Chapitre 5: Arrivés dans l'arène
Les coups pleuvaient sur sa tête. Pandora se protégea, se recroquevilla, mit ses bras au dessus de sa tête. Tout son être lui hurla silencieusement de partir, mais Pandora savait que Morgane comptait sur elle. Elle attendit patiemment la fin des coups, pour se rendre compte que ce n'était que la lumière qui lui procurait cette sensation. Morgane avait aussi lâché sa main et se protégeait les yeux: le soleil était agressif. Et puis tout d'un coup, plus rien. Aveuglée, elle ne vit pas qu'elle était exactement à l'endroit où elle n'avait jamais voulu être.
L'arène.
Un frisson d'excitation la traversa, une poussée d'adrénaline. Le déni ne pouvait plus être une cachette. Tout ses sens étaient prêts, elle sentait l'herbe fraîche, la sueur de Morgane, les cliquetis des tributs qui apparaissaient sur le terrain. La Corne d'abondance était un rond d'herbe, de cinquante mètres de diamètre. Au milieu, comme des oeufs de Pâques, des armes. Des sac à dos, des bouteilles d'eau et de la nourriture. Et en face d'elle, les tributs, hébétés. Tous se remettaient de la lumière blanche qui les avaient aveuglés.
- Pandora ! Dit Morgane en la secouant, on prend un sac et on part !
La blonde se réveilla brutalement de cet étrange rêve, de la contemplation qui la confortait tant. Elle vit Morgane courir, et la suivit.
Derrière elle, elle entendit des cris, la terre tremblait. Les tributs étaient plus que prêt pour récupérer des ressources, elle entendit avec effroi un cri de douleur. Sachant qu'elle était poursuivie, elle courut plus vite, et attrapa deux sacs à dos. Elle chercha Morgane du regard, l'oeil alerte. Celle-ci courait très vite, loin du cercle d'herbe, coursée par deux garçons. Pandora se sentit alourdie par ces deux sacs, mais continua de courir.
Morgane disparut derrière un buisson, et Pandora fut soulagée de cette cachette. Pataugeant dans la boue qui entourait la Corne d'abondance, elle se jeta dans le buisson, en espérant rejoindre Morgane, qu'elle imaginait tapie au sol juste derrière.
Son sang ne fit qu'un tour lorsqu'elle se rendit compte que sa coéquipière n'était pas seule. Un des deux garçons qui l'avait coursée juste avant avait plaquée celle-ci au sol. C'était sans doute pourquoi Morgane avait disparu d'un coup. Il tenait une lame au dessus de son visage, mais Morgane tenait son poignet fermement, empêchant le poignard de la dévisager. Sans hésiter, Pandora leva le pied et donna un grand coup dans l'épaule son adversaire. Cela la déstabilisa, elle tomba sur le sol, mais cela permit a Morgane de reprendre le contrôle de la situation.
Le tribut tomba au sol, déséquilibré par le coup. Il eut à peine le temps de tomber au sol que Morgane jeta son poignard loin d'eux dans la boue, et elle se releva:
- Dépêche toi, Pandora !
Pandora se releva, tremblante, prit ses deux sac à dos et courut derrière Morgane. Les cris et les coups s'estompèrent pour être remplacés par le chant des oiseaux. La forêt, calme et pleine, les entourait et semblait les protéger. Elles frappaient le sol recouvert de feuilles de leurs pieds, sans relâche. Pandora n'en pouvait plus, elle avait trop couru. Les poumons en feu, elle fit une pause. Impossible pour elle de demander à Morgane de s'arrêter, il aurait fallu qu'elle crie, et Valentin leur avait rappelé que c'était dangereux.
Elle posa sa main sur l'écorce d'un arbre, et reprit son souffle comme elle put. Sa sueur dévalait son dos, rendant son tee-shirt froid et humide. Elle détesta la sensation.
- Morgane ? Demanda-t-elle, pas trop fort.
Personne ne lui répondit. Elle regarda autour d'elle, et s'aperçut que Morgane avait continué de courir sans elle. Elle s'essuya le front, et essaya de calmer les tremblements nerveux qui l'agitaient. Pandora respira, se concentra sur des choses qu'elle connaissait pour réfléchir posément.
