25 ~ The deepest truths
POV Luke
Je me repasse en boucle les paroles de Cécile comme pour mieux les analyser alors que Jared lui s'entraîne au tir sur des mannequins. Comment pourrais-je me rendre à la Bulle sans être vu et arrêté ? Bien que l'ont soit privilégiés par l'AGFA, nos sorties sont contrôlées et j'ignore quel mensonge je pourrais trouver. J'ignore également si je dois en parler à Jared et lui proposer de venir avec moi, après tout lui a fait le choix de rester ici car ce projet l'intéresse vraiment.
Mais c'est un excellent tireur, il pourrait m'être utile.
"Tu n'es pas bavard -Me dit ce dernier dans mon dos- Ton recensement ne s'est pas bien passé?
- Si, seulement je m'interroge sur la finalité de tout ça.
- On va repeupler la Terre c'est ce qu'ils ont dit la semaine dernière.
- Je sais bien, mais pourquoi ces critères ? Je ne sais pas si tu es au courant mais ils ont fait demander aux femmes si elles étaient aptes à avoir des enfants.
- Sérieux? -Demande-t'il entre l'amusement et le dégoût- Ils ne vont pas nous forcer à nous reproduire j'espère.
- Tu imagines ? -Je demande en attrapant un arc et vidant le carquois sur les cibles déjà amochées par les tirs de Jared- Déjà qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut lorsque l'on est au Tertiaire et qu'on atteint dix-huit ans. Si maintenant on nous f...
- Comme si les mecs étaient les plus à plaindre dans tout ça. "
Je sursaute et plante ma flèche dans un des murs alors que je me tourne pour voir d'où provient cette voix. C'est la fille de tout à l'heure, celle qui m'a surpris devant chez Cécile. Dans sa main pend une hachette flambant neuve et Jared et moi perdons quelques couleurs tandis qu'elle s'avance vers nous, ou plutôt vers moi.
Puis d'un geste elle fend l'air de sa hachette, laquelle se plante droit dans la tête de la cible.
" Aucune envie de me reproduire avec de sombres merdes comme vous -Elle nous regarde à tour de rôle- Et ça chie dans son froc en plus de ça. Toi là -Elle me montre d'un signe de tête- j'ai un message de ta mère.
- Ma m...
- Liz Hemmings, ancienne professeure de mathématique à l'École de l'Est et mère de deux garçons dont l'un d'un a été envoyé crever à l'Iceberg. Exact? - Je serre l'arc jusqu'à presque le briser tandis que Jared me lance un regard de mise en garde- J'ai vu ta gueule s'afficher quand j'ai vérifié avec elle ses informations, quant à ton frère, j'avais déjà entendu parler de la rumeur.
- Qu'a-t'elle dit?
- Pas grand chose -Elle s'approche de moi et s'arrête, attendant un moment avant de finalement cracher à mes pieds- Elle n'a pas bonne opinion de ton engagement dans l'Armée. Tu as de la chance que je n'ai pas pris ce geste personnellement lorsqu'elle l'a fait.
- Et tu as fait tout ce chemin pour me dire ça?
- Oh non, je voulais aussi savoir pourquoi tu étais allé voir Cécile Jones, tu n'as aucun lien de parenté avec.
- Je peux savoir en quoi ça te froisse? Je t'ai laissé faire ton recensement, t... -Je m'arrête aussitôt, son arme pointée sous ma gorge-
- Apparemment tu ne sais pas qui je suis petit con alors je vais te briefer, je m'appelle Héda Copp et je suis la responsable des Soldats femmes de l'Est. Tu vois, ce qui me froisse c'est que non seulement tu as fait une entorse à ta liste et au règlement, mais il semblerait que tu aies posé des questions au médecin qui t'accompagnait à l'Hôpital - Elle charge son arme, toujours contre ma gorge- Et que tu sois retourné auprès de Cécile Jones, faisant croire aux Gardiens que tu la ramenais chez elle. Pourquoi ?"
Ses yeux noirs, dont l'un est couvert d'une longue balafre partant de son sourcil, scrutent les miens, attendant de me voir craquer. Pourtant je ne dis rien, la gorge sèche et réfléchissant le plus vite possible à un mensonge plausible. J'ignorais réellement qui elle était, je ne l'avais même encore jamais vue et si elle est aussi influente qu'elle le dit, alors elle fera un rapport à l'AGFA, en particulier à Amadalia. Je vais mettre Cécile en danger.
" Pandore -Répond Jared dans un souffle alors que j'ouvre des yeux ronds- C'est bon Luke dis-lui, ça n'en vaut pas la peine.
- Pandore ? La gamine qui a été envoyée à l'Iceberg ? -Elle demande en s'écartant pour mieux me regarder-
- C'était la fille de Cécile Jones, enfin, la fausse fille -Dis-je sans trop savoir dans quoi je me lance- Je voulais seulement savoir si elle ne manquait de rien, c'est pour ça que je suis allé la voir.
- Tu es qui pour cette fille? -Elle demande en levant l'arme jusqu'à ma tempe- Réponds!
- Juste un ami -Dis-je en regardant Jared du coin de l'oeil, ce qu'elle remarque-
- Arrête de me prendre pour une conne -Elle abat sa crosse contre ma tempe et se réjouit de me voir au sol- Tu as dix secondes pour me dire la vérité sinon c'est ton pote qui y passe."
Je redresse la tête, sonné, mais voyant clairement l'arme pointée vers Jared. Est-ce qu'elle va vraiment le faire?
