XI 🪻 Depuis le naufrage
XI
Depuis le naufrage
Grand océan, archipel pirate, Cap Fortune
Dans l'air flottait l'odeur de sa petite chambre attenante à la taverne. Elle ne pouvait pas retourner où son père avait posé leur demeure sur l'île. Ce n'était pas parce que c'était trop loin, une journée suffisait pour faire le tour complet du croisant. Ce n'était même pas sur une autre. Elle n'avait besoin que de ses pieds pour s'y rendre.
Non, elle ne rentrait pas chez elle parce qu'elle s'effondrait à chaque fois. Y mettre les pieds lui était toujours plus difficile que la fois précédente.
Puis, il y avait cette autre odeur. Plus... masculine. La braise mêler à la jacinthe. Un mélange étonnant. Il disait aimer cette fleur. À chaque fois, il humait sa senteur et la lui tendait sans la lâcher des yeux.
Une de ses mains jouaient avec ses cheveux qu'il avait détache probablement pour éviter qu'elle ne se blesse encore. Trop sérieuse et maladroite, c'était les qualificatifs qu'on lui collait enfant. Et lui, c'était quoi encore ? Charmeur et vif d'esprit. Si on les voyait aujourd'hui, le monde s'était bien chargé de les changer.
L'autre main du rouquin était prise par un de ses livres. Le visage concentrer, il n'avait pas remarqué encore ses yeux noisette qui le détaillaient. Hyacinthe pouvait passer des heures à le regarder depuis son lit. Prendre le temps de détailler tout de lui. Sa mâchoire était plus marquée et ses joues d'enfant disparue. Son nez droit, ses yeux aux longs cils qui faisaient pâlir d'envie les filles. Ses iris rougeoyantes de magie. Ses cheveux aux courtes boucles laissées en bataille et couvrant une partie de son grand front, qui n'appelaient qu'à être encore plus en décoiffer par ses mains.
Puis ce grand corps. Il était resté plus grand qu'elle mais maintenant de bien plus. Il avait perdu ses rondeurs pour devenir svelte et musclé. Il avait dû passer des heures à faire des travaux manuels et des combats pour s'entraîner.
Le Roux... Est-ce qu'il était vraiment venu pour elle ?
Il fallait lire entre les lignes et cela n'était jamais clair.
– C'est lequel ?
Il se tourna surpris et lui sourit.
– Épidémie et Maladie, de Mathieu Lors
– Un somnifère.
– Il parle de choses intéressantes.
– Papa le disait aussi...
– Il répertorie le tout et leur symptôme. Jusqu'à présent je n'ai rien qui si rapproche. Ils sont banaux.
– On le sait déjà.
Elle poussa sur ses deux bras pour s'asseoir. Ce qui avait pour effet de les rapprocher l'un de l'autre.
– Oui... Est-ce que les runes de Aurel vont suffire ?
– Je l'espère... Ou...
Elle se bloqua et c'est là que le grand bras du pirate l'entoura pour l'attirer à lui en passant sa main dans son dos.
– Chut... C'est terminé...
– Non... elle sanglota en s'accrochant à lui.
– On va trouver une solution. Il y a suffisamment de livre sur la médecine ici...
– Mais il s'agit de magie.
– Alors demandons au soigneur.
Elle pouffa contre son épaule.
– Il est nul. Il pense faire des miracles et refuse d'admettre faire de la magie.
– C'est une pensée qu'on lui a inculquée. Il a besoin d'explications.
La main du pirate passait délicatement entre ses mèches. Ce simple geste avait pour conséquence de l'apaiser. Il déposa un baiser sur son front.
– Il est nécessaire de garder notre calme pour trouver la meilleure solution.
– Il faudrait pour cela qu'on ait le temps d'analyser les étapes par lesquelles passe un patient.
– Les observations de ... sont assez claires je pense. La solution est toute trouvée.
Elle ne pouvait qu'acquiescer. Le Roux avait d'excellentes bases de médecine, il n'était pas juste défini par sa condition de mage. Seulement, le remède était aussi simple que complexe.
– Tout ses gens souffrent et risquent de mourir... Elle souffla.
