Chapitre onze
❝ On dit que la trahison est une question de date ❞
Trois jours sont passés depuis le début de ce qui semblait être l'avant-dernière épreuve. Tsubasa avait consacré son temps à du repérage et éviter tous les autres candidats. Une fois ses marques prises, à l'aube du quatrième matin, cette dernière se mit en marche. Reposée du manque de sommeil et parée à la traque, elle commença à sillonner les environs à la recherche de sa cible. Premier objectif peu compliqué, au vu de la petite taille de l'endroit et ses années d'expérience dans la chasse à la prime. Avant midi, elle était sur les traces de Kurapika. En Zetsu, cachée tantôt au milieu des branches ou derrière un arbre, la blonde attendait le parfait moment pour lui récupérer son badge. Il se trouvait déjà en compagnie de quelqu'un, le présumé Léorio dont Kirua et Gon avaient parlé au début de l'examen. Il lui fallait donc attendre patiemment.
Les heures défilèrent. Ainsi que la journée, puis la nuit tomba. Désespérée de ne pas les voir se séparer, Tsubasa se demanda si attaquer de front ne serait pas une décision plus simple. Alors qu'elle se triturait les méninges afin de peser le pour et le contre, le duo s'agita.
— Mon couteau ! s'écria le brun. J'ai perdu mon couteau !
— Et alors ? répondit Kurapika.
— Il faut qu'on retourne sur nos pas, je dois le récupérer !
— Quoi ? Non, c'est hors de question. Il fait noir, on va se perdre et n'importe qui pourrait nous tomber dessus !
Une dispute. Un sourire étira les lèvres de la Berisha, cachée derrière un tronc d'arbre. Les deux amis levèrent vite le ton, pour décider qui avait raison mais ne purent arriver à un terrain d'entente. Ça ne pouvait pas mieux tomber.
— Tu fais ce que tu veux, mais moi, je reste ici ! s'écria le blond.
— Bah moi, je vais chercher mon couteau sans toi ! rétorqua son aîné.
— Ne te plains pas si tu te fais dépouiller en chemin !
— Hein ? Qu'est-ce que tu dis, j'entends pas, tu es trop loin ! ironisa Léorio en s'enfonçant dans les buissons.
Kurapika soupira d'énervement. Il s'adossa contre le bois et se laissa glisser contre. Il ne savait pas s'il devait continuer ou attendre ici. Les deux solutions semblaient dangereuses. C'était bientôt la fin de l'épreuve, Léorio avait son badge et celui de sa cible, tandis qu'il restait à quatre points. Son badge et un récupéré sur un candidat inconscient.
Un bruit le tira de ses songes. Une branche venait de craquer à proximité. Alarmé, ce dernier se redressa immédiatement et attrapa ses deux épées en bois. Les environs s'agitaient, comme si quelqu'un s'approchait. La seconde d'après, il distingua une forme qui s'avançait jusqu'à être illuminée par le clair de lune. Les feuilles dessinèrent des ombres sur son visage mais il pouvait la reconnaître.
— Tsubasa ? s'étonna-t-il. Qu'est-ce que tu fiches ici ?
Elle continua d'avancer sans rien dire. Il pointa ses armes dans sa direction.
— Arrête-toi ! s'exclama-t-il. Je ne te fais pas confiance !
— Et tu aurais bien raison.
Il arqua un sourcil, étonné. La jeune femme s'arrêta à une distance raisonnable. Ils se toisèrent pendant quelques secondes. Kurapika ouvrit la bouche pour parler mais elle le devança :
— Ta tentative désespérée de me soutirer des informations sur le bateau m'a réveillée. J'y ai pensé ces derniers jours. Désespérée, certes, mais habile.
— Et alors ?
Il ne flancha à aucun moment. Abaisser sa garde aurait été de la folie, malgré tout il resta très attentif à chacun de ses mots.
— Tu es venu me parler de "douleur". D'une sensation étouffante qui m'entourait, que tu ne pouvais ignorer. Ça m'a mis en rage d'entendre une chose pareille de la part de quelqu'un comme toi. Puis j'ai un peu réfléchi. Et tu sais quoi ?
Il secoua la tête, incrédule.
— Tu avais raison.
Tsubasa rit nerveusement. Un frisson d'effroi parcourut Kurapika qui manqua de reculer d'un pas. Une main sur son visage, ses épaules se secouaient au rythme de ses esclaffements.
— Tu ne peux pas t'imaginer l'enfer dans lequel j'ai vécu ces dernières années, continua-t-elle sans s'arrêter de rire. Un cycle de torture, pression mentale, banalisation de la violence, entraînement interminable... L'exploitation infantile de ma famille. Et j'en suis sortie. Je suis une bête sauvage lâchée en liberté.
Le Kuruta ne dit rien. Il ne s'en donna pas le droit et laissa ses paroles lui retomber dessus sans broncher.
