Chapitre 32
Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Pas parce que mon esprit est submergé de tout un tas de pensées et de problèmes - bien que ça n'aide pas - mais bien parce que le lait a fini par faire effet sur mon appareil digestif. J'ai passé la nuit entière accolée au WC à me vider de tous les côtés.
Plus jamais je ne me ferai avoir.
C'est alors vidée de toutes mes forces que je rejoins Chris au centre du village le lendemain à midi, comme il était prévu. Je n'ai pas vraiment le moral pour ce genre de chose, mais je ne suis pas une lâche non plus et ne déclarerais pas forfait.
Persuadée que le défi concernera la nourriture, je ne prends aucun petit déjeuner. Je n'ai rien avalé depuis plus de douze heures, ce qui me confère sans doute un avantage comparé à Chris qui n'aura certainement pas pris cette peine.
Je vais remporter ce duel et lui faire regretter sa minable blague d'hier.
Mais alors que je rejoins Chris et tous les autres métamorphes venus assistés au défi, je ne remarque aucun buffet, aucune nourriture de n'importe quelle sorte.
Mince, je crois que je vais regretter cette stupide décision.
-Ça alors, tu as une mine affreuse. constate Nyce en venant à moi.
-A qui la faute ?
Je fusille Chris du regard.
-Alors, c'est quoi ce défi ? je lui demande, désireuse d'y mettre fin le plus tôt possible.
Le loup bombe le torse.
-Suis-moi.
Et il s'en va en direction de la forêt.
Quoi ? Il va me faire marcher ? C'est quoi, une manière de me fatiguer avant la véritable épreuve ?
Je le suis malgré tout, suivie par les autres métamorphes qui ont hâte d'assister à la scène. Deux kilomètres plus tard, nous arrivons au pied d'une haute falaise mesurant sans doute plus de cinquante mètres de haut.
-Voilà le défi : le premier de nous deux à arriver au sommet de la falaise remporte le duel.
Je l'observe, intriguée.
Les loups savent grimper ?
Je suis contente de ce défi. Je ne grimpe peut-être plus aussi souvent qu'avant, mais je dois certainement mieux escalader que ce gros tas de muscles. Finalement, Nyce avait raison, Chris a choisi une épreuve que je peux remporter.
-Tu es conscient que je vais te foutre une raclée ? je le nargue.
-C'est ce qu'on verra.
Nous nous mettons tous deux en position au pied de la falaise, attendant le signal pour commencer à grimper. Avant que le départ ne nous soit donner, je me transforme pour ne pas perdre de temps inutilement.
-C'est parti ! s'écrie Nyce qui joue l'arbitre.
Aussitôt, nous nous élançons. Je saute sur la roche en même temps que Chris. Mon adversaire préfère rester sous sa forme humaine et se sert uniquement de ses griffes de loup pour se hisser le plus haut possible.
Étonnamment, le loup grimpe plus vite que ce que je pensais. Je redouble alors d'efforts, essayant d'instaurer un maximum de distance entre lui et moi.
Je grimpe le plus vite possible. Mais arrivée à la moitié du parcours, je commence à fatiguer. Le terrain est de moins en moins praticable. Escalader commence à devenir difficile.
Je grimpe aux arbres, pas aux falaises !
Arrivée au trois quart du parcours, Chris me dépasse. Je saisis cette opportunité qui s'offre à moi, et saute. Mes griffes s'accrochent aux vêtements du loup, et je me hisse le long de son corps.
Il est bien plus facile à escalader que cette maudite roche !
Le loup grogne, mécontent de ma tactique.
Arrivée sur le haut de son dos, je m'élance et recommence à escalader la falaise. Je suis essoufflée et mes pattes me font souffrir. Mais je ne baisse pas les bras et continue mon ascension.
Je vais gagner !
Je suis presque arrivée au sommet maintenant. Chris n'est pas très loin en-dessous de moi, mais je peux y arriver avant lui. Je ne mesure plus les risques et me lance à corps perdu dans la course. Mais alors que j'ai presque atteint le sommet, mes pattes glissent et je tombe.
Je suis rattrapée deux mètres plus bas par une branche où ma patte arrière a eu le malheur - ou le bonheur, tout dépend du point de vue - de se coincer. D'un côté, je suis soulagée de ne pas avoir atterrit cinquante mètres plus bas. La chute aurait fait très mal. Mais d'un autre côté...
Je suis belle et bien coincée.
Impossible pour moi de déloger ma patte. Si je le fais, je chuterai inévitablement sur le sol. Mais si je ne le fais pas, je perds la course.
Il est trop tard maintenant. J'entends la petite foule de métamorphes acclamer Chris qui semble avoir terminé son ascension.
Le loup a gagné, et j'ai perdu.
C'était prévisible non ?
Soudain, quelque chose m'attrape la patte et me hisse vers le haut. Chris m'aide à remonter la falaise et à atteindre le sommet. Une fois de retour sur la terre plate, je reprends forme humaine, les fesses sur le sol, à bout de souffle.
Contre toute attente, le loup me tend la main pour m'aider à me relever.
-C'était une très belle course. me complimente t-il.
Ça alors, si je m'y attendais.
J'étais persuadée que ce loup était insensible, foncièrement méchant et hypocrite. Et voilà qu'il se montre amical envers moi.
C'est le monde à l'envers !
J'accepte malgré tout sa main tendue. Et ensemble, nous nous approchons du rebord de la falaise. En bas, les métamorphes nous acclament tous les deux. Les larmes me montent aux yeux en voyant ce spectacle.
-J'ai perdu. C'est insensé. Pourquoi est-ce qu'ils m'applaudissent ? je demande ahurie.
-Tu leur as prouvé à tous que tu n'es pas qu'une vulgaire chatte de salon. Tu leur a montré ce que tu vaux. Tu m'aurais battu si tu n'avais pas glissé. Tout le monde l'a vu. m'explique Chris.
Et alors je comprends. Les loups ne m'avaient pas exclue parce qu'ils me détestaient. Ils attendaient simplement que je fasse mes preuves.
Pour la première fois depuis mon arrivée ici, je sourie franchement. J'ai réussi ce que je pensais impossible, je me suis intégrée à ma nouvelle meute.
-Et si on allait fêter ça maintenant ? propose Chris.
Avec joie !
Nous redescendons de la falaise pour rejoindre le petit groupe de métamorphes en bas. Puis nous reprenons la route jusqu'au village, dans la joie et la bonne humeur. J'apprends à faire connaissance avec chacun de mes camarades de meute. Je mémorise leur nom, leur rang dans la meute. Je m'intègre.
Et ça me rend heureuse.
Mais ce sentiment s'estompe alors que nous apercevons Andréas qui semble nous attendre à l'entrée du village. Son expression ne semble pas très avenante.
-Où est-ce que vous étiez passez, tous ? demande t-il froidement.
-On a fait une petite compétition entre Chris et moi. Mais si tu étais un peu plus présent, tu le saurais.
Et je passe près de lui sans lui accorder plus d'attention qu'il ne mérite.
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