Chapitre 25

-Réveille-toi, ma belle Hasna.

Tirée du sommeil par une agréable voix suave, je m'étire. Je me suis endormie peu de temps après avoir vomi dans la nature, ce qui m'a empêchée de recommencer une deuxième fois.

En ouvrant les yeux, je tombe nez-à-nez avec Andréas. Le loup m'observe d'un air attendri. De bonne humeur, j'attrape son visage, une main sur chaque joue, et l'embrasse à pleine bouche.

Hum, que c'est bon de se réveiller avec un tel étalon à ses côtés.

Andréas peine à s'écarter.

-Ce n'est pas que je n'apprécie pas ce délicieux moment - bien au contraire - mais nous sommes arrivés. me stoppe t-il.

Ce n'est pas trop tôt !

Je pousse Andréas et sors par la portière grande ouverte. L'air frais me fait un bien fou après avoir passé tout ce temps enfermé dans le cercueil métallique. Je m'étire une nouvelle fois. Andréas se poste derrière-moi et m'encercle de ses bras.

-Bienvenue dans ton nouveau chez toi.

J'observe avec attention ce nouveau paysage qui me fait face.

Hum, il est sûr qu'on est arrivé à bonne destination ?

C'est un petit village sobre, avec de vieilles bâtisses datant du siècle dernier. Certaines maisons semblent même à deux doigts de s'effondrer.

Sans doute y en a-t-il qui ont fini par le faire, je me dis en voyant des tas de gravats ici et là.

Tout est terne. Même les jardins font pitié, avec leurs tas de mauvaises herbes.

Comme je regrette la belle prairie de Saorsa.

-C'est...

Triste ? Pitoyable ? Désastreux ?

-Je sais ce que tu penses. Ça fait pitié à côté de ton ancienne maison.

Et pas qu'un peu !

-Je croyais que vous rouliez sur l'or.

Après tout, c'est bien sur une croisière de luxe qu'ils ont navigué durant une semaine. Avec tous ces beaux costumes, et ces suites privées, je m'attendais à un truc éblouissant.

-C'est le cas. Mais c'est Lorenzo qui gérait les finances, et il n'a jamais accordé trop d'importance à l'état de notre territoire. En fait, je le soupçonne de préparer cette attaque contre Saorsa depuis longtemps, afin de récupérer vos terres et de reconstruire une fois là-bas.

Il est vrai que le territoire de Saorsa est magnifique, idéalement placé. Mais tout de même...

-Je comprends maintenant quand tu disais que nous allions avoir du pain sur la planche. je soupire.

Je n'ose même pas imaginer les travaux phénoménales qu'il va falloir réaliser pour améliorer ce taudis.

-Si ça peut te rassurer, la demeure de l'Alpha est beaucoup plus moderne.

-Donc si je comprends bien, Lorenzo rénovait sa propre maison mais laissait ses camarades de meute vivre misérablement ?

Andréas se passe la main dans les cheveux en soupirant.

-C'est un peu ça, oui.

-Et les loups se sont laissés faire ?

Bien-sûr, ils n'ont pas vraiment d'autre choix que d'obéir à leur Alpha.

Stupide hiérarchie.

-Bon, et si on y allait ? J'ai ordonné à toute la meute de se réunir devant notre résidence dans deux heures, le temps que chacun défasse ses bagages.

Tout semble désert lorsque nous traversons le village. Si je ne savais pas ce que je sais, je dirai même que c'est à l'abandon. Je trouve ça même étonnant que Lorenzo et sa meute soit parti sans laisser quelques loups pour veiller sur leur territoire en cas d'intrusion.

Enfin, ce n'est pas si étonnant s'il était sûr de remporter les terres de Saorsa.

Nous arrivons bientôt dans notre nouvelle maison et, effectivement, tout est en bien meilleur état. Le bâtiment semble avoir été bâti récemment. Les murs et les fenêtres sont étonnement très propres en comparaison des autres maisons.

Et je ne parle même pas de ce qu'il y a à l'intérieur ! Tout un tas de meubles presque neufs, une cuisine moderne et bien équipée, et trois gigantesques chambres.

-Où est-ce que je dépose mes affaires ? je demande à Andréas en trainant ma valise derrière-moi.

Il me désigne une porte fermée. J'entre dans la pièce et dépose ma valise sur le côté avant d'observer la chambre.

Il n'y a aucun doute, c'est bien la chambre d'Andréas.

Tout est sobre, rien de trop personnel ne traine. Mais son odeur corporel flotte délicieusement dans l'air.

