Chapitre 34

« L'image de cet enfant poignardé me hante chaque nuit. Je revois le bras du soldat qui s'abat, encore et encore. Le sang qui gicle. Le sang qui se répand au sol. Le souffle rauque et mourant de l'enfant. Son dernier soupir.

Pendant plusieurs jours, j'ai senti l'odeur de son sang sur mes vêtements. Ces connards m'ont laissée mariner dedans jusqu'à ce qu'eux-mêmes ne puissent plus supporter cette puanteur. Ils m'ont alors récurée des pieds à la tête, sous leur jet d'eau savonneuse et glaciale. Mon débardeur et mes sous-vêtements ont été lavés aussi.

Alors que je pensais pouvoir enfin trouver quelques heures de sommeil bien méritées, ils ont envoyé un garde taper dans les barreaux des cellules tous les quarts d'heure. Impossible de dormir. Donc je suis là, fixant le plafond de ma cellule à maudire mon geôlier et m'imaginer lui faire bouffer sa matraque jusqu'à la poignée. De toute façon, j'imagine qu'ils vont bientôt venir me chercher.

En effet, la porte finit par s'ouvrir et je retrouve l'homme qui s'occupe de m'escorter depuis quelques semaines.

— Alors ce café ? demandé-je d'une voix éreintée. Ça tient toujours ?

— Jamais tu n'es fatiguée ? rétorque-t-il, las.

Je baisse la tête et mes épaules s'affaissent.

— Si.

— Allez, suis-moi.

Il m'aide à me relever et nous circulons à travers les couloirs.

— Dans d'autres circonstances, on aurait peut-être pu être amis, déclare-t-il, soudain.

— Je ne crois pas, non.

— Pourquoi ?

— Parce que tu bosses pour cette enflure de Macrélois et que ton job consiste à accompagner les gens se faire torturer.

L'homme hoche la tête d'un air pensif avant d'ouvrir une porte.

— Ils t'attendent. Je viendrai te récupérer tout à l'heure.

Effectivement, à l'intérieur l'homme en blouse blanche aux yeux vairons m'attend. Mais cette fois, il n'est pas seul. Une quinzaine de personnes sont assises sur des chaises pliantes et me font face au centre de la pièce. Il y a des hommes en armes, des administratifs, de hauts dignitaires. Sur les murs, des néons de toutes les couleurs donnent une ambiance particulière à la scène. Certainement mis en place pour l'occasion.

J'avance lentement vers le fauteuil de dentiste qui me tend les bras. Je m'installe et commence à sangler mes pieds. La blouse blanche en fait de même avec mes poignets et pose le casque relié à un tas d'appareils sur ma tête.

Une fois tous les réglages terminés, l'homme se tourne vers l'assemblée et commence un exposé sur une nouvelle technique de torture. Enfin nouvelle... pour les autres. Lui et moi commençons à bien la connaître. Sa voix, sans timbre particulier, s'élève au-dessus de nos têtes. Je ne l'écoute pas, plongée dans les méandres de mes tourments passés et à venir.

Ce n'est que lorsque le bourdonnement des machines s'enclenche que je remarque qu'il a arrêté de parler. Une violente douleur me cambre sur la chaise et je commence à recevoir les ondes électriques qui activent mes peurs les plus enfouies, les plus terribles et les plus atroces. Je serre les dents. Si je me retiens de pousser des gémissements, je ne peux empêcher les larmes de rouler sur mes joues à mesure que la terreur grandit en moi, jusqu'à m'étouffer.

La blouse blanche brandit alors devant mes yeux des objets, des photos, des bandes sonores. À chaque fois l'assemblée regarde attentivement ma réaction, puis prend des notes.

Je suis consciente de cette terreur qui me dévore de plus en plus et en même temps, cela me permet de m'extraire de ce corps en souffrance. Ce corps épuisé, brisé, j'en fais abstraction, m'en détache et le regarde de loin. Je me vois fermer les yeux. Mon rythme cardiaque ralentit.


Baboum. Baboum. Baboum.


Baboum. Baboum.


Baboum.


Ba...


Une décharge électrique me secoue violemment.


...


Une seconde, plus puissante, plus longue, m'ébranle.


...


Ba...


...


Une troisième me transperce l'esprit, me happe et me fait revenir dans ce corps que je ne veux plus.


Baboum.


Je rouvre les yeux et croise le regard vairon de mon tortionnaire. La séance peut reprendre.

Une larme coule à nouveau le long de ma joue pour mourir dans mon cou. Je suis là, sans l'être. Une immensité blanche m'enveloppe et m'emporte loin de mon supplice. Loin de mes tourments. »

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Et nous y voilà ! Ce sera le dernier chapitre de ce tome que je posterai ici, la sortie officielle d'Horizons #3 - Des cendres nous renaîtrons étant aujourd'hui ! Vous pouvez le commander directement sur le site de l'éditeur (www.inceptioeditions.com), sur la Fnac ou Amazon ou dans n'importe quelle librairie en France.

Le tome 3 sera deux fois plus volumineux que les deux précédents car nous avons décidé de rassembler les 4 derniers tomes en deux volumes pour plus de plaisir et pour terminer la saga plus rapidement. Sachez donc que le tome 4 et dernier d'Horizons est en cours de correction éditoriale et sortira début décembre. Bien évidemment, je vous tiendrai au courant.

Si vous m'avez suivie jusque là, j'espère que ce début du troisième opus vous aura séduit et donné envie de lire la suite. Xalyah a encore beaucoup d'épreuves à surmonter devant elle et il va falloir qu'elle revoie ses positions si elle veut espérer obtenir vengeance un jour... Je dis ça, je dis rien... :p

Merci à tous ceux qui me soutiennent sur Wattpad ou sur les autres plateformes de réseaux sociaux. C'est grâce à vous qu'Horizons prend vie !

Ce n'est pas un adieu, juste un au revoir. D'autant plus que je reviendrai probablement bientôt avec un nouveau projet...

Encore merci et à bientôt,

Lysiah

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