Chapitre 1 :

-Théo ? Tu crois que je vais être prise pour la Moisson ?

Je me tourne vers ma sœur, Lilou. Je regarde ses yeux bleu clair, plein de peur. Je n'aime pas la voir comme ça. Je passe mon bras autour de ses épaules et j'écarte ses cheveux blonds de son visage. Elle est inquiète.

-Tout va bien se passer. On est nombreux dans le district, tu n'as qu'à voir combien il y a de personnes dans ta classe. Tu n'as aucune chance d'être moissonnée, d'accord ? Tu n'as pas à t'inquiéter, ça va aller. Tu me crois ?

-Mais... Et si jamais ça arrive, me demande-t-elle, les yeux remplis de larmes, prêtes à couler.

-Non... Tu n'as aucune chance. Tu n'as pris aucune tesserae, alors tu n'as qu'un papier parmi des centaines. Il y a des adolescents qui en ont pris beaucoup plus. Tu n'as pas à t'en faire.

-Tu es sûr ?

-Oui. Tu n'as pas à t'inquiéter, assurai-je.

Lilou baisse les yeux. Je sais qu'elle n'est pas convaincue, mais j'ai toujours eu du mal à la rassurer. Elle pose sa tête sur mon épaule. Je caresse ses cheveux pour lui montrer que je suis avec elle et je commence à la bercer comme le faisait notre mère avant qu'elle parte dans les bras d'un Pacificateur. Mon père entre dans la pièce.

-Vous êtes bientôt prêt ? demanda-t-il. Il va bientôt falloir y aller.

-Tu peux me coiffer ? dit ma sœur en se tournant vers moi.

Depuis que notre mère est partie, elle aime que ce soit moi qui le fasse. Je lui souris. Elle retourne sa tête pour me laisser faire. Je commence à brosser ses cheveux blond miel. Je les attache en faisant un chignon comme je sais les faire. Je m'applique au mieux. Une fois que j'ai terminé, Lilou se lève pour enfiler une vieille robe de notre mère. Mon père s'approche de moi et pose sa main sur mon épaule pour me soutenir.

-Tu n'as pas à t'inquiéter, toi non plus.

Mon père a vu que j'étais un peu tendu. Je hoche la tête, essayant de masquer mes émotions. Ce n'est pas vraiment pour mon père, mais surtout pour ma sœur, je ne veux pas l'inquiéter. Ce n'est pas un jour agréable, je ne veux pas l'empirer. Je me lève pour m'habiller de manière plus convenable. Je prends les bols sur la table pour les mettre dans l'évier. Mon père me les prends des mains et me fait signe de ne pas m'en occuper. Je le remercie et retourne dans ma chambre. J'enfile la seule chemise pas trop sale ou abîmée que j'ai. Je passe ma main sur ma tête pour remettre de l'ordre, mais mes cheveux bruns sont en permanence ébouriffés. Je soupire un coup pour me donner du courage. On est l'un des districts les plus nombreux. J'ai pris des tesserae, oui, mais pas beaucoup. Je n'ai pas beaucoup de chances d'être tiré, Lilou encore moins. Quand je reviens dans la salle, ma sœur est là, belle dans sa robe verte pâle. Je souris en la voyant. Mon père nous fait signe d'y aller. Lilou glisse sa main dans la mienne et la serre. Mon père attelle notre vieux cheval de trait. J'aide ma sœur à s'installer. Les maisons sont toutes entourées de grands champs permettant d'élever les vaches des familles. On habite donc loin du centre-ville où à lieu la Moisson et mon père a proposé à plusieurs personnes de passer les prendre pour faciliter le chemin. La première maison à laquelle nous nous arrêtons est celle du meilleur ami de ma sœur, Jules. Contrairement à elle, j'ai très peu d'ami, un seul pour dire, Martin... En arrivant, près du centre-ville, mon père attache notre cheval à l'un des nombreux poteaux pour cet effet. D'habitude, c'est plutôt calme, mais une fois par an, il y a beaucoup de monde. Le district entier en fait. Tout le monde se bouscule, je perds plusieurs fois Lilou de vue. Les Pacificateurs s'énervent plusieurs fois. J'entends des coups tirer en l'air. Peu à peu, j'arrive à guider ma sœur jusqu'au ficelles qui délimitent l'endroit pour les adolescents. Je m'inquiète de la laisser seule quand elle en a besoin mais je crois le regard de Clémence, une fille de ma classe. On ne se parle presque pas en cours, mais elle est sympa et je sais qu'elle rassurera ma sœur si besoin. Je la remercie silencieusement et je traverse l'allée pour rejoindre la partie de la place qui a été bloquée pour les adolescents garçons. Je me mêle aux garçons de mon école. J'en reconnais certains, mais pas tous.

