XVIII 🪻 Ainsi devint
XVIII
Ainsi devint
Grand océan, archipel pirate, Cap Fortune
Le passage naturel au milieu de la falaise était étonnant. Il se rapprochait du rivage avant de s'engouffrer dans la pierre. Mais il fallait le savoir pour le voir. Ce n'est pas visible mais quand on y était, tout devenait clair. Hyacinthe tenait toujours par la main Le Roux et l'entraînait à sa suite.
– Et, on va y aller comment pour leur foutre une bonne raclée ? Fit Faveur en les suivant.
– Comment ? A la nage, elle répondit avec un certain sérieux, dans la voix uniquement.
Sur son visage que la jeune capitaine de pouvait pas voir, se trouvait un sourire amusé.
– Pardon ? C'est une blague ?!?
Toujours aussi dramatique dans ses réactions, ça ne changeait pas. Elle devait tirer une de ses têtes derrière elle.
– Oui, Faveur. A ton avis, on rejoint comment un ennemi en pleine mer.
– Parce que tu vas nous faire croire que tu as un navire maintenant ?
– Au fond de la mer, y en a même deux qui me reviennent.
– Arrête de te foutre de moi Hyacinthe, c'est même plus drôle ton jeu.
Hyacinthe continua d'avancer en suivant le sentier à l'abandon au milieu de la falaise. La mer était juste à côté, il y avait même moyen d'y descendre, ils trouveraient de l'autre côté un escalier casser dans la roche. Elle le prit en prenant une grande inspiration et ignorant la jeune capitaine qui racontait qu'ils ne seraient jamais assez d'eux trois. Ce qui n'était pas faux à moins qu'elle ne claque des doigts, sauf qu'elle ne pouvait pas en abuser, la magie nécessitait d'être en forme, cela épuisait le corps et l'esprit. L'eau frappait le rocher et suivit le passage qui montait dans la roche avant de déboucher sur la crypte couverte. Cela faisait un bout de temps qu'elle n'avait pas posé un pied dans ce repère. Quoiqu'elle fût quand même venue avant leur départ en quête de Nébuleuse.
Sauf que tout avait changé.
Amarrer au quai sec plus en haut, se tenait toujours bien là le navire qu'elle connaissait que trop bien. Sur la coque était noté "Jade Rouge". Une petite caravelle maintenue hors de l'eau par de solides poutre. Les hommes de son père l'avaient sorti de l'eau pour ne pas que la dernière bâtisse de cette flotte ne s'abîme à rester sur le quai plus en bas dans l'eau turquoise.
Puis ce silence de mort qui avait disparu lui aussi. Un silence qui était remplacé par la vie, le bruit des caisses et tonneaux transporté, les pas sur le pont. Ses yeux lui piquaient de voir tout cela bouger à nouveau. Sa gorge se noyait d'émotions. La main de Le Roux serra un peu plus la sienne.
– Je vois pourquoi mon parrain aimait cette vie...
La surprise était de taille pour Faveur qui découvrait les lieux insolites et hors du temps, elle ne savait plus où donner de la tête.
De l'autre côté de la crypte se trouvait une sorte de maison complètement ouverte, elle apercevait un salon, une cuisine et une salle à manger, des espaces cachés. C'était impressionnant toutes ses plateformes dans la pierre qui pouvait accueillir du monde. Hyacinthe se tint derrière elle.
– Un temps, ce fut ma maison... Marmonna-t-elle.
Il y avait aussi des voix qui chantaient en cœur pour donner du rythme à leur travail. Une dizaine d'hommes étaient occupés à préparer le navire. L'un d'entre eux n'était autre que Théon, nouvelle surprise pour Faveur. Il se tourna pour les observer avec un immense sourire. Il cria et cela résonna.
– Le capitaine est arrivé !
Tous se stoppèrent pour les regarder après avoir crié l'information avec joie. Hyacinthe déglutit et avança à grands pas jusqu'à la plaque en bois qui reliait le quai haut au pont. Elle s'arrêta au-dessus de la rambarde en fixant tout ce petit monde. Ils étaient tous là. Cela devait faire un moment qu'ils étaient au travail sur la vieille coque de bois.
