77. Se sauver ☑️
Mélody
- Je peux vous aider ?
Le docteur Call se tourne vers moi, sourire aux lèvres, et m'observe par dessus ses lunettes.
- Mélody ! Vous êtes bien matinale aujourd'hui. Comment allez-vous ?
Comment je vais ? Très bonne question. Je n'en sais rien. Je n'ai pas envie de pleurer, ni de crier, ni de me cloîtrer dans mon mutisme. Mais est-ce que je me sens mieux ?
- Ça va. Mais j'ai toujours ce goût de sel dans la bouche. Et en me levant, j'ai eu mal au cœur. Mais la douleur est vite partie. Et puis, je jete un œil sur ma montre, il est 11 heures !
- Je vois. Il descend de l'échelle et enlève ses lunettes. Les résultats de votre prise de sang sont parfaites et je ne vois aucune explication quant à ce goût de sodium. Rien d'autre ?
Je le suis alors qu'il sort du réfectoire pour se diriger vers une grande armoire dans le couloir.
- Et bien, non.
Il attrape un petit carton qu'il me tend, il en prend un autre et nous retournons à notre point de départ.
- Posez le sur la table dans le fond. Rien d'autre ? Pas même la nuit ?
J'ouvre le carton et en sors des guirlandes électriques.
- Je me suis réveillée vers 2h30. Pas à cause d'un mauvais rêve cette fois-ci, enfin, je ne sais pas vraiment, je ne me souviens de rien, mais... Je marque une pause en cherchant bien mes mots, pour ne pas qu'il me prenne pour une folle.
- Mais... ?
Je soupire en me tournant vers Adam; ce dernier accroche des branches de sapin sur un pan de mur. J'avance jusqu'à lui et relève la tête vers une fenêtre.
- Mais je me suis sentie comme soulagée. Et je ne sais pas pourquoi.
Il ne me répond rien, ne me regarde pas et recule un peu pour observer son œuvre d'art.
- Vous en pensez quoi ?
- C'est joli. Mais ça manque de couleurs.
- Je vous laisse le soin de décorer. Tout est là dedans, il me montre un sac en plastique. Donc, vous vous êtes sentie soulagée. Intéressant.
Intéressant ? Je lui lