prologue
Roumanie mars 1926
- BLESTEMAT !!!! Avait hurlé la femme face à moi. Je regardais mon guide impuissant, il haussa les épaules et m'entraina à part.
- C'est une pauvre femme. Elle a perdu la tête, on l'a connait tous ici.
Je rajustai mes lunettes et continua d'observer cette femme qui était de toute évidence folle. Mais quelque chose m'interpella. Elle était, certes, folle allier, mais quand elle me regardait, elle était aussi très effrayée.
- Elle a peur, dis je à mon guide. Et puis elle a prononcé un mot que je ne connais pas... Blestemat ?
- Ce n'est rien, répéta mon guide. Elle dit n'importe quoi ! Venez, il faut partir. Votre train va bientôt rentrer en gare et si vous voulez rentrer en Amérique, il ne faut pas le louper, n'est ce pas ?
Je regardai maintenant mon guide qui souriait avec le peu de dent qu'il lui restait. Il avait été un bon guide jusqu'ici. S'évertuant à rendre mon séjour en Roumanie dans les meilleurs conditions possible. Bien que je n'avais finalement pas réussi à photographier le moindre indice d'un monstre bien connu d'ici " Dracula" ou Vlad l'empaleur. C'était instructif, mais rien de bien folichon pour écrire un article complet pour la gazette. Il n'y avait pas assez de concordance avec les dates et les lieux où cet individu aurait pu apparaitre. Il y avait que la visite du château d'intéressant. Et j'avais pris de nombreux cliché du bâtiment. Le patron voulait du sensationnel, il allait être déçu.
Je sortais mon Rolleiflex de ma sacoche (un appareil photo, un prototype, que j'avais eu en avant première, lors de mon passage en Allemagne, un petit bijou de technologie soit disant passant.), et immortalisai celle qui me traitait de "Blestemat".
La femme se statufia quand le flash apparut. Puis elle se mit à hurler encore plus fort et à fuire dans une petite ruelle de la ville. Elle disparut comme elle m'était apparu quelques minutes plutôt.
- Vous l'avez effrayé avec votre engin ! Nombreux ici ne savent pas ce que vous tenez. Peut être avez vous aspirer son âme ?
Je grimaçai en guise de réponse.
- Peut être, murmurai je.
Et cela me rassura pas du tout.
Je rangeai mon appareil dans sa sacoche, et suivit mon guide qui avait arrêté un taxi. Il indiqua la gare et s'empressa de me dire au revoir. Je montai dans la voiture, et observai la ruelle sombre où était parti cette femme. La voiture démarra en trombe, et je levai ma main pour saluer mon guide.
- Vous américain ? Demanda le conducteur.
- Oui ! Vous parlez anglais ?
- Un peu oui. J'ai chance d'être aller à école.
Je souriais aux fautes qu'il faisait, puis m'adossa un peu plus dans le siège. Soudain, une illumination me vint en tête.
- Vous pourrez peut être m'aider !
- Je vais faire...
- Il y a un mot que je n'ai pas compris, de la part d'une femme. Elle m'a dit Blestemat...
Dans le rétroviseur, je vis mon conducteur, d'abord étonné, puis il fronça les sourcils. Il semblait réfléchir. Il était silencieux, pendant quelques secondes. Je commençai à croire qu'il ne savait pas comment le traduire. Puis il soupira et demanda :
- Vous méchant avec elle ?
- Non... C'était une pauvre femme, répondis je en levant les yeux au ciel.
- Alors... Humm... déchu veut dire, mais j'ai pas mot exacte
- Déchu ? Moi je suis déchu ?
Je me mets à rire nerveusement.
- Non... Je ne crois pas, je pense plutôt être "maudit" à la rigueur.
- Ah ! Voilà mot pas trouvé !
Mes épaules s'affaissèrent encore plus.
- Vous maudit ! s'exclama t-il
Il semblait content de sa trouvaille. Moi je l'étais moins. Mes yeux se baissèrent sur ma sacoche et je la caressai par instinct. Pour une fois dans mon voyage, il n'y avait rien eu de bizarre, de malchanceux. Et voilà que je suis tout de même rattrapé. Me traiter de maudit n'était pas si faux, puisqu'on m'avait déjà traité de maudit. Pour rire, toujours, me promettait-on.