-Fais comme chez toi.

Je sourie malicieusement.

-Tu sais que si tu me dis ça, je vais faire de cette chambre un véritable carnage ?

Oh oui, je vais étaler mes pelotes de laine, remplir les tiroirs d'herbe à chat, griffer ces jolis rideaux et mettre mes poils partout où je passerais.

Il lève les yeux au ciel en riant.

-Je le sais, oui. Mais c'est bien pour ça que je t'aime.

Il entre à son tour et dépose les quelques cartons qui m'appartiennent sur le sol.

-En parlant de ça, et ce qu'on pourrait reparler de cette histoire de... euh...

Je tripote mes mains, nerveuse à l'idée de revenir sur cette conversation incongrue. Malheureusement pour moi, Andréas ne semble pas comprendre où je veux en venir, m'obligeant à prononcer le mot tabou.

-Âme-sœur. je souffle.

Je suis mal à l'aise avec cette idée, mais il va bien falloir en parler un jour où l'autre. Andréas pense que nous sommes liés par le destin. C'est complètement fou, s'il veut mon avis.

-Et que veux-tu que je te dise ?

Andréas commence à défaire les cartons.

-Pourquoi est-ce que tu penses ça ?

Il s'arrête de déballer, se relève et s'avance jusqu'à être à ma hauteur. Je lui rends son regard anthracite qui m'observe avec intensité. Je me sens toute chose chaque fois qu'il me regarde ainsi, de ce regard chargé d'émotions.

-Parce que je suis tombé amoureux de toi dès l'instant où nos regards se sont croisés.

Je baisse les yeux, ne supportant plus tout ce flot d'émotions qui me traverse lorsque je le regarde.

-Je croyais que c'était ton loup qui avait succombé le premier.

-Oui, c'est vrai, parce que je ne voulais pas croire à l'évidence, contrairement à lui. J'ai essayé de refoulé mes sentiments, mais j'ai bien vite réalisé que ça n'allait pas être possible.

Le loup agrippe doucement mon menton et me relève la tête.

-J'ai l'impression que tu as du mal à me croire.

Je secoue la tête.

-Je veux bien te croire sur ce que tu dis que tu as ressenti. Mais ce lien d'âme-sœur, tu n'as aucune preuve qu'il existe bien.

-C'est évident, pourtant ! A chaque fois que tu as essayé de me fuir, tu es revenue vers moi. Les âmes-sœurs ne peuvent pas s'éloigner l'un de l'autre, ça les détruit autrement.

Je refuse d'y croire. Un métamorphe a une chance sur un milliard de trouver son âme-sœur. Je n'en ai jamais vu, pour moi ce ne sont que des rumeurs et tout cela n'existe pas. Et même si ça existait, je ne peux pas croire que moi, la chatte la plus malchanceuse au monde, ait pu voir sa roue tourner.

C'est bien trop beau pour être vrai.

J'ai déjà eu beaucoup de mal avant d'accepter qu'Andréas veuille réellement de moi. Alors accepter de croire un truc aussi dingue que ça...

-Franchement, je pense que si nous étions âmes-sœurs, je l'aurais su dès le départ.

Parmi toutes les versions que j'ai pu entendre, s'il y a bien une chose qui revient toujours, c'est que les deux âmes reconnaissent au premier coup d'œil leur moitié. J'ai bien été attirée par Andréas la première fois que je l'ai vu, mais ça n'a rien à voir avec le destin. Il est tout simplement beau à se damner.

Qui donc peut ne pas avoir le coup de foudre après avoir reluqué un morceau pareil ? Personne, on est bien d'accord.

-Peut-être pas. Il arrive que des âmes-sœurs mettent du temps avant de se rendre compte de ce qui les lie.

-Et comment peux-tu le savoir ? Honnêtement, est-ce que tu as déjà dans ta vie ne serait-ce qu'un couple d'âme-sœur de tes propres yeux ? je le défie.

Il rit jaune.

-J'ai vécu assez longtemps pour en avoir aperçu plus d'un. me confie t-il.

Je croise les bras contre mon torse, intriguée.

-Ah oui ? Et tu as quel âge exactement ?

Son visage se ferme aussitôt. Je regrette vite ma question. J'avais oublié à quel point il est malpoli de demander son âge à un métamorphe - mais bon, quitte à être compagnon, je suis censée être au courant de ce genre de choses non ?

Quel loup ingrat !

-On devrait se dépêcher. La meute ne va pas tarder à se réunir.

Et il s'en va, coupant court à la conversation.

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