22. La vérité.








SUNOO.


C'était l'obscurité total.

Je ne pouvais pas sentir grand chose, ni me lever. J'étais abattu, coincé dans la noirceur à entendre le silence me narguer. J'avais perdu toute sensation, dans un espace où plus rien n'existait. Le temps est passé, je ne sais pas combien. Le silence s'est éternisé, jusqu'à ce que j'eus enfin l'impression d'émerger.

Le décor auquel j'ai été confronté en rouvrant les yeux ne m'a pas surpris. Parce que j'ai senti son odeur de partout. J'ai donc jugé que j'étais chez lui. Je me suis naturellement blotti dans une couverture. C'était confortable, et ça tenait au chaud alors, je n'ai pas hésité. Et puis, ne pas m'exposer à la lumière à mon réveil a été un soulagement.

C'est chaleureux à l'intérieur. Ça m'a fait tout drôle de ressentir à nouveau mes membres. J'ai réussi à tomber en voulant me lever. Je me suis laissé glisser contre le pieds du lit, tête baissée et soupirant de désespoir.

Je suppose que ça devait arriver. N'empêche, jamais je n'aurais imaginé retourner dans cet endroit un jour. Je n'ai pas de souvenirs clairs. Mais, impossible d'oublier la forme monstrueuse du bâtiment délabré.

J'aurais peut-être rit, comme pour dédramatiser la chose. Mais ce n'est pas la joie. J'ai pas très envie de sourire. Ça m'aurait arrangé de passer la soirée d'Halloween sans qu'une terreur d'enfance ne revienne.

C'est chiant. Et mon téléphone qui sonne ne fait que me rappeler le moment fatidique. Je suppose que lui aussi, l'a vu.

Heeseung.

Il sait tout maintenant. Si j'avais parié qu'avant la fin du premier semestre j'aurais étalé ma vie à un loup géant, je me serais dit que c'était impossible. Est-ce qu'il va trouver ça bizarre ? En soit, je m'en fiche de ce qu'il pense.

Le fait est que, à tout moment, mes chaleurs déclenchent ses ruts. Comme la première fois dans son appartement. Il m'avait retrouvé un soir, m'a-t-il dit. C'était mon dernier jour des chaleurs. Malgré le venum ingurgité, il a suffit qu'il me touche pour que tout dérape. Et vu ce qui s'est passé dans mon dortoir, je n'ai pas très envie de retenter l'expérience.

Il se détache de moi. Lentement par contre. Ça ne me plaît pas trop. J'étais bien au chaud dans... ses bras. Enfin, non, pas dans ce sens là. Je veux dire, oh j'abandonne. Je suis trop fatigué pour m'offusquer de mes pensées. Alors, on va dire que c'est un moment de faiblesse.

— Tu as des chaleurs, c'est bien ça ? Me demande-t-il.

Sa question est suffisante pour que j'esquive la discussion. Je détourne le regard et cherche à m'éloigner de lui. On ne va pas parler de ça. Ça reste une partie de ma vie privée. On discute peut-être, sans moins d'hostilité de ma part comme au début, mais ce n'est pas pour autant que j'irai me confier comme si on se connaissait depuis des années.

Quoique, j'ai parfois cette impression avec lui. L'impression qu'il m'est familier. 

Juste un air vague comme ça.

Je m'arrête dans ma lancée en remarquant sa main accrochée à la couverture que j'utilise toujours. Je croise son regard ferme mais aussi avide d'en savoir plus.

— Je n'ai rien d'autre à dire.

Je m'attends à ce qu'il me lâche mais ce n'est pas le cas. Après, pourquoi être surpris ? Il fourre son nez dans ma vie depuis qu'on s'est rencontré. Sa curiosité ne m'étonne pas. Je ne me laisse pas démonter pour autant.

Je veux me lever, or sa main émet une pression suffisante qui me pousse à reposer mes fesses dans l'immédiat. Un hoquet de surprise m'échappe. Il est fort alors je ne peux pas grand chose. Mon regard mauvais l'agresse.

— Qu'est-ce que tu fous ?

Je suppose que ça lui brûle les lèvres de savoir pourquoi une renarde et non un renard ? Ce que ça implique que malgré mon statut d'homme, j'ai des chaleurs et non des ruts ? J'imagine bien les types de questions farfelues qui doivent le traverser.

