31. Bataille silencieuse.








HEESEUNG



À la troisième sonnerie, elle prend l'appel.

Je l'entends marmonner à l'autre bout du combiné, me faisant une idée de ce qu'elle devait faire avant que je ne la joigne. Un massage ? Journée cocktail en main sur une terrasse ? Ou alors un massage sur la terrasse avec comme supplément, les masseurs.

Allô ? Dit-elle d'une voix nonchalante.

Sheevan.

Une seconde, cette voix me dit quelque chose.

Le pire est sans doute le fait qu'elle ne m'a réellement pas reconnu, tant elle est ailleurs dans son petit monde, avec une faible capacité de mémoire. Je dois patienter des minutes entières dans cet avion qui surplombe les édifices enluminés.

Heeseung ? Dit-elle d'une voix hésitante.

Je dois être inquiet, sachant que tu as enregistré mon numéro il y a des années ?

Par le combiné, je l'entends étouffer un petit cri de bonheur et marmonner des instructions qui s'apparentent à un renvoi, je suppose.

Ce n'est pas ce que tu crois !

— Et que dois-je croire ? Que je ne suis plus privilégié ?

— Arrête de me faire culpabiliser. Je venais de me réveiller, vois-tu. C'est plutôt toi qui est en tord. Des mois sans appel, jeune homme.

J'avoue avoir abusé.

— J'espère que tu as de quoi te faire pardonner.

Un léger sourire peint mes lèvres. J'imagine d'ici, sa moue délicate et son air affligé, un poil arrogant.

— Je serai à Oslo d'ici quelques heures.

Une nouvelle qui, je sais d'avance, la rendra ivre de joie. Des secondes s'écoulent avant qu'elle ne réagisse, comme si elle prenait le temps d'assimiler la nouvelle.

No way !

— Rejoins-moi demain soir.

Je raccroche sans plus attendre, conscient qu'elle me le fera payer une fois de retour au bercail. En attendant, c'est le cadet de mes soucis. Je me braque un moment devant l'icône du compte de Sunoo, il y a sa photo dessus. Je n'ai quitté l'Amérique que quelques heures, et le manque se creuse déjà.

Sa présence, absente, m'est difficile à gérer. Je garde un vêtement à lui à proximité. Ne pas sentir son odeur me fait perdre mes repères. C'est un trompe nez qui me permet de mieux me concentrer sans avoir l'impression qu'il a disparue.

Et j'ai besoin de faire ce voyage si je veux réussir à coincer celui que je cherche. Il s'agit de l'une des personnes les plus insaisissables sur cette planète. Fuyant ses responsabilités depuis tout jeune, il vit dans un monde imaginaire au milieu de ses livres.

Je range le téléphone, la mine durcis devant ce que Jay a réussi à dégoter dans l'ombre de sa mère. Ce papier, raison pour laquelle je traverse le globe pour plus d'explications.

Il s'agit du rapport original du drame d'halloween.

***

— J'espère que vous avez fait bon voyage monsieur. Soyez le bienvenu.

Je tente de dissimuler la légère crispation de mon visage. Mais je me demande si ce n'est pas peine perdu.

— Leï, j'avais demandé une entrée discrète, dis-je, les dents serrées.

Devant moi, un homme d'une cinquantaine année, tout au plus, m'adresse un sourire gênant. Ses cheveux sombres, parsemés de mèches grises sont parfaitement plaqués en arrière. Il est vêtu d'un ensemble, un costume impeccable à cause de son rang. Après tout, c'est lui qui a guidé la descendance de l'Alpha actuel.

C'est un homme pour qui j'ai beaucoup de respect et à qui j'avais précisé de me faire gagner l'intérieur de la maison dans la plus grande des discrétion. Mais voilà que je fais face à une rangée de bêtas comme s'il s'agissait du couronnement d'un héritier.

Ce n'est pas tant leur allégeance qui me déplaît. Je voulais juste passer le plus inaperçu possible. Celui que je cherche serait capable de sauter dans un avion pour fuir loin, au bout du continent, s'il venait à apprendre mon arrivée.

— Je suis désolé monsieur, ça s'est ébruité, c'était hors de ma volonté.

— Cesse de m'appeler monsieur, dis-je dans un soupir.