— Je sais des choses qui te feraient trembler d'effroi. J'ai vu des choses qui auraient pu te faire tourner de l'œil. J'ai fais des choses qui te dégoûteraient. Toi et moi n'avons absolument rien en commun.
Elle s'avança pour se trouver à proximité de ses épées et s'en glissa une sur sa propre gorge, sans même sourciller.
— Et pourtant, tu t'es permis de me juger.
— Ce n'est pas ce que je voulais faire ! se défendit-il.
— Alors pourquoi ton arme est pointée contre moi ?
Il voulut lui dire qu'elle venait juste de se mettre en joue sans qu'il ne bouge le petit doigt, mais il préféra simplement ranger ses deux épées.
— Je ne souhaitais en aucun cas t'offenser, reprit le blond. Pour être honnête, je voulais aussi m'assurer que ça allait. Personne ne fait une tête pareille quand tout est parfait dans sa vie.
— Oh, tu t'inquiétais ?
— Qu'est-ce que ça peut faire ?
— Eh bien...
La Berisha franchit la distance entre eux, placée dans la zone de confort de son interlocuteur. Partagé entre l'incrédulité et la gêne, il ne put reculer, son dos déjà plaqué contre le tronc d'arbre.
— C'est plutôt intéressant de la part de celui qui se méfiait de moi, remarqua-t-elle.
— Tu ne rends pas la tâche facile, avec tes sarcasmes et ton agressivité, rétorqua-t-il.
— Tu as cherché à travailler avec moi, il me semble. Et justement, j'en profite d'en reparler pour te dire que je te serais peut-être utile.
— Utile ? répéta Kurapika en haussant un sourcil.
— Tu veux retrouver la Brigade Fantôme, non ? Je me suis dis qu'on pourrait...
Le corps de la jeune femme se colla contre celui du Kuruta qui suivit ses mouvements d'un œil attentif. Un peu tendu, la situation lui échappait seconde par seconde. Malgré ses centimètres en moins, Tsubasa l'intimidait à sa manière. Il faillit déglutir lorsque ses mains ses posèrent de chaque côté de sa taille, contre l'arbre.
— Discuter de cette fameuse collaboration, termina-t-elle.
Il rit jaune, confus. Ce qui se passait ne semblait pas réel à ses yeux. Ils avaient une conversation qui manquait de sens. Qui ressemblait un prétexte pour en arriver à cet exact moment. Il était loin d'être dégoûté, sa méfiance restait simplement en alerte.
— Discuter, hein, souffla le blond.
— Oui, pour travailler ensemble, comme tu l'as émis ce fameux soir, dit-elle un sourire espiègle aux lèvres.
— J'avais bien compris la première fois, lança ce dernier sans flancher.
— Donc est-ce que ça te dit ?
Ses doigts attrapèrent le col du survivant afin de le rapprocher encore. Il manqua de s'étouffer, incapable de réagir. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait. Comment d'une dispute avec Léorio, il se retrouvait là avec Tsubasa. Il récupéra le contrôle de ses mouvements lorsque la jeune femme effleura presque ses lèvres avec les siennes. Kurapika posa sa main sur sa bouche doucement, pour l'en empêcher.
— Ta proposition a l'air intéressante, finit-il par répondre. Mais j'ai besoin de temps pour l'examiner.
Elle attrapa son poignet, se libérant. Tête penchée sur le côté, la Berisha ne perdit pas son sourire.
— Il me faut une réponse tout de suite.
Les pensées du blond défilaient à toute vitesse dans son esprit. Il analysait le pour, le contre et les risques. Puis, en l'espace de quelques secondes, tout s'arrêta. Les battements irréguliers de son cœur résonnaient, la chaleur l'empêchait de réfléchir. Il releva le menton de Tsubasa et scella leurs lèvres sans un mot. Le duo glissa sur le sol, à genoux entre les jambes de ce dernier. Ses mains allèrent se balader dans les cheveux de Kurapika et leurs souffles s'entremêlèrent.
La jeune femme écarquilla les yeux quand son dos heurta l'herbe et que son sac fut jeté sur le côté. Presque paniquée, elle n'eut pas le temps de protester que le Kuruta reprit leur échange. Ses mains attrapèrent ses flancs. Puis il se recula, un air étrange sur le visage. Sa vision troublée, il peine à distinguer son interlocutrice.
— Tu as...
Elle tenait une fiole dans sa main, bouche couverte par un tissu. Une vapeur presque invisible s'en échappait. Au plus elle se propageait dans l'air, au plus il y voyait mal. Il retomba sur le côté, incapable de bouger.
— Au fait, l'interpella cette dernière en refermant le récipient avec un bouchon en liège. J'ai oublié de te montrer quelque chose.
Elle sortit de sa poche la carte que tout le monde avait pioché dans l'urne. Une fois retournée, il fut incapable de dire quoi que ce soit mais ce fut assez près pour qu'il voit le numéro dessus.
— Je te remercie pour ton badge, Blondie. Fais de beaux rêves.
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