La voiture ralentit et se gara devant la gare. Je sortis quelques billets pour le payer et le remercia de sa course et de son éclaircissement à mon mot mystère. Il sourit en contrepartie et s'engagea sur la route dès que je claquai la porte. L'observant s'éloigner, un agent de la gare vint à ma rencontre et m'interpella :
- Mister Murphy ?
- Oui ? C'est bien moi.
- Vos bagages sont déjà dans le train, vous pouvez vous installer à son bord.
Je remerciai l'agent ferroviaire, et le suivit pour embarquer dans le train. Un long voyage m'attendait pour revenir à Akham. J'allais pouvoir méditer sur ce que j'avais appris ici, et en sortir un article aussi complet que je le pouvais.
Le voyage en train fut assez agréable. La cabine couchette n'était pas occupé par d'autre voyageur, ce qui m'arrangeait dans la progression de mon article. Je gribouillai ma page de phrases, rajoutai, rayai, rouspétai tout du long. Et les nuits étaient courtes. Je cauchemardai comme à mon habitude.
Au cinquième jour de train, celui ci arriva en gare de Saint Nazaire en France, et je ne m'attardai pas à flâner dans cette ville portuaire. Prenant ma cabine attribué pour le voyage sur l'atlantique, je me mis en action pour créer une chambre noir dans les toilettes de celle ci. Je déployai mes pellicules et les trempai dans le bain qui fera effet. Je suspendais les pellicules afin qu'elles sèchent de leur bain. Je sentis alors que le bateau voguait. Toute mon installation avait pris du temps. Je m'étirai, et décida d'aller manger un morceau dans la salle à manger principale.
L'ensemble du bateau était luxueux. La salle à manger l'était tout autant, quant à la nourriture présentée, je n'en parlai même pas. J'avais même des scrupules en vers mon patron, de manger des mets qui sortaient de l'ordinaire sur son argent. Mais après tout c'était lui qui m'avait envoyé au fin fond de l'Europe, pour aller enquêter sur "Vlad l'empaleur". Je prenais place sur une petite table ronde. Autour de moi, les tables se remplirent de personnes riches vu les habits dans lesquels ils étaient fagotés. Je sortais ma pipe, mis du tabac et alors que je cherchai des allumettes, une main élégante avança pour m'en proposer une. Je levai les yeux pour découvrir une jeune femme au cheveux courts et noir. Elle portait une robe verte qui scintillait à chacun de ses mouvements. Des sautoirs de perles pendaient à son cou. Elle avait elle même un long porte cigarette au bout de ses doigts.
- Vous semblez être embêté de ne pas trouver du feu, dit-elle d'une voix suave.
- Merci.
J'attrapai l'allumette et la fit craquer. Les flammes prirent le tabac, et j'inspirai la pipe pour la faire partir le feu. Pendant ce laps de temps, elle s'était assise à coté de moi. Je regardai tout autour pour voir si cette belle jeune femme était accompagnée.
- Il n'est pas là , dit-elle avec un sourire, devinant aisément ma recherche visuelle. Il est déjà occupé dans ses "affaires...". Je vous ai vu arriver seul, et prendre place seul. Je me suis dis "pourquoi pas faire connaissance, après tout le voyage va durer longtemps".
Je souriais timidement à d'une telle approche si direct. Elle inspira à son tour dans son porte cigarette, avant de rejeter la fumée vers le ciel.
- Jenny Barnes, annonça t-elle en tendant la main vers moi.
- Rex...Murphy, répondis-je en lui attrapant sa main gantée.
- Rex... Et bien, que faites vous ici sur ce grand bateau en partance pour l'Amérique.
Je constatai alors son accent. Il était américain, mais semblait être mélangé avec l'accent français.
- Le travail, enfin le retour ...
- Ho ! Et que faites vous de beau dans la vie ?