— Bien Heeseung, soit le bienvenu. Tu devrais te reposer un peu avant d'aller le voir. Le décalage horaire doit t'avoir épuisé.

Tandis que mes bagages sont escortés —il n'y en a pas des masses— nous avançons, Leï et moi, au milieu du cortège. C'est un brin différent de lorsque je revenais à Holmenkollen pour les congés d'hivers. Ma terre natale, là où est établie la demeure royale de notre meute.

En tant que fils de Garam, ils ont tous du respect pour moi, envers mon frère et ma sœur. Cependant, ils laissent transparaître une formalité plus rigides, des courbettes plus respectueuses. Même Leï m'a vouvoyé malgré le lien qu'on entretien depuis mon enfance.

Je jette des oeillades discrètes et remarque la distance nette qu'il maintient entre nous. Il a beau vouloir paraître comme d'habitude, la proximité que nous partagions s'est étiolé. Je garde mes pensées pour moi, poursuivant comme si de rien n'était.

— Et le laisser filer pendant que je dors ? Hors de question.

— Je comprends tes inquiétudes. Mais monsieur s'est enfermé dans la bibliothèque depuis deux jours. Je ne pense pas qu'il en sortira avant un moment.

Je hausse un sourcil.

— Une nouvelle trouvaille ?

— Des ouvrages venus d'Égypte. Dès qu'il a reçu son colis, il s'est réfugié en demandant à ce qu'on ne le dérange pas.

J'y réfléchis. Il n'a pas tord, une fois que l'autre plonge dans un bouquin, il est incapable de s'extirper de son monde, à moins qu'un événement épouvantable ne le surprenne.

Comme mon retour par exemple.

— Très bien. Je serais dans mes appartements jusqu'au diner.

Il s'incline poliment, un sourire franc aux lèvres. Moi aussi ça me fait plaisir de le revoir. Et j'aurais aimé lui demander des explications sur la raison pour laquelle, cette familiarité entre nous s'est fragilisé.

Or ce qui me torture l'esprit est si inquiétant que j'ai du mal à me concentrer. J'échange souvent avec Jay, lui demande de garder un œil sur mon petit renard favoris.

Sunghoon est occupé ailleurs chez nos voisins suite à ses obligations familiales —je me suis gardé de lui mentionner que son chihuahua était dans le coin— c'est louche et j'aurais tout le temps de le cuisiner sur ses secrets. 

Soit, je pénètre ce chalet gigantesque, le bercail des Lee. L'entrée principale est majestueuse avec des portes en bois massif et des éléments en fer forgé, ornées de motifs ancestraux. On se croirait à l'ère des vikings.

Il s'agit le même modèle qu'au domaine à New Haven. Les loups doivent l'ouvrir en se servant uniquement de leur force pour prouver leur supériorité en puissance au reste de la meute. Je mobilise mes muscles et exerce une pression suffisante qui me permet d'entrer.

L'architecture à l'intérieur est ouverte et aérée. Les baies vitrées qui s’étendent sur toute la hauteur, créant un contrast avec les murs de briques grises empilées de façon chaotique, et le reste de la construction essentiellement constituée de bois.

Elle est faite de telle sorte qu'elle semble se fondre dans le décor de la nature. Nichée sur une pente, avec quelques arbres environnantes et la neige qui recouvre la pelouse verdoyante. Des fontaines et lacs artificielles peuplent le vaste étendue de la cour intérieure.

Les portes de la maison sont plus petites et donnent sur le hall et une hauteur sous plafond importante, conférant un sentiment spectaculaire. Les fresques abondent sur les murs, l'histoire de la meute et les légendes scandinaves se tenant côtes à côtes.

— Mes grands-parents sont là ? Adressé-je à Leï.

— Ils sont dans leurs appartements.

Les membres de la meute qui vivent ici sont réparties dans les petites maisons avoisinantes, qui nous entourent. Ils s'occupent du tourisme, des hôtels de luxe et des stations de ski.

— Tu ne leur a rien dit rassure-moi.

— Comme prévu, non. Mais je crains qu'ils soient malgré tout au courant.

Après avoir poussé un soupir, je longe l'escalier central au bois sombre. La balustrade est ornée de gravures représentant les loups. Enfin, j'atteins ma chambre. Une pièce sobre et minimaliste. Des fenêtres panoramiques qui donnent une vue exceptionnelle sur le quartier et le ciel.

