𝐀𝐑𝐂 𝐈𝐈/ 16. Date-déjeuner.












HEESEUNG.





Je le regarde sous tous les angles.

Il se vautre sur son siège sans se soucier d'être trop brute ou déranger le voisinage. Sunoo se met à l'aise, les bras et les jambes écartées. Un bruyant soupire lui échappe. Il paraît satisfait que ses fesses aient trouvé un siège assez confortable.

Je m'assois avec plus de calme.

En pensant qu'il tiendra parole. Qu'il ne touchera plus au venum. La vérité est que je n'ai aucun souvenir d'hier, je lui ai menti tout à l'heure.

Je ne connais pas l'alpha, malgré les années passées à le savoir terré quelque part, au fond de moi. Contrairement aux autres hybrides, je ne suis pas connecté à lui. C'est une entité libre qui est indépendante de ma volonté. Ses décisions ne peuvent être interférées par mon bon vouloir.

Du moins, pour l'instant.

C'est une force silencieuse. La source de tout le pouvoir que je détiens, de mes sauts d'humeur, de ma violence. Et je suis curieux de découvrir ce qu'il a fait lorsqu'il a pris les commandes, ce dont il est au courant.

— Une bonne bière pour démarrer la journée ! S'exclame Sunoo euphorique, avant que son expression faciale ne décline. Ah. Il n'y a que des trucs de vieux.

Il est blasé. Ça me fait doucement sourire. Le vin est de loin l'unique boisson alcoolisée que je consomme pour ma part.

— Je prendrai un café, merci, dis-je à la serveuse.

Je pose mon regard sur mon petit renard.

Ses yeux pétillent de malice et d'impatience. Il a déjà choisit son menu. Ses gestes sont brusques et un peu déséquilibrés. Il balaye le petit café de son éternel air nonchalant, avant d'ancrer ses yeux sur les miens.

— Quoi ? Me demande-t-il.

Je pari tout que j'ai un sourire niais plaqué aux lèvres qui me rend idiot. D'après Jay.

— Pourquoi tu me fixes de cette façon ?

— J'aime te regarder, confié-je sans gêne.

Pour la première fois, Sunoo ne s'arme pas d'hostilité. Je ne me sens pas rejeté. Il détourne juste un peu les yeux, comme s'il tentait de couvrir quelque chose. Je ne suis pas sûr.

— T'es un mauvais dragueur. On t'as jamais dit que t'étais flippant à faire ça ?

— Oui, plusieurs fois.

Mon sourire s'étire plus sur le côté droit. Mon menton se cale dans les creux de mes paumes. Accoudé à la table, mon regard s'intensifie. Je l'admire un peu mon renard. Je suis complètement fan de lui.

Même lorsqu'il revêt son expression choqué, à cause de ma confession.

— Laisse tomber, souffle-t-il. 

J'étouffe de petits rires qui remontent lentement. C'est passionnant de le voir ainsi. Je remarque des détails qui sont invisibles habituellement. Comme un petit grain de beauté au dessus de sa joue, près du coin de son œil.

Quand il ne sourit pas, il renvoie un côté intimidant. Il a cette manie de lorgner les autres avec dédain. Mais je me demande si ce n'est juste pas sa façon de regarder. On pourrait croire qu'il se sent meilleur que n'importe qui dans ce café.

Il porte beaucoup de vêtements larges. Est-ce à cause de la saison ? Son blouson en cuir lui échappe rarement. Ses actes sont rudes. Pourtant, physiquement, il possède des traits fins et délicats. C'est un contraste amusant.

Sa voix qu'on pourrait imaginer dans l'aiguë, est plutôt grave, profonde. Il ramène sans cesse ses cheveux noirs en arrière. Pas mal de regards convergent vers lui. Ce qui a pour don de m'agacer. Dès que j'en croise un, je l'assène d'un regard si dur et si terrifiant qu'il prend peur et coupe tout contact visuel.

Je me sens mieux après.

— Ta commande, commence de façon sèche la serveuse en déposant le plat sous le nez de Sunoo. Et voici pour toi mon beau, poursuit-elle avec moi.

Le plat ne donne pas envie. Tout à l'heure j'ai commandé sans réfléchir. Et maintenant que je vois tout ce gras, je me demande ce à quoi je pensais.

À ton petit renard.

C'est vrai.

Une ombre me cache la vue. Fronçant les sourcils, je lève les yeux, croisant les pupilles bleuâtres de la serveuse, sourire crispée aux lèvres. Je me demande si elle est constipé. Elle me fixe, comme attendant quelque chose.