Ça doit être déroutant. Je n'ai pas envie de nourrir sa curiosité. Je veux juste rentrer chez moi.

— Tu as paniqué. Pourquoi ?

Je déglutis, mes yeux s'écarquillant plus que nécessaire. Je ne m'étais pas attendu à cette question là. Moi qui croyais qu'il serait plus perplexe à cause de ma renarde. C'est une question à laquelle je veux encore moins répondre.

J'aurais au final préféré qu'il étale une curiosité malsaine autour de ma nature. Pas ça.

— Ça ne te regarde pas.

Je tente de partir mais cette fois-ci, sa main entoure mon poignet. Je grimace malgré moi à cause la rude prise. À quoi est-ce qu'il joue à la fin ?

Heeseung me coince contre le pieds du lit, ne me laissant aucune faille pour m'échapper. Je le fixe, un peu inquiet. J'aime pas ça. Nous sommes seuls, dans une pièce qui porte son odeur et qui doit être la sienne, je suppose.

Mais ce que je n'aime surtout pas, ce sont ses yeux. La seule chose de rassurant est le gris de glace qui ressemble à des morceaux de verre dans le noir. Au moins, je sais que ce n'est pas l'alpha. Malgré tout, son regard reste dur. Je l'ai rarement vu avec une expression pareille. Rien avoir avec le loup obsédé qui me poursuit d'habitude.

L'odeur de cèdre m'enveloppe. Elle se mêle à l'ambre. Je me mord l'intérieur de la joue, je ne sens que ça, et c'est agréable malgré moi. N'empêche, son odeur s'impose un peu trop. Non, Sunoo, non, concentre-toi. Je me demande s'il ne fait pas exprès de diffuser son odeur pour me déconcentrer.

Je ne dois pas me faire avoir. Je tente de retirer mon bras de son emprise. Mais force est de constater que je suis faible. Face à lui, du moins. Il ne bouge pas d'un iota.

— Qu'est-ce qui te prend à la fin ?

— Tu ne réponds pas.

Pardon ? Je cligne des yeux.

— Peut-être parce que je ne veux pas le faire ? En quoi ça te regarde ?

— Tout de toi me concerne.

Non, je laissais peut-être passer avant mais pas ce soir. Je n'aime pas son ton exigeant, sa manie de me voir comme acquis. Je ne lui appartient pas bordel, je ne veux ressentir aucune émotion d'appartenance !

— Ah ouais ? Et qui l'a décidé ? Craché-je méchamment.

Moi.

Ce n'est pas vrai... il ne peut pas me faire ça n'est-ce pas ? J'arrête de lutter contre sa main immobile. Il m'agace au plus haut point.

— Et voilà la véritable nature des prédateurs dévoilée au grand jour...

Mon ton est mesquin, dans l'unique but d'injecter du venin à la situation. Pourtant, la petite pique n'a pas l'effet désiré. Son regard n'en demore pas, reste plat. Des vagues d'apparence calmes. Or dans ses yeux, quelque chose de féroce y gronde.

Ça me déstabilise.

— Ça n'a rien de drôle comme situation.

Une rage soudaine me monte à la tête.

— Mais bordel, puisque je te dis que ça ne te regarde pas ! Laisse-moi partir.

Il se rapproche brusquement, provoquant la coupure temporaire de ma respiration. J'ai beau hausser le ton tout à l'heure, une certaine crainte demeure quelque part en moi.

Son visage est proche, bien trop proche.

— Réponds-moi.

Son souffle me heurte. Des secondes s'écoulent, je suis surpris que son ton ait légèrement changé. Que malgré la dureté dans la façon dont il me fixe, il a tenté d'être plus doux. Je n'aime pas ça. Je me sens inconfortable tout d'un coup. Je n'ai qu'une envie, me tirer de là.

Il prend trop d'espace. Je réfléchis rapidement à un mensonge pour qu'il me lâche.

— C'était pas la joie ok ? Dis-je sous le coup de la frustration. C'est pas tous les jours que ça va.