Si elle se basait sur les nombreuses fois où elle avait regardé les Hunger Games, elle débutait bien. Rester sur le centre de l'arène était typique des premiers tributs, les plus forts. Leur Mentor leur avait bien recommandé de rester loin du centre. Cependant, elle ne pensait pas avoir deux sac a dos dès le début, cela la surprenait. De plus, ils étaient tout les deux remplis. Quelque chose n'était pas logique.
Elle s'assura que personne n'était autour, et s'accroupit. Elle ouvrit un des sacs. Une couverture de survie, des boîtes de conserve et une bouteille d'eau. Au fond du sac, Pandora trouva un petit cristal. Bien qu'il soit d'un blanc cristallin, et qu'il reflète le soleil, il n'était d'aucune utilité. Le deuxième sac renfermait à peu près la même chose, et cela surpris Pandora.
- C'est trop facile... Murmura-t-elle, hébétée.
Où était le sang, les cris, la violence ? Tout ce qu'elle avait, c'était à manger pour une bonne semaine. Cela la rassura, elle se sentit beaucoup mieux. Était-ce si terrible que cela de faire les Hunger Games ? Elle ferma les sacs. Le vrai problème était qu'elle avait définitivement perdu Morgane. Cette pensée lui remit les pieds sur terre.
Pandora avait conscience d'être l'une des plus menues de l'arène. Sa force physique était un point sur lequel elle ne devrait pas compter, ce qui n'était pas le cas pour Morgane. Pour se protéger, et attaquer des tributs, elle devait à tout prix la retrouver.
Elle avait remarqué que la portion de forêt dans laquelle elles avaient immédiatement foncé n'était pas très grand. De là où elle était, Pandora pouvait voir la fin de la forêt, à sa droite. Certains pins offraient des branches basses, et elle essaya de monter dessus.
L'exercice s'avéra compliqué. Les branches cassaient, où se tordaient sous son poids pour raser le sol. De plus, Pandora avait deux sac à dos assez lourds, et les épines de pin lui rentraient dans les mains et les bras. Après quelques essais fatiguants et décourageants, elle réussit à monter assez haut pour voir les limites de la forêt.
Appeler les quelques hectares d'arbres "forêt" pouvait être ridicule. Vu d'un hélicoptère, ce devait n'être qu'une infime portion de l'arène. Cependant, pour Pandora, c'était déjà énorme, et retrouver Morgane dedans s'avérerait compliqué. Comment avait-elle réagi en voyant qu'elle ne l'a suivait plus ? La blonde enleva la lanière du sac autour d'une grosse branche proche d'elle et s'apprêta à descendre.
- C'est pas possible d'être aussi con. Franck, tu n'aurais pas dû utiliser ce truc.
Pandora se figea. Son coeur se mit à battre fort, et l'angoisse la prit. Les voix provenaient du sol, juste en dessous des arbres aux alentours. Allaient-ils la voir, elle qui faisait plier les branches de tout un arbre, avec ses deux sacs ? Les épines de pin incrustées dans sa peau lui faisaient mal et l'envie de frotter ses mains pour enlever la terre la démangeait.
- J'ai fait ce que j'ai pu ! Il aurait pu...
La voix masculine se tut, un coup de canon retentit. Pandora sursauta. Elle connaissait ce bruit, l'annonce fatale de la mort d'un des participants. Elle était sûre de l'avoir entendu plus tôt, mais dans l'action elle n'y avait pas prêté attention. Des gens mouraient dans cette arène et Pandora en ferait partie.
- Pandora ?
Morgane s'arrêta, inquiète. Elle se retourna, chercha, revint sur ses pas. Sa coéquipière n'était tout simplement pas là. Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle courait seule. Oui, c'était possible que Pandora l'ait perdue depuis cinq minutes, ou une heure.
- Pandora, t'es où ?!