Puis elle fait feu et vise volontairement le côté de la jambe, déchirant seulement le tissu. Jared se met instantanément à bondir d'une jambe sur l'autre alors qu'Héda semble s'amuser à vider son arme autour de ses jambes avec un sourire mauvais.
Est-elle toujours désireuse de connaître mon lien avec Pandore ou bien préfère-t'elle s'amuser avec Jared lequel est à bout de souffle, pris entre sa fierté de rester et son envie de fuir pour survivre?
" De toute façon, j'ai fait remonter l'info -S'arrête soudain Héda, m'offrant un sourire mauvais- Si tu ne me réponds pas à moi, tu n'auras plus le choix de le faire auprès des Gouverneurs. Enfin, Amadalia.
- Je sais qu'elle n'est pas là en ce moment et elle sait qui je suis.
- Je vois que vous êtes bien renseignés Monsieur Hemmings."
Mon corps devient rigide, aussi bien en voyant le visage fier d'Héda devant moi qu'en reconnaissant la voix dans mon dos. Je pivote lourdement, reprenant de l'air pour gonfler mes poumons afin de faire face à Amadalia en personne.
Elle n'est pas comme d'habitude. Son calme légendaire a laissé place à des rides de frustration et une colère peinant à être refoulée déforme toute sa personne. Elle fixe son regard perçant sur moi, pourtant je ne pense pas être l'origine de cette colère.
Au contraire je ne le devine que trop bien, surtout qu'elle n'est pas là, comme Cécile l'avait suggéré.
" Vous avez reçu mon rapport ? -Lui demande Héda d'une voix de parfait larbin- C'est lui dont je vous parlais, il est allé voir Cécile Jones, celle-la même que vous m'aviez confiée de par sa dangerosité.
- Cécile n'est pas dangereuse -Dis-je les dents serrées-
- La dangerosité ne vient pas toujours des armes à proprement parlé, Monsieur Hemmings -Me raille Amadalia- Vous savez tout comme moi les efforts qu'elle a mis en place avec sa cousine, la professeur Calgary, pour cacher Pandore de moi. Pour ça, elle est dangereuse.
- Je voulais seulement m'assurer qu'elle allait bien -Dis-je nerveusement alors que Jared commence à s'éclipser-
- Et qu'avez-vous pensé d'elle?
- Elle est épuisée, sa nouvelle vie la contraint à rester cloitrée, mais elle peut coller à votre programme.
- Notre programme? Vous croyez?
- Elle est en forme, elle occupait une profession utile et pourrait se révéler efficace si vous la repreniez à l'avenir et puis, elle n'a jamais eu d'enfant, elle pourrait bien en avoir d'ici peu."
Si leur tri met véritablement hors course les personnes faibles ou jugées non-utiles pour l'AGFA alors je me devais de dépeindre Cécile Jones sous un meilleur jour qu'elle ne m'était apparu. Face à moi, la Gouverneur semble réfléchir et changer du tout au tout, un sourire amusé naissant sur ses lèvres jusque-là tordues de colère.
"Vous êtes prêt à tout pour cette fille.
- Madame? -Dis-je sans trop comprendre-
- J'ai toujours cru que vous et Pandore étiez véritablement ennemis, mais ce n'était que mon point de vue d'adulte, si je regarde cela comme une enfant, donc comme vous, je me rends compte qu'en vérité vous seriez prêt à prendre plus de risques qu'il n'y parait pour elle. Nous avons donc un point en commun.
- Je regrette mais je ne vois pas en quoi nous avons ce point en commun.
- Pandore pense avoir choisi le bon côté en restant auprès de Joe Duncan et de ceux qu'elle considère comme ses nouveaux amis. Mais de vous à moi, ces gens ne sont pas ses amis, ils attendent et la jaugent car elle pourrait être la raison de leur perte. Joe le premier.
- Que risque-t'elle avec lui?
-Risquait -Me corrige-t'elle avec un sourire- Oui, elle risquait d'être trahie. Mais bien qu'il ne soit plus une menace, il a minutieusement préparé son coup et ses élèves tout particulièrement, pour réaliser ses desseins futurs. Voyez-vous Monsieur Hemmings, je suis inquiète pour elle, vraiment.
- Elle sait se défendre, si je dois bien lui reconnaître une qualité c'est celle-ci.
- La défense ne lui sera d'aucun secours lorsqu'elle sera seule face à tous ces timbrés. Je ne doute pas de sa force, mais elle est trop importante pour être laissée en pâture.
- Pourtant, vous n'avez pas réussi à la ramener avec vous.
- Je vous l'ai dit, elle a choisi de faire confiance aux mauvaises personnes, lesquelles ont d'ores et déjà montré leur vrai visage -Elle marque une pause avant de regarder Héda- Je vais continuer dans mon bureau, fais en sorte que Nicholson ne soit pas mis au courant tout de suite de mon retour. Monsieur Hemmings, quant à lui, va venir avec moi.
- Qu'est-ce que je fais de l'autre garçon?
- Il vient de l'Est? -Demande Amadalia en regardant Jared qui hôche vigoureusement la tête- Ce serait du gâchis de le tuer, il pourrait m'être utile.
- Bien -Répond Héda non sans déception-
- Tant qu'il garde le silence sur ma venue ici."