Il y a un moment de silence. Un moment selon laquelle j'espère avoir été le plus crédible possible. Je n'ai pas envie d'en parler, encore moins y penser. Plus ça reste enfouis, mieux c'est. Et j'y crois ; je survis non ? Ça sert à quoi de s'assoir autour du thé et parler de ces choses ?

Mon épaule est soudain compressé par Heeseung. Je couine malgré moi, parce que étant une proie, je ne peux pas m'empêcher de frémir, intimidé. C'est une loi de la nature. Ça aussi c'est agaçant. Je ressemble à une souris coincée dans ses griffes. Je ferme les yeux pour ne pas le regarder.

— Il arrive qu'une situation stressante nous pousse à nous transformer, contre notre volonté.

Mon souffle se coupe. Bon sang non, arrête de parler.

— Souvent parce qu'on fait face à une situation soudaine et traumatisante.

Traumatisante, le mot me fait déglutir et me donne envie de vomir. Je ne suis pas traumatisé. Je ne veux pas de compassion. C'était chiant comme moment, je l'ai pas vraiment digéré ok. Mais ça me gêne d'en parler. Il faut que je m'en aille.

Or je bouge à peine. Sa prise est trop forte pour que je lutte contre. Mes poils se hérissent et ressortent malgré moi, mon corps me croyant en danger. Ça n'a pas l'air de l'alerter, ni de l'arrêter.

Au contraire, son front se colle contre le mien. J'ouvre les yeux de surprise.

Je suis sous le choc devant son visage.

— C'est le cerveau qui prend cette décision, pour éviter un choc mortel.

Sa rétine est d'une lueur rougeâtre. Un peu faible, mais présente quand même. Je me rend alors compte d'à quel point il devient de plus en plus compliqué de respirer. Cette chaleur que j'appréciais au début, commence à devenir étouffante.

Une lourdeur compresse ma poitrine. Le souffle de Heeseung devient plus lent, plus bruyant et plus chaud. À croire qu'une braise se trouve dans son corps ; que de la lave pourrait couler de ses pupilles carmins.

— Tu... t'es pas dans ton état normal.

Je tente de lui signaler. Pour qu'il reprenne ses esprits et arrête d'augmenter la température ! Et surtout, qu'il s'éloigne. 

Mais c'est tout le contraire. Ce qui m'effraie, c'est le sourire temporaire qui étire ses lèvres. Il baisse les yeux, et alors je ne vois plus le sourire. Les mots semblent collés à sa langue, il les broie de façon lente, avant que ces derniers ne se décollent et me parviennent jusqu'aux oreilles.

— Au contraire... je n'ai jamais été aussi lucide.

Je garde mes jambes serrées. La sueur coule de mon menton. Ma respiration est saccadée, mes doigts se replient. Ce n'est plus du plaisir que je ressens, comme les rares fois où il y avait ces effluves épicés dans les airs. Mais un malaise.

Une force invisible écrase mes organes. Doucement, il attrape mon menton et m'oblige à croiser son regard.

Ses iris totalement rouges.

Je me répète mais, ce n'est pas comme l'autre fois. La fois où il donnait l'impression d'avoir été possédé, et qu'il n'était plus maître de ses actes. Que sa conscience s'en était allé, laissant place à l'alpha. J'ai l'impression qu'il est toujours là, avec moi. Malgré la couleur évidente de ses yeux.

Je me sens sondé, analysé. C'est comme si on forçait une barrière en moi.

— Alors réponds-moi, honnêtement.

— Je ne veux pas...

Je secoue la tête. Du moins, j'ai essayé malgré le fait qu'il maintienne mon visage.

— Pourquoi ? Tente-t-il de comprendre.

— Parce que c'est débile.

Il perds son temps. Ce n'est rien de plus qu'une histoire un peu triste, voilà.

— Ce n'est pas débile si ça te met dans cet état.

— Qu'est-ce que t'en sais ?

Je ne peux pas m'empêcher de me montrer aigre. De vouloir fuir son regard mais notre contact visuel perdure. Il lit tout dans mes yeux.

— Quelqu'un t'as fais pensé que c'était débile ?

Je déglutis difficilement, ne respirant que ses phéromones à chaque bouchée d'air.

— C'est... non, mais, ça l'est, dis-je, confus.

Mes sourcils se froncent. Mon ventre se tord d'angoisse. Je ne suis plus sûr de ce que je pense.