Elle se gratta la tête, très inquiète. Où était la blonde ? Si douce, si fragile, elle n'avait pas suivi le rythme que lui imposait Morgane. Quel impolitesse ! Elle la savait vulnérable et vexée face aux écarts qui les éloignait. Étaient elles si éloignées que cela ? Physiquement c'était sûr, mais Morgane appréciait Pandora pour son écoute attentive et précieuse.
Cesse de penser à elle, pensa-t-elle en se reconcentrant. Morgane décida de marcher plus lentement, sans s'arrêter, pour que Pandora la rattrappe. Où était la petite Pandora, sa petite Pandora ? C'était angoissant de la savoir seule.
- C'est parce qu'elle est faible que je m'inquiète pour elle, marmonna t elle
Bien sûr. Sinon, Morgane ne penserait pas à elle, elle se fichait de gagner les Hunger Games avec le deuxième tribut. Elle se fichait de tout, elle voulait juste gagner. Sa coéquipière n'était là que pour lui apporter une aide.
Ces pensées égoïstes ne lui plurent pas. C'était pourtant ce qu'elle devait penser: penser à sa personne, ne faire confiance à personne, trahir s'il fallait. Seulement, quelque chose la retenait. Quelque chose accrochait la prunelle de ses yeux aux magnifiques iris bleues de Pandora. C'était détestable, mais tellement féerique que Morgane ne se posait même pas la question.
Un bruit, un craquement de branches. Morgane se retourna: Pandora était là ! Elle eut des frissons d'espoir, mais se rendit compte que ce n'était pas son pas. Elle se tapit derrière le tronc d'arbre le plus proche, agenouillée. Elle sortit de sa poche une pierre tranchante, et attendit fermement.
Une jeune femme sortit d'une broussaille. Elle avait les yeux foncés, le regard apeuré. Ses cheveux en bataille étaient blancs et elle avait un beau visage. Ses lèvres étaient violettes, elle mourait de froid. Elle marchait d'un pas lent, irrégulier. Elle était blessé.
Morgane sortit de sa cachette. La fille était maigre, elle n'avait rien dans ses mains, elle ne considérait pas qu'elle soie une menace. Elle se releva. L'inconnue hurla de peur, et mit ses bras sur sa tête.
- ME TOUCHEZ PAS !
Morgane se figea. Elle hurlait, battait des bras. En soi, toutes les choses que Valentin leur avait recommandé de ne pas faire. Morgane se rappelait précisément ses paroles:
"Si vous parlez fort, si vous allumez un feu, si vous dérangez les choses sur votre passage, c'est que vous cherchez à vous faire repérer. Forcément ! Sinon, ça ne servirait à rien."
La fille s'était recroquevillée, figée, les yeux révulsés. Elle regardait Morgane avec stupeur. Cette dernière s'était approchée lentement.
- Me tuez pas ! dit le tribut, d'une voix sanglotante.
L'abrutie veut me faire repérer. C'est sûrement l'une des premiers districts.
Elle se jeta sur elle, et lui asséna la pierre sur le crâne.
Elle la plaqua à terre, bloqua son buste entre ses cuisses et la frappa avec la pierre. Comment décrire ce qu'elle ressentait ? Elle voyait son visage se déformer, des cris silencieux sortirent de sa bouche grande ouverte. Elle frappait, frappait. Le sang envahissait sa vue, elle voyait double. Survie. Survie, tout simplement. Cette fille l'aurait dénoncée si Morgane l'avait laissé vivre. Et possiblement, elle l'aurait attaquée en première. C'était par instinct de survie qu'elle le faisait, elle se protégeait de cette inconnue qui lui voulait du mal. Ses cuisses serraient son buste tellement fort que des os craquèrent.
La seule chose qui la ramena à la réalité fut le coup de canon.
Elle venait de tuer un tribut.
Elle se releva, comme brûlée. Elle empoigna son sac à dos, laissant une empreinte pleine de sang dessus. Il fallait qu'elle trouve une rivière, elle était sale.
Elle marcha quelques temps, sans trop se fatiguer. Son esprit était ailleurs: où était Pandora ? Elle commençait à angoisser, et si un coup de canon retentissait, lui apprenant qu'elle était morte ? C'était peut-être pire que d'être soi-même mort. Elle frissonna.