L'hymne du Capitole commence presque aussitôt. De grands écrans montrent les images en direct. Le maire commence a lire le discours sur l'histoire de Panem. La Révolution, la création des Hunger Games... La même chose qu'à chaque fois. Il énonça ensuite les noms des anciens gagnants du district 10. Il n'y en avait pas beaucoup. Les regards passent du maire sur l'estrade jusqu'aux écrans. L'image qui montrait le sceau du Capitole montre désormais les images filmées en direct du district 1. Je suis tendue, je n'écoute que d'une oreille. Comme toujours, c'est compliqué. Cinq garçons et six filles se sont portés volontaires en même temps. Je hais les carrières. Au final, ce sont un garçon de dix-huit ans, musclé et certainement entraîné et une fille de dix-sept ans, qui a l'air menaçante ont été choisis. C'est la même chose pour les districts suivants. Puis, arrive le tour du district 10. Je cherche le regard de Lilou. Elle est terrorisée. Je lui fais un pouce en l'air pour lui montrer qu'il n'y a pas à s'inquiéter. Gabrielle Hubman s'approcha, prenant un malin plaisir à faire patienter les adolescents. Je serre les mâchoires. Tout me dégoûte dans les Hungers Games. Elle tourne lentement sa main parmi les différents papiers de prénoms des filles. Je ne lâche pas des yeux son sourire atroce. Elle saisit finalement une feuille entre ses deux doigts fins, certainement parfaits grâce à une quelconque opération du Capitole. Elle le sort doucement de la boule de verre.

-Et le tribut femelle pour les 64èmes Hungers Games est...

Elle s'arrête, laissant traîner volontairement un silence pesant. Rien que pour ça, je la déteste. Je la déteste car elle inquiète ma sœur en faisant ça. Elle laisse émettre une possibilité qui n'existe pas mais que ma sœur, elle, voit.

-Est... Lilou Leech !

À cet instant, le monde s'est mit à tanguer autour de moi. Comment ça ? J'avais mal entendu. Elle n'avait pas dit « Lilou Leech », mais « Lilou Meetch », ou quelque chose comme ça. Ce n'était pas possible autrement.

Je la vois avancer sur l'estrade d'un pas chancelant. À moins que ce soit moi qui tourne, je ne sais pas. Je n'arrive plus à réfléchir. Un souvenir passe en boucle, celui ou je dis à Lilou qu'elle ne risque rien. Quelles étaient les probabilités ? Combien de chances avait-elle ? Et quelles étaient ses chances de survie dans l'arène, elle, si jeune, innocente ? Je crois que je pleure, mais je ne suis pas sûr. Je sens une main presser mon épaule, mais je ne sais pas à qui elle est. Je ne cherche pas à savoir. Gabrielle accueille ma sœur. Je vois son visage. Elle arrive à garder son calme. Alors qu'elle va mourir. Elle ne peut pas gagner contre ces brutes de carrière. Gabrielle dit quelque chose au micro que je n'entends pas. Sûrement qu'elle félicite Lilou. La féliciter pourquoi ? Pour aller à une mort certaine ? Elle plonge sa main dans la boule de verre pour les garçons. Je n'entends toujours pas se qui est dit. Je ne sais pas qui est appelé, mais un garçon d'une quinzaine d'année se lève, sous le choc et s'approche de l'estrade. Mes yeux se posent sur ceux de Lilou. Je vois ses larmes, prêtes à couler. C'est à ce moment que je fais la seule chose qui me passe par la tête. Je me réveille enfin et je hurle :

-Je suis volontaire !

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