Mes affaires sont déjà rangées. Je retire mes vêtements dans l'optique de prendre une douche.

J'ai laissé des souvenirs dans cet endroit. Il y a une rangée de photos contre le mur au dessus de ma table. Des amis du lycée, mes tout premiers. Nous venions passer l'hiver ici, en raison de ce que la ville avait à offrir. Le ski, les saunas. C'était devenu une tradition.

Je souris en reconnaissant parmi les adolescents, Sheevan. Une coupe à frange, des cheveux bruns ondulantes, menton levé et dos droit. Ainsi, elle sort du lot. Des lèvres pulpeuses autrefois moqués et des yeux sombres, le regard intensifié grâce aux traits de mascara.

Et dire que j'étais censé épouser son petit frère, un omega d'une bonne lignée. Ce n'était qu'un arrangement stratégique qui est vite tombé à l'eau lorsque ma mère s'est rendu compte qu'elle ne pouvait pas me contrôler. À défaut d'exercer son autorité d'Alpha, elle aurait eut du mal à me faire passer les noces traditionnelles.

Je m'éloigne et glisse sous le jet d'eau. Quand bien même je l'admirais, qu'elle a été présente, joignable et d'un soutien indéfectible, Garam est plus stratège que maternelle. Et je ne peux pas m'empêcher de me méfier. Encore plus en ce moment.

Sunoo était là, ce soir d'halloween, et tous le savaient car c'est marqué dans le rapport. Pourquoi ma mère a tenté d'effacer ce détail ? La version qu'à trouvé Jay est différente du document officiel. La seule personne qui peut m'en apprendre plus est—

— Cupcake ! Je suis là !

— Sheevan.

Je resserre la serviette autour de ma taille, tandis que mon amie fait irruption dans ma douche. Amie, la seule qui s'est levé pour m'adresser la parole à la surprise de tous, alors que j'étais évité depuis ma tendre enfance parmi les miens.

— Oh, mais qu'est-ce que tu fais voyons ? On s'est déjà vu nus un bon nombre de fois.

Pour sûr, j'en ai appris des choses avec elle dans mon adolescence.

— La situation est différente.

— Je sais je sais. Tu sors avec un petit renard. Félicitations pour ta première mise en couple. J'y croyais pas !

Je le prendrai presque mal. Elle se rapproche en passant ses bras par dessus mes épaules. Je demeure stoïque malgré le peu d'espace entre nous. Elle n'a pas tant changé depuis.

— Les omégas sont verts de rage. Toute la lignée de Lee Garam leur échappe.

Je ne réagis pas tant que ça. Je n'ai jamais été intéressé par leurs avances.

— Tu as fait vite.

J'attrape ses poignets et retire doucement ses mains. Mais loin de la vexer, une lueur excitée danse dans ses iris.

— Oh là là Heeseung, qu'est-ce que tu comptes me faire ? Minaude la brune.

Je roule des yeux, autant agacé qu'amusé.

— Rien. Tu permets ? Poursuivé-je, déposant un baiser furtif sur le dos de sa main.

Puis, lui indique la sortie en silence. J'aimerais m'habiller sans qu'on m'observe. Le teint de Sheevan rougit, elle retire sa main en douceur.

— Toi, tu n'as pas idée de combien de cœurs tu brises. Ton renard a de la chance.

J'ai surtout de la chance que, dans son petit univers dont il est le centre, Sunoo ait daigné m'accorder un regard.

— Tu ne caches même pas ton sourire, remarque la brune en soufflant.

Je la sens jalouse. Ça me fait tendrement sourire. Même si l'idée de se mettre en couple l'horripile, encore plus le fait d'être exclusive, l'existence de Sunoo a pour conséquence l'arrêt de ce que nous partagions tous les deux.

— Bon, je t'attend à l'extérieur. Tu me raconteras pour ton mec.

Elle fait claquer la porte à son passage. Et moi, je n'arrête pas de penser à Sunoo. Je me demande ce qu'il fait en ce moment.

***

Leï et moi nous échangeons un dernier regard, dans une entente mutuelle. Après quoi, il est le premier à toquer. Sans attendre de réponse —car cela aurait été une perte de temps— il entre. Je le suis à la trace.