— Quelqu'un t'as fais du mal ?

Je me braque. Je ne l'avais pas remarqué mais à présent, je me rends compte d'une chose. Heeseung est en colère. Il donne l'apparence d'être calme et pourtant, j'ai l'impression qu'il se retient d'exploser. Sa voix tombe dans le grave à sa question. Le choc m'empêche de répondre en premier temps.

C'est son regard insistant qui me ramène à la réalité. Le fait que ses pupilles s'écarquillent de façon dangereuse me fait reprendre conscience.

— Non ! Crié-je, comme si le dire à voix basse ne serait pas suffisant.

Il n'y a rien. Je ne veux juste rien dire. C'est suffisant comme raison. Or son regard me rend la tâche difficile. J'ai l'impression de me faire sermonner. S'il ne me parlait pas avec autant de douceur, j'aurais juste disparu.

— Il n'y a rien.

Il sait que je mens, parce que ma voix vacille, montre à quel point je ne suis pas sûr de ce que je dis. Son regard est projeté dans le mien. Mon piètre mensonge ne passe pas.

Mon cœur lâche de façon soudaine, durant quelques tierces avant de redémarrer, lorsque la main qui plaquait mon épaule redescend jusqu'à ma paume. Il glisse son pouce entre chacun de mes doigts, répétant le geste plusieurs fois. Ça me détend. Je n'y peux rien, c'est quelque chose qui me calme malgré moi.

Je veux tourner la tête mais impossible. Son regard parle pour lui-même. Son geste tempère une quelconque seconde panique qui pointerait le bout du nez. Je n'aime pas paraître faible devant les autres. Surtout devant un super prédateur. Ce sont toujours des failles que les gens exploitent.

Et ce monde est un monde de survie pour être honnête. Je ne veux pas parler du fait d'être loin en bas dans la chaîne alimentaire.

Mais du fait d'avoir des chaleurs.

— J'ai... le souffle m'échappe.

J'ouvre la bouche mais la referme aussitôt.

— Ne t'arrête pas, insiste Heeseung.

— J'ai eus mes premières... les premières chaleurs là bas.

Halloween n'est pas un bon souvenir. L'histoire du garçon effronté qui se battait contre tout le monde. Lorsque j'étais jeune et que mon cas a été découvert, les médecins n'avaient aucune idée de quoi faire. Cependant, on doutait sur le fait que je sois fécond comme les femelles ou pas. Et l'être implique des chaleurs.

Après tout, je reste un garçon. Il n'y avait juste qu'à attendre. Attendre de voir comment ça ira vers l'âge adulte. Je me suis normalement développé et j'ai vécu comme un garçon. J'en suis un. Et puis, est venu l'étape de l'adolescence. Mes quatorze ans. Une soirée d'Halloween à gambader dans la forêt à cause d'un mauvais plan en groupe.

Les fortes douleurs m'ont surpris en pleine course. Je me suis perdu. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Ce n'était pas agréable.

Il accentue les caresses entre mes doigts, ajoutant quelques cercles imaginaires dans ma paume qui me gardent détendu. Tout comme son odeur qui s'est imposé en maître. J'ai l'horrible envie de détourner la tête.

— Il y avait une espèce de bête dans cette forêt.

Heeseung s'arrête. Il a l'air crispé. Pour ma part, je crache tout. Mon cœur frappe violemment contre ma poitrine. Une gêne s'installe en moi. Ça me fait bizarre de raconter ça. Comme si je passais par un passage étroit qui me comprime et me force à faire demi-tour.

Mais parce que le loup ne me laisse pas fuir, je force pour la première fois les mots à dépasser la barrière malgré le fait qu'ils m'écorchent à leur passage.

— Je me suis réfugié dans ce bâtiment.

Et d'une certaine façon...

— Je ne me rappelle plus de la suite.

...c'est comme si j'enlevais du poids.

Je crois avoir perdu connaissance ce jour là. Spécialement à cause des douleurs. Parce que les chaleurs c'est avant tout de violentes crampes. Si elles sont associées au sexe, c'est parce que les phéromones des mâles peuvent aider à détendre les nerfs, ces derniers restent hypersensibles. Le plaisir nait de là.

