Chapitre 14: Blood in the River
— Comment ça, célibataire ? Je ne veux pas rompre avec toi, moi !
— Il n'en est pas question, Gon. Moi non plus, je n'en ai pas l'intention. C'est juste mieux de faire croire ça pour monter sur scène.
— Et que tu sois hétéro aussi, c'est mieux pour monter sur scène ?
— Oui...
— Mais tu es gay, Kirua !
— En fait, je ne sais pas trop.
— Qu'est-ce que tu veux dire ? C'est évident, non ? Tu m'aimes, et je suis un homme, alors tu aimes les hommes.
— Oui, je sais ça, mais ça ne rend pas les choses plus évidentes.
— Tu es attiré par les filles ?
— Je ne sais pas... Peut-être. Je n'en ai aucune idée. Il n'y a que toi que je... Je n'ai jamais regardé les autres, alors je ne suis sûr de rien.
Gon garda le silence un instant, les yeux rivés sur lui, ébranlé par son émouvante sincérité. Blessé d'abord, touché ensuite, il ne savait plus comment gérer sa frustration et la confusion de son petit-ami. Kirua n'avait pas pour habitude de lui livrer ses doutes et, affecté mais loin de vouloir lui faire de la peine, Gon éloigna tant bien que mal la tempête émotionnelle qui le menaçait.
— Kirua, je n'ai pas envie de faire semblant d'être seul. Je suis avec toi, et je t'aime. Je ne veux pas me cacher.
— Moi non plus, je n'en ai pas envie de faire semblant mais...
La tête baissée, les joues roses, Kirua se mordait la lèvre, incapable de finir sa phrase. Gon avait raison. Il le savait. Mais s'assumer, c'était abandonner l'unique rêve de sa vie, celui qui réalisait tous ses espoirs, celui à travers lequel il apercevait son avenir.
— Mais tu es prêt à te cacher pour être plus connu.
— Ce n'est pas seulement ça, Gon. Si on apprend la nature de notre relation, je devrai sans doute renoncer à chanter. Je ne m'en sortirai pas.
— Mais qu'est-ce que tu en sais ? C'est Pariston qui t'a dit ça. Est-ce qu'on peut vraiment lui faire confiance ? Ging ne l'aime pas, après tout.
— Les contrats sont déjà signés, c'est trop tard pour se poser la question. Et puis je ne pense pas qu'il disait ça pour me nuire. C'est juste son boulot. Il m'a expliqué ce dont j'ai besoin pour réussir, c'est tout.
— Mais peut-être qu'on peut le raisonner. Il y en a, des chanteurs gays et connus, alors pourquoi pas toi ?
— Mais ces mecs-là, tu peux les compter sur les doigts de la main, Gon. Regarde-nous. On est un énième groupe d'adolescents qui marche à peu près dans un télé-crochet. Ce n'est pas avec ça que je vais transporter les valeurs LGBT. Pariston n'y peut rien. Il m'a juste dit la vérité.
— Ça ne me plaît pas, Kirua. Je suis gay, et tu es mon petit-ami. Ce n'est peut-être pas très vendeur, mais c'est comme ça. Je ne veux pas faire semblant. Je ne veux pas avoir honte de ce que je suis. Je ne veux pas me retenir de te prendre par la main ou de t'embrasser parce que ça ne plaît pas aux autres. Je ne veux pas voir des filles te draguer sans réagir. Je ne veux pas faire comme si on n'était que deux potes... Je ne veux pas m'empêcher de t'aimer.
Déçu, mais peu surpris, Kirua baissa la tête en signe de capitulation. Sa chambre du deux-centième étage, qu'ils avaient désormais investie comme étant la leur prenait des allures nostalgiques. Les murs blancs s'engluaient du filtre sépia de ses souvenirs, et Kirua observait le lieu comme s'il l'avait déjà quitté. Les lueurs matinales illuminaient le visage de Gon pour l'embellir encore, et au fond de ses prunelles dorées, il retrouvait déjà la consolation qui lui permettrait de le suivre jusqu'au bout du monde.