Cette salle est gigantesque, de forme circulaire, les étagères fixées contre les murs, soutenant les milliers d'ouvrages qu'aucun homme ne pourrait lire en une seule vie. Il y en a de toutes sortes.

Certains racontant notre histoire; dans des langues traduites, comme dans le norsk. Il a toujours aimé les temples du savoir, se soustraire du monde véritable et voyager grâce à l'imaginaire.

— Monsieur ? Monsieur Jungkook ? Vous avez de la visite.

L'air est empreint de l'odeur des pages marquées par le temps. Un feu de bois qui crépite, répand les effluves de santal. Les flammes sont l'unique source de lumière, les volets en forme d'arche sont closes et condamnés.

— Monsieur, vous m'entendez ?

— Qu'y a-t-il donc, Leï ?

La voix nonchalante s'élève et percute les murs. Elle est brute et sans effort. Chaque mot, articulé avec lenteur, une lourde paresse transpirant autant dans son timbre que dans ses gestes.

— N'avais-je pas dit ne pas vouloir être dérangé ?

Avec habilité et patience, il retourne les pages de son bouquin. Des signes étranges sont gravés dessus. De là d'où je me tiens, il m'est impossible de lire quoi que ce soit. La taille volumineuse du livre m'impressionne. Elle repose sagement sur un pupitre.

— Je le sais monsieur, mais c'est important.

L'homme qui s'adonne à la lecture est installé avec lassitude sur un siège en bois, rembourré de cuir, aux motifs en fer forgé, inspirant la royauté. Les flammes ardentes projettent son ombre et la grossissent.

Je me rappelle autrefois avoir été effrayé par ces formes ténébreuses qui ondulaient sur le tapis. Parce qu'il avait l'air si grand. En même temps, il inspirait la sécurité, sentiment réconfortant grâce auquel j'arrivais à l'approcher.

Mes souvenirs d'enfance peuplent mon esprit. Les pas de Leï résonnent à peine lorsqu'il se déplace, rangeant les tasses argentées disposées avec négligence sur la table.

— Votre thé a refroidit, lui fait-il remarquer.

Ce à quoi l'homme réagit à peine.

— Oh, aucune importance, marmonne ce dernier, appuyé de gestes laconiques.

Ses traits rigides gardent quelques traces juvéniles qui viennent adoucir le tout. Ses pupilles aussi claires que les miennes sont empreints d'une concentration tenace. Sa chevelure ébène retombe sur son front comme du lierre, en petites ondulations.

Sa masse musculaire est tout aussi imposante que n'importe quel alpha, quoique dissimulé sous son chino crème et sa chemise en soie blanche, et un polo aux motifs tribal.

— Vous n'avez toujours pas répondu aux messages de Heeseung.

C'est à peine s'il décroche de sa lecture. Leï poursuit.

— Il risque de mal de le prendre. Vous aviez promis de le faire et cela fait des mois monsieur.

— Je m'y mettrai ce soir même.

Il est si désinvolte que ça le décrédibilise. Je me demande combien de fois il a fait cette promesse.

— Je crains que ce ne soit trop tard.

— Ne soit pas si dramatique. Cela ne te ressemble pas.

— Il est là.

— Trêve de plaisanterie, ce n'est pas drôle.

— Je suis loin de me moquer de vous monsieur.

Et parce que je suis épuisé, j'interviens enfin.

Papa.

Il se fige. Les yeux en soucoupe, la surprise le prenant aux tripes. À un rythme d'escargot, mon père relâche la page qu'il comptait retourner. Je le fixe déglutir, le stress guidant ses membres, ses phéromones légèrement perturbés après avoir entendu ma voix.

Il pivote vers moi au ralenti, exposant les iris grises étincelant d'une certaine crainte. La ressemblance entre nous est frappante. Aussi, malgré son âge, son visage est loin d'avoir vieillis.

— Fiston, quelle surprise ! S'exclame-t-il.

Il lâche un rire nerveux. En effet, il est surpris, pris de court, une chose qu'il n'apprécie pas. Il s'approche en me prenant dans ses bras. Les sourcils pliés, je ne lui rend pas son étreinte.