Sans se presser, Heeseung lâche mon menton. Mon regard s'effondre aussitôt. Je préfère fixer le vide plutôt que soutenir une seconde de plus son regard. J'ai revu mes parents au réveil. Je ne sais pas comment ils m'ont retrouvé. J'allais bien en rouvrant les yeux, juste un peu secoué par les crampes.

À ce jour là, j'ai compris qu'en plus d'être une proie, le fait d'avoir des chaleurs faisait de moi une cible pour n'importe quel mâle mal intentionné. Ma méfiance s'est accrue au point de me rendre fou. Il fallait que je devienne le plus fort possible.

Je sens un truc bizarre d'un coup, mes pensées s'arrêtent. Il y a un moment de latence.

Et d'un coup, la pression augmente.

Elle est furieuse, oppressante. J'ai l'impression d'étouffer pendant quelques secondes. Je relève brusquement la tête et me fige. Les pupilles de Heeseung donnent l'impression de s'embraser. Son regard se noircis plus que jamais. Et je ne comprends pas la raison. Il voulait savoir, alors, je lui ais tout dit.

Mais là, il est plus qu'en colère.

Je m'inquiète. À savoir si c'est à cause de moi.

— Hee—... le reste de son prénom meure sur mes lèvres.

On t'as touché ?

Mes sourcils se froncent. Sa voix... elle est de nouveau inhumaine. Comme la dernière fois. Comme quelque chose qui gronde férocement en dessous d'elle. J'ai d'abord du mal à comprendre sa question. Si on m'a touché...

— Personne ne m'a tou—...

Je termine à peine ma phrase que je crois savoir de quoi il parle. Je le ressens dans les phéromones qu'il déploie, son impatience. Il attend une réponse. Je secoue négativement la tête.

— Non, je, non.

Je n'ai jamais subit d'agression de ce genre. Je suppose que c'est ce qu'il veut savoir. La colère de Heeseung ne tarit pas. J'ai malgré moi la forte envie de tout lui dire.

— Ce n'est jamais arrivé, dis-je en voulant être plus rassurant.

À vrai dire, dans toute cette histoire, c'est juste cette drôle de bête ce soir là qui m'a effrayé. Mes parents disent que c'était peut-être une hallucination causé par la douleur. Les premières chaleurs sont toujours les plus douloureuses.

Mais comment peut-on imaginer des billes rouges aussi glaciales dans la pénombre de la nuit ? Cette masse sombre et effroyable à l'aura écrasante qui m'a fait prendre conscience de mes faiblesses, qui a longtemps hanté le gamin que j'étais.

J'ai finis par me persuader qu'il ne s'agissait véritablement que de mon imagination. Pourtant, cette nuit là, caché dans une salle de classe poussiéreuse de l'école abandonnée, j'ai entendu des grognements.

Mes souvenirs restent flous. C'est impossible d'avoir des images exactes. Et tant mieux, j'ai tout fait pour les enfouir. Ils sont porteur d'effroie.

Et la colère de Heeseung empire la situation en voulant les déterrer. Il m'a lâché la main et le visage. Alors, timidement, je tâte son vêtement. Mon geste est timide, parce que j'ai l'impression d'être un demandeur d'attention. Et ça me gêne. Ça me fous la gêne du siècle.

Or ce qui m'énerve encore plus c'est de sentir sa colère pesante. Lorsque je touche son bras, et que mes doigts s'accrochent au tissu de sa manche, j'ai sens qu'il y a plus. Beaucoup plus. Un profond mélange de jalousie acide qui perfore sa peau.

À croire que je peux entendre sa voix gronder, dans mon esprit; sentir ce qui l'anime, là.

Une profonde haine.

— Hé euh... écoute-moi...

Je parle bas sans m'en rendre compte, secouant ses bras. Ils bougent à peine. Mon instinct qui me hurle de tout lui dire, qu'il est digne de confiance. 

Soudain, il me serre si fort dans ses bras, comme si j'allais m'envoler. Je ne comprends pas. Son visage plonge dans mes cheveux. Je le sens humer mon odeur avec force. Je frissonne de la tête aux pieds. C'est, je suis perdu. Enfin, non. C'est, c'est agréable.

Son étreinte est purement possessive.