Ses seins sont visibles et mes yeux se posent inévitablement dessus car ils sont juste sous mon nez. Dois-je prévenir ou cela est fait exprès ? Il est vrai qu'il fait une petite chaleur à l'intérieur pour un mois d'automne.

— C'est bon, grogne mon renard. On n'a besoin de rien.

— J'attends que le jeune homme me réponde par lui-même, minaude la serveuse d'une voix mielleuse.

C'est moi qu'elle indique du doigt. Pourquoi est-ce qu'elle parle de façon si aiguë ? Maux de gorge ? Ça expliquerait son faciès constipé ?

Soudain, un voile sombre retombe sur le magnifique visage de Sunoo. Intrigué, je l'observe sans bouger. La façon dont il tient sa fourchette entre ses doigts ne dit rien qui vaille. Un sourire mesquin fluet redessine ses lèvres pulpeuses.

Dégage, adresse-t-il à la jeune femme.

Cette dernières frissonne, c'est quelque chose que je peux sentir. Elle expulse des phéromones de détresse. Et elle m'a l'air de se donner du mal à les dissimuler le plus possible. C'est en fait une hirondelle.

Et je ne comprends décidément rien de ce qui se trame. Surtout lorsqu'elle revêt une mine boudeuse en s'éloignant de notre table, marmonnant des insultes. Sunoo n'a pas l'air de l'apprécier. Bizarre. Peut-être qu'il a eut un différend avec elle ?

Pendant que je retire mon mouchoir blanc que je déplie, avant de le disposer sur mes jambes, Sunoo coupe de façon agressive sa viande. Je commence à m'inquiéter. D'après Sunghoon, il serait fort. J'ai pu remarquer cette puissance en effet.

Parfois, elle me donne envie de le taquiner, c'est plus fort que moi. Pourtant, ce n'est pas inscrit dans mes habitudes.

Bientôt, le couteau tranche le morceau de volaille en entier. Or Sunoo ne s'arrête pas, continuant de scier cette partie avec hargne.

— Tu devrais peut-être—

L'assiette se casse.

Ok.

Un blanc s'installe. Ce n'est pas grave. Ça m'est souvent arrivé.

— Arg ! J'aime pas les pétasses dans son genre. Neuneuneuneu j'attends qu'il réponde par lui-même. Non mais elle ne se gêne même pas pour draguer. Tu fais ton service et tu te casse en fait. Ce n'est même pas pro'.

Je n'ai absolument rien compris. De quoi est-ce qu'on parle là ?

— Ça m'énerve !

— Tu veux qu'on s'en aille ?

Si cet endroit ne lui plaît pas, je préfère qu'on mange ailleurs. Mes sourcils se froncent d'inquiétude. Je plonge dans son regard que j'ai du mal à sonder. Je peux toujours réserver pour une salle privée dans un restaurant chinois non loin d'ici. Je n'ai besoin que de son accord.

Tout d'un coup, il paraît perturbé dans sa colère.

— Non, dit-il, un sourire inquiétant aux lèvres. Tout est parfait.

Vraiment ? Je me surprends à apprécier son compliment. S'en est un n'est-ce pas ? Notre premier rendez-vous est parfait. Recevoir ces mots de lui ont un impact différent de quand ma mère me félicitait pour mes réussites.

C'est drôle comme plus jeune, j'aimais être dans ses bonnes grâces. Et à présent, la seule pensée qu'elle pourrait tourner autour de Sunoo me dégoûte. Elle comme n'importe qui de la meute.

— Je suis ravi que ce moment te plaise alors.

D'un coup, il cligne des yeux, comme s'il venait de se rendre compte des mots qu'il avait prononcé. Il hoche la tête avec lenteur en soupirant.

Je suis de plus en plus perdu. Mais bientôt, nous reprenons le repas. Enfin, j'ai du mal. Après quelques bouchées, je me sens déjà lourd. Le goût ravage mes papilles gustatives, mais de la mauvaise façon. Je n'aime pas la viande saignante.

Je l'aime, blanche.

Ce n'est pas le cas de mon petit renard lui. Il dévore son assiette non sans jetter de vagues coups d'œil dans son dos, en direction de celle qui a rapporté notre commande. Je pense qu'il y a mieux que manger. Il y a regarder Sunoo, c'est plus distrayant.

C'est naturellement donc que je délaisse mon plat.