Jared jure d'une voix hystérique qu'il ne dira rien et gardera le secret, suppliant presque Amadalia de le laisser en vie pour qu'il s'occupe de la protéger personnellement. Cela semble l'intéresser pourtant Jared n'est pas à la hauteur de ses gardes personnels, c'est ce qu'elle lui dit avant de faire un signe de tête à Héda, laquelle retrouve un sourire haineux, tirant de sa poche une seringue qu'elle plante sans attendre dans le cou de Jared que je n'ai pas eu le temps de prévenir. Un liquide foncé, semblable à celui que j'avais vu au sous-sol de l'hôpital, se déverse et aussitôt Jared se contorsionne de douleur.
" Il ne va pas mourrir -Me murmure Amadalia tout en me prenant par le bras- Au contraire je lui ai offert une chance de me protéger et surtout de survivre, vous le verrez bientôt par vous-même."
Peu convaincu, je regarde mon ami s'écrouler au sol, secoué de spasmes mais à présent silencieux tandis qu'Héda le soulève sans soucis, l'amenant je ne sais où. Comment être sûr qu'elle ne l'a pas tué et qu'elle ne me réserve pas le même sort? Je déglutis avec douleur, mon corps se dérobant presque lorsqu'elle me tire fermement jusqu'à son bureau, situé à l'arrière de nos terrains d'entraînements. Enfin si on peut appeler ça ainsi, le premier mot qui me serait venu en tête était plutôt bunker. Couvert d'acier et fermé par de grosses chaines, je me rends compte que je n'y avais jamais prêté attention depuis mon arrivée dans l'Armée. Pensant trouver du matériel sportif ou des armes à l'intérieur, je suis surpris de voir que l'endroit est totalement vide. Pas de meubles ou d'affaires, rien qu'un sol en métal et quatre mur de la même froideur, sans fenêtres.
" Vous devez avoir tout un tas de questions -Dit Amadalia pour briser le silence-
- Où Héda a-t'elle amené Jared?
- Sûrement à l'infirmerie, ne vous en faites pas elle s'occupera bien de lui -Elle me regarde du coin de l'oeil- A moins que ce ne soit ça qui vous préoccupe justement. Héda est ma garde du corps personnelle, entraînée et presque créée pour ma sécurité, je lui fais confiance.
- Créée? -Je me remémore son aisance à porter Jared et la force presque naturelle qu'elle a mis dans ses hachettes- Vos sérums...
- J'en ai toute une panoplie! -Elle jette un regard par dessus son épaule, vérifiant que personne ne nous ait vu entrer avant de remettre les chaînes et de fermer la porte- Si les avancées technologiques nous ont bien appris quelque chose, c'est que la nature humaine est infiniment modifiable. Nous en sommes même la preuve vivante, nous tous ici au Nouveau Canada. Qui aurait pu croire, il y a des milliers d'années, que l'humain pourtant habitué à vivre sur Terre, pourrait s'acclimater sous l'eau? L'Homme est immuable et c'est à nous, les meilleurs scientifiques, de les façonner pour qu'ils deviennent parfaits.
- Selon vous, Héda est parfaite ?
- Violente, je le conçois, mais elle m'a brillamment servie jusque-là.
- Et Pandore ?
- Ah ça, nous allons en parler, mais pas ici."
Où veut-elle aller pourtant? Sans fenêtres ni porte ouverte, nous sommes invisibles et personne ne pourrait nous entendre. Elle vérifie une dernière fois que l'arsenal de verrou reliés à la porte est bien fermé avant de s'approcher du mur du fond. Il n'y a ni jointures, ni différences de niveau, un simple mur d'acier lisse et froid qui ne comporte pas de porte secrète.
Mais cela ne l'empêche pas de poser un bracelet contre la paroi et après un léger bip, je sens le sol bouger. Dans un sursaut je tente de m'accrocher à la porte verrouillée, mais je sens très vite mon corps soumis à la pesanteur et pour cause, le sol qui s'était mis à trembler commence à s'enfoncer et à descendre, donnant l'impression que les murs d'acier s'allongent. Je regarde Amadalia qui se délecte de la situation, sa silhouette se faisant plus basse à mesure que le sol descend.
"Si j'étais vous, je lâcherais maintenant avant de faire une chute plus dramatique."
Encore une fois peu rassuré, je regarde la distance entre mon appui, duquel je me tiens à bout de bras et le sol. Elle a raison, je ne pourrai pas rester comme ça indéfiniment et je finirai pas tomber de plusieurs mètres. Je me résous à lâcher et termine ma chute face contre l'acier après que mes coudes et mes genoux aient glissés sur la surface lisse.
Où est-ce qu'on va?
" Pourquoi toujours autant de réticences à faire confiance à ses aînés -Pouffe Amadalia sans me regarder- Vous n'êtes pas si différent de Pandore.
- Que vouliez-vous me dire à son sujet?
- Nous ne sommes pas encore arrivés.
- Et où est-ce qu'on va?
- Je vous l'ai dit, dans mon bureau.
- Votre bureau est à la Rûche, pourtant nous ne faisons que nous enfoncer depuis plusieurs minutes.
- Perspicace. Je vous aurais volontiers choisi comme garde personnel, mais vous me serez plus utile en étant vous-même. Je dois quand même vous poser une question, avez-vous confiance en Nicholson?
- En l'Ouest vous voulez dire? -Elle acquiesce- Je ne sais pas, ces derniers temps j'ai trouvé les anglophones distants, mais c'était aussi la première fois qu'ils étaient autant mélangés à nous, ce doit être normal.
- Les anglophones sont très bons en français, ne vous imaginez pas le contraire.
- Vous sous-entendez qu'ils font exprès de rester entre eux?
- Je voulais seulement avoir votre avis."