En se rapprochant de la Corne d'abondance, elle réussit à trouver une flaque d'eau qui lui parut claire, et lava son visage écarlate. Elle n'avait aucune notion du temps, peut être qu'elle était dans cette arène depuis des semaines, ou depuis quelques minutes seulement. En voyant de l'agitation sur le cercle d'herbe surélevé, elle s'éloigna et se plongea dans la forêt. Celle-ci avait parut accueillante à première vue, mais les pins s'assombrissaient au fur et à mesure du temps.
Morgane leva les yeux. Le soleil se couchait, la nuit approchait. Elle avait entendu un autre coup de canon, et cela ne la rassurait pas. Elle savait parfaitement qu'elle devrait se battre pour sa vie. Chaque seconde passée dans l'arène augmenterait ses chances de gagner.
Elle se figea en entendant des bruits de pas précipités. Plusieurs personnes couraient, en sa direction. Morgane s'était fait repérer, il fallait qu'elle parte.
Elle se mit à courir, courir dans le sens opposé pour échapper aux tributs. Elle réfléchissait vite, et se rendit compte qu'ils gagnaient du terrain. Courir n'était pas la bonne option pour survivre. Ni une ni deux, elle se jeta dans un buisson.
Les feuilles et les branches écorchèrent sa peau, elle retint une exclamation de douleur. Cependant, elle ne bougea pas. Seule sa respiration, sa sueur et le battement de son cœur pouvaient indiquer à ses assaillants qu'elle était là.
Et elle attendit dans une position très inconfortable ainsi, avant de se rendre compte que personne ne l'a poursuivait. Avait-elle rêvé ? Cependant, elle vit deux ombres courir lorsqu'elle se releva. Morgane n'était pas poursuivie, elle avait été sur la trajectoire de participants qui ne savaient même pas qu'elle était là.
Elle se sentit soulagée, mais recommença à courir dans le sens inverse de ses adversaires de sorte à ne pas les croiser. Étaient-ils poursuivis ? Au cas où, Morgane tenait dans sa main la lampe de poche de son sac, et un petit couteau.
Au bout de quelques dizaines de minute de marche, elle eut un frisson. Un mauvais pressentiment, une illusion trompeuse. Était-ce le faisceau de la lampe ? Il semblait qu'à son extrémité, un épais nuage couvrait sa vue. Sans en prendre compte, Morgane avança.
- Pandora ? Pandora, t'es là ?
Elle se risquait à hausser la voix, car laisser Pandora seule le soir lui semblait impensable. Cela faisait plus d'une heure qu'elle la cherchait, mais ses membres devenaient lourds. Son souffle était court, rauque, c'était sans doute la fatigue.
- Morgane !
Luttant contre la lourdeur de ses paupières et l'engourdissement de ses membres, elle répondit:
- Où es-tu ?
- Ici, dans l'arbre ! Je suis coincée.
Morgane repéra la branche où son acolyte était posée.
- Tu ne peux pas descendre ?
- Non ! Enfin, je peux mais les deux sacs sont trop lourds pour moi.
- Lance les moi et arrêtons de crier, dit Morgane.
Pandora toussa, et lança l'un des sacs. Morgane put le rattraper, mais ses articulations lui faisaient de plus en plus mal. Sa vision était brouillée. Elle récupéra le deuxième sac.
Trop occupée à essayer de respirer normalement, elle ne vit pas Pandora descendre de l'arbre.
- Morgane, ça va ?
Elle la serra dans ses bras, malgré une quinte de toux violente.
- Oui ça va, dit Morgane d'une voix rauque. Je t'avais perdue...
- Je ne sais pas ce qui se passe mais il y a un problème, fit remarquer Pandora, effrayée. Toutes les fleurs s'ouvrent alors qu'il fait nuit...
Elles regardèrent autour d'elle et purent remarquer qu'elles étaient dans un brouillard âpre, et que les oiseaux chantaient comme si c'était le grand jour.
Chapitre 2I90E2I90
Pandora était tellement soulagée de voir Morgane. La gratitude qu'elle éprouvait était pourtant entachée par la douleur qu'elle éprouvait.