À la place, je bois un peu de ce café qui dilue l'arrière goût de la viande sur ma langue. Il n'y a à présent que l'odeur musqué, un intérieur chaleureux, le garçon dont je suis amoureux.

C'est un grand mangeur à ce que je vois. Il avale sa viande à grosses bouchées, laissant quelques miettes border ses lèvres. Il a une façon assez désinvolte de se tenir à table. C'est un peu irritant pour moi, je dois l'avouer.

— T'en veux plus ?

Mes yeux croisent les siens. Il louche sur mon plat. Je ne sais pas si je dois trouver ça adorable, ou adorable. J'ai une folle envie de le prendre en photo. D'un sourire bienveillant, je pousse mon assiette vers lui.

— Tu peux le prendre.

— T'es sûr ?

— Parfaitement.

Il fixe ma viande presque intacte, à défaut de quelques bouts arrachés sur le côté.

— Attends, t'as rien pris ?

— Ce n'est pas nécessaire. Je le digère mal de toute façon, lui fournissé-je.

Il arque le sourcil. Je vois sur son visage, un intérêt pour l'information que je viens de lui confier. Il paraît réfléchir un instant.

— Pourquoi avoir commandé alors ?

Je pensais trop à lui.

Ça a vraiment tendance à me distraire ces derniers temps. Ou plutôt, j'ai été distrait dès le premier soir où je l'ai senti. Son odeur aux fraîcheurs de la rosée matinale. Ce n'est qu'en sa présence que j'arrive à ordonner un peu mieux mes pensées. Loin de moi, je cogite. Je ne suis jamais serein.

— Mange, vas-y.

Sans insister, un sourire déforme ses lèvres.

— Bah, si tu insistes tant, je ne vais pas dire non.

Je n'ai pas vraiment insisté mais oui, bien sûr. Je le fixe à dévorer ce second plat lorsque j'aperçois toujours les miettes sur son visage. Je grimace et décide de nettoyer tout ça.

— Attends.

Je pense user de mon mouchoir mais Sunoo est bien trop concentré sur son plat. Au moment d'utiliser son couteau, ce dernier entaille ma paume sans le vouloir. L'argent tranche ma chair et libère un filet de sang.

Nous nous arrêtons tous les deux.

Je regarde cette blessure qui ne m'affecte pas. Je ne ressens aucune douleur. Je regarde juste le sang couler, un peu indifférent. Mais Sunoo lui, grossit ses yeux dans la stupeur.

C'est la première fois que j'aperçois une pareille expression.

Peut-être parce qu'il a l'air de s'en vouloir.

— Je...

Il ne complète pas sa phrase, comme si les mots suivants se heurtaient à une barrière invisible. Je n'arrive pas à deviner ce qui lui traverse l'esprit. Alors, je m'en remet à ses phéromones qui traduisent des signes plus claires de sa culpabilité. 

Sunoo dépose son couteau avec lenteur. À croire que sa main se pose au ralenti sur la table. Il fixe ma blessure d'un regard fermé. Je peux l'entendre déglutir.

— Je t'ai blessé...

Son constat m'interpelle. Ça m'étonne qu'il soit affecté. Je me presse de le rassurer aussitôt. C'est comme un besoin urgent de lui préciser que tout va bien.

— Ce n'est rien. Je ne ressens pas vraiment la douleur.

Ce n'est qu'une entaille superficielle à mon échelle. Je suis bien trop fort pour qu'une écorchure pareille me fasse quelque chose. Or Sunoo n'a pas l'air de comprendre. Il se saisit en vitesse de son sac et l'ouvre. D'un ton déterminé, il me lance :

— Donne-moi ta main.

Je fronce les sourcils en le voyant sortir une boîte pour les premiers soins.

— Il n'y a pas besoin de s'affoler.

Mes paroles ne heurtent que le vide.

Ça m'intrigue. Ce n'est pas tout le monde qui se balade avec de l'alcool, du coton, des pommades, du fil et une aiguille... c'est un matériel complet. Après, Jay se trimballe avec des assiettes en porcelaine et des verres à vin dans son sac alors, qui suis-je pour juger ?

Sans m'écouter, Sunoo se saisit de ma main blessée. Rencontrer sa paume rêche et chaude est un pur bonheur. Je crois que ce que j'aime chez lui sont ces petites choses banales auxquelles nous ne prêtons même plus attention.

Puisqu'il est tant déterminé alors, je le laisse faire.