Et nous en restons-là. Les minutes défilent lorsqu'enfin le sol se stabilise, la pièce est semblable à celle que nous avons quitté, et que je ne vois plus tant elle est à des niveaux au dessus de nos têtes d'ailleurs. Il y a une nouvelle porte, toute aussi robuste que celle d'en-haut. Amadalia pose à nouveau son bracelet, semblable à une montre, contre la-dite porte et celle-ci s'ouvre sur un long couloir circulaire en acier également, comme un prolongement métallique perpendiculaire à celui que nous venions de descendre. Voyant que je ne bouge pas, elle passe la première.
" Vous n'avez rien à craindre Monsieur Hemmings. Suivez-moi"
N'ayant d'autre choix, je lui emboîte le pas et me retourne pour voir le sol d'acier remonter. Ingénieux comme procédé. Puis la porte se ferme automatiquement et je me contente de suivre Amadalia, nerveux.
À quoi pourrais-je bien lui servir, en restant moi-même, comme elle l'a dit ? Je n'ai pas confiance dans les anglophones, mais pour autant, je n'ai pas confiance en elle non plus. Pandore est peut-être naïve, elle n'a pas fait le choix de rester à l'Iceberg pour rien.
Après avoir traversé le couloir, nous passons une autre porte qui cette fois-ci débouche dans une gigantesque pièce circulaire de plusieurs niveaux, dépourvu de champ de force car totalement recouverte d'acier. Arrivés au bord d'une balustrade, Amadalia m'invite à regarder l'énorme pièce sous nos pieds.
"Cet endroit n'est pas répertorié sur les cartes du Nouveau-Canada, du moins sur les cartes récentes. Le long couloir que nous avons descendu et celui que nous venons de quitter non plus.
- Il n'y a pas de champs de force ?
- Il y en a un, mais il n'est pas visible de l'extérieur, ce qui nous rend totalement invisibles aux regards ennemis.
- Est-ce là votre bureau? -Je butte sur le terme, l'endroit étant vingt fois supérieur à la taille de celui de la Rûche-
- Disons plutôt que c'est mon laboratoire.
- Vous êtes une scientifique ?
- Je suis La scientifique, celle qui pilote tous les projets et dirige tous les scientifiques de l'Est. C'est ici que je forme le plus gros de nos effectifs, mais aussi ici que naissent tous les projets.
- Purity est né ici ?
- Oh non, c'était un projet entre nos deux Gouvernements. Je suis fairplay vous savez, j'ai garanti une totale transparence à Nicholson alors pour cela il valait mieux éviter de faire le sérum ici.
- Il ignore que vous avez votre propre laboratoire ?
- Il ignore ce laboratoire. Nicholson, Pandore et bien d'autres ont vu mon laboratoire officiel, celui que je veux bien montrer à tous, mais celui-ci est différent.
- Pourquoi me le montrer à moi ?
- Car c'est ici que je veux que vienne Pandore.
- Vous voulez que je la fasse venir ici ? - Elle acquiesce- Vous vous trompez de garçon, c'est Michael qu'il vous faut pour ça. Pandore me fait autant confiance qu'elle vous fait confiance.
- Michael ? -Elle semble réfléchir un instant, posant son regard en contrebas- Ah oui Monsieur Clifford! je me souviens, ce petit romantique prêt à tout pour Pandore.
- Prêt à tout oui, plus que moi. Il est également très fort, il a rejoint l'Iceberg à l'heure qu'il est et il s'y est rendu pour protéger Pandore.
- Je crois que vous n'avez toujours pas compris que ce qui rend puissant un individu ce n'est pas uniquement sa force physique. Votre ami Michael est un idéaliste, un rêveur. Si je ne m'abuse, ce n'est pas votre cas -Elle me regarde du coin de l'oeil- La vie a été dure à votre égard, vous perdez votre père, puis votre frère et à présent votre mère. Qu'a perdu Michael Clifford?
- Si j'ai perdu mon frère c'est de votre faute -Dis-je en essayant de me contrôler-
- Là n'est pas la question, j'ai fait ce que je devais faire -Elle hausse les épaules et se tourne dos à la balustrade, s'y posant contre- Vous avez une force d'esprit que Michael n'a pas, vous avez conscience du danger et vous avez compris qu'il ne viendrait pas de moi. Pourquoi, d'ailleurs, êtes-vous dans l'Armée?
- Ça me semblait intéressant.
- Ne me mentez pas. Michael s'y est enrôlé pour Pandore ça n'en fait aucun doute et de ce fait il n'est pas à même de répondre à mes attentes. Mais vous, pourquoi ?
- Pour survivre."
La réponse m'est venu soudainement. C'est vrai que j'aurais pu continuer mes études et devenir professeur comme je l'avais toujours voulu. Mais les choses ont changé si vite qu'il m'a semblé que l'armée était la seule issue aux jours obscurs qui venaient. Quelque chose dans l'air avait soudainement changé , comme si un compte à rebours s'était lancé au dessus de nos têtes et qu'il nous fallait faire des choix réalistes plutôt qu'idéalistes.
Je suis réaliste, pas Michael. C'est pour ça que j'ai choisi de rester ici plutôt que de foncer tête baissée à l'Iceberg.
" La survie nous fait agir en conséquence Monsieur Hemmings et j'en connais un rayon -Dit-elle avec un petit sourire fataliste- Bien que j'aie essayé de lui faire comprendre l'inverse, Joe Duncan était aussi un idéaliste, comme Michael.
- Que lui est-il arrivé ?