— Je comprends, Gon, murmura-t-il, résolu. Je comprends que ça ne soit pas possible pour toi. Je m'y attendais... C'est peut-être mieux ainsi, finalement. On peut tout annuler, laisser tomber et commencer autre chose. On retravaillera ton Nen, puis on reprendra les missions d'Hunter, tous les deux. Au fond, tant qu'on est ensemble, ça me va.
Les mots de Kirua entrèrent en résonnance avec le cœur de Gon. Il palpitait déjà d'envie à l'idée de chercher un nouveau mentor, de retrouver son Nen grâce aux encouragements de Kirua et de repartir à l'aventure ensemble, main dans la main, sans que l'avis des autres ne puisse les toucher. Déjà, il entrevoyait les douces nuits d'été où, perdus en pleine nature, ils se blottiraient l'un contre l'autre en admirant les étoiles. Il sentait la brise fraîche, l'humide odeur de mousse au cœur de la forêt, mêlée au parfum sucré dont il ne pouvait plus se détacher.
En une phrase, un monde nouveau s'était déployé dans son esprit ; celui qui menaçait de s'ouvrir depuis plusieurs semaines, qu'il avait relégué dans un coin de son esprit, de peur de se montrer égoïste. Leurs péripéties le hantaient toujours, et la fissure du manque se creusait lentement dans son cœur, sans qu'il ne parvienne à en ralentir l'ascension. Le Nen et les combats peuplaient ses rêves, lorsqu'il s'évertuait à chanter pour partager la passion de sa moitié, et nier ses véritables désirs devenait douloureux.
Il était heureux de faire de faire de la musique, de lui plaire, à lui et des milliers d'autres gens. Mais sentir la force tranquille, la puissance régulière et immuable du Nen circuler dans ses veines, les frissons de plaisir parcourir sa peau, le déferlement d'énergie, ce n'était pas comparable. Hisoka avait raison. Gon ne vivait que pour se battre. C'était le danger de la mort imminente, l'excitation mêlée d'angoisse, la douleur triomphante du combat remporté qui le faisaient vibrer.
Seulement voilà, le Nen de Gon avait disparu depuis longtemps déjà. Ses rêves d'héroïsme se ternissaient chaque jour un peu plus avec ses souvenirs, et ce qui restait de son pouvoir d'antan le glaçait d'effroi. La masse noire et impénétrable de son aura ne lui laissait entrevoir que le carnage et la destruction, et Gon ne le supportait pas. Il s'était jeté corps et âme dans la musique pour savourer à chaque instant la présence de son petit-ami et de ses compagnons de longue date. Il s'était promis de laisser à Kirua la chance de réaliser son rêve, de l'accompagner dans son aventure. C'était à son tour de briller.
— Non, non. Je sais à quel point la musique est importante pour toi. Tout ce qui compte, c'est que tu réalises ton rêve. Cette aventure, c'est la tienne, Kirua.
§
Génocideur :
Tu crois que tes yeux deviendront rouges quand je te ferai jouir ?
Type à la chaîne :
Pardon ?
Tu te fous de ma gueule ?
Génocideur :
Un peu.
Type à la chaîne :
Et c'est comme ça que tu comptes « m'aider à me reconstruire » ?
Génocideur :
Peut-être. Je n'ai jamais été très doué avec tout ce qui concerne la bonté.
Type à la chaîne :
C'est sûr que piller, violer et tuer font plus partie de ton arbre de compétences.
Génocideur :
C'est vrai. En soi, c'est déjà pas mal. Tu ne trouves pas ?
Par contre, je suis au regret de t'annoncer que le viol n'a jamais fait parti des talents que tu dépeins si bien.
Type à la chaîne :
Oui. Toi, tu te contentes simplement de flirter avec la limite.
Génocideur :
Il n'y qu'avec toi que je flirte.
Type à la chaîne :
Comme si j'étais le seul.
Et puis tu appelles ça du flirt ?
Jusqu'à preuve du contraire, tu ne fais que me harceler.
Génocideur :
Et alors ? Ça fonctionne bien, non ?
Type à la chaîne :
Non.
Génocideur :
Alors comment tu justifies ton trouble ?
Type à la chaîne :
Quel trouble ?