Il n'a pas beaucoup parlé, ses gestes en revanche sont beaucoup plus expressifs. Je le laisse faire, laissant ma tête reposer contre son épaule. En fait, je suis juste fatigué, dans les vapes à cause des violentes phéromones de Heeseung qui me font tourner la tête.

Je lui ais tout dit. Je ne réalise pas encore. Je n'ai pas peur sur le champ. Tout ce que je ressens, c'est un certain soulagement. Peut-être parce que les mots ont coulé plus facilement d'entre mes lèvres. J'ai été mal à l'aise au début. Au final, ce n'était pas si désagréable. Et, j'aurais pas aimé l'entendre me sortir des mots de consolation. J'ai horreur de ça.

Sa meilleure réponse est son étreinte. C'est tout ce dont on a besoin en soit. Je me fiche du reste. Il n'y a eut aucun commentaire et je préfère ça. C'est peut-être à cause de ses phéromones que je suis plus calme que je ne l'espérais. J'en sais rien. Je ne veux pas trop réfléchir.

Alors j'arrête de le faire.

Heeseung respire chaque morceau de mon corps. Son visage se frotte contre mes cheveux. Sa main remonte lentement et s'agrippe à ma nuque. Chacun de ses gestes ne transmet qu'un message. Une sorte de protection. Des frissons me parcourent.

Ça se répète dans ma tête, je suis à lui.

Mes paupières s'affaissent peu à peu, mais pas complétement. Je me cambre sous ses caresses, ses doigts qui glisse entre mes cheveux, puis descendent dans le creux de ma nuque. L'échine me foudroie.

Les choses ont commencé à devenir alarmant quand j'ai déplié mes jambes, les passant au dessus des siennes, rien que dans le but de me rapprocher de lui. Doucement, mes bras l'enserrent à mon tour. Je ferme les yeux un instant, puis me noie dans son odeur.

Mon corps est traversé de petits soubresauts, des papillons virevoltent dans mon estomac. Je suis comme secoué de décharges électriques à petite dose. C'est dans cet état second que je l'entends, cette seconde voix, inhumaine, provenant de son loup.

Mon renard.

***

Je. Suis. Mort. De. Gêne.

— Arrête de faire la tête Sunoo, souffle Jake à côté de moi.

— C'est pas toi qui enlaçait un mec comme si vous étiez en couple ! Crié-je à mon tour.

Rien qu'à y penser, je me fige. C'est pas possible. On va dire que c'étaient les phéromones ok ? Je venais à peine de me réveiller, j'avais pas toute ma tête.

C'est complètement faux.

Je me frotte le visage. Il y a des trucs intimes, mais tellement intimes qui existent dans le monde. Un câlin comme ça, c'est super intime.

— En soit, il est amoureux de toi.

— Oui mais... !

Oui mais rien du tout. Je n'ai pas d'arguments. Je finis par soupirer et me laisser glisser contre le mur. Lee Heeseung sait tout maintenant. Il sait beaucoup de choses sur moi d'ailleurs. C'est inhabituel. C'est inquiétant.

Cependant, je me surprend à ne pas être super vigilent et sur mes gardes. Que je veuille le reconnaître ou non, il procure un sentiment apaisant.

J'ai quitté leur maison ce matin. Leur maison qui est celle dont a parlé le camionneur quand Jake roulait le soir d'halloween. La famille super aisée, la propriété qui s'étend sur toute la montagne, tout ça appartient aux Lee. Sacré fortune. Je suis heureux de savoir que Jake est resté.

Nous sommes partis et nous avons traîné au lieu d'assister aux cours. C'est la première fois qu'il sèche avec moi. Mais on en avait besoin. Nous avons déambulé dans la rue de la chapelle, devant les boutiques aux vitrines lumineuses qui préparent déjà la fête du père Forest. 

Soudain, une voiture s'arrête en face de nous. Rien qu'en voyant la carrosserie, un sourire s'étale sur mes lèvres.

— Il est là, dis-je à Jake.

Ce dernier hoche la tête et se lève. Pendant que moi, je vais à la rencontre de l'homme qui sort de sa voiture.

— Oncle Kurl !

Ça fait si longtemps qu'on ne l'avait plus revu, Jake et moi.

JAY.

Jamais je n'avais vu Heeseung dans cet état.