- Il n'a pas su reconnaître le vrai danger, alors j'ai dû le mettre hors d'état de nuire.
- Vous l'avez tué ? -Je demande sèchement, imaginant vaguement la silhouette robuste au cheveux rouges mort dans un coin de l'Iceberg-
- Pas moi, mais si cela n'avait pas été fait, Pandore serait encore en danger.
- Pourquoi ne demandez-vous pas à Michael de la ramener ici?
- À votre avis ? Vous avez dit vous-même que s'il était parti à l'Iceberg c'était pour protéger Pandore, mais la protéger de qui ? -Elle fixe son regard sur le mien sans que j'ose répondre- Allons Monsieur Hemmings ne soyez pas timide, je sais ce que tout le monde pense de moi, vous ne me briserez pas le coeur.
- Il veut la protéger de vous.
- Exactement. Il ne me la ramènerait donc pas et ferait l'erreur de la laisser entre des mains ennemies.
- Comment pouvez-vous me prouver que vous n'êtes pas notre ennemie ?
- Je n'ai pas l'intention d'envoyer Pandore sur Terre. J'ignore si vous êtes au courant du projet Hunters, lequel était porté par Joe Duncan, mais il avait pour but d'envoyer des Illégaux sur Terre pour y préparer notre retour.
- Et pourquoi Pandore n'irait-elle pas ?
- Car cette histoire de préparer notre retour n'était qu'un écran de fumé. Joe avait prévu depuis longtemps d'amener Pandore sur Terre et ce depuis l'instant où il a vu à quel point je m'intéressais à elle -Elle commence enfin à descendre et me fait signe de la rejoindre- Il a vu une opportunité de s'opposer encore une fois à moi, sans trop savoir dans quoi il s'embarquait. Il ne savait pas pourquoi je la voulais tant, pourquoi je la gardais, alors il a prit le risque de tourner la situation à son avantage."
Elle m'arrête devant une porte qu'elle ouvre à l'aide de son bracelet. À l'inverse de toutes les autres portes de son laboratoire, c'était la seule visiblement fermée et je comprends pourquoi lorsque nous y pénétrons. A l'intérieur se trouvent tout un tas d'écrans, reliés à des caméras de surveillance disposées un peu partout dans l'Est. En bas des écrans il y a un ordinateur et elle se met à pianoter sur l'écran tactile en quête de quelque chose.
" Je vais vous donner un avantage sur Michael Clifford. Avant ma petite visite à l'Iceberg j'avais quelques doutes mais à présent j'en suis certaine et je sais très précisément où trouver la faille."
Elle pianote encore un moment non sans grogner, avant de pousser un cri de satisfaction. Et tandis que je regardais les écrans au dessus de nos têtes, découvrant un bloc de dix d'entre-eux alignés sous la mention "Terrier", elle me pointe du doigt un autre bloc d'écrans alignés sous la mention "Laboratoire-Est". À première vue, il s'agit du laboratoire dans lequel nous nous trouvons, chaque écran est à l'heure exacte, date exacte, jusqu'à ce qu'elle ne pianote sur son propre écran d'ordinateur. L'un des écrans du bloc se met à grésiller et s'anime dans le sens inverse. Elle est en train de remonter en arrière. C'est une pièce remplie de tubes à essai reliés à des ordinateurs, il y a beaucoup de monde qui y entre sans avoir à présenter de bracelets à l'entrée, j'imagine qu'il s'est donc passé quelque chose dans cette pièce.
" Tout comme vous j'ignore ce que nous allons trouver dans cet enregistrement et je n'y aurais pas songé si je n'avais pas compris."
Moi je ne comprends rien. De qui parlions-nous avant d'arriver ici ? De Michael, de Pandore et de Joe aussi. Je serre discrètement mon arme contre moi, me sentant de moins en moins en sécurité bien que je sois seul avec elle dans la pièce et qu'elle ne soit, normalement, pas armée.
" Le voilà!"
Je sursaute à son cri et j'aurais presque pu tirer si elle s'était retournée vers moi. Mais je suis invisible et il me semble qu'elle parlait plus pour elle que pour moi. En levant les yeux, je comprends qu'elle a stoppé la marche arrière. Nous avons fait un bond de plus de deux mois.
La pièce est aussi banale qu'elle ne l'est aujourd'hui, avec les mêmes tubes et les mêmes ordinateurs. Seulement il y a moins de monde.
Amadalia ne cligne pas des yeux, elle ne veut pas rater une miette de l'enregistrement et elle me parait plus terrifiante que jamais. On dirait une folle sur le point d'imploser. Je fais un discret pas de côté et reporte mon attention sur l'écran lorsqu'elle ne peut réprimer un nouvel hoquet de satisfaction.
" Il est là -Murmure-t'elle- Saleté de gamin."
Par gamin je m'attendais à voir Michael ou tout autre enfant de l'Est ayant eu accès au laboratoire secret, mais ce n'est pas un enfant qui vient de rentrer. Trapu et couvert d'une panoplie complète de chercheur, c'est un adulte qui prend place devant les tubes à essai. Personne ne semble faire attention à lui, car après tout il porte le même costume que tout le monde. Il reste dos à la caméra pendant une quarantaine de minute, s'active sur les tubes en faisant toute une batterie de tests qui ne m'inspirent rien avant qu'il ne se lève brusquement.
Il n'y a pas de son, mais à ses gestes il semblerait qu'il soit satisfait et automatiquement mon regard se pose sur l'écran d'ordinateur sur lequel brille une photo d'identité.
Un courant glacial me traverse en reconnaissant Pandore.