Génocideur :
Mmh... Celui de notre dernière rencontre, par exemple.
Type à la chaîne :
Qui t'a dit que j'étais troublé ?
Génocideur :
Mon petit doigt.
Et tes pupilles dilatées
Tes joues roses
Tes soupirs bruyants quand je m'approchais de toi...
Type à la chaîne :
...
Je ne sais pas de quoi tu parles.
Génocideur :
Tu vois ? Même là, je te trouble.
Type à la chaîne :
Oui bah je ne sais pas ! Peut-être que me faire agresser dans les couloirs par le mec qui a foutu ma vie en l'air est un peu troublant !
Génocideur :
Oh mais arrête avec ça, Kurapika.
Tu te caches derrière tes excuses pour faire semblant de ne pas vouloir me sauter dessus.
Mais toi et moi, on sait très bien ce que tu veux vraiment.
Type à la chaîne :
Et qu'est-ce que je veux ?
Génocideur :
Ma bite.
Type à la chaîne :
C'est fou.
Tu me dégoûtes encore plus qu'avant.
Génocideur :
Mmh... Je vois que tu esquives le sujet.
Tu sais ce que tu n'as pas esquivé ?
Type à la chaîne :
...
Génocideur :
Notre baiser ( ͡° ͜ʖ ͡°)
Type à la chaîne :
J'étais bourré. C'est tout de suite plus difficile d'éviter les obstacles.
Génocideur :
Je suis un obstacle ?
Type à la chaîne :
Clairement.
Génocideur :
Je suis flatté. Je ne pensais pas que tu m'accordais tant d'importance...
Type à la chaîne :
Je te déteste tellement.
Génocideur :
Oh, tu sais ce qu'on dit : le lit de l'amour est le même que celui de la haine.
Type à la chaîne :
Personne ne dit ça.
Génocideur :
Et c'est bien dommage.
Bon, je dois aller répéter.
Viens me voir, ce soir. Ça me ferait plaisir de voir tes jolis yeux au milieu de la foule.
— C'est votre crush qui vous déconcentre autant ?
Les mains calées sur les hanches, Machi considérait le Chef de la Brigade Fantôme avec un dédain à peine voilé, les sourcils arqués par l'exaspération. Ses cheveux roses et touffus s'étaient emmêlés au fur et à mesure de la répétition, tandis qu'elle gérait la séance à bras le corps, plus motivée que jamais.
La jeune femme témoignait généralement plus de respect au Lucifer, mais depuis quelques semaines, celui-ci tendait le bâton pour se faire battre, à force rêvasser et pianoter sur son téléphone, un sourire niais coincé sur les lèvres.
— Peut-être.
— Donc vous avez vraiment un crush !
— On se posait la question depuis un moment avec les autres, avoua Nobunaga. C'est une fille ?
— Va savoir, rétorqua Kuroro, évasif, amusé par l'intérêt du groupe et leurs grands yeux écarquillés rivés sur lui.
— Mais comment vous trouvez le temps de vous chercher une petite amie ? demanda Phinks.
— Qui a parlé de chercher ?
— Quoi ? Ça veut dire qu'on la connaît ?
— De loin, je suppose. Bon, on reprend ?
— Oui, c'est très bien les feux de l'amour, mais on a encore du boulot, ajouta Machi.
— Phinks, en tant que batteur, tu es le garant du rythme, alors fais attention. Si tu continues d'accélérer comme ça, je te remplace par Karuto.
— C'est impossible, coupa Machi. Je le garde en deuxième guitariste. Phinks ne sait pas jouer et il est hors de question que j'assume les parties toute seule.
Kuroro souffla, tandis qu'elle le fixait avec défiance, campée sur ses deux pieds. Machi était le seul membre de la Brigade à lui tenir tête avec autant d'aplomb. D'habitude, son franc parler l'amusait beaucoup, mais cette fois-ci, il se retenait de lui voler son Nen pour lui coudre la bouche avec.