Il était question de les abandonner à leur triste sort. Son impuissance lui faisait aussi mal que le destin qui l'attendait. Son père lui avait appris sa devise :
"Chaque vie est importante."
Il en avait une bonne. Il n'était plus là ni à sa place. S'il pouvait la voir, il devait être déçu. Elle avait lu tous ses livres, étudier le matin avant son service ou quand elle ne parvenait pas à dormir. Mais tout cela était trop... Difficile. Maladie, épidémie, sang, blessures, fractures, mort. Tout ce qui l'empêchait de fermer l'œil de la nuit. C'était trop difficile. Elle avait besoin de la joie et le bonheur insouciant, c'était à la taverne qu'elle les trouvait.
Une main se posa sur sa joue délicate. Une légère pression l'amena à être obligée de fixer Le Roux dans les yeux.
– Tout va bien... Il souffla.
Ses mots perçurent ses lèvres closes qui s'entrouvrirent comme pour les aspirer. Son regard rouge ardent consumait son être. Il était le feu, cette chaleur qui pouvait envahir son corps. Il pouvait y avoir plus, cela devait arriver, c'était inévitable et attendu. Personne ne leur en voudrait pour leurs choix égoïstes. Ils n'avaient jamais formé qu'un seul être.
La seule question était de savoir s'ils étaient prêts à y plonger la tête la première.
Ses lèvres entre-ouvertes laissaient passer son souffle brulant de plaisir. Les siennes s'en approchaient tout autant. Leurs êtres étaient déjà en fusion quand le vide entre eux étaient presque inexistant.
Trois coups furent donnés sur la porte. Ils se reculèrent, réalisant ce qu'il venait de se passer. Ils étaient si proches, la corde était si fine. Le Roux reposa sa main sur sa joue et l'attira à lui pour déposer un baiser sur sa joue libre. Il lui offrait le choix.
Mais il n'y avait jamais eu de choix.
On frappa à nouveau à la porte. Le Roux voulu le lever mais elle l'empêcha en sautant sur ses lèvres pour un simple baiser chaste. Ses doigts glissèrent le long de son visage.
– Je m'en vais ouvrir.
Elle s'empressa d'attacher ses cheveux à nouveau. Il n'était pas question qu'elle se montre ainsi. Ses yeux naviguèrent sur le mur de sa chambre. Tout était normal si on faisait abstraction de la quantité phénoménale de livres sur la médecine. Surtout pour une serveuse.
Louri entra timidement.
– Je me sentais mieux et je voulais vous en remercier quand Météore m'a appris votre état.
– Il n'y a eu rien de grave.
– Vous vous êtes évanouie.
Elle leva les yeux au ciel. Ce n'était pas un drame. Elle fixa Le Roux pour trouver de l'aide auprès de lui. Ce soigneur n'allait pas abandonner. Il s'avançait déjà dans sa chambre.
– Laissez-moi vous rendre la pareille.
– Alors occupez-vous de vos patients et éradiquer le mal.
– Je l'ai senti vous savez... Ce n'est pas une simple épidémie. Il y a autre chose derrière, cela dépasse mes compétences.
A tenter qu'il en ait, elle se retint de parler.
– Si seulement nous pouvions voir ce fameux mage...
Et voilà qu'il jouait carte de l'empathie.
– Qui ? Fit Le Roux.
Il savait que c'était un piège, ... était clair comme l'eau de roche.
– J'ai entendu parler d'un mage de vie... Mais tout le monde en a peur.
Le Roux tourna les yeux vers elle à la recherche d'une approbation.
– Est-ce vrai ?
– Personne ne devrait être au courant.
– Vous savez qui c'est ? J'en étais certain ! Fit le soigneur.
– À tenter que je sache, rien ne m'impose de vous le dire.
– Comment se fait-il que vous soyez au courant d'une telle affaire qui vient de grand pirate.
– Peut-être parce que j'ai grandi entourer de ses mêmes personnes.
Peut-être arriverait-elle à lui détourner l'attention. Cet homme était une tête de mule. Il fallait être subtil. Mais ce n'était pas suffisant, il revenait à la charge.
– Il est le seul qui puisse nous sauver.
– Il nous tuera tous, elle fît froidement. Qui dit que ce n'est pas lui qui a lancé ce sort ?