Presque comme un seul homme, ils posèrent un genou à terre et un poing sur le cœur. Hyacinthe déglutit, à ses côtés Faveur était impressionné par une telle dévotion. La serveuse déglutit. Son regard parcouru la crypte aménagée en repère de pirates, il fut un temps où elle y avait vécu entre deux sorties en mer. Ce lieu n'était autre que le quartier général de son père et ce qui s'apparentait le plus à une maison pour elle. Sa vraie maison.
– Membres de la flotte des Trois Jade ! Elle tonna. Moi, Hyacinthe, fille d'Aurel, vous demande de mettre entre mes mains votre vie et je vous promets que toujours vous rentrerez chez vous. Comme mon père vous l'a promis avant moi. Aujourd'hui nous partirons sur le front ! Que ceux qui veuillent me suivent ! Nous avons un ennemi, celui qui a tenté de nous détruire. Montrons à ce monde qui est l'équipage plus robuste !
Théon se leva et s'approcha un grand chapeau blanc entre ses mains dont le côté gauche était relevé et maintenu par un gros nœud rose avec des fleurs de tissus accompagnés des plumes de paons courtes et teintées en rose. L'homme d'une trentaine d'années tendit à la jeune femme le bien précieux.
– Est-ce que tu le veux bien cette fois-ci ?
Elle se revit trois ans plutôt, le jour de ses dix-huit ans, ils avaient tous déboulé à la taverne alors qu'ils fermaient. Ils avaient attendu puis lui avait demandé de prendre la place de son père. Théoriquement, elle était le capitaine du Jade Rouge puis toujours mais trop jeune pour une telle place, Théon la tenait pour lui. Mais cet anniversaire, c'est le passage de flambeau et elle devenait le capitaine. Et plus, elle était la commandante des Trois Jades avec le décès de son père. C'était lui qui avait décidé.
Son désormais second lui avait tendu le chapeau blanc en lui demandant d'accepter.
– Non, je refuse.
– Hyacinthe, c'est la volonté de ton père, il t'a fait son héritière.
– Et bien, en tant que votre capitaine mes amis, je vous souhaite bon vent. Les Trois Jades c'est terminé.
Ils lui avaient juré fidélité éternelle avant de se retirer. Elle n'avait même pas pris leur présent. Une fois seule, Hyacinthe avait fondu en larmes.
Elle le prit en le remerciant d'un geste de la tête. Hyacinthe d'un grand mouvement ample et délicat à la fois, se coiffa du chapeau sous les hurlements de joies de ses matelots qui applaudissaient.
– On a placé ta malle dans la cabine, l'informa Théon. Tu as juste le temps de te changer pendant qu'on termine de préparer le bâtiment.
– Appelle-moi quand vous avez terminé.
– Je vais leur donner un coup de main, fit Le Roux.
D'une main, il lui retira son chapeau et se pencha pour déposer un baiser léger comme une plume sur ses lèvres.
– Heureux de vous retrouver enfin commande.
Il partit en riant vers le petit équipage. Ils étaient si peu nombreux désormais. Enfin ils n'avaient pas besoin d'être nombreux non plus. Hyacinthe fit signe à Faveur de la suivre. La jeune fille bouillonnait de question et elles seraient au calme dans la cabine.
– Ferme derrière nous.
Elle obtempéra pendant que Hyacinthe s'approchait de la malle peinte par sa mère. Ses doigts effleuraient les fleurs, des jacinthes, et les lettres de son prénom.
– Il est magnifique...
– Oui, c'est l'œuvre de ma mère...
– Tu ne parles jamais d'elle. Enfin tu ne parles jamais de toi tout court.
– Elle est morte bien avant mon père... C'était une artiste dans l'âme. Elle avait choisi de suivre mon père même au bout du monde.
– Alors toi aussi tu as beaucoup voyagé.
– Et oui, Faveur. En famille.
– Et ton père t'a donné un bateau... Dire que le mien m'a laissé le trouver seule...