Ce n'est pas tout. Quelque chose clignote par dessus son visage et s'il n'y avait pas eu les couleurs, je n'aurais pas reconnu l'imposant I rouge des Illégaux, pixelisé à l'écran. L'homme toujours de dos attrape un téléphone et n'y reste pas longtemps, il pianote sur l'écran et le visage de Pandore disparait, sûrement envoyé sur les écrans de manche des Gardiens.
Je m'étrangle à cette pensée.
Le coup de fil, le visage de Pandore avec ce I rouge placardé sur son visage... Et la date. Tout concorde, c'est le jour où elle a été dénoncé.
Je serre la crosse de mon arme mais pas de peur cette fois. Une rage commence à m'animer alors qu'à présent je sais qu'on a voulut me faire porter le chapeau de cette dénonciation.
Je ne l'aurais jamais fait!
Alors qui?
Je suis tellement à cran qu'à présent c'est moi qui fixe l'écran sans cligner des yeux, sans même m'occuper du regard d'Amadalia sur moi.
Je fixe l'homme s'éloigner de l'ordinateur et ranger le matériel après avoir vérifié que personne ne le voyait. Il range tout dans une mallette et s'empresse de s'en aller. Cela se passe en une fraction de seconde, mais je n'ai pas cligné des yeux. Je vois tout. Et tout ce que j'aperçois au moment où l'homme se tourne et disparait, ce sont des mèches rouges, s'échappant de la combinaison.
Joe Duncan.
*
" Vous le saviez -Dis-je enfin, amer-
- J'en ai eu la confirmation récemment -Elle coupe l'enregistrement et revient à la date d'aujourd'hui, où personne ne se trouve plus dans la pièce- Je suis revenue ici pour vérifier par moi-même et je suis contente que tu aies pu voir ça toi aussi.
- Elle avait confiance en lui.
- Plus qu'en vous ça c'est certain. J'ignore encore comment il a pu rentrer ici, j'avais tout fait pour l'en emp...
- Pandore et toute sa famille pensent que c'est moi qui l'ai trahie! -Je la coupe, fou de rage- Ce salaud s'est servi d'elle!
- Il s'est servi de vous tous. C'est grâce à vous, ainsi que Michael Clifford, qu'il a pu s'approcher d'elle sans éveiller de soupçons. Cet appel qu'ont reçu les Gardiens à propos de soit disant tests sur des cheveux, c'était ingénieux. N'importe qui aurait pu trouver ses cheveux et les faire examiner surtout que les rumeurs sur son illégalité se renforçaient au fil du temps. Les soupçons se sont naturellement posés sur vous, c'est ce qu'il voulait. Moi-même je pensais qu'il s'agissait de vous, sur un coup de tête après que je vous ai fait punir.
- Jamais je ne l'aurais trahie, j'ai perdu mon frère à cause de ces conneries ! Je la détestais mais je ne lui aurais jamais souhaité ça ! Et ce salaud il a profité de la situation!
- Je comprends votre colère et j'aurais eu plaisir à vous voir vous venger de lui, mais ce n'est plus la peine aujourd'hui. Ce qui compte, aujourd'hui, c'est de ramener Pandore à sa juste place. Joe voulait sciemment l'envoyer sur Terre pour son propre plan, pas par amitié ou je ne sais quelle idiotie qu'il lui aura fait miroiter.
- Que voulait-il faire sur Terre ?
- Pandore aurait été sa monnaie d'échange, son salut pour pouvoir contrôler la Terre.
- Mais il n'y a plus rien à contrôler sur Terre ! -Je lance agacé-
- Ce que vous ignorez n'est pas obligatoirement irréel.
- Arrêtez de parler par énigmes ! -Dis-je en tirant mon arme et la pointant sur elle, ce qui ne semble pas l'effrayer- IL Y A QUOI SUR TERRE ?!
- Si vous me tuez, vous ne le saurez jamais."
Je serre vigoureusement mon arme au point de faire blanchir la jointure de mes doigts, à cran. Pris entre l'envie de la tuer et celle de tuer Joe, même déjà mort, mon cerveau bouillonne et j'imagine tout un tas de situations possibles. Si je la tue maintenant je pourrais aller à la Bulle chercher un Sub et m'enfuir avec ma mère et Cécile ou bien-même je pourrais aller récupérer Pandore et Michael. Mais si je la tue, Nicholson me tombera forcément dessus. L'AGFA est un serpent à deux tête et bien que l'une semble être la seule tête pensante, l'autre peut également faire sombrer l'Est.
" Choisissez bien votre camp Hemmings -Dit-elle tout bas comme si elle avait lu dans mes pensées- Ne faites pas la même erreur que Pandore. Je veux nous sortir tous de là.
- Alors dites-moi la vérité, sinon je ne vous ferai pas confiance et vous devrez compter sur quelqu'un d'autre pour vous ramener Pandore.
- Suis-moi."
Encore une autre satané pièce et donc une satané énigme. Je fini par baisser mon arme afin que mon comportement ne soit pas suspect en sortant de la salle des écrans de surveillance. D'ailleurs, elle aurait pu sonner l'alarme, ordonner de m'abattre au moment où je suis sorti, mais rien ne se passe. Elle marche tranquillement le long des escaliers en métal et nous continuons à descendre toujours plus bas.
Je ne sais pas si c'est l'afflux de colère ou le fait de descendre toujours plus profondément, mais mon crâne me fait mal. Au bout d'un moment mon écran sur ma manche annonce la réception d'un message et pensant y trouver une réponse de Michael, je remarque qu'il s'agit de la vidéo de surveillance incriminant Joe.