Dans son dos, Leï m'indique en silence d'être indulgent avec lui. Malheureusement, je ne suis pas de son avis. Il est hors de question que je le ménage. Il se retire, me laissant seul avec mon père.

— Si j'avais su que tu viendrais, je t'aurai préparé une grande fête !

— Tu aurais surtout fuit à l'autre bout de la planète.

— Haha, tu as le sens de l'humour, comme ton père.

— J'ai à te parler, c'est important.

M'appuyant sur mes mots tranchants, je retire ses bras de mes épaules. Il n'a pas l'air si offusqué. Mon père s'est toujours montré maladroit avec sa descendance depuis ma tendre enfance.

— Ah, viens donc, installe toi. C'est un peu le désordre.

Et j'avoue qu'il y a bon nombres de choses que je lui reproche. Il a rarement été présent. La figure d'autorité sur laquelle j'ai du m'appuyer était son bras droit.

Il paraît qu'il est nécessaire qu'un alpha soit élevé comme il faut par un autre alpha aussi fort, voir plus que lui. Pour en faire un bon meneur et gérer sa puissance.

— Dis-moi tout.

Tiens, étonnant, il ne cherche pas d'excuse pour s'envoler cette fois-ci. Je n'attends pas alors et lui présente le dossier.

— Tu étais au courant de cette affaire ?

Le sourcil arqué, un fin sourire fend ses lèvres.

— Je remarque que tu n'as pas de temps à perdre.

Mon silence lui sert de réponses. Il jette un coup d'œil au papier. À cet instant précis, je mobilise mes sens pour lire ses réactions et déceler la moindre faille.

Quand bien même il entretient une relation bizarre avec ma mère, ça m'étonnerait qu'il n'ait pas été mit dans la confidence. Il feint l'ignorance avec maîtrise.

— Les meurtres à l'école abandonné. Je m'en souviens. Tu approchais de ta majorité.

Il s'égare.

— C'est la toute première version. Elle indique que sur les lieux, un renard a été retrouvé inconscient non loin des morts. Ce détail n'est pas mentionné dans le rapport officiel.

La chaleureuse ambiance qui nous enveloppait se désintègre au fil des minutes. Je m'appuie contre le dosseret de mon siège, lui lançant un regard glacial, annonçant le ton de la discussion.

Le silence s'étire jusqu'à ce que d'un coup, les phéromones implosent, déployant toute leur puissance, chacun cherchant à assoir sa dominance.

Moi qui me croyait incapable de me dresser contre mes parents, me retrouve animé d'un sentiment si fugace et incontrôlable. L'impression de brûler de l'intérieur, ma respiration devenant plus lente.

— Que veux-tu insinuer ?

— La meute de Lester est au courant ? L'affaire a beau être classée, ils sont toujours dessus. Alors...

Quelle est cette pulsion qui anime mon cœur ?

— ...Je me demandais...

Ma voix qui devient plus mesquine, les mots provocateurs expulsés du bout de mes lèvres.

— ... S'ils étaient bien au courant de tout.

Mais mon père n'en démord pas. Il arbore cette mine impénétrable, une maîtrise de lui-même à saluer.

— Je ne comprends pas pourquoi nous en parlons.

Que cachent ils à la fin ? Pourquoi mettre autant de mystère sur cette nuit ? Le fait que Sunoo soit mentionné me rend malade et me pousse à vouloir découvrir la vérité.

— C'était peut-être un oubli. Ou alors, la présence de ce renard n'était pas pertinente.

Sunoo était-il pourchassé par ces loups ? Il a parlé d'yeux flamboyants aperçu dans les bois. Mon père a conscience de ma persévérance qui ne compte pas se contenter de cette simple raison.

Nos odeurs sont si fortes, nous ne bougeons pas et pourtant, une bataille silencieuse est en cours. La rage me prend aux tripes, à tel point que je suis sans pitié, éjectant mes phéromones les plus violentes.

Il soutient mon regard sans flancher. Ses doigts se maintiennent aux accoudoirs de son siège. Mon odeur se renforce, sature l'air et devient plus épais, aussi lourd qu'il le faut pour l'étouffer. Je perds le contrôle.