Le Kuruta jouait avec ses nerfs. Il avait pris trop de place et d'importance, sans que le Lucifer ne l'ait vu venir. La frustration, la colère ou la peine s'étaient abaissés au rang des sentiments gérables. Mais c'était la première fois qu'il ressentait une attirance d'une telle intensité. Son désir allait bien au-delà de la pulsion sexuelle qu'il adorait prétendre. En réalité, il ne voulait que l'embrasser encore, s'enivrer du liquoreux parfum de ses lèvres, et glisser ses doigts dans ses cheveux. C'était tout. La chasteté de ces désirs omniprésents l'obsédait à force de le troubler, tandis que le souvenir de Kurapika dansait à l'infinie dans les méandres de sa mémoire, comme l'automate inépuisable d'un coffret à bijoux.
Il avait appris à décrypter cette pâle caricature de son visage, et savait désormais y déceler sa joie contenue ou les prémices de sa colère. Il l'avait embrassé encore et encore, sans que jamais cela ne le comble. Il l'avait détaillé des yeux sous chaque angle, dans toutes les postures, et alors, l'inquiétude était née dans son esprit. Le voile du désir avait gommé ses cernes boursoufflés, son teint cireux et sa maigre stature. Les yeux rougis qu'il avait aperçu à leur dernière rencontre avaient pris des proportions démesurées, où le vitré partiellement irrité laissait voir des veines saillantes d'une lueur maladive et fiévreuse. L'anormale dilatation de ses pupilles avait plongé le Lucifer dans une angoisse rarement ressentie, et une culpabilité profonde, alors que l'hypothèse invraisemblable se formulait lentement dans son esprit.
Les mots ne collaient pas ensemble, mais tous les signes étonnants qu'avaient remarqué Kuroro y prenaient un sens. Ses sautes d'humeur, courantes et injustifiables. Ces longues heures passées à l'ignorer, suivies d'un répondant désinvolte à mille lieux de son caractère. Ses accès de rage, ses dépressions soudaines. La peur d'y lire sa responsabilité l'avait empêché de les voir, mais tous les signes concordaient vers une seule vérité. Kurapika s'était coincé dans un ascenseur émotionnel, un paradis artificiel que Kuroro avait minutieusement modelé. Consciemment ou inconsciemment, il ne savait pas vraiment. Mais cette implication mortifère pesait bien plus lourd que les autres. Kurapika se droguait, régulièrement et sous nez, peut-être depuis longtemps, et Kuroro ne parvenait pas à comprendre ce qui avait changé, ce qui l'avait fait passer d'un adolescent modèle à un jeune homme désœuvré.
Très vite, la réalité l'éclaira d'une lumière blanche et sans filtre. Ce qui avait changé, c'était la haine. Elle s'était effacée, et il ne restait rien. Toute la vie de Kurapika tournait autour de lui depuis le massacre. Kuroro s'en était assuré, sans jamais mesurer la véritable ampleur de ses actes. La marionnette s'était brisée avant qu'il n'en saisisse l'importance et sans qu'il ne sache comment la réparer. « C'est toi ma vie, Kuroro » sonnait nettement moins romantique, désormais. Ce n'était pas une déclaration d'amour. C'était la vérité nue, sale et déprimante. Il n'y avait que lui, et un océan de vide après que la haine eut disparue.
Kuroro avait ruiné Kurapika. Pour le passé. Pour l'avenir. Pour tous les jours où un sourire s'échouerait sur son visage. Le monstre de haine s'était changé en une dépression dévastatrice, trop douloureuse pour être libérée, et muselée au creux de sa gorge.
Seule la colère palliait à la destruction. Seule la rage le maintenait debout. Contre Kuroro, contre le monde entier, contre son passé et contre lui-même. Alors, s'il n'y avait que la haine pour le protéger, Kuroro la décuplerait, la déclencherait à l'infini, jusqu'à le tirer, à la sueur de son front, des griffes du désespoir.
