et... on va éviter de laisser la concurrence prendre de l'avance, dis-je en désignant du menton les chasseurs de prime qui s'apprêtaient à quitter le bar.
Ils ne le quitteraient pas.
O'Connor fit craquer sa nuque et se leva pour s'avancer d'un pas rapide jusqu'au premier à côté du bar. D'un seul coup, Banmian attrapa le type assit à sa droite et lui donna un coup de boule pour le sonner, avant de l'empoigner par le bras et la jambe pour le faire voler dans la pièce comme un projectile lancé à pleine vitesse qui s'écrasa contre la porte d'entrée, bloquant la retraite des chasseurs.
Les autres clients se levèrent, prêts à se battre. D'un crochet du droit, j'en fis valser un contre le mur, renversant au passage la table où étaient assis trois mafieux en costumes noirs. Ils sortirent immédiatement des pistolets automatiques de sous leurs vestes pour tirer dans la foule et O'Connor se mit à rire en donnant un coup de bottes dans un genou qui passait là.
— J'aurais dû pisser sur ces enfoirés de mafieux quand j'étais aux chiottes, Capitaine !
— Te gêne pas, Flamy !
J'en désarmais deux en leur arrachant leurs mitraillettes pour les broyer sous les coups de leurs propres crosses, pendant que Banmian vidait le chargeur du troisième en le forçant à mâcher ses propres balles.
O'Connor monta sur la table derrière nous sans cesser de ricaner sombrement en baissant sa braguette, et je jetais les deux types à ses pieds avant de me retourner vers les chasseurs restants qui essayaient de se faire la malle et les derniers clients qui pensaient encore pouvoir se battre, dont les mécaniciens qui m'avaient mal regardé au début de l'Affrontement.
Alors que matraquais un crâne avec un pied de table et que Banmian ramassait des tessons de bouteille pour écraser un bras dessus, une odeur fétide d'urine, de bière et de plasma commença à embaumer le bar, sous les hurlements des mafieux dont les plaies ouvertes brûlaient au contact du plasma et de la pisse Helvetarienne. Combien d'artificiers dans cette galaxie pouvaient se targuer de savoir distiller leur propre explosif sans alambic ?
— Putain de merde, j'ai oublié mon briquet, beugla O'Connor en remontant sa braguette.
Je poussais un ricanement mauvais en me tournant vers lui. Ma danseuse ne s'avait pas s'arrêter de tourner. Avec la quantité d'alcool et de plasma qu'il avait ingéré, il y avait de quoi faire sauter tout le bar.
— C'est pas très pro, ça, O'Connor. Banmian, t'en as un ?
— Il s'est pas lavé les mains, Capitaine.
— Fais pas chier, Banmian.
Un briquet vola d'une main à l'autre, et O'Connor descendit de son promontoire en écrasant un visage au passage. Je m'arrêtais au-dessus d'un des chasseurs étalé au sol pour sortir l'Interface de sa poche. Il avait bien été contacté pour la même prime que nous, sauf que sa version n'avait pas été émise par l'Association des Chasseurs. Elle venait directement de StarControl. Et il ne devait pas ramener l'arme de Samsara Lab. à Mandalay, mais bien au siège intergalactique de StarControl.
Un double contrat ? Dans le camp contre les Forces Spéciales de StarControl ? Cette information me fit frissonner légèrement, et je réfléchis un instant, alors que Banmian récupérait une bouteille de vodka derrière le comptoir.
50 000 dollars pour affronter les Forces Spéciales sur la ligne d'arrivée, est-ce que ça valait le coup ? Si on la jouait fine, ça pouvait rapporter gros. Tout ce qu'on avait à faire, c'était récupérer la fille et la ramener dans son laboratoire sans faire de vagues.
Tout à fait notre style, ça.
— Aller, ça suffit, on part en chasse les gars ! En mode furtif !
Cinq minutes plus tard, le bar disparut dans un souffle vert, libérant la station stellaire de ses crocs de parasite, explosant comme une tique trop gonflée de sang, répandant sur le monde un parfum de plasma, de bière et de pisse.
https://youtu.be/kc_tcjCBb2s
Compteur à "putain": 8 occurrences
Ça va, vous n'avez pas encore les yeux qui saignent du plasma ? Alors plutôt biosciences ou cybernétique organique ?
Mes écraseurs d'os commencent à vous plaire ?
Oui certains chapitres sont longs, je le répète, non, je ne les couperai pas pour Wattpad, sur ce point vous pouvez aller danser avec O'Connor.
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