IX

Et avisée

Grand océan, archipel pirate, Cap Fortune

Hyacinthe soupira de capitulation.

– Merci, sourit leur roi.

– Pour mon père, pas pour toi.

Il jouait en traître à lui parler de lui comme ça. C'était déloyal mais elle l'avait été aussi. Un retour de bâton qu'elle pouvait difficilement éviter.

Elle retira son tablier et le lui jeta à la figure. Il avait réussi à gagner, en traître, bien qu'il soit leur chef, oublié qu'il était un pirate avant tout n'était pas une bonne idée. Il connaissait son point faible, comment contourne les règles qu'elle s'infligeait. Enfin, le sujet qu'il avait choisi pour la poussée était douloureux, car c'était parmi ses propres principes. L'héritage précieux de son père.

– Je te laisse travailler à ma place, elle ronchonna avant de disparaître dans la minuscule cuisine pour sortir du bâtiment de bois.

– Hyacinthe ? Fit le tavernier.

Il était occupé à préparer le repas d'un groupe. Ça sentait toujours aussi bon sa petite cuisine.

– Météore va me remplacer, il m'a demandé quelque chose.

Forcer la main serait une meilleure expression.

– Il va servir les clients ? S'étonna le tavernier.

– Il s'en sortira ou tu lui dis qu'il n'aura plus jamais mon aide.

L'homme rit. Il connaissait sa plus ancienne employée. C'était une tête de mule. Elle sortit par la porte arrière de la taverne et s'engouffra dans les ruelles.

Elle n'était pas d'humeur, ce n'était pas sa faute si cet imbécile de soigneur était assez incompétent pour se ramasser la maladie mortelle alors qu'il tentait de la soigner sur leur île. Parce que comme elle, Météore se doutait qu'il avait dû en tomber malade. Vraiment pas doué ce gamin. L'épidémie était assez faible pour l'instant mais les symptômes n'avaient rien de rassurant. Hyacinthe l'avait bien dit que ce garçon était incompétent, Météore avait tenu à lui offrir une chance. Et voilà ce que cet imbécile lui donnait déjà raison.

– Hyacinthe !

Elle se figea, qu'est-ce qu'il faisait ici ? Elle prit une profonde inspiration et se tourna lentement. Il ne manquait plus que lui. Le Roux réduisit sa foulée et s'arrêta devant elle, il perdit son sourire progressivement face aux yeux orageux de Hyacinthe. Le noisette de ses pupilles était si sombre.

– Quoi encore ? Elle grogna.

Il ne croyait pas à la jeune fille innocente que tout le monde voyait en elle. Inutile de jouait la comédie, pire il lui en voudrait.

– C'est plus moi qui devrais vous poser la question.

– Je vous laisse.

Elle se tourna et reprit son chemin à contre cœur. Elle serait bien restée discuter avec. Bien sûr le grand benêt la suivait.

– Il n'est pas prudent de se promener seule.

– Je connais mieux ses rues que vous.

En plus, elle y était déjà.

La maisonnette attribuée à Louri n'était pas grande, un peu plus que celle d'autre néanmoins. Il devait avoir besoin de place pour son laboratoire. Le Roux restait sur ses talons. Elle se tourna vers lui et lui tendit un de ses bracelets. Il le prit et l'observa.

– Il empêche d'attraper les maladies. C'était à papa.

Il le passa sans attendre autour de son poignet.

– Nous allons donc voir un malade ? Pourtant vous n'avez aucune compétence.

– En effet. Mais Météore ne veut pas l'entendre.

– Le pauvre patient va avoir besoin de soutien.

– Nous sommes chez un soigneur qui ne se manifeste plus depuis deux jours.

– Oh, je vois... Faveur m'a dit que vous le trouviez incompétent. Quel genre de soigneur ne dispense pas ses soins quotidiens ? Pire se prendrait la maladie.

Le Roux avait la même conclusion qu'elle, ce n'était pas très étonnant...

Elle frappa à la porte et attendit d'être invitée pour entrer à l'intérieur. C'était un lieu très simple, il y avait quelque livre sur une table, une armoire bancale avec quelques potions, seules preuves de ses activités professionnelles. Dans un coin, allongé dans son lit, le soigneur avait vraiment mauvaise mine, elle s'approcha, le rouquin sur ses talons.

– Vous... Vous devriez... Partir...

Sa voix était erratique et faible. Elle soupira d'agacement, elle aurait dû parier.

– Le soigneur est mal en point, pouffa Le Roux à dessus de son épaule.

Elle l'ignora.

