Chapitre 17 - #3

Je m'appuie lourdement sur le jeune homme qui inspecte rapidement sa blessure. Il pisse le sang, mais c'est superficiel. Je peine à rester consciente tandis que les voix des deux hommes nous parviennent aux oreilles. Fait chier, putain.

— Va-t'en Khenzo, murmuré-je, à bout de souffle. Si tu restes avec moi, tu es mort. J'ai l'impression qu'ils sont bien décidés à me trouer la peau.

Il me prend le visage entre les mains et plonge ses yeux dans les miens.

— Je ne m'en irai pas sans toi. Je sais que tu peux y arriver.

Le sol tangue dangereusement autour de moi et je m'accroche à ses avant-bras pour ne pas tomber. Je grimace et repousse les points lumineux qui encombrent ma vision. Va pour une dernière course : s'il croit que je peux le faire, pourquoi pas moi ? Joe et son comparse sont presque sur nous et la grenaille siffle à nouveau au-dessus de nos têtes.

Nous passons un grand carrefour et tournons à l'angle d'un immeuble, quand je trébuche et roule au sol. Incapable de me relever tant mon corps me fait souffrir, j'arrive tout juste à ramper pour essayer de me mettre à l'abri derrière un panneau publicitaire. Khenzo revient sur ses pas pour me venir en aide :

— Allez, lève-toi ! m'encourage-t-il en me tirant par le bras.

— Je... je... pas...

Alors que nos poursuivants nous rattrapent, Khenzo s'accroupit à mes côtés et passe ses bras autour de mes épaules, comme s'il voulait me protéger.

— Va-t'en...

— Sûrement pas !

— Ça ne sert à rien d'être... héroïque si... si c'est pour... crever. Va-t'en !

Dans un ultime effort, j'essaye de le repousser d'un poing sanglant, mais rien à faire. Il resserre un peu plus son étreinte et baisse la tête, attendant le coup de feu fatidique.

— Fais pas le con, supplié-je, les larmes aux yeux.

J'entends les bruits de course qui se rapprochent. Les deux hommes sont là, pointant leurs fusils à pompe sur nous. Mon front touche sa poitrine et sa main se pose sur ma nuque. Je crois bien que le moment est venu.

— Vous là ! Déguerpissez d'ici !

Surpris, Khenzo relève la tête et regarde dans la direction opposée de nos poursuivants. Une femme d'un certain âge tient un fusil d'assaut contre son épaule, visant Joe et Mark. Malgré sa petite taille, elle n'a pas l'air de vouloir plaisanter.

— Te mêle pas de ça mamie, lui ordonne Joe. C'est une histoire entre elle et nous !

Sans crier gare la femme ouvre le feu aux pieds des deux hommes qui font un bond de deux mètres en arrière.

— Ça va pas bien la vieille ! s'exclame Mark. T'aurais pu nous tuer !

— J'aurais pu oui, mais je crois qu'il y a eu suffisamment de morts ces derniers temps.

Désabusés, les deux hommes glissent leurs armes sous la ceinture et repartent d'où ils étaient venus, l'air de rien. Soulagée, je m'écroule sur le dos et lâche un juron libérateur.

— Merci, dit Khenzo en direction de la vieille femme. Je crois qu'on vous doit la vie.

— Je le crois également, répond-elle avec un air malicieux. Vous n'avez pas l'air d'être au meilleur de votre forme tous les deux. Suivez-moi.

Trop épuisée pour répondre, je laisse Khenzo décider de notre sort.

— Nous n'avons pas le choix, me murmure-t-il en se penchant vers moi pour poser une main sur ma joue. Tu vas y rester sinon.

Le jeune homme m'aide à me relever, mais l'effort m'arrache un gémissement de douleur.

— Tu vas pouvoir marcher ? demande-t-il, l'air inquiet.

— Oui... ça va aller.

Deux pas. C'est tout ce que j'ai réussi à faire avant que mes jambes ne se dérobent sous moi. Khenzo me rattrape au vol et me soulève dans ses bras. Je m'agrippe à son cou et laisse échapper quelques larmes de douleur.

— Je suis désolée...

— T'en fais pas.

La démarche lourde, il s'engage à la suite de la femme. Celle-ci entre dans le hall de l'immeuble situé à l'angle de la rue et adresse un signe de tête à un homme qui monte la garde au pied des escaliers, armé d'une mitraillette. Éreinté, Khenzo atteint le dixième et dernier étage avec soulagement.

La femme le mène jusqu'à une chambre où il m'allonge sur le lit. Je laisse échapper un grognement de douleur au moment où il me redresse pour enlever mon manteau.

