92. Aaron. Partie 1 ☑️
Mélody
- Mel !
Aaron vient s'asseoir à côté de moi et me serre dans ses bras. Malgré ma crise, j'ai pu envoyer un message à mon nouvel ami pour qu'il me rejoigne. Autour de moi, les gens me regardaient, mais personne ne m'est venue en aide ; j'aurais pu crever devant tout le monde sans qu'aucun ne bouge le petit doigt.
- Pas vraiment, dis-je entre deux sanglots. J'ai encore eu.. je n'arrive pas à terminer ma phrase.
- Des images, Aaron termine.
Je hoche positivement la tête. Des images et des dialogues. Pourquoi est-ce que cela m'arrive à moi ?
J'entends Aaron demander une bouteille d'eau et me la tendre doucement. Je la prends dans mes mains tremblantes, peinant à dévisser le bouchon.
Aaron remarque ma difficulté et, sans dire un mot, il m'aide à l'ouvrir. La fraîcheur de l'eau apaise ma gorge nouée par les sanglots, mais elle ne parvient pas à chasser les pensées sombres dans ma tête.
- Respire, Mel. Respire doucement, il murmure.
Je ferme les yeux et m'efforce de suivre ses conseils, inspirant profondément comme me l'a appris Adam. La douleur dans ma poitrine commence à s'atténuer, laissant place à une lassitude écrasante.
Aaron continue de me tenir, son étreinte me rappelle que je ne suis pas seule.
- Tu n'es pas seule dans tout ça, je te l'ai déjà dit, comme s'il pouvait lire mes pensées. On va trouver une solution, je te le promets. Tes crises vont s'atténuer.
Je voudrais y croire, mais les images continuent de me hanter, surgissant sans prévenir, me coupant le souffle.
Aaron est là, mais pour combien de temps ? Combien de temps avant qu'il ne réalise que je suis un poids, un fardeau qu'il ne peut pas porter ? Tout le monde m'abandonne. De ma propre famille, en passant par Adam jusqu'à Tyler.
- Tu as déjà fait tant pour moi en si peu de temps, je murmure, ma voix presque inaudible. Pourquoi tu continues ?
Aaron me regarde avec une intensité qui me surprend. Il semble chercher ses mots, comme s'il voulait dire quelque chose d'important, mais qu'il hésite.
- Parce que... je tiens à toi, Mélody. Plus que tu ne le penses. Si nous nous sommes rencontrés, ce n'est pas pour rien.
Ses mots me frappent de plein fouet. Ils résonnent en moi, percutant cette partie de moi qui a toujours crû ne pas mériter qu'on s'y attarde. Je ne sais pas quoi répondre, alors je me contente de me blottir un peu plus contre lui, en espérant que la chaleur de ses bras m'aidera à calmer la tension qui m'habite encore.
**
Nous sommes finalement rentrés une fois que j'étais calmée. Aaron a réussi à me faire rire, avec des blagues débiles, du niveau d'un Nathan ou d'un Josh. Cela m'a fait du bien.
Maintenant, je suis allongée sur le canapé en observant le plafond, cherchant désespérément un moyen d'enlever de ma tête Tyler. Mais c'est compliqué; c'est comme si cet homme avait envahi mon corps, mes veines, tout en fait.
- Tout va bien ? Me demande Aaron alors qu'il pose un verre de jus d'orange à côté de moi.
- Il faut bien, je soupire.
- Lève tes jambes deux secondes.
Sans réfléchir, je m'exécute. Il se met alors assis, et tapote sur ses cuisses pour que je pose mes membres. Doucement, il commence à me masser.
Progressivement, je me détends.
- Je passais des heures à faire ça à mon ex femme, me dit-il. Ça calmait ses angoisses.
- Ah ouais ? Je la comprends, ça fait du bien. Je lui souris avant de fermer les yeux.
- Elle me disait toujours que j'avais des doigts de fée. Alors, à la moindre occasion, je la massais. Elle adorait sentir mes mains dans son dos. Aaron a besoin de parler, alors je le laisse, en me concentrant sur ses mains. Quand on se disputait, du moins, quand elle s'énervait après moi, je m'arrangeais pour la caresser.
J'entends des sanglots dans sa voix. J'ai de la peine pour lui. Vraiment. Je sais ce que c'est que de perdre l'être aimé.
- Elle me manque tous les jours.
J'ouvre les yeux et braque mon regard sur lui. Son visage est pâle, ses iris sont humides. Je me relève et glisse une main dans ses cheveux.
- Je suis désolée Aaron.
Il tourne la tête vers moi en m'offrant un sourire triste.
- Il y a des jours, c'est plus difficile que d'autres. Il s'essuie les yeux d'un revers de la main. Elle me manque.
- Viens là, il se colle à moi, je passe un bras autour de ses épaules. Tu veux me parler d'elle ?
- Non, mais je veux bien un gros câlin.
Je lui souris, et on s'allonge sur le canapé. Nos bras s'entourent mutuellement, et on reste comme ça pendant un long moment.
Du bout des doigts, je caresse son avant bras, tandis que lui niche sa tête dans mon coup.
Je sens des larmes contre ma peau. J'ai mal au cœur de le savoir si fragile. Finalement, nous ne sommes pas si différents en effet; nous sommes tous les deux des âmes blessées dans nos cœurs.
Deux âmes perdues, amoureuses sans retour.
**
Nous avons finit par nous endormir, enlacés sur le sofa. J'ai réussi à dormir sans cauchemars pour la première fois en trois jours. Cela m'a fait du bien. Évidemment, je n'ai pas rattrapé tout mon sommeil, néanmoins, je me sens en meilleure forme.
À côté de moi, Aaron dort toujours à point fermé. Je le regarde quelques minutes en souriant, puis me lève du canapé en essayant de ne pas le réveiller.
J'attrape mon portable et remarque des notifications. Avec mon appareil, je me rends dans la cuisine, me fait couler un café et m'installe devant la fenêtre.
Je m'allume une clope et lis mes messages.
Tyler.
Il me demande si je veux bien continuer à communiquer avec lui au moins par téléphone. Je réfléchis quelques instants. Est-ce vraiment une bonne idée de lui dire oui ?
Non, c'est une mauvaise idée. Je lui ai dit que j'avais besoin de temps pour moi.
Je commence à écrire que non, mais finis par me raviser.
Moi
D'accord, à la condition de ne pas en abuser 🙂.
Je cède une fois plus; c'est une habitude avec Tyler. Couper les ponts définitivement, je n'y arriverai pas de toute façon; je me connais. Je reçois un nouveau message, je le lis mais ne répond pas tout de suite. Je ne veux pas qu'il croit que je suis pressée ou que je n'ai rien à faire hormis lui répondre.
Je termine ma clope et mon café, puis file prendre une douche. J'ai l'impression de coller de partout, et je déteste cette sensation.
**
- Te voilà réveillé.
Je souris à Aaron alors que je sors de la salle de bains. Ce dernier est assis sur le canapé et s'étire en bâillant.
- Oui. Quelle heure il est ?
- 18h30.
- Quoi ? Il se lève d'un bon en manquant de se cogner dans la table basse. J'ai dormi 6 heures !
J'émets un rire en hochant la tête.
- T'avais besoin de dormir.
On discute quelques minutes, puis on décide de sortir manger une pizza.
Il passe à la salle de bain, tandis que je débarrasse un peu la cuisine.
Tyler
Quelque chose ne va. J'ai mal au cœur tout à coup, et mes tempes cognent, mais c'est moins douloureux que d'habitude.
Je m'asseois sur un fauteuil, ferme les yeux et essaie de respirer calmement.
Des images. Encore et encore tournent dans ma tête.
Je vois Mélody, sourire à quelqu'un, mais je n'arrive pas à voir son visage.
Mélody qui éclate de rire, celui qui m'était habituellement réservé.
Une boule se forme dans ma gorge à mesure que les images défilent.
Mel qui se lève, qui pose ses lèvres sur les joues d'un homme.
Mélody ? Qui est-ce ? Est-ce pour ça que tu me rejettes ?
Adam, cela ne peut être qu'Adam. Je vais le tuer. Si il pose encore ne serait-ce que sa main sur elle, je ne répondrai plus de moi !
Mon mal de tête s'intensifie, les battements de mon cœur s'affolent.
Putain Mélody !!
J'essaie désespérément de rouvrir mes yeux, mais impossible, comme si quelqu'un ou quelque chose m'en empêchait.
Comme à chaque fois, mes mains se plaquent sur chaque côté de mon crâne.
Un frisson glacé me parcourt. Ma brune rit aux éclats. Ce qui me fait le plus mal, c'est de voir leurs doigts entrelacés qui semblent parfaitement assortis, comme s’ils avaient été faits pour se trouver.