Elle était montée sur le dos de Morgane, en proie à une violente quinte de toux. Chaque pas, chaque secousse qu'elle ressentait faisait sauter son estomac, vidait ses poumons. La brume qui les entourait avaient un effet sur elles deux, Pandora le sentait. Bien que Morgane ne le montre pas, elle la voyait grimacer de douleur. Elle avait d'abord pensé à un gaz lacrymogène, mais les effets étaient plus diverses et plus dangereux.
Morgane portait Pandora et trois sacs à dos remplis, elle n'allait pas très vite. Cependant, elle courrait comme elle pouvait. Le seul avantage de ce nuage ocre était qu'elles ne croisèrent personne.
- J'ai vu des gens courir en sens inverse, dit Morgane d'une voix rauque. Ils fuyaient ce truc.
Pandora ne répondit pas mais toussa. Elle somma à Morgane de s'arrêter.
- Ça ne sert à rien, tu t'épuises.
Morgane la lâcha, poussant un petit soupir de soulagement. Sur ses épaules, les marques rouges des frottements des lanières des sacs à dos étaient tristement visible. Reprendre son souffle lui paraissait difficile, Pandora la laissa s'asseoir contre un arbre. Elle regarda autour d'elle. Comme un brouillard, la fumée avait envahi les lieux, et elles pouvaient à peine voir ce qui les entouraient. Pandora s'allongea dans l'herbe, se rendant compte qu'elle avait de plus en plus de mal à respirer.
- C'est de pire en pire, laissa échapper Morgane.
Sa coéquipière regarda le ciel, la lune claire, et les nuages. Elle se rendit compte que ces astres, contrairement à la forêt autour d'elle, étaient clairement visibles alors que pourtant, le brouillard toxique les entourait.
- Morgane ? Est ce que tu peux monter dans cet arbre, le plus haut possible ?
Celle-ci lâcha la fleur qu'elle étudiait, regarda Pandora avec une mine étonnée, avant de se lever, vacillante. Elle grimpa sur l'arbre, Pandora l'attendait au sol, toussant.
- Pandora !
- Oui ?
- Le brouillard ne s'élève pas, l'air est normal ici.
- Je t'envoie les sacs.
Après que Morgane aie réceptionné les sacs, Pandora monta et se posa sur l'épaisse branche près de son acolyte. L'air était frais, mais sain. Elle respira un grand coup, et de rendit compte que le poids dans ses poumons s'était envolé.
- Je suis tellement heureuse d'être en vie, laissa-t-elle échapper.
- Tu as un bon oeil, c'est grâce à toi que nous sommes sortis de cette chose.
Pandora, grelottante de froid, sortit des couvertures. Elle en donna une à Morgane:
- C'est étrange, je trouve que tout se passe trop bien pour nous.
- Je me suis fait un sang d'encre lorsque j'ai vu que tu ne me suivais pas, dit sévèrement la plus grande.
Pandora rougit.
- Moi aussi. Juste après que tu sois partie, il y avait deux tributs qui ont discuté, juste en dessous de l'arbre où j'étais. J'ai eu vraiment peur qu'ils ne partent jamais. Tout d'un coup, des animaux s'enfuyaient, et ils sont partis en courant. Je crois qu'ils avaient compris pour la brume.
- Et tu es restée coincée dans l'arbre ?
- Je ne voulais pas partir sans les sacs ! Mais, j'avais mal aux poumons.
- Tu n'as plus mal ? Demanda Morgane, soucieuse.
- Ça va.
Le ventre de la brune se mit à protester, malgré la gêne de celle-ci. Pandora sourit, elle avait faim aussi. Bien que leur Mentor les avait gavées de nourriture avant d'entrer dans l'arene, la faim les prenait de court.
- Toi aussi tu as des conserves dans ton sac ? Les miens en sont remplis.
Pandora sortit deux conserves, troublées par son regard attentif posé sur elle. Tout était si calme autour d'elle, comme si l'univers tout entier se concentrait sur elles deux. La blonde devait sûrement avoir un problème cardiaque car son coeur faisait des soubresauts dans sa poitrine. Elle donna rapidement la portion à sa camarade
- Merci. J'avais vraiment faim.