— C'est moche, déclare-t-il en soulevant mon t-shirt.

Je baisse les yeux sur mon ventre. Mes vêtements ont pris une couleur cramoisie et le sang continue de s'écouler par la plaie béante que mes mains tremblantes essayent de comprimer. Alors qu'il fouille fébrilement dans sa sacoche pour m'administrer les premiers soins, la vieille femme pose une main ridée sur son épaule.

— Laisse mon grand. Va prendre une douche, je m'occupe d'elle.

Une douche ! Quelle merveilleuse idée ! Un long frisson me parcourt le corps alors que mon regard suit Khenzo qui sort de la chambre à reculons, en m'adressant un dernier sourire plein d'empathie. Son inquiétude semble réelle et pour la première fois depuis longtemps, une vraie bouffée d'angoisse me prend à la gorge.

Je grimace pour l'évacuer et gesticule afin de trouver une position plus confortable. Ma vision se trouble. J'ai faim. Mal aussi. Froid. Chaud. Mais faim surtout. Oui. J'aimerais manger des crêpes. Avec du sucre et du citron... Du miel aussi. C'est bon. Et la confiture de maman... la meilleure...

— Je te ferai des crêpes si tu veux, ma chérie. Mais pour l'instant tu dois te reposer, dit doucement la vieille femme en passant un linge humide sur mon front en sueur.

Oh putain, ça y est, c'est le début de la fin si je commence à halluciner. « Ma chérie » ; ma mère m'appelait tout le temps comme ça. D'ailleurs, son visage se penche sur moi et m'adresse son plus beau sourire.

— Maman... tu m'as manqué !

Mes doigts ensanglantés essayent de lui toucher la joue, mais je n'ai plus de force et mon bras retombe mollement sur le matelas. Dans ses mains, elle tient une seringue et, doucement, elle entoure mon bras d'un cordon pour me faire un garrot. Derrière elle, la silhouette floue d'un homme s'approche.

— Papa... je... j'ai réussi...

La pointe de la seringue s'enfonce dans le creux de mon bras. Je ne sens rien. Je suis heureuse. Ils sont là, près de moi. Je les ai enfin retrouvés après tout ce temps. Une douce torpeur m'envahit, parfumée aux crêpes à la fleur d'oranger, aux confiseries, au chocolat et au thé à l'amande amère. Un paradis bien mérité !

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Je m'excuse pour mon retard, cette publication était prévue pour vendredi, mais j'ai eu dix-milles choses à faire en même temps et... donc je n'ai pas eu le temps de poster la suite :(

Enfin, le mal est réparé, et voilà ! Nous sommes arrivés au bout du troisième et dernier chapitre que je posterai ici. Si vous souhaitez connaître la suite des aventures, rendez-vous sur le site des Éditions Inceptio, la Fnac, Amazon ou toutes les librairies en France à partir du 11 février prochain (peut-être qu'il est même possible de passer commande dès maintenant en librairie pour l'avoir à la sortie, je sais que l'éditeur a une commande libraire en attente pour le tome 2) !

J'espère que ce début de tome vous aura plu ! N'hésitez pas à me faire part de votre ressenti, ce que vous avez aimé, ce que vous n'avez pas aimé. Et si vous avez des théories farfelues pour la suite, ne vous privez pas de les partager, j'adore lire vos hypothèses !

Pour le moment, je n'ai pas encore de date à annoncer concernant la parution du troisième tome, cela dépendra beaucoup de l'accueil réservé aux deux premiers tomes. Rassurez-vous, il verra bien le jour car le contrat est déjà signé, mais la sortie sera plus ou moins rapprochée en fonction des retours que l'éditeur aura sur le début d'Horizons. Du coup, si vous avez aimé, n'hésitez pas à en parler autour de vous. Le bouche à oreille est très important pour les jeunes auteur(e)s :)

Je ne sais pas si vous aurez des questions à me poser, mais si c'est le cas, n'hésitez pas à le faire ici. Je ne pense pas faire une FAQ car il faudrait beaucoup de questions pour cela, mais je pourrai y répondre ici. Et si vous n'en avez pas, ce n'est pas grave, ce qui compte avant tout pour moi, c'est de vous avoir emmenés dans mon univers en compagnie de ces personnages qui sont chers à mes yeux et mon cœur. Alors merci de m'avoir lu jusque là. Vraiment. Merci mille fois.

N.B: N'hésitez pas à jeter un œil sur la dernière partie, vous y trouverez un listing des salons et dédicaces qui sont prévues dans les semaines et moi à venir.

Lysiah
with love


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