... sembla réfléchir à cette hypothèse avant de se raviser.
– Non, nous lui offrons une protection.
– Je crains que ce ne soit plutôt un royaume ennemi qui soit derrière cette sournoiserie, fit Le Roux.
– Jamais un royaume ne ferait pareil chose, cela est bien trop... fourbe.
– Je me joins à Le Roux, fit la brune en croisant les bras. Saphar n'est plus tenu par un membre de la lignée royale depuis la révolte. Les mages y pullulent.
– J'ai sentis en effet de la magie derrière cette attaque.
Hyacinthe et Le Roux échangèrent un regard qui leur suffit à se mettre d'accord. Il n'avait pas de mage de vie mais cela n'était pas forcément nécessaire. Il fallait s'y prendre différemment c'était tout. Tenter leur chance. Si cela réussissait, ils étaient sauvés.
Elle s'assit mieux sur le bord de son lit.
– Tu parles de sentir la magie.
– Et donc ?
– Seul un mage ou un anti-mage peut y parvenir. Donc toi qui prétend ne pas faire de magie... Conclut Hyacinthe
– Je soigne les gens, je ne fais pas des tours.
– Je maitrise le feu, je ne fais pas des tours, c'est très utile pour allumer un feu, contrôler sa taille et sa puissance, mais aussi pour attaquer mes ennemis.
Une boule feu se forma dans sa main. Elle la fixa un moment sans rien dire, juste en cherchant à retrouver sa respiration. Il connaissait son élément, elle ne devait pas s'en inquiéter, il maîtrisait à la perfection ses pouvoirs. Ce n'était que du feu et rien de plus.
Il lui sourit et elle fit de son mieux pour se concentrer sur ses yeux rougeoyants. Ils brillaient de magie, mais c'était le calme qui y régnait, elle s'attela à calquer sa respiration sur la sienne. La discussion des deux hommes ne l'intéressait plus.
– Hyacinthe...
Rien qu'un petit feu de magie, contrôler par Le Roux. Il ferma la main et la flammèche s'éteint. Ses mains se posèrent sur ses épaules.
– Tout va bien, elle affirma.
– Vous n'êtes pas encore bien remise, laissez-moi vous auscultez...
– Ça ira...
– Peut-être avec vous aussi été touché par ce mal.
– Cela m'étonnerait, Hyacinthe a une excellente immunité.
– Que vous dites. Laissez-moi voir.
Il insista tellement qu'il parvint à passer devant le rouquin. ... était presque collé à elle. D'un mouvement brusque elle le repoussa et cria qu'elle allait bien. Cela sembla suffisant calme le jeune soigneur.
– Vous devez agir et prouver que vous êtes un vrai soigneur. Vous pouvez manipuler la magie et créer la solution.
– Comment ?
– En immunisant les îles par exemple, proposa Le Roux.
– Et vous m'en croyez capable ?
– Non, mais on n'a pas le choix, répondit Hyacinthe.
Il n'y avait pas le choix, le soigneur devait réagir. C'était le seul à pouvoir sauver la mise. Mais il fallait le brusquer et poussé à dépasser ses limites. Le Roux lui expliqua les principes basiques comme le fait que la magie se trouvait dans chacun, elle était là et n'attendait qu'à être déployée.
– Je suis nul...
Il désespérait face aux demandes du second de Faveur.
– On n'a rien en essayant, on a tout en faisant.
– Vois avez facile.
Le Roux haussa les épaules et prit ses explications.
La magie s'échappa de lui finalement et toucha l'île entière. Hyacinthe approuva d'un mouvement de tête. Le calme revenait en elle, ils étaient sauvés.
– Pas mal, espérons que ce soit bon.
– Vous croyez ?
– On ne sait rien de l'ennemi, ajouta Le Roux.
– Mon professeur de soin disait que j'étais un des pires, il avoua.
– Nous y voilà, je m'en doutais. Qui voudrait venir ici pour soigner cette bande d'alcoolique.
🪻☠️🪻
Demain :
Elle semblait savoir tout...
🪻☠️🪻
À demain 9h pour la découvrir la suite ❣️
Bizzz
Anarsis ❣️
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