– Il avait trois navires, le plus grand, le Jade Vert, était le sien. Après il y avait deux autres, le Jade Noir et celui-ci, le Jade Rouge.
– Donc les Trois Jades. Et où sont les autres ?
– Au fond de l'océan avec mon père et le reste de ses hommes.
Le visage de Faveur se figea. C'était la première fois que la brune exprimait clairement ce qu'il s'était passé. Elle ouvrit la malle et commença à en sortir ses affaires. Il y avait tous ses souvenirs mais aussi ses vêtements, dont ceux qu'elle avait pris pour accompagner Faveur, Yvir et Wu.
– Je suis ici, uniquement parce que mon père, au bord du gouffre à préférer sacrifier ce qui lui restait, sa vie proche de la fin, pour me sauver. L'immortalité est un fardeau, je l'ai directement compris pendant que je me noyais au milieu des débris.
– Je suis désolé...
Hyacinthe retira ses vêtements abîmés et appliqua quelques runes, elle verrait plus tard pour demander à être totalement soigné.
– Je déteste les batailles navales, c'est un nid à misère. Ce qui va suivre Faveur, n'a rien avoir avec ce que tu connais. Mon père était le plus traqué des pirates du monde connu. Parce qu'il était mage de vie. Sa petite flotte de trois navires était redoutable, ici, tu es la seule non mage.
– Sérieusement ? Ce n'était pas un mythe ?
– Non, Faveur. Aurel n'a rien d'un mythe...
Elle enfila ses vêtements.
Sa tenue était composée une chemise blanche aux manches amples pour se protéger du soleil, avec un petit corset blanc au-dessus comme elle en portait habituellement en brun, et le fameux jupon court de sa mère arrivant sous ses genoux rose clair, des bottes brune assortie avec des bas rosés. Un ensemble bien plus pratique pour la mer. Elle attrapa sur un siège ce qu'il restait de l'habituel cape que son père arborait, il n'en restait que la moitié, une épaulette de cuir blanc avec le tissu doré qu'elle avait retravaillé pour que cette relique tienne la route pour elle. Elle la plaça sur son épaule droite à l'aide d'une chaînette. Elle changea les broches de son chignon pour d'autres longues et pointes avec une forme stylée de fleur de lys au bout. Celle-ci était pointue au bout, une idée de sa mère pour avoir un moyen de défense. Elle avait trois de ses piques.
Faveur prit le chapeau et le posa sur sa tête en souriant.
– Là, on dirait une vraie pirate.
– Je l'ai toujours été, comme toi...
Elles se souriaient. Il le fallait avec ce qui allait venir. Bientôt le monde entier saurait qui protéger les îles pirates de Grand Océan. La suite allait être difficile mais loin d'être impossible, pas pour eux. Elles sortirent de la cabine, comme prévu, Théon avait terminé tout juste à temps.
– On largue les amarres ! Elle cria avec joie non dissimulée.
La serveuse devenue capitaine se dirigea vers le gouvernail avec ses invités, alias Faveur et son second, ainsi que le sien, Théon. Le Roux sourit de plus belle et donna un coup de coude à Faveur.
– Quand je disais que je choisirais son équipage, je ne blaguais pas...
– Je n'en reviens pas... Souffla la jeune capitaine éblouie par la prestance de son amie qui était comme un poisson dans l'eau. Le pire c'est qu'il existe bel et bien. Elle a une longueur d'avance sur moi-même. Le Roux, ne m'abandonne pas où j'aurais perdu la partie.
Depuis quand c'était un jeu ? Se demanda Hyacinthe.
Il est vrai qu'elle et Yvir courait après la plus grosse prime. Pire, il y avait embarqué le raisonnable Wu dans leur compétition stupide. À tous les coups, Faveur allait tomber sur l'affiche à son effigie à l'âge de quinze ans quelques part et l'ajouter à leur jeu stupide. À moins qu'après ce qu'ils allaient faire, sa prime serait remise à jour avec un zéro de plus pourquoi pas.