– Et vous, vous devriez vous soignez, c'est Météore qui m'envoie pour vous aider. Je ne sais pas si vous vous rendez compte du nombre de personnes qui ont besoin de votre aide ici. Le Roux, aide-moi à l'asseoir.

Il le prit et l'assit avec son aide.

– Il lui faut boire.

Elle obéit à sa demande. Le Roux en savait un peu plus qu'elle, c'était bien pour cela qu'elle avait accepté qu'il la suive. Louri but. Hyacinthe croisa les bras et attendit ses instructions. Elle n'aimait pas avouer que cet homme pouvait se rendre utile ici. Mais le soigneur était le plus apte, il avait étudié la maladie dont il souffrait désormais. Elle attendait ses instructions et Le Roux aussi. Il le fallait. Même si c'était pour aider un idiot.

Chaque vie compte.

– D'accord... Sur la table... Il y a mes notes, suivez la recette.

La dites table était encombrée de bazar et le temps qu'elle trouve la feuille volante, son patient était endormi et c'était bien mieux ainsi. Elle lut les analyses sur plusieurs pages de la maladie et son évolution pour ce faire une idée. Pendant que Le Roux tentait de le remettre un peu plus sur pied avec ce qu'il trouvait dans l'unique pièce de la maison.

Les explications de Louri étaient bancales et manquaient de méthode. Elle lui jeta un œil critique et observa son état rapidement. Le rouquin vint lui donner un coup de main. Il devait avoir de la fièvre, signe que le corps combattait la maladie, mais il fallait veuille à ce qu'elle ne monte pas de trop. Il était fatigué et pâlichon en apparence. Rien de plus de visible d'un simple coup d'œil.

Elle s'évertua alors à lire la préparation pour soigner et c'était pour le moins, déroutant.

Il n'était pas étonnant qu'il n'arriverait pas à soigner qui que ce soit, puisque les ingrédients annulaient une grande partie des effets entre eux. Le Roux se pencha et lui souffla :

– Tu es sûr qu'il est soigneur ?

– C'est ce qu'il prétend... Il a ses pièces...

Elle fit glisser ses le long de la cordelette pour toucher celle offerte par son père. Est-ce que Louri les avait reçues ou est-ce qu'il les avait volé. Normalement le nom était frappé dessus...

– Tu se souviens des cours de d'herbologie de ma mère ?

– Ça devrait aller.

C'est comme un jeu pour elle, elle se servit de la faible documentation pour soigner cette espèce de peste masquée en mixant quelques plantes, créant un liquide qu'elle fit avaler à leur malade sous l'œil attentif de son assistant. Leur patient s'était endormi.

– On est mal...

– Espérons que ce sera suffisant pour le remettre d'aplomb.

– Cette maladie n'a rien de naturel.

Après lui avoir donné l'antidote. Il leur fallu un peu attendre qu'il se réveille, et ensuite pour s'assurer qu'il allait mieux. Son visage avait repris des couleurs.

– Qu'avez-vous fait... ?...

Assise à table, elle ne lui jeta pas un seul regard.

– Rien.

– Si, dites-le-moi, mon remède ne fonctionne pas à ce point, je le sais, alors j'aimerais savoir ce que vous avez fait.

– Et qu'est-ce que cela change ?

– Nous pouvons sauvez tout le monde ! J'étais certain que vous étiez une soigneuse, pourquoi ne pas m'aidez plutôt que de servir à boire.

– Il se fait que j'aime mon métier et comprenez bien que je ne suis pas un mage de soins comme vous.

– Je ne suis pas mage mais soigneur. Et vous ?

– Je ne suis qu'un mage de feu, fit Le Roux en se posant à côté de la brune.

Elle leva les yeux au ciel. Elle connaissait cette rengaine stupide alors que c'était ce qu'il était, un mage. Une personne pratiquant de la magie, un mage. Mais sa "classe" n'acceptait pas de l'avouer. Pourtant ils utilisaient bel et bien la magie.

– Vous avez usé de magie en soignant une pauvre âme, ajouta le pirate. Vous ne comprenez rien à la magie.

– Je ne vais pas laisser un enfant mourir quand même ! Il s'insurgea en tentant de se redresser plus mais il retomba bien vite.

– Vous avez user d'une magie, que vous ne comprenez pas vous-même, qui plus est ! C'est de l'inconscience ! Vous êtes définitivement le pire de tous ! Intima Hyacinthe.

– Parce que vous, vous êtes si douer pour soigner ? Alors pourquoi vous ne le faites pas ?