Je sens mon cœur se tordre, chaque battement devient douloureux, une véritable torture. La nausée m'envahit, un mélange de jalousie et de désespoir m’étreignent.
C’est comme si le monde s'effondrait autour de moi, ne laissant que ce spectacle cruel pour me détruire.
J'ai mal à en crever.
C'est Adam. J'en suis sûr ! C'est pour cette raison qu'il ne voulait pas que je dise à Mel que ma mémoire revenait.
C'est pour ça ! Quel enfoiré ! Il veut juste bousiller ma vie pour profiter de ma Mélody. Hors de question de le laisser faire.
Mon mal de tête commence à se calmer; je ne vois plus rien, mais mon cœur continue de tambouriner contre ma poitrine.
J'ai besoin de savoir, besoin de la voir. Mais surtout, j'ai besoin de la déranger, de les déranger, pour rappeler que Tyler Joseph est là.
Bien là.
J'attrape mon téléphone et compose le numéro de Mel. Je tombe sur la messagerie au bout de la sixième tonalités. Je raccroche et rappelle. Même scénario.
Moi
Salut Mel. J'ai besoin de te voir. On peut se donner rdv quelque part ?
Pas de réponse au bout de cinq minutes.
Moi
Mel, c'est important.
Je tourne en rond comme un lion en cage. Ma main se serre autour de mon portable, tandis que ma bouche crache des insultes qui résonnent dans tout le salon.
Toujours pas de réponse. Je deviens braque.
Je me laisse tomber sur le canapé, toujours mon téléphone serré dans ma main. Mon cœur bat si fort que j'ai l'impression qu'il va exploser.
Mon regard est rivé sur l'écran, où défilent les messages laissés sans réponse et mes appels ignorés.
Je boue de rage.
Pourquoi ne me répond-elle pas ? Je le sais, je sais qu'elle est avec Adam et cela me ronge.
La jalousie me prend à la gorge, me brûle de l'intérieur. Mélody !
Je n'arrive pas à rester tranquille, mes doigts tapotent nerveusement le bord du canapé.
Je suis en colère, inquiet, et ma tête est remplie de scénarios que je n'arrive pas à chasser, ni à contrôler.
Je tente de rappeler une dernière fois.
Sans succès.
Je me lève brusquement, attrape mes clés, sors de ma maison, grimpe dans ma caisse et prends la route en direction du centre ville.
**
Mélody
- Merci pour cette soirée Aaron ! Je me suis bien amusée.
Je lui souris, avant de poser mes lèvres sur sa joue.
- Ravi de te l'entendre dire.
Il passe un bras autour de mes épaules, et, collé l'un à l'autre, nous rentrons à l'appartement.
Une fois à l'étage, je sors mon portable de mon sac et mon sourire s'efface lorsque je remarque plusieurs appels en absence et des messages de Tyler.
Aaron, voyant que quelque chose ne va pas, s'approche de moi. Je sens une vague d'angoisse monter en moi. Mon cœur commence à battre plus vite, et une chaleur étouffante envahit ma poitrine.
Je n’ai jamais ignoré un appel de Tyler, et le fait de voir autant de notifications manquées me donne une impression de vertige.
Je lis les messages, mes mains légèrement tremblantes. Il n'y a rien de grave, cela me rassure un peu, mais la manière dont il a écrit, ne présage rien de bon.
Pourquoi n'ai-je pas entendu mon téléphone ? Un sentiment de culpabilité s'empare de moi.
Aaron pose doucement sa main sur mon bras, cherchant à me rassurer.
- Ça va ? demande-t-il d'une voix inquiète.
- Ouais, enfin... Tyler a essayé de me joindre plusieurs fois. Il avait besoin de me parler.
- Essaie de le rappeler non ? Ça ne doit pas être si grave, sinon il t'aurait dit pourquoi.
Je ne réponds rien; on voit qu'il ne connait pas Tyler. Il se fait des films pour tout et n'importe quoi.
Cela dit, il n'est plus vraiment mon Tyler, sa réaction ne sera probablement pas la même qu'avant, quoique...
- Je vais l'appeler, tu as raison.
Il est tard, mais je suppose que Tyler est toujours réveillé. Je me pose devant la fenêtre et appelle.
Tyler
Les lumières sont allumées dans l'appartement d'Adam. Ils sont donc là.