Le Lucifer darda son regard d'argent sur son groupe. La Brigade Fantôme était restée fidèle à elle-même. Puissante et effrayante. Le style avait suivi. Du métal. Violent. Agressif. Des mots crus, arrachés à la trachée. Une finesse enrobée dans la brutalité. Chacun y avait trouvé son compte. Feitan chantait aux côtés de Kuroro et Nobunaga. Shizuku les accompagnait au clavier. Karuto avait appris la guitare en mimant les gestes de son frère, lorsqu'il l'espionnait entre les entrainements. Machi s'était formée en autodidacte, lors des après-midis calmes passées au QG, à l'instar du reste de la Brigade. Nombreux et particulièrement doués, ils s'étaient hissés en favoris du concours sans difficulté, aux côtés de L.P.M, Irumi et Hisoka, malgré un échec humiliant, quelques semaines auparavant.
L'aîné Zoldyck s'était chargé de les éliminer, les scores serrés jouant en sa faveur. La défaite avait créé des remous au sein de l'équipe. L'incompréhension et la déception avaient généré une volonté de fer. L.B.F était revenu plus impitoyable encore. Ils avaient massacré leurs adversaires dans des notes sanguinaires, fatales.
La victoire d'Irumi était, à leurs yeux, passée de l'humiliation totale à la simple erreur de parcours. Seuls Hisoka et L.P.M attisaient leur curiosité méfiante, étant les uniques musiciens du concours à n'avoir pas encore échoués. Prête à les écraser, la Brigade les considéraient déjà comme les adversaires dont dépendaient leur succès. Pour eux, XHuntor n'était pas un jeu. Il ne l'avait jamais été. C'était un champ de bataille. Et l'amour n'y avait pas sa place.
§
Il s'était retrouvé dans les gradins de l'arène sans réellement comprendre comment, porté par ses jambes jusqu'à un siège éloigné de la scène. La promesse intérieure du Kuruta n'avait pas été longtemps gardée. Il s'était juré de ne plus accorder la moindre attention au Lucifer, mais ce dernier l'avait encore préservé de ses démons intérieurs. La gratitude collait à la peau de Kurapika comme un vieux chewing-gum. La drogue aussi. Chaque sevrage rendait l'addiction plus forte et troublante.
Combien de fois n'avait-il pas vomi ses tripes dans les toilettes de l'hôtel, après avoir vu le monde des morts, mêlé à celui des vivants, tanguer devant ses yeux comme un manège d'enfer ? Combien de fois s'était-il réveillé en sursaut, en plein après-midi, couvert de sueurs froides et poisseuses ? Combien de fois ses yeux l'avaient-ils brûlé du manque de sommeil, asséchés par ces longues nuits passées à contempler le décor de fin du monde, esquissé sur son plafond aux gras traits de ses angoisses ?
Kurapika était arrivé à la conclusion qu'il allait finir par se tuer, et cette perspective l'éclairait d'un doux renoncement désespéré. La mort lui renvoyait la tendresse accueillante de l'oubli dans les limbes, sans plus croire en rien, prêt à tout accepter tant qu'il pouvait disparaître. Mourir d'une overdose, juste pour se convaincre qu'il n'avait pas totalement abandonné, qu'il avait seulement manqué de chance et perdu le contrôle.
C'était à ces pensées obsessionnelles que Kuroro l'avait arraché malgré lui, avec sa verve piquante qui forçait Kurapika à garder conscience. Jamais il ne lui dirait à quel point il se sentait reconnaissant, à quel point il lui donnait envie de vivre. La géante rouge éclairait l'hiver de son existence, et, dans ses instants de grâce, faisait fleurir des coquelicots sur les parterres neigeux qui tapissaient son âme. Jamais il ne lui dirait qu'il rêvait de fondre dans son magma en fusion, effacer la froideur de la mort dans sa consomption.
*musique*
A good god is a dead one
Un bon dieu est un dieu mort
A good god is the one that brings the fire
Un bon dieu est celui qui apporte le feu
A good god is a dead one
Un bon dieu est un dieu mort
A good god is the one that brings the fire
Un bon dieu est celui qui apporte le feu
Le groupe avait commencé à jouer, tirant le Kuruta de ses rêveries morbides. Jamais encore il n'avait vu Kuroro sur scène, et, bien décidé à lui témoigner son désintérêt, il s'était réfugié loin de son regard, là où il pouvait l'observer en toute quiétude.