- Je suis reporter,
- Ho ! Journaliste ! C'est formidable.
Elle reprit une bouffée de tabac, et s'approcha inexorablement de moi. Je déglutis et me sentis soudainement pris au piège. Je n'étais pas quelqu'un de très à l'aise avec la gente féminine. Une serveuse mit fin à son rapprochement en s'interposant entre nous. Elle dépose une belle assiette d'entrée devant Jenny, et fit de même pour moi.
- Bon appétit ! Dit elle
Jenny lui jeta un regard noir, puis se reporta sur l'assiette apportée.
- Du Homard... C'est tellement surfait ! Dit elle sur le ton de le désinvolture.
Je regardai l'assiette à mon tour, pris ma première fourchette. Mes lèvres attrapèrent un morceau et je mastiquai cela avec précaution. C'était bon, non c'était excellent ! Mais je n'avais pas l'habitude de manger ce genre de plat. Jenny, elle, devait être lassée. Ce qui m'amenait à la réflexion qu'elle faisait parti du beau monde. Surement lassée par tout... Et par son mari.
Elle me sourit soudainement, et me demanda :
- Vous m'avez dit que vous étiez reporter, mais pour quel journal ? Le Chicago tribune ? Le Daily News ?
Je pausais ma fourchette et m'essuya la bouche en tapotant ma moustache. Je grattai ma gorge pour éclaircir ma voix, car le nom que j'allais annoncer n'était pas aussi prestigieux.
- Non, pas de grand nom, c'est un journal local, Les Échos d'Arkham.
Elle interrompit sa main qui portait la nourriture à sa bouche.
- Comment avez vous dit ?
Alors que je m'apprêtais à lui répondre, elle enchaina :
- Vous êtes d'Arkham ?
- On ne peut rien vous cacher, répondis je
- Alors, avez vous connu ma sœur ? Isabelle Barnes ?
Je pris du recul dans mon siège et réfléchis quelques instants. Le nom me disait vaguement quelque chose.
- Pas personnellement, répondis-je prudemment.
- Sans doute, et puis c'est normal, elle a disparu !
Soudain quelque chose me revint à l'esprit ! Oui, elle avait disparu, mais elle était aussi très connu pour être "folle". Encore une ... pensais-je.
- C'est pour cela que je rentre en Amérique ! Malgré les moyens que j'ai mis en place à distance, personne ne la retrouve. Je veux régler cette histoire, et la revoir. Revoir ma sœur.
Je la regardai avec intérêt. Sa disparition était une enquête à reprendre, et qui sait peut être allait-on tomber sur quelque chose d'intéressant et peut être photographier...
Photographie...
- Bon sang !
Je me levai d'un coup, et m'excusai auprès de Jenny.
- Mes photos ! Je... Désolé, je dois vous laisser !
La jeune femme me regarda incrédule, et commença se lever comme si elle voulait m'accompagner.
- Je vous en prie, ne bougez pas pour moi, je ...
Je reculai tout en bafouillant des excuses bidons, faillis tomber avec un serveur qui portait des assiettes, et me pris les pieds dans un tapis. Je partis en courant direction ma cabine. Je pouvais encore entendre la voix de Jenny m'appeler avec inquiétude. Oui, j'étais inquiet. J'avais laissé mon matériel et une grande frayeur me prit. J'ouvrai en grand la porte de ma cabine et me précipitai vers les toilettes. J'entrai rapidement pour éviter toute exposition de lumière superflu.
Mes pellicules étaient là à m'attendre sagement. Je soupirai de soulagement, et avançai vers celles qui se trouvaient les plus proche de moi. C'était les derniers clichés que j'avais pris. Je décrochai délicatement la pellicule de son support de séchage et regardai rapidement les prises de vue. Elles étaient plutôt réussies. Et je tombai alors sur celle de la femme hystérique.
La voyant, j'écarquillai les yeux, puis je fus pris de vertige. Je me plaquai contre le mur et me laissai glisser pour pouvoir m'assoir. Je regardai un dernière fois le négatif et revis ce visage. Il était flou et déformé.
Je suis réellement maudit...
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