J'ai même un léger sourire aux lèvres en le voyant manipuler ma main avec soin. Finalement, il sait faire preuve de douceur dans ses gestes. J'en apprend des choses ce matin. Je passe un si bon moment que je voudrais le faire durer.

Sunoo porte une attention particulière sur l'entaille, tout en ouvrant le flacon d'alcool.

— Ça va faire mal, serre les dents.

Sans aucune pitié, il verse une quantité conséquente sur la blessure.

Je retire ce que j'ai dis sur la douceur dans ses gestes.

Heureusement qu'il s'agit d'une douleur tellement infime à mon échelle que je ne ressens pas grand chose. Il affiche un sourire malicieux, comme s'il s'attendait à ce que je réagisse.

Or voyant ma face demeurer la même au fil des secondes, il me renvoie un air interloqué.

— Tu n'as pas mal ?

Je l'avais pourtant prévenu que je ne sentais rien. Et de toutes les façons, la peau allait se rétablir en quelques heures. Je fais semblant de grimacer.

— Si. Un peu.

— Je le savais ! S'écrit mon renard avec un air un peu diabolique.

Une expression qui ne tarde pas à se faire remplacer par une mine faussement compatissante.

— Je veux dire, soit fort, hrum hrum.

Il se racle la gorge en empruntant les manières de faire d'un médecin qui s'adresse à son patient. C'est tellement passionnant que je le dévore du regard. Je le soupçonne d'être un peu sadique, à avoir délibérément versé de d'alcool sur ma blessure tout en gardant conscience de la douleur qui sera provoquée.

Malheureusement pour lui, il aura du mal à atteindre son objectif.

— J'ai presque finit, m'annonce-t-il.

Un vrai petit médecin. Je l'aime. C'est trop mignon. Sunoo passe un bandage autour de ma main et finit par tout ranger. Il rassemble les objets contaminés par mon sang dans un petit sac en plastique et le dispose ailleurs.

— Et voilà ! Dit-il, tout fier de lui.

Je fond. Je fixe le bandage si bien réalisé.

— Merci, lui adressé-je chaleureusement. Je peux savoir pourquoi tu as une boîte de soins dans ton sac ?

En réalité, elle est plutôt utile. Cependant, notons bien que c'est rare d'en porter sur soi. Personne ne prévoit une blessure au dehors.

— C'est un cadeau de Jake, me confie mon renard.

J'aurais du m'en douter. Ça fait sens. Surtout que le chihuahua est en faculté de médecine. Ok, ce n'est pas un chihuahua mais on m'a compris.

— Io t'a appris à soigner les blessures c'est ça ?

Il secoue la tête.

— En fait, quand j'étais plus jeune, je me battais souvent. Mes amis aussi. Et pour ne pas se faire prendre par les parents, on se soignait nous même.

Les mots coulent d'entre ses lèvres et me fascinent d'emblée. Encore une fois, ça rejoins les informations que Sunghoon m'a confié. Lorsqu'il l'a vu se battre contre Kai. Je me doutais bien qu'il avait une poigne supérieur pour une petite proie face à son prédateur.

— Tu étais donc un fauteur de trouble, dis-je en croisant les bras, un sourire en coin moqueur.

— Quoi ?

Sunoo papillonne des yeux, éberlué, puis son visage se déforme par la grimace qui s'étale sous sa peau.

— Eh mais, pourquoi je te raconte tout ça d'ailleurs ?!

Je n'en sais rien mais depuis, j'ai soif d'en savoir encore plus.

— Parce que t'étais un élève model en cours toi ?

— Le premier de la classe.

Il bat des paupières. Ça doit l'étonner. On s'imagine souvent une image différente de ce que je suis.

— Quoi ? Toi, tu étais le premier de la classe ?

— C'est si surprenant ?

— Un peu... t'étais une sorte d'intello ?

Je hoche la tête, amusé par sa curiosité.

— Non, sérieusement ? Tu passais ton temps dans les livres ? Tu avais un appareil dentaire ? Des lunettes ? Avec plein de boutons ?

— C'est déplacé comme remarque, dis-je sur un ton de sermon.

Mais lui se contente de rire aux éclats.

— Oui, désolé, c'était une blague.

Ça me rassure un peu. Après, il n'a jamais renvoyé l'image de ces personnes qui cultivent les stéréotypes. J'aime la façon dont il rit aussi aisément. C'est sorti d'un tel naturel que j'ai senti mon cœur bondir.