Pandora se pencha vers elle et dit simplement:
- Tu aurais pu me le dire.
Elle embrassa Morgane. La lune veillait sur elles, éclairant leurs profils un court instant unis. Celle-ci répondit au baiser, ne paraissant ni surprise ni habituée. Pandora se blottit contre elle et continua de parler:
- J'ai eu vraiment peur aujourd'hui. J'aurais aimé que tu fasses attention et que tu ne me laisses pas toute seule dans la nature.
- Tu as raison. Désolée, Pandora.
- Et demain... J'aimerai vraiment qu'on soie ensemble sans se perdre l'une l'autre. Pourquoi il y a du rouge sur ton sac ?
- Oh, c'est juste de l'argile rouge. Je suis passée près de la Corne d'abondance, il y avait de la boue.
- Il y avait des gens, là-bas ?
- Je crois. En tout cas, c'est ce qui m'a dissuadé d'y rester trop longtemps.
Elles parlèrent quelques temps mais Pandora s'endormit bien vite. L'odeur rassurante de Morgane, bien que mêlée à leurs sueurs, lui permit de dormir calmement et pleinement.
Pandora se réveilla en sursaut, alors qu'elle sentait qu'une main se posait fermement sur sa bouche. Elle voulut hurler mais reconnut le bras de Morgane. Pourquoi la bâillonnait-elle ainsi ? Elle n'eut pas à attendre longtemps avant de comprendre. Un groupe de personne passait dans la clairière avoisinante.
Nul doute qu'ils étaient plusieurs, au vu du raffut qu'ils faisaient. Pandora leva la tête, et aperçut des visages connus. Six adolescents foulaient l'herbe sans ménagement, sans peur de se faire repérer. De quoi pouvaient-ils avoir peur ? C'était eux que tout les tributs craignaient. Dans le lot, la blonde reconnut les deux tributs du district 1, qui parlaient et riaient avec les autres. Morgane les regarda passer, on pouvait lire la peur dans ses yeux de se faire remarquer. Tous étaient surentrainés, agiles, forts.
Heureusement, ils passèrent sans même lever le regard.
- Je parie que ça nous mènera à la source. L'eau y est claire, disait l'une des filles. On pourrait même camper un peu !
Lorsqu'ils furent passés, Morgane fit un signe à Pandora. Elle prit deux sac à dos, donna le dernier à sa coéquipière.
- Ils parlaient d'une rivière. Suivons-les.
Pandora courait derrière elle, le coeur battant. Elles suivaient les pas des premiers districts, sans vraiment prendre le même chemin. Ainsi, elles ne risqueraient pas de les croiser.
Puis, elles eurent un temps d'hésitation. La forêt n'était pas très grande, elles arrivèrent à l'orée. Nul doute que ce qu'elles virent les firent reculer.
Elles avaient sous les yeux une grande plaine, couverte de fer. On aurait dit un désert, muni de dunes et d'un vent arride. Seulement, le sable n'était que rouages de cuivre, et le ciel était dégagé.
- On y va ou pas ? demanda Morgane, soucieuse. Ils pourraient nous voir.
- Allons-y. De toute façon, savoir où est l'ennemi nous permettra de prévoir ses attaques.
Elles continuèrent à marcher, un coup de canon retentit. Pandora frissonna, et prit la main de Morgane.
- Ça va ?
- Oui. C'est juste que... C'est tellement angoissant de savoir que je vais mourir ici, dans ce lieu, sans jamais savoir si tu auras gagné. Ou l'inverse, qui est encore pire. Mourir après toi.
- Ne dit pas ça ! On va gagner, d'accord ? Tu as vu le nombre de choses qu'on a récupérées ? Tu as vu comme on se débrouille bien ?
Pandora, peu convaincue, préféra se taire plutôt que de débattre avec Morgane, qu'elle sentait très attachée à cela.
- Qu'est-ce que dirait ma mère ? Elle ne m'a jamais vu me battre comme ça. Je pense qu'elle ne me reconnaitrait pas.
- Ta mère ?