Un éclat de surprise le traverse. Et peut-être que ça aurait dû m'interpeller. Je perçois les grognements gutturales de mon père, ses crocs aiguisés et ses griffes acérées qui se préparent à l'attaque.

Malgré le fait qu'il se dresse en face de moi telle une montagne majestueuse, incontournable et solide, je continue d'alourdir la pression.

Le décor qui nous entoure s'altère peu à peu, des flammes d'un rouge vermillon semblent flotter autour de nous, ou sous mes pieds. Quelle importance. Je suis juste déterminé à le faire flancher.

La température s'élève, ses doigts se resserrent.

— Heeseung, m'appele-t-il avec calme.

Comme si nous n'étions pas au cœur d'un combat qui oppose nos formes profondes. Un face à face invisible car il est n'est pas physique. Tout se joue au niveau des phéromones.

Je veux qu'il s'incline.

Je permets à la partie la plus cruelle, la plus brute de ma personne de me posséder. Une force plus sombre comme je ne l'avais jamais sentie, plus dangereuse et dévastatrice qui s'étend comme des ombres maléfiques.

Soumets-toi.

— Heeseung ! Entendé-je crier plus loin.

C'est assez flou. Je tourne lentement la tête vers un nouvel arrivant. Leï. Mon père pense profiter de ce moment de distraction pour me déstabiliser afin de me contrôler.

Je grogne, les vases explosent. Les jambes de Leï, fragilisées, n'arrivent plus à le soutenir. Il tremble et tombe à genoux, lâchant un gémissement plaintif. Mon père se précipite vers lui en quittant le combat, ce qui me met dans une rage folle.

Mon grondement rugit comme un coup de griffe qui déchire son dos. Il se retourne vivement, non sans rager, se défendant à coups de pattes violents. J'encaisse avec un rictus inquiétant, les blessures sur mon âme.

À croire que mon alpha n'attendait que ça. Se dresser contre mon père et ma mère. Un détail diffère aujourd'hui. Je le sens plus que jamais sous ma peau, réveillé, avide de pouvoir, de conquérir et se dresser contre toute autorité.

Lui qui ne s'était que peu manifesté par le passé ne s'est jamais montré aussi sanguinaire et soif de domination. J'ai ignoré les paroles de ma mère, or si elle avait raison ? C'est Sunoo, la cause de tout cela.

Plus il devient mien et plus ma puissance se renforce. Comme si mon renard me nourrissait, tirant des limbes du sommeil mon alpha afin qu'il retrouve ses forces délaissées au fil des ans.

— M-Monsieur... c-cessez de... commence Leï d'une voix tremblante.

La force de mon père s'amenuise au fil des secondes, troublé par l'inquiétude qu'il ressent envers l'homme qui m'a instruit.

— Heeseung... s'il-te-plait... implore ce dernier, à terre.

Il a eut raison de moi.

Immobile, je l'observe, soulevé par mon père qui se retire de notre affrontement. La sueur perle sur son visage, les muscles tendus comme s'il avait fournit le plus gros des efforts.

C'était un combat de phéromones alors les dégâts ne sont pas physiques. Je finis par me calmer. Les vagues houleuses et conflictuelles disparaissent.

Je ne supporterai pas qu'on touche à Sunoo. Mon estomac se resserre à l'idée. Je suis un peu sonné. Après tout, je viens de combattre mon père et ça laisse des séquelles au vu de son statut.

Je quitte la bibliothèque, suivant quand même ses traces. Son odeur me mène devant une porte. J'ouvre grand les oreilles, capturant les mots qu'il prononce. Il semble communiquer par téléphone.

— Tu ne comprends pas Garam ! La situation s'est empiré. Ce n'est qu'une question de temps.

Silence.

— Je verrai quoi faire de mon côté. Mais il faut s'attendre au pire.

Je m'éloigne de la porte après qu'il ait raccroché. Il faut être idiot pour penser que mes parents sont honnêtes. Tout me confirme qu'ils cachent bel et bien une chose.

Mon séjour en Norvège m'en a appris assez. Je ne peux me fier qu'à mes amis. Et mon renard. En descendant les marches, je croise Sheevan qui m'attend au rez-de-chaussée.

— Tu m'as l'air pressé. Tu comptais fuir sans me dire au-revoir ?