Pour la première fois, je sens que j'ai captivé son attention. Je ne le sens pas sur ses gardes à cet instant précis. Je ne me sens pas comme un danger pour lui. Il est détendu.

— Le truc c'est que les prédateurs comme toi parlent plus avec leurs poings que leur cerveau. Ils ne connaissent que cette langue !

Je me dis qu'il n'a du côtoyer que cette catégorie depuis sa naissance. C'est pour ça qu'il se méfie autant de moi ? Il donne l'impression de mépriser les prédateurs. Et ça provoque ma curiosité. De savoir où il a grandit. Comment. Tout ce qu'il faisait plus jeune. Ses manies.

— Mmm mouais, après réflexion, tu parles comme un noble. J'aurais du m'en douter.

— Et toi donc ? À part dormir en classe, tu faisais quoi ? Osé-je lancer pour le taquiner.

Sunoo ouvre la bouche, comme surpris par mon audace. Mais il n'est pas vraiment vexé. Il arrive même à cacher un sourire qui forçait à égayer son faciès.

— De quoi tu parles ? J'étais bon en sciences ! J'avais les meilleures notes ok ?

Personnellement, bien que j'obtenais les notes les plus hautes dans toutes les matières, j'ai eus une préférence pour la littérature. Sans l'entreprise, je serai devenu écrivain.

— Le prof de physique était un gros dégueulasse. Il me dégoûtait. Ça me saoule parce que c'était ma matière préférée à la base. Le prof de sport était un voyeur. Et celui des maths était chiant à mourir. Qu'est-ce qu'il nous bassinait sans cesse avec ses histoires à la con. Et celui du français, oh lui c'était le menteur originel. Jamais vu un mec débiter autant de salades. Il n'y avait que le prof de biologie qui était un bon. C'était vraiment un coin paumé mon lycée.

Tout ce qu'il dit s'imprègne à moi à la seconde. Je ne manque rien. Il me parlera des heures et mes oreilles s'ouvriront en grand pour absorber ses mots, comme s'il s'agissait d'une nourriture essentiel à mon corps.

C'est tout ce dont j'ai besoin pour mieux respirer. Mon petit renard est du genre à débiter au final.

— Toi, je parie que t'étais dans un établissement privé de fils et filles à papa, me lance-t-il.

— Je ne le prendrai pas pour une offense.

Cependant, il a raison. Sunoo pouffe et devient d'un coup gourmant de mes péripéties.

— Raconte un peu voir.

— Ce n'est pas aussi passionnant que ton expérience.

C'était une grande bâtisse, avec des hall espacés. Des professeurs plus engagés que les siens, une rigueur académique qu'il fallait suivre. L'endroit préféré que je fréquentais souvent était la bibliothèque.

— Dis-moi ce que tu veux savoir.

Je lui raconterai tout dans les moindres détails. Il n'aura qu'à me le demander.

— Vous portiez des uniformes ?

— Oui.

— C'était moche ou pas ?

— Plutôt confortable.

— Ça ressemblait vraiment à un château, ton lycée ?

— C'était... grand, oui, hésité-je.

Or Sunoo enchaîne sans me laisser le temps d'y penser.

— C'est vrai que vous aviez des caniches de compagnie ? Vous vous déplacez en carrosse ?

Un rire nerveux m'échappe.

— C'était plutôt normal comme école.

— Quoi ? Il n'y avait même pas de siège de massage ? Ni de climatisation dans chaque classe ?

Mais d'où il tient tout ça ?

— Je te le ferai visiter, si tu veux.

— Ah non merci ! J'ai pas quitté le lycée pour y remettre les pieds.

Je ne sais pas s'il a essayé d'être drôle mais même sans comprendre, je ris malgré moi. Toutes ces expressions qui traversent son visage sont nouveaux pour moi. Et je m'en régale tant. Je les imprime précieusement dans ma tête.

Mon renard, rien qu'à moi.

Quelque chose se met à gronder tout au fond, vibrant sous mon torse. C'est subtil et un peu étrange mais ça remue d'une certaine façon. Elle favorise les pensées toutes plus possessives les une les autres. J'ai du mal à les empêcher de couler.

Parfois, c'est trop compliqué à contrôler. Je pense fermement que Sunoo est à moi. Et le regard des autres sur lui m'agace. Encore heureux qu'il ne puisse pas lire dans les pensées. Je n'ai plus envie qu'il me fuit.

Une once de tristesse me traverse.