– Parce que je ne veux pas finir comme vous ! Malade à en mourir ! Inconscient ! Et que ce n'est pas mon métier ! Il n'y a que les idiots qui veulent sauver le monde sans avoir de conséquences.

– Je ne vous le permet pas !

Hyacinthe soupira fortement pour calmer ses nerfs. Elle n'aimait pas cette facette d'elle qui pouvait s'emporter facilement parfois. Cet homme lui sortait par les yeux. Le Roux se rapproche discrètement pour poser sa main dans son dos. C'était étrange comment une simple présence pouvait la calmer.

– Votre maître ne vous a pas appris qu'en magie, il y a toujours une compensation ? Demanda Le Roux.

– Je ne sais plus, il finit par avouer. Et de toute manière ici, ce n'est qu'une simple épidémie.

– Faux, cette peste n'a rien de naturel, elle affirma.

Elle en était certaine, c'était une magie de très bon niveau, dangereuse. Elle savait ce qu'on attendait d'elle, ce que leur déesse protectrice attendait qu'elle fasse. Mais c'était jouer avec le feu, elle devait rester anonyme.

– Des cas similaires ont été recensés dans d'autres pays de ce que je sais. Il suffit d'une personne pour infecter une population entière, surtout dans les conditions dans lesquelles vous vivez tous ici.

Elle se pinça l'arête du nez et se tourna vers lui.

– Qu'est-ce que vous avez encore ?

– Silence ! Je réfléchis !

Il leva les yeux au ciel. Hyacinthe l'ignora, ce n'était qu'un imbécile pour ne pas avoir remarqué quoi que ce soit d'étonnant.

– Et vous, vous êtes aussi d'accord sur cette analyse ?

– Oui, répondit le pirate.

– Quel sont vos compétences ?

– Ma mère est médecin. Elle m'a appris quelque peu de son savoir.

– Qu'est-ce qui vous le fait penser ?

– Les symptômes, ils sont... banaux ?

– Vous n'avez rien.

– Nous vous avons soigné. Votre antidote était mauvais, les ingrédients s'annulaient.

Elle savait que des vagues de pestes passaient parfois mais ici, ce n'était que des rumeurs. Son métier lui avait appris à prendre les dires avec des pincettes. La grande peste n'arrivait pas comme cela, elle n'aurait jamais dû les touchés même.

Ce n'était pas naturel.

– Reposez-vous, nous avons laissé sur la table la recette de la composition que nous avons modifié.

Hyacinthe sorti suivie de Le Roux.

– On fait quoi ?

– On voit avec Météore.

Elle se rendit à la taverne pour admirer le spectacle de Météore derrière le bar occupé à servir une bière. Elle s'assit à un tabouret et Le Roux à côté d'elle.

– Tu viens me secourir ?

– Tout dépendra de toi. Louri est tombé malade. Le Roux m'a aidé pour le soigner.

La salle était vide et personne n'était près du bar. Parler serait plus simple.

– Merci à tous les deux. Je vais voir avec lui pour la suite.

– Météore, ce type, tu es sûr qu'il est soigneur ?

– Bien évidemment, il a été élève dans une grande académie du continent. J'ai fait mes recherches.

– Il a eu de la chance d'être diplômé ou ils ne leur apprennent vraiment rien, continua Le Roux

– Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ?

– De toute façon, il ne pourra rien faire contre cette épidémie. Nous n'avons qu'une seule chance, les runes de protection de papa sont toujours en place.

– Une bénédiction.

– Tu es certaine ? Lui demanda Le Roux.

– Il avait fait un système quand on a colonisé l'archipel. Cela atténue les maladies graves pour empêcher les morts.

– Ce qui explique que l'épidémie n'a encore emporter personne. Cela aurait dû déjà arriver.

– Ce n'est pas la première fois qu'ils tentent et je crains qu'il ait trouvé pour passer au-dessus... Elle marmonna.

Elle était occupée à triturer ses doigts entre eux. Le stresse montait dans ses veines. Si cela arrivait ce serait une catastrophe. Louri n'était pas loin encore pour savoir mais ils en étaient proche et si ce n'était pas cette fois-ci, ce serait la prochaine. Ses mains agrippèrent ses cheveux tenus en un chignon bas. Elle baissa la tête sur le comptoir. Son corps était parcouru par la peur et ses tremblements.

Ils étaient dans la merde, la mort pouvait prendre la ville d'assaut d'un moment à l'autre.

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Demain :

Qui cachait ses démons...

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À demain 9h pour la découvrir la suite ❣️
Bonne semaine mes pirates 🏴‍☠️

Bizzz
Anarsis ❣️