J'angoisse à l'idée de les trouver nus, venant perturber leur tranquillité. Je ne devrais pas être dans cet état; après tout, j'ai bien couché avec Mégane...
Mais ce n'était pas le même scénario. Pour moi, Mélody n'existait que comme une connaissance. Nous n'étions pas un couple.
Connaissance... Ce mot résonne horriblement à mes oreilles. C'est l'amour de ma vie, malgré nos différences. Elle s'est imprégnée sous ma peau la première fois que j'ai croisé son regard, même si, notre différence d'âge était un frein.
J'ai de la chance, quelqu'un sort de l'entrée, je n'ai pas besoin de sonner.
Je fonce vers l'ascenseur, et appuie plusieurs fois, comme si il allait arriver plus vite. Complètement idiot.
Une fois à l'intérieur, je fais la même chose, appuie plusieurs fois pour qu'il aille plus vite. Pathétique.
Une fois dans le couloir, je fonce vers la porte et tape du poing contre, jusqu'à ce que j'entende la la serrure grincer.
- Tyler ? Me dit Adam avec un mouvement de recul. Ça ne va pas de taper si fort ?
- J'ai besoin de parler à Mélody, je rétorque sans m'excuser.
- Je ne sais pas où elle est. Bonne nuit.
Il tente de refermer la porte, mais mon pied l'en empêche.
- Je ne partirai pas tant que je ne l'aurai pas vu, j'essaie de rentrer, mais il m'en empêche.
Le psy soupire, avant de me dire qu'elle n'habitait pas là.
- Comment ça, elle n'habite plus là ?
Adam soupire, avant de finalement me laisser entrer.
- Regarde par toi même Tyler. La chambre est au fond à droite.
Je lui lance un regard méfiant et me dirige vers la pièce en question. J'ouvre la porte et découvre une chambre totalement vide.
Le lit est défait, laissant apparaître juste le matelas. Je m'avance dans la pièce, chaque pas résonnant légèrement sur le parquet. Une légère odeur de cannelle et orange flotte encore dans l'air. Je me retourne vers Adam, les sourcils froncés.
- Depuis quand est-elle partie ?Adam baisse les yeux, visiblement mal à l'aise. Trois jours.
Depuis qu'elle a quitté l'hôpital.
Une vague d'inquiétude me submerge. Elle ne serait jamais partie sans prévenir, sans me dire quelque chose, pas à moi !
- Elle t'a dit où elle allait ?
Il fait non de la tête. Il ment, les yeux ne mentent jamais.
- Tu te fous de moi Adam ! Où est-elle ?
Ma voix a monté d'un ton. Mes poings se serrent, prêts à exploser, mais je me retiens.
Je sens mon cœur battre plus fort, le sang martelant mes tempes. Adam recule d'un pas, les yeux écarquillés, comme s'il se préparait à une confrontation inévitable.
- Tyler, je t'assure, je ne sais pas où elle est.
Je le fixe intensément, cherchant le moindre indice de vérité ou de mensonge dans son expression. Ses mains tremblent légèrement, et il évite de croiser mon regard. C'est un signe. Il cache quelque chose.
- Tu ne sais pas mentir Adam ! Après le nez, t'as envie que je te pète les genoux ?
Son teint vire au gris, mais il reste muet. Je suis en train de bouillir intérieurement.
Respire Tyler. Respire calmement.
- T'as dix secondes pour me dire où elle se trouve.
Adam hésite, puis soupire de nouveau avant de sortir un morceau de papier froissé de sa poche. Il me le tend avec une main incertaine. Je le saisis brusquement et déplie le papier.
- C'est l'adresse de Mélody.
- Elle a trouvé un appartement ? Je questionne en lisant l'adresse.
- Elle squatte chez une connaissance, me répond Adam d'une voix basse.
Je relève la tête vers le mec au nez amoché, et le fusille du regard.
- T'as dû être trop pressant avec elle ! Ça ne devait pas te suffire de tenter de lui rouler les pelles !
- Que... Quoi ?
- Ne fais pas le mec qui ne comprends pas Adam ! Je le sais.
- C'est elle qui te l'a dit ?
Mon cœur cesse de battre. Il me subsistait un doute, malheureusement Adam vient le balayer d'un revers.
C'est arrivé. Adam et Mélody se sont embrassés.
- Combien de fois c'est arrivé ?
Je ne devrais pas poser cette question, mais je veux le savoir. J'en ai besoin.
- Une fois, il répond d'une voix lasse.
- Une fois ? Je ne te crois pas Adam !
Adam pâlit, comprenant que la situation vient de prendre une tournure bien plus sérieuse.
- Je te jure que si. Et elle m'a repoussé si tu veux tout savoir.
Je suis soulagé. Elle la repoussé, les images n'étaient pas faussées. Un poids s'évapore de mes épaules, mais de courte durée.
Avec qui était donc Mel ?
- C'est qui cette connaissance ?
Adam baisse la tête sur ses pieds; ça ne sent pas bon. Il ne me répond pas malgré mon insistance. Je répète encore et encore la même question.
- Aaron.
- C'est qui celui là ?
**
Mélody
Malgré plusieurs appels, Tyler ne décroche pas. Soit il n'a pas son téléphone sur lui, soit il me fait la tête.
Si c'est la deuxième option, grand bien lui fasse ! Après tout, je n'ai aucun compte à lui rendre.
Néanmoins, je lui envoie un texto. Je ne devrais pas, je le sais bien, mais...
Mais c'est Tyler. Je n'ai pas pour habitude de le laisser dans le vent.
Moi
Salut Tyler. Désolée de ne pas avoir répondu, je n'ai pas entendu mon téléphone. Il était dans mon sac. Rappelle-moi quand tu peux.
Pourquoi je me justifie ? C'est plus fort que moi. Cela a toujours été comme ça avec Tyler. Je me suis toujours justifiée du pourquoi du comment ; il faut absolument que j'arrête avec ça. Il n'est pas mon père et encore moins mon petit ami; quand bien même il le serait, je n'ai pas à lui dire ce que je fais ou ce que j'ai fait.
Avec Tyler, c'est comme si je perdais toute logique, toute raison. J'ai l'impression de devoir prouver quelque chose, comme si chaque mot ou chaque geste devait être validé par lui.
Je devrais m'affirmer, mais dès qu'il est là, dès qu'il m'appelle, toutes mes résolutions s'évanouissent. Il y a cette étrange puissance dans son regard, cette façon qu'il a de me scruter, comme s'il pouvait voir à travers moi, lire mes doutes, mes peurs.
Du moins, c'était comme ça avant.
Maintenant qu'il n'est plus le même, je continue sur la même lancée, alors que je ne devrais pas.
Je sais très bien que dès que je le verrai ou dès qu'il m'appellera, je lui dirai où j'étais et avec qui j'étais.
Il faut absolument que je travaille là-dessus.
Je rejoins le salon où Aaron m'attend sagement, assis sur le sofa.
- Alors, tu as réussi à le joindre ?
- Non, je soupire en me laissant tomber à côté de lui.
- Je te sens nerveuse Mélody. Tyler t'inquiète?
Je me tourne vers lui et lui offre mon sourire crispé.
- Je m'inquiète de sa réaction. Tyler est très gentil, mais s'emporte vite et souvent pour rien.
- Comme pour ce fameux clip ?
- Ouais, comme ce clip. Mais bon, il n'est plus le Tyler que j'ai connu. J'angoisse certainement pour rien.
Le regard d'Aaron est braqué sur moi, l'air de réfléchir. Son index tapote ses lèvres.
- A quoi tu penses ?
- Je pense que tu n'es pas honnête avec toi-même.
- Qu'est-ce que tu entends par là ?
Il soupire avant de se passer la main sur le visage, avant d'étouffer un baillement.
- Dans ta tête, tu es toujours en couple avec Tyler, je tente de le couper, mais m'en empêche. C'est pour cela que tu te justifie de tout auprès de lui. Même si il est amnésique.
- Tu racontes n'importe quoi Aaron.
Je me lève brusquement et attrape mon paquet de clopes.
- Pourquoi tu t'énerves alors ? Si j'ai tors, ça devrait te passer au-dessus de la tête.
J'allume ma cigarette, les nerfs à vifs.
- Je m'énerve parce que ce que tu me dis, c'est de la connerie !
- Mélody, réponds juste à une question. Après ça, le débat sera clos, il me dit de sa voix calme.
Il s'approche de moi, mains sur les hanches, ses yeux braqués dans les miens.
- Est-ce que tu as eu ta rupture ?
Je fronce les sourcils, ne comprenant pas où il veut en venir. Pourquoi me parle-t-il de rupture ? Aaron doit savoir que c’est compliqué, que rien n’est vraiment fini, même si tout semble dire le contraire.
- Ma rupture ? Je répète, confuse.
Aaron continue de me fixer, ses yeux cherchant une réponse que je ne suis pas sûre de pouvoir lui donner.
Il y a quelque chose dans son regard, une détermination mêlée à une pointe de douleur. C’est comme s'il essayait de comprendre une situation qui échappe à sa logique.
- Est-ce que tu as eu ta rupture, Mélody ? insiste-t-il. Est-ce que tu as vraiment accepté qu'il soit passé à autre chose ?
Mon cœur se serre à l'évocation de ce il.
Mon ex. Celui qui, il y a quelques mois encore, partageait tout avec moi, et qui maintenant… ne se souvient même plus de ce que nous étions.
La mémoire peut être cruelle, arrachant les souvenirs comme on arrache une feuille d’un cahier. Mais je n’ai jamais cessé de croire, d’espérer qu’il puisse se rappeler, qu’il puisse revenir.
- Aaron, il ne se souvient plus de nous. Il ne se souvient plus de moi, dis-je, ma voix tremblante malgré moi. Enfin, il se souvient de quelques souvenirs, mais il est incapable de les remettre dans leurs contextes.
Aaron baisse les yeux un instant, et je sais qu'il comprend. Il sait ce que c'est de perdre quelqu'un sans vraiment le perdre, de continuer à voir cette personne tous les jours, mais d’être invisible pour elle.
- Mais il sort avec quelqu’un d’autre maintenant, continue Aaron doucement, comme s'il essayait de me ramener à une réalité que je refuse de voir.
- Je sais mais...
- Il a une nouvelle vie, Mélody. Et toi… tu es coincée dans l’ancienne.
Je sens mes yeux picoter, mais je refuse de laisser les larmes couler. Oui, il sort avec une autre, mais ça ne change rien pour moi. Je n’arrive pas à faire comme si tout cela n’avait jamais existé, comme si je pouvais effacer nos souvenirs aussi facilement que lui.
Je lui ai demandé de me laisser tranquille, mais je n' pas encore réussi à enterrer notre histoire.
- Je continue à agir comme s’il se souviendrait, j'admets finalement, presque en chuchotant. Tu as raison. Je n’ai pas encore eu de rupture, Aaron. Et je n'en veux pas. Pas tant qu’il y a une chance qu’il se souvienne, qu’il se rappelle de nous. Toi-même tu m'as dit que peut-être, il m'avait bien dit qu'il se souvenait de tout.
Aaron pousse un léger soupir, puis il s'approche encore, posant une main réconfortante sur mon épaule.
- Je comprends que ce soit difficile, Mélody. Mais… combien de temps comptes-tu attendre quelque chose qui ne reviendra peut-être jamais ? Et puis, si vraiment il a retrouvé la mémoire, pourquoi ne pas te l'avoir dit dès son arrivée à l'hôpital ?
Il a complètement raison. Sur toute la ligne.
Mais j'ai espoir que tout recommence, que l'on reprenne notre histoire là où elle s'est arrêtée.
- Tu sais, il continue d'une voix douce, j'ai eu le temps de t'analyser ces derniers jours. Et tu as les mêmes réactions que moi. Je n'ai pas de rupture direct tu sais. Mon ex a juste envoyé les papiers du divorce.
- Sérieusement ? Mais c'est dégueulasse ! Je dis d'une voix pleine de colère.
- Ouais, dégueulasse comme tu dis. Ce n'est pas pire que tes soucis avec Tyler, je le sais bien. Mais tu vois, même avec les papiers dans les mains, j'ai continué à vivre comme si elle était encore à mes côtés, comme si elle allait passer la porte et me dire : coucou mon ange, je suis rentrée ! T'as passé une bonne journée ?
- Tu vivais dans le passé, je murmure.
Je lui souris en effaçant mes larmes.
- Oui, jusqu'à ce que j'aille la voir quelques semaines après notre divorce. Je voulais qu'elle me dise en face que c'était finit nous deux. Je ne me suis pas senti mieux, je suis d'ailleurs toujours fou d'elle. Mais un poids c'est libéré de mes épaules, et j'ai pu tourner la dernière page du chapitre. Maintenant, je vais de l'avant.
Je devrais en faire autant. Mais est-ce que j'en suis capable ?
Sur ces dernières pensées, j'entour de mes bras l'homme face à moi.
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