Je la rejoins en ralentissant la cadence. Elle porte un manteau brun, les doigts plongés dans ses poches.

— On fait un tour ? Propose-t-elle.

Je hoche la tête en silence et enfile mon manteau au col à fourrure. Il fait nuit dehors, je n'ai rien avalé, ma vision est un peu trouble et l'air frais est réparateur.

Nos pas s'enfoncent dans la neige, je n'arrête pas de penser à tout à l'heure. Quelques maux de têtes pointent le bout de leur nez. Le manque de Sunoo s'accroît. Mon renard me manque.

Il hante mes esprits. Je veux le protéger, créer un monde dans lequel il n'aura jamais à craindre qui que ce soit. C'est le mien et ce besoin de le revendiquer chaque jour me démange au niveau des crocs.

S'il était là, je l'aurai enfermé dans une puissante étreinte pour ne le lâcher qu'au lendemain. Je crois que je suis addict, besoin de ma dose quotidienne de Sunoo.

— Le ciel est magnifique.

Les lumières verdâtres dansent au milieu des étoiles. Les aurores boréales ne sont pas aussi visibles à Oslo. Néanmoins, en hiver, elles sont d'un charme mirifique.

Il m'est facile d'imaginer mon petit renard dans mes bras, fixées au balcon, devant une vision enchanteresse d'une telle beauté. On aura notre petit chez nous. Je voudrais un jour lui faire visiter mon pays.

— Tu sais, je ne pensais pas te revoir ici. Tu as arrêté de venir dès ta rentrée à la fac.

Je suis conscient que nous avions comme tradition de passer les congés d'hivers chez moi, entre appartements de luxe et pistes de ski ; avec un verre de vin chaud et des balades à cheval.

— Tu as changé Heeseung.

— Comment ça ? Dis-je, étonné.

Un doux sourire orne son visage. Sheevan replace une mèche rebelle derrière son oreille, l'air mystérieux.

— Tu ne t'en rend pas compte ? Tu es, différent. Tu dégages quelque chose de plus intense.

Je ne sais pas comment le prendre. Sa louve a-t-elle sentie quelque chose en rapport avec mes phéromones ? J'ai encore plus de mal à saisir la phrase qui vient compléter cette dernière.

— Ça donne envie de te suivre, et de s'en remettre à toi. 

Mais je n'ai pas le temps de rebondir dessus que je reçois un message.

Jay

Il faut que tu rentres. Ni-ki pète un câble.
J'ai pas assuré sur ce coup...
J'aurais dû écouter Jungwon...
Maintenant, à cause de moi, il sait tout.
Les types qui ont harcelé Jungwon...

Mon cœur bondit.










______________________

Oh oh ça dérape de partout 👀 l'alpha de Hee Hee qui se réveille, ça ne dit rien qui vaille.

Toujours aucune théorie sur l'école abandonnée ? 😇 Vous inquiétez pas si vous ne trouvez rien hehe

Que se passe-t-il avec Ni-ki ?

Je ne sais pas si vous avez remarqué le truc entre le chapitre précédent et celui-ci. On a l'univers de Sunoo, des couleurs chaudes, du orange, de la lumière, une ambiance un peu chill, bordélique, vivante...
Et de l'autre côté, l'univers épuré de Heeseung, des couleurs froides, un environnement luxueux calme et apaisant... v'là c'était mon petit kiff.

Ça manque de moments Heesun mais bon, pour l'avancé de l'intrigue 😔🤍 il le faut

Et JUNGKOOK LE PAPA ALPHA HAHA

À savoir : je sais que de base j'avais fais des allusions sur l'origine des loups ancestraux qui venaient de chine mais je me suis rendue compte que Heeseung est toujours chinois dans mes fics 😂 (dark Moon, tattoo) je dois innover. Je passerai sur les autres chapitres pour modifier ça mais du coup, bb alpha vient de la Norvège 😍 j'espère que ça vous plaît hehe (faites pas gaffe aux prénoms coréens, enjoy, c'est juste une fanfic 😣)

BREF MAMA Y A UNE SCÈNE DU HEESUN DEVANT J'AI TELLEMENT HÂTE DE LA POSTER. J'AI DES PAPILLONS DANS LE VENTRE RIEN QU'EN Y PENSANT BREF JE ME CASSE-

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