Morgane resta pensive.
- Je sais pas. Moi j'ai pas de putain de mère, donc je ne me rend pas compte. Tu es née dans un véritable cocon.
- Oui. En fait, je ne sais pas si c'était mieux comme ça ou pas. C'est une éducation, voilà tout.
Elles restèrent pensives, mais aperçurent bien vite un attroupement. Morgane se tapit au sol derrière le relief d'une tôle métallique, Pandora s'accroupit.
Une fille et un garçon, dos à dos, faisaient face aux six jeunes gens qu'elles avaient vu passer. Le clapotis de l'eau, qui séparaient les tributs du district 10 des autres. La scène paraissait compliquée: les premiers districts les encerclaient. Ils tenaient des armes à la main. Franck, le plus baraqué de tous, tenait une grosse hache entre ses mains. Les autres étaient armés de poignards, de lame en tout genre, ce qui les rendait encore plus menaçants.
À la place des deux tributs qui étaient au milieu, Pandora aurait été morte de peur. Seulement, ceux-ci arboraient un air indéchiffrable, mais confiant. De loin, il lui était impossible de voir ce qu'ils portaient au poignet, mais c'était conséquent, et cela avait pour avantage de repousser les adolescents autour d'eux.
En regardant de plus près, ce que la blonde se permit de faire en voyant que les premiers districts ne faisaient pas du tout attention à leurs arrières, le district encerclé portait des bouts de métal partout sur le corps, disposés de façon arbitraire.
Nul doute que ces pièces de métal provenaient du sol pleins de rouages du désert, seulement les pièces étaient assemblées, formées en artefacts puissants. Cela imposait le respect.
Lorsque l'un des tributs eut le malheur de s'approcher trop près, il recula, comme brûlé. Les autres reculèrent, et ceux qui étaient encerclés gagnèrent du terrain.
- On fait quoi ? chuchota Pandora.
- Attend. S'ils s'entretuent, ça nous permettrait de récupérer les deux sacs qu'ils ont posé au sol.
Elle les pointa du doigt. Son acolyte hocha la tête. Pendant ce temps-là, devant elle, les tributs avaient commencés à se battre. Pandora ne ferma pas les yeux lorsque l'un des tributs des premiers districts perdit une oreille suite à une attaque imprudente. Elle voulait s'habituer à voir le sang, les cris de douleur du garçon qui tombait à genoux, les deux mains sur le côté de la tête.
Dans un état second, elle ne perdit pas une goutte du spectacle qui s'offrait à ses yeux. Bien qu'encerclés par six personnes, les deux tributs étaient comme entourés d'un champ de force qui empêchaient tout être de s'approcher d'eux. Quoi que soit ce dispositif, il était ingénieux. De plus, confiants, les premiers districts n'avaient pas eu l'intelligence d'attaquer en groupe. Ils devaient être impressionnés par les cris de l'un des leurs, dont la tête était en sang.
Pandora ne se rappela plus de la scène qui se déroula juste devant ses yeux tellement elle était barbare. Lorsqu'elle reprit ses esprits, l'une des filles du groupe de 6 gisait sur le sol, devant le garçon et la fille qui étaient jadis encerclés.
Les premiers districts étaient soudainement refroidis. L'envie d'aller s'abreuver au ruisseau leur avait passé, et l'orgueil de se savoir les plus fort leur avait coûté cher.
- Pandora ! Pandora, tu m'écoutes ? S'il te plait.
Morgane prit le menton de Pandora, qui s'était figée, pour le tourner vers elle:
- On doit partir. Qu'est-ce qui t'arrive ?
- Rien, rien, souffla Pandora en se relevant.
- C'est les tributs du district 12, dit-elle en montrant du doigt ceux qui tenaient les bracelets électroniques. Je suppose qu'ils ont trouvés leur bonheur ici, dans la ferraille. Ils sont très dangereux: tu les as bien vu empaler cette fille...
Elles se relevèrent, alors que l'alliance des premiers districts se dispersait, affolés. Heureusement pour elles, le district 12 ne vit pas les deux ombres, en haut d'une dune métallique, s'éloigner.
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