Hugo

Silent est devant moi, il fait les cent pas pendant que je lis le dossier qu'il m'a refilé. Il est arrivé chez moi ce matin, à l'aube, m'a tiré du sommeil que je venais à peine de trouver pour me balancer l'épais dossier marron de Mariane. Je sais que je n'aurais probablement pas dû le lire, mais la tentation était trop forte.

J'y ai appris son âge, à peine vingt-deux ans, pas étonnant que Silent et tout le Club l'appelle gamine, comparée à nous, c'en est une. Je suis pas vieux pour autant, mais à son âge, on ne devrait pas avoir vécu tout ce par quoi elle est traversée.

Le commando lui a fait faire toute sorte de chose, ils se sont servit d'elle pour arriver à leurs fin, sans se douter que ce job allait la bousiller. Ou alors, ils s'en fichait. Je me crispe alors que j'arrive aux photos. Si j'ai réussis à garder à peu près mon calme en lisant les missions auxquelles Mariane a participé, il n'en ait rien maintenant que je vois dans quel état Luhan l'a retrouvée.

J'ai vu son dos cette nuit-là, j'ai vu les cicatrices qui s'entremêlaient sur sa peau. Mais je n'avais pas assez d'imagination pour imaginer tout ce part quoi elle est passée.
Les images sont comme des énormes gifles en plein visage. Son corps recouvert de bleus, son dos scarifié et son visage... son visage qui n'a plus rien d'Angélique. Le nez brisé, les yeux gonflés et bleutés, les lèvres enflées, les pommettes en sang...
Je détourne les yeux et balance les photos sur la table pour ne plus avoir à les regarder. Mes doigts se crispent sur le dossier et d'un coup, je pète un cable. Je balance le dossier à travers la pièce. Je me lève et envoie valser mon fauteuil avant de balancer mon poing dans le mur le plus proche. Voyant que ce geste ne me calme pas, j'attrape mon siège et le soulève puis le balance à travers la pièce.
Je fais les cents pas, jure comme un beau diable, insulte tout le monde. Le commando, le cartel italien, même leur maman. Mais cela ne m'apaise pas pour autant. Au contraire, des flashs du corps de Mariane sur les images ne cessent de me passer dans la tête. J'ai besoin de la voir, de voir qu'elle va bien, qu'elle ne souffre pas.
J'ouvre alors la double porte qui mène à la grande salle et m'apprête à sortir quand on m'interpelle :

- Calme toi avant d'aller la voir.

Je me retourne, et reste stupéfait de voir Silent assis à sa place de VP, les pieds sur la table. Je ne sais même pas quand ce connard s'est assit. Peut-être lorsque j'ai commencé à partir en vrille et qu'il est resté assit à me regarder faire en silence. Ouais, probablement. C'est tout à fait son genre.

- Vire tes pieds de ma putain de table.

Il grogne et me fais un doigt d'honneur avant de finalement mettre ses pieds sur le sol et de se lever. Il s'approche de moi et pose une main sur mon épaule avant de me scruter pendant une longue minute l'air de vouloir dire « tout va bien se passer, mon frère. ». Enfin, il me lâche et me plaque un joint sur le torse. Je l'attrape avant qu'il ne tombe et Silent quitte la pièce. Je l'observe traverser la grande salle sans s'arrêter, esquivant Julia, Loop et Tom, et il balance un coup de pied dans la porte pour sortir.

Pas besoin de le suivre pour savoir où il va, si ce mec me connaît par cœur, je le connais au moins aussi bien, voire même plus. Il va aller au studio de tatouage de sa petite femme, le RedwoodInk, et probablement s'entretenir avec Mariane avant d'aller baiser avec Luhan dans sa salle de torture.

J'observe un à un les gars qui me regarde comme si j'allais à nouveau tout casser puis lentement, je leur tourne le dos et referme les doubles portes. Je dépose le joint sur la table, ramasse mon fauteuil, y pose mon cul et enfin, allume le pétard.
Je fume rarement seul, il y a toujours Silent, Julia ou un des gars avec moi. Mais aujourd'hui, un bon cône ne devrait pas être de trop pour m'embrouiller le cerveau et me permettre d'effacer pour un temps les images de Mariane et de son corps abîmé.