" Vous la montrerez à Pandore, elle doit connaître la vérité.
- Et comment lui faire comprendre que ce n'est pas truqué ?
- Vous demanderez à l'ancienne collègue de Joe, Mélawi. Elle était au courant -Elle se tourne enfin vers moi- Je vous l'ai dit, elle se fit aux mauvaises personnes."
Comment avaient-ils tous pu se faire berner par cet inconnu qui avait débarqué du jour au lendemain, prétendant s'intéresser à Pandore pour son potentiel sportif. Comment ai-je pu me faire berner. Je la pensais en sécurité, il n'y avait que moi qui le savais, tout ne reposait que sur moi, sur mon silence et elle le savait. Comment a-t'elle pu croire que c'était moi ?
Sur le point de faire une autre crise, j'enfonce mes mains dans mes poches, effleurant du bout des doigts ce que je sais être un bout de la photo de Pandore piquée à Michael.
Michael a dénigré les Illégaux. Joe l'a dénoncée, cette Mélawi a couvert Joe et Éponine a balancé Pandore dans la classe. Et se sont ses amis ?!
J'étais peut-être son ennemi mais moi au moins je l'ai protégée.
" Nous sommes arrivés, seulement avant d'entrer j'aimerais que vous me fassiez une promesse -Je m'arrête, sortant de mon tourbillon de pensés et découvrant la dernière porte la plus en bas du laboratoire- Ce laboratoire est top secret il en va de soi, mais ce qu'il y a à l'intérieur est encore au-delà du secret si un au-delà est possible.
- Je ne dirai rien.
- Je vous en remercie, mais je ne peux pas me fier qu'à votre parole, ce serait trop risqué car je sais à quel point les enfants son rebelles et stupides.
- Alors quoi, vous voulez que je signe quelque chose sur... ma vie ?
- J'aurais seulement besoin de votre sang."
Mon sang ? C'est une blague ?
Ma stupéfaction l'emporte sur ma crise de nerfs et je suis pris au dépourvu quand elle me montre une seringue vide, encore emballée comme pour justifier la présence d'aucun poison.
" A quoi mon sang peut vous servir si je trahi votre secret ?
- Je vous l'ai dit, je suis La scientifique et si je le souhaite je peux imaginer tout un tas d'arme à tête chercheuse capable de vous identifier à l'aide de votre sang."
L'idée semble absurde pourtant je me liquéfie. Toutes ces avancés technologiques, ces sérums, ces subs, ces champs de force, ce laboratoire. Tout est régit par sa seule personne et elle semble bel et bien capable de créer une telle arme, si ce n'est pas déjà fait.
" Vous comprendrez que c'est pour le bien du Gouvernement de l'Est.
- Et si je n'entre pas dans cette pièce ?
- Vous en avez déjà trop vu mon garçon et je ne veux pas avoir à vous tuer. Je vous ai fait venir car je savais que vous aviez l'esprit pour et surtout que vous étiez mon dernier espoir de récupérer Pandore. Ne me décevez pas maintenant."
J'observe la seringue. Elle semble vraiment neuve et hors de tout soupçon. Aussi si elle souhaite vraiment m'utiliser pour récupérer Pandore, elle n'y gagnerait pas à me tuer ou à me transformer en je ne sais quoi. Je finis par tendre mon bras à la seule condition que ce soit moi qui me pique.
Lorsque la seringue arrive dans ma main, je comprends qu'il s'agit d'un jeu de confiance mutuelle. Elle sait que je pourrais retourner cette seringue contre elle et la tuer avec. Ça serait tellement simple, trop simple. Elle le sait. Je le vois dans ses yeux. Elle savait que je réagirai ainsi et que l'idée me traverserait la tête. Mais elle savait que je ne ferai rien pour les mêmes raisons que j'ai accepté de lui faire confiance. Je dois aller dans son sens.
C'est bien là la différence avec Michael.
Si il avait accepté de la suivre, il aurait tout tenté pour la faire tuer, quitte à mourrir à son tour. Il serait mort pour Pandore.
Mais une fois mort, quelle aide lui aurait-il apporté ?
Elle n'aurait plus aucun véritable ami. Personne pour la protéger de la deuxième tête du Serpent, Nicholson. Si je reste en vie suffisamment longtemps grâce à mon manque d'idéalisme, alors peut-être pourrais-je me racheter.
Encore une fois Amadalia semble lire dans mes pensées et ne me presse aucunement. Elle hoche seulement la tête car c'est la seule chose sensée à faire. Je ne suis pas en position pour jouer les héros.
Alors j'ouvre l'emballage et me fais moi-même une prise de sang.
Mon pacte avec la première tête du Serpent est scellé.
" Bien, à présent suivez-moi."
Je lui remets la seringue qu'elle range soigneusement dans une pochette vierge en échange d'une compresse neuve, comme si elle l'avait préparé à l'avance et elle actionne son bracelet contre la dernière porte, massive, blindée.
À l'intérieur deux Gardiens armés jusqu'aux dents montent la garde. Ils ne semblent pas normaux et en pensant à Héda, je me dis que la moitié de la garde rapprochée d'Amadalia doit être génétiquement modifiée en cas d'attaque d'une grande intensité.
Puis, passé les Gardiens, nous débouchons sur un autre escalier.
"Attendez avant de descendre"
Elle dit ça en me tenant par le bras, de l'autre main elle pianote sur son petit bracelet-montre et après un énième bip en provenance de l'escalier, elle me lâche.