Jusqu'à présent Yvir s'était tu, mais la récompense en or pour Hyacinthe était... plus élevé de la moitié de sa prime actuelle. Mille cinq cents pièces d'or était une folie. Ça serait une catastrophe même juste en doublant le montant. Le monde allait vouloir sa tête. La tête de l'immortel... Elle ne voulait pas être pourchassé. Pas du tout !
– Ne t'inquiète pas Faveur, je ne vais pas non plus t'abandonner... De toute façon, elle ne voudra jamais de moi à bord constamment.
La jeune fille le dévisagea.
– Tu es vraiment amoureux en fait.
– Bien sûr que j'aime cette fille ! Il affirma. Depuis toujours, j'ai bien l'impression...
Il jeta un œil à sa belle brune qui vérifiait les derniers détails. Elle était si belle concentré dans son élément. On aurait dit qu'elle avait toujours fait ça.
– Tu la connais depuis si longtemps ?... J'al l'impression que sa vie à commencer à quinze ans... Avoua Faveur.
Elle était la personne qui collectait toutes les informations et jamais elle n'avait entendu parler de l'enfance de son amie. Et ce n'était pas faute d'avoir essayé. Le Roux eut un petit rire.
– Depuis sa naissance...
– Racontes !
– Oh, je pourrais te parler de combien elle était calme et sage, de tout ce qu'elle a pu vivre. Mais elle m'en voudrait... Peut-être qu'un jour, tu sauras... Patience... Tu as déjà beaucoup à apprendre...
Faveur ne le quitta pas du regard. Le Roux était occupé à détailler du regard chacun des gestes de Hyacinthe qui c'était transformé en un claquement de doigts en un véritable chef. Elle était loin de la fille accrochée aux mâts qui avait peur de la mer. Celle planqué quatre semaines dans une chaloupe au milieu du pont. Elle était tout simplement confiante et connaissait à la perfection son petit équipage.
La brune sourit de plus belle avant de se tourner vers son équipage. Elle se mit à marcher et crier :
- Larguez les amarres, mettez-moi ce bâtiment à l'eau et descendez les voiles !
Le bois grinçait délicieusement sous ses pas léger. Elle avait oublié cette sensation agréable d'être pleinement à sa place. Elle s'approcha de son timonier, l'homme tenait fermement les poignées du gouvernail. Ils n'étaient que quelques-uns, une dizaine, c'était peut mais elle avait de la chance entre son second, le timonier, le cuisinier et le soigneur, les autres étaient polyvalents. Enfin, ils semblaient s'être convenablement réparti à nouveau les postes.
C'était tous d'excellents marins. Et eux voyait en elle son défunt père. C'était pour cela que ceux qui avait échappé avec ce navire à l'hécatombe, l'avait choisie, et non pas sous la volonté de Aurel. Elle était capitaine par naissance, par nature et après plusieurs années d'attente par choix personnel. Car cela faisait depuis ses dix-huit ans de la jeune fille qu'elle était vue comme tel, désignée capitaine officiel du dernier navire de la petite flotte reconnue. Mais cela était encore un de ses nombreux secrets jusqu'à lors. Ils avaient toujours respecté son choix.
Certains c'était engagé temporaire pour d'autres navires, quelques rares n'avaient pour dire plus mis un pied à terre. Tout avait cependant compris une chose. Face à une attaque directe de l'archipel, leur capitaine ne resterait pas indéfiniment inactif. Évidemment, il lui avait fallu du temps pour qu'elle bouge enfin. Météore et ce fichu amiral y avait contribué. Ils avaient tous reprit espoir le jour où elle avait repris la mer, elle n'était pas n'importe qui. Une fois ses peurs passées encore plus.
Les deux mages de vents gonflèrent la voile et la coque glissa le long de sa cale sèche jusqu'à s'enfuir dans l'eau. L'eau les réceptionna pour filer droit vers la sortie, le vent frappant leurs peaux part la vitesse qu'ils prenaient.
L'attaque était imminente.
🪻☠️🪻
Demain :
La mage de vie...
🪻☠️🪻
À demain 9h pour la découvrir la suite ❣️
Bizzz
Anarsis ❣️
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