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
The one that brings the fire
Celui qui apporte le feu
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
Le Kuruta n'avait encore jamais profité d'une telle effervescence depuis le public. La foule en liesse agitait les bras, secouait la tête en rythme en hurlant les paroles qu'ils semblaient connaître par cœur. L'arène aimait L.B.F. Elle aimait leur manière de se démarquer, leur musique violente et agressive, leur effet de groupe et leur force manifeste.
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
La musique de la Brigade leur ressemblait. Elle répandait la haine comme un venin, dirigée par un chef dont le regard doux et calculateur laissait entrevoir la folle barbarie. Kuroro déchainait des ondes d'admiration de tous les côtés. Son groupe le suivait avec déférence, prêt à le suivre au bout du monde et vers une victoire certaine, grâce à sa voix grave, à peine éraillée.
A good lord is a dark one
Un bon seigneur est un seigneur des ténèbres
A good lord is the one that brings the fire
Un bon seigneur est celui qui apporte le feu
A good lord is a dark one
Un bon seigneur est un seigneur des ténèbres
A good lord is the one that brings the fire
Un bon seigneur est celui qui apporte le feu
Kurapika observait le Lucifer se mouvoir comme une ombre, sans comprendre comment la musique pouvait lui procurer des émotions d'une telle intensité. Chacun de ses pas le faisait vibrer jusqu'à la plante de ses pieds, quand son cœur tambourinait en rythme avec les baffles déchaînés.
Kuroro ondulait sur scène dans une grâce insaisissable. Il attirait le regard, vampirisait les spectateurs déjà hypnotisés par présence. Kurapika était tombé dans le flot d'admiration qui parcourait la salle sans s'en rendre compte.
Même du fond de l'arène, il avait accroché ses yeux. Leur éclat rougeoyant perçait la pénombre et le brouillard vaporeux. Kurapika observait la scène la bouche sèche, sans prendre conscience de la lueur écarlate qui l'avait rendu si reconnaissable.
Lord visible and sensible
Seigneur visible et sensible
Of whom this earth is but a frozen spark
De qui cette terre n'est qu'une étincelle gelée
Turning about thee with annual and diurnal motion
Tournant autour de toi avec un mouvement annuel et diurne
Source of light, source of life
Source de lumière, source de vie
Let thy perpetual radiance hearten us
Que ton perpétuel rayonnement nous console
To continual labour and enjoyment ;
Au labeur et à la jouissance continus ;
So that as we are constant partakers of thy bounty
Alors que nous sommes des participants constants de ta générosité
We may in our particular orbit give out light and life
Nous pouvons dans notre orbite particulière donner de la lumière et de la vie
Sustenance and joy
Nourriture et joie
To them that revolve about us
Pour ceux qui tournent autour de nous
Sans comprendre pourquoi, il sentait chaque geste de Kuroro lui être destiné. Il voyait son regard ne contempler que lui, et son long manteau d'hermine le parer d'élégance. Ses prunelles ne cessaient de croiser les siennes, tandis qu'un sourire imperceptible naissait sur son visage, comme s'il n'y avait jamais qu'eux deux dans l'arène surpeuplée.
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
Kuroro chantait pour lui. Il n'avait fait que cela depuis le début, attendant patiemment que le Kuruta ne l'écoute. Juste pour le plaisir de le rendre fou. Et ça avait fonctionné. Kurapika était hors de lui. La rage et l'admiration se combattaient farouchement, se dominaient l'une l'autre à tour de rôle, sans qu'aucune ne parvienne à prendre le pas.
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
The riverbed will run red with the blood of the saints and the blood of the holy
Le lit de la rivière sera rouge du sang des saints et du sang des sacrés
The riverbed will run red
Le lit de la rivière sera rouge
Gagné par l'excitation en ébullition qui emplissait l'arène, la pensée trop lente pour suivre la folie de ses émotions, Kurapika aimait et haïssait le Lucifer comme jamais auparavant. La malveillance véhiculée par le morceau avait envenimé son esprit, et désormais, il se retenait de détruire la scène entière, et d'étrangler Kuroro à mort. Parce qu'il détestait sa rage, distillée dans ses veines comme un poison mortel. Parce qu'il se détestait d'aimer ça.
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