Aussi accablé et prêt à se déverser sur la première personne qui s'approcherait un peu trop de lui. Je ne sais pas s'il est conscient de la tension qu'il a imposé. Seul Sunghoon se tient à côté de lui, imperturbable.

Depuis quelques temps, j'avais remarqué un changement.

Mais je comprends mieux à présent. Heeseung, il est devenu son alpha. Est-il le mien aussi ? Mon regard navigue sur les lignes dans ma main. Bien sûr que non. Je suis trop sourd pour entendre son appel. La preuve, il s'est passé tellement de choses que j'ai raté.

À aucun moment je n'étais là. Peut-être qu'il faut plus de temps ? Peut-être que le prochain à être appelé sera moi ? Je suivrai Heeseung aveuglément. Peut-être que, je dois juster patienter. Pour entendre sa voix. Ou alors...

— Voilà, tu sais tout à présent.

...c'est qu'il ne compte pas le faire.

Je me redresse, croisant de nouveau les regards à Sunghoon et Heeseung. Une petite distance nous sépare. Je déglutis. Non Jay, ce n'est pas le moment de penser à ça. Je reprend contenance. Mes poings se resserrent à mon insu.

— Du coup, on fait quoi maintenant ?

Sunghoon demeure impassible. C'est lui qui me répond.

— Les rapports n'ont jamais mentionné la présence d'un renard ce jour là. Tout ce qu'il y a d'inscrit concerne les quelques loups présents ont été éradiqués par une bête d'une puissance phénoménale.

Le regard de Heeseung s'assombrit plus que jamais. Je ne sais pas à quoi il pense. Mais il est bien trop calme. D'habitude, il explose de rage. Le fait qu'il reste aussi pensif est plus inquiétant.

— Qu'est-ce que ça veut dire ?

— C'est simple, réplique Sunghoon. Nous pensons que l'affaire a été étouffée. Le véritable rapport a du être conservé quelque part.

C'est possible. Quand on prend du recul, il y a pas mal de mystère autour.

— Ta famille s'occupe des trucs de ce genre, je reprends. Tu devrais demander à ton père. Peut-être qu'il a une idée de—

Jay.

Je me tais. Heeseung se lève enfin. Ce n'est plus pareil. Quelque chose a changé dans sa voix. Mais aussi, dans sa posture. Quand il m'a appelé, tous mes membres se sont mobilisés. J'aurais du m'en rendre compte depuis le début. J'étais trop ailleurs.

À cause de ça, j'ai raté tellement de choses. Heeseung est devenu comme Lysandre, comme tous ces loups qui se démarquent au sein de la meute pour prouver leur valeur aux yeux de notre Alpha.

Est-ce que ça veut dire que notre amitié à changé ? Je me tend malgré moi lorsqu'il pose ses deux mains sur mes épaules.

— À part Kang et Namjoon, la seule personne en qui ma mère a confiance, c'est la tienne.

Nos mères sont les meilleures amies du monde depuis toutes petites. Inséparables, bien avant même que nous ne naissions. Il est vrai que l'Alpha pourrait lui confier un tel document.

— Tu veux que...

— Ramène moi ce papier.

Je hoche lentement la tête tandis qu'il me lâche. Ses yeux sont devenus si mystérieux, moins expressifs. Comme si à présent, ses pensées étaient scellées. Je ne peux plus savoir à quoi il pense. Il me dépasse, suivit de Sunghoon qui emboîte naturellement ses pas.

Et moi, je les trouve si loin de moi. Un fossé qui se creuse entre nous. Je veux que ce soit juste mon imagination. Et pas la fin de quelque chose.










__________________

Je suis un peu stressée en postant. Je ne peux pas me dire exactement si ce chapitre est bien ou pas. 😣

Vos avis sur la discussion entre Heeseung et Sunoo ?

Les sentiments de Jay ?

Si vous vous rappelez bien, Sunoo a mentionné au premier chapitre avoir été confronté à une bête un soir d'halloween. J'avais tellement peur que vous fassiez le lien quand Heeseung en a parlé ! Mais personne n'a cala 😂💔

Après, le mystère reste entier.

On se retrouve dimanche pour le prochain chapitre. 😊 Je l'aime beaucoup ! Emojis spoil : 🥰📷❄️




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