L'escalier en question s'illumine et une dalle, précédent la première marche, s'active.
" Veillez à bien appuyez vos deux pieds dessus."
Inutile de demander pourquoi, je suis certain que l'escalier est piégé. Il semblerait qu'Amadalia se donne énormément de mal pour cacher la pièce la plus cachée du labo.
Comme demandé, j'appuie mes deux pieds sur la dalle mais je préfère descendre après la Gouverneur. Elle appuie ses bottes quelques secondes, comme si c'était un paillasson qui absorbait l'eau sous les pieds et s'avance dans l'escalier lumineux.
Rien ne se passe, enfin rien de facheux. Je la suis, observant là encore l'énorme espace en acier.
" C'est vous qui avez construit tout ça?
- C'est un héritage familial des Lambert. Je n'ai fait qu'y ajouter ma touche personnelle. À la base c'était un refuge pour les scientifiques de l'Est chargés d'étudier les nouvelles maladies qui ont touché le Nouveau Canada.
- Alors les Gouverneurs de l'Ouest n'ont jamais su que ce laboratoire existait ?
- Oh si il y en a eu un, mais disons qu'après sa mort pour le moins bizarre, ma famille a préféré faire chambre à part comme on dit. Nous avons gardé le laboratoire à la Rûche pour ne pas éveiller les soupçons, mais pour tout vous dire, je suis presque sûre que l'Ouest a ses propres petits secrets bien gardés.
- Et sinon... Quelle est votre touche personnelle ?
- Cette salle est truffée de pièges, il n'y a que moi qui y ai accès et qui sache comment les éviter. Oh j'aurais bien aimé que Joe y entre, il aurait pu tenir tête à mes gardes, mais il serait mort bien après.
- Pourquoi Joe a-t'il eu accès au laboratoire d'ailleurs ? Ou plutôt, comment en connaissait-il l'existence? Aux dernières nouvelles il n'était pas scientifique."
Mais elle ne répond pas. Elle fait comme si elle n'avait pas entendu pourtant ses dents sont serrées au point de se briser. Cette haine entre eux, tout est lié à Pandore ?
Arrivés en bas de l'escalier une autre porte nous barre la route. Même rengaine, le bracelet pour ouvrir, un bip sonore venant de la porte elle-même et un souffle de vapeur faisant s'ouvrir le dernier rempart vers la vérité.
Encore une pièce circulaire gigantesque. Elle s'allume aussitôt et mon souffle se coupe à la vue d'énormes Subs contre un des murs, lesquels montent jusqu'à une hauteur indéfinie, semblable au loin couloir que nous avions descendu pour arriver ici. il y a donc un accès de sortie qui ne nécessite pas de faire marche arrière.
Contre un autre mur je reconnais des réacteurs de champ de force inactifs mais eux aussi démesurés et juste à côté des tas d'écrans avec une image de mauvaise qualité. D'ici ça ne ressemble pas à un endroit que je connaisse. Est-ce l'Ouest qu'elle espionne depuis cette base bien cachée dans les profondeurs ?
Au centre et c'est le dernier élément majeur, se trouve une forme abstraite, monstrueuse, cachée sous un drap de longueur titanesque et bien que je pensais qu'elle le soulèverait, elle ne fait que le longer, m'invitant à la suivre sans toucher à rien sans quoi je serai pulvérisé sur le champs par des espèces de lasers sortant des murs.
Mais qu'est-ce que c'est que cet endroit et qu'avaient en tête les Lambert depuis des générations pour garder et armer une telle forteresse ?
D'ailleurs, si on pouvait aménager ces endroits, nous n'aurions plus aucun soucis de manque de place et de surpopulation là-haut. Mais à l'évidence, l'Est ne veut pas peupler le Nouveau-Canada, elle veut s'en échapper. Ces Subs en sont la preuve.
" Si Pandore revenait au Nouveau-Canada, elle serait mon assistante ici. Je la garderai bien au chaud, protégée, le temps de régler les derniers problèmes. Vous aussi seriez la bienvenue.
- Qu'est-ce que c'est que cette pièce.
- C'est la pièce décisive, celle qui nous apportera une nouvelle vie. Notre temps ici bas est désormais compté, au dessus de nous se livre une guerre silencieuse et si nous restons cachés encore trop longtemps nous aurons perdu.
- Au dessus de nous, vous voulez d...
- Nous ne sommes pas les seuls à vouloir reprendre nos terres. En plus de l'ouest il existe des menaces bien plus grandes et Joe en avait conscience, c'est pour ça qu'il voulait Pandore, il voulait l'échanger. Moi je veux la garder.
- L'échanger contre quoi ?
- Je te l'ai dit -Dit-elle en changeant de ton à mon égard- Sa suprématie sur Terre."
Et elle me montre les écrans dont l'image rendue par les caméras est miteuse, eux aussi séparés en deux blocs, au dessous desquels brillent les mentions MONTRÉAL et TORONTO.
Je manque de tomber à la renverse.
Ce sont des images de la surface.
" Joe le savait ? -J'articule difficilement-
- Joe a toujours su quel était mon but et par jalousie il a tenté de me dépasser.
- Mais p...pourquoi ?
- Montréal en tant que partie francophone reviendra aux Lambert. Il a toujours voulut être supérieur, ce petit enfant pourri gâté -Elle se tourne vers moi, amusée mais malsaine- Tu n'as toujours pas compris ? Joe Duncan était mon ignoble et illégal de petit frère. Joe Lambert."
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