Mais je la fais disparaître la seconde d'après. C'est notre date-déjeuner. D'ailleurs, Sunoo a finit son plat. J'ai épongé tout à l'heure le sang sur la nappe mais quelques traces y résistent. Je suis encore dérangé par les miettes éparpillés sur son visage. Alors je décide de retenter mon geste précédent.

Cette fois-ci, je m'assure que le couteau soit hors champ.

Ensuite, je peux enfin nettoyer ses lèvres. Il est surpris en premier lieu. Peut-être est-ce la raison pour laquelle il ne réagit pas. Je retire les traces de nourriture sur son visage, puis m'arrête à ses lèvres où mon pouce émet une petite pression.

— Mange correctement la prochaine fois.

Il cligne des yeux, puis me réponds d'une voix nerveuse.

— Euh, ouais.

Tiens. J'aurais parié qu'il aurait rejeté mon acte avec rudesse. Je reconnais être surpris là. Soudain, en voulant se gratter le cou, il dévoile un bout de peau caché par son pull. Je déglutis avec l'impression que mon cœur tombe dans mon ventre, lorsque j'aperçois une morsure.

Mes yeux se calent dessus sans plus pouvoir s'en décrocher.

Je me vide d'air.

Ne me dites pas que c'est ce que j'ai fais hier...

Je ne l'ai quand même pas mordu ?

Sunoo se rend bien vite compte que j'ai aperçu les traces de mes canines. De façon brute, il tire sur son pull de telle sorte que la morsure ne soit plus visible. Et contre toute attente, son visage chauffe. Le mien n'est pas mieux.

Nous devenons silencieux, gênés.

Aucun de nous ne veut en parler, j'en suis persuadé. Sunoo n'a pas l'air de m'en vouloir. Pourtant, il connaît comme moi la signification des morsures. Je commence à m'inquiéter à l'idée d'avoir fait quelque chose de déplacé hier.

Je l'ai mordu, ce n'est pas rien.

Au final, j'ai cédé aux envies qui me torturaient depuis un moment. Mes canines ne m'ont d'ailleurs pas démangé depuis ce matin. Trop pris dans ma réflexion, je n'y avais même pas fait attention.

Ce n'est qu'une morsure Heeseung, rien de grave. C'est en soit un lien affectif que même un parent et un enfant peuvent partager.

La morsure devient vraiment intime lorsqu'on mord à plusieurs endroits, de plusieurs manières. C'est une façon de marquer son territoire, un signe d'appartenance si je veux employer un langage primitif. Puisque l'instinct animal fait aussi partie de nous.

Il ne m'en veut pas ?

Je n'ose pas lui demander au vu de notre gêne respective. Je comptais me lancer dans un autre sujet lorsque des odeurs familières viennent titiller mes narines.

— Mais c'est vraiment eux ! Hé Heeseung !

Non.

Dites moi que je rêve.

Pas en plein rendez-vous quand même.

— Oh ? Fait Sunoo en levant la tête, ayant lui aussi senti leur présence.

C'est avec la mine blasée, dégoûté, que je croise les bras, tandis que Jay approche. Accompagné de son chat. Je l'aime bien Jay. C'est mon meilleur ami. Mais tout ce que je retiens c'est que mon date est fichu.

Parce qu'il vient de s'assoir avec nous.

— C'est trop cool de tomber sur vous ! Et si on mangeais ensemble ?















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Jay tu rends quelqu'un énervé là 😂🤣

Le date déjeuner a été plus soft que je ne me l'imaginais. Ils sont tellement cute mes enfants. 😍
Discussion calme, sans prise de tête, sur des sujets simples. 😊

🌝 Par contre comment ça marque d'appartenance. Heeseung-ssi ?

Bref 🤭 le jaywon qui s'invite houhou trop hâte de poster ce dimanche !

Merci d'avoir joué le jeu au dernier chapitre et répondu aux questions. Ça me fait super plaisir de découvrir les impressions des lecteurs. C'est peut-être banale pour les lecteurs, mais vraiment, en tant qu'auteur c'est très amusant/gratifiant/encourageant comme moment. 😊

Merci aussi de voter et de commenter. Vous ne savez pas à quel point ça peut faire plaisir. Surtout en ces temps où les votes et les commentaires se font si rare sur la plateforme en général. Je suis tellement heureuse et reconnaissante de lire vos réactions. C'est un réel bonheur. Mon moment préféré c'est répondre aux commentaires no joke 😂✨. 🤍 Prenez soin de vous !







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