Mariane

Assise au comptoir du studio, je fais les comptes. Enfin, j'essaie. Luhan a balancée du Avenged Sevenfold dans sa salle de torture depuis plus de deux heures et toute cette musique me donne mal au crâne et m'empêche de me concentrer. Je referme le carnet de compte alors que le carillon tinte et je me retrouve nez à nez avec le cher mari de ma meilleure amie.

- Elle est encore occupé pour au moins une demie heure, signalé-je sans préambule.

Il hoche vaguement le menton et me balance son paquet de clope au visage avant de faire tinter à nouveau le carillon en quittant le magasin. Je l'observe alors qu'il s'adosse à la vitrine et soupire. Il veut sûrement me parler... Je le rejoins et allume une cigarette avant de lui rendre son paquet. Je sais que la suite ne vas pas beaucoup me plaire, autant avoir de la nicotine pour calmer mes nerfs.

- Il s'inquiète.

Je fronce les sourcils, je sais qu'il ne parle quasiment jamais, mais il va vraiment juste me dire ça et me laisser me demerder avec le reste ?

- Comme nous tous, Silent. Tu t'inquiètes pour ta femme, elle s'inquiète pour moi, Hugo aussi et moi, je m'inquiète pour tout le monde.

- Il à lu ton dossier.

Je m'étouffe avec ma fumée. Voilà donc pourquoi Luhan a évité de me regarder toute la mâtinée. Cette imbécile a donné mon dossier du Commando à Silent, qui l'a refilé à Hugo. Je soupire. J'aurais dû m'en douter. Luhan ne peut pas résister à son mari...

- J'ai forcé son coffre ici, pour avoir ton dossier. Cette nuit. J'ai déboulé direct chez Hugo, et quand j'suis rentré, Luhan m'a fait un scandale. Elle me l'a pas donné. Elle t'aurais jamais fait ça.

Je ferme les yeux. Bon, au moins, ma meilleure amie ne m'a pas trahie.

- J'ai envie de te mettre une raclée, Silent. Je sais que vous vous voulez bien faire avec Hugo, mais là, tout ce que vous allez réussir à faire, c'est provoquer ce putain de cartel qui en a après moi ! Ils vont vous traquer et tous vous buter ! Femmes, enfants... tous !

Il ouvre la bouche mais aucun son en sort. Bien, le muet est de retour.

- C'est des psychopathes sans états d'âmes dans cette mafia ! Je suppose que tu as lu mon dossier toi aussi. Tu sais ce qu'ils m'ont fait quand ils ont découvert mon identité ! Tu sais qu'ils m'ont humiliée, violée et torturée ! Et putain, si tu tiens vraiment à Luhan, tu ferais tout pour ne pas la mettre en danger plus qu'elle ne l'est déjà, parce que... parce que...

Les joues en larmes, je me retiens de justesse de balancer ce que je sais sur Luhan quand je vois son mari se redresser brusquement à l'entente du prénom de sa femme.

- Parce que quoi ? Luhan est la personne la plus badass que je connaisse, Mariane ! Alors oui, je flippe pour elle, mais jamais je la laisserai mener un combat seule.

- Il le faut. Ce n'est pas seulement mon combat ce cartel... pas seulement ma vendetta, c'est aussi la sienne.

Je ferme les yeux et me frotte les joues pour essuyer mes larmes alors que Silent m'attrape mes poignets et me hurle dessus pour que je le regarde, pour que je lui dises pourquoi Luhan a tant besoin de se mêler à mes affaires.

- Parce qu'ils ont tué mon enfant. Lance froidement Luhan, adossée à la porte d'entrée.

Je baisse la tête alors que Silent me lâche et je m'écarte pour le laisser rejoindre sa femme. En deux enjambées, il l'a rejoint, et la serre fort dans ses bras. J'ose enfin lever les yeux vers ma meilleure amie qui me fixe, les yeux embués de larmes qui, je le sais, ne couleront pas.

- Désolée... chuchoté-je.

Booooommmm

Que de révélations !

Hugo et Silent ont découvert la vérité sur Mariane...

Et Silent sait enfin pourquoi Luhan ne veut pas d'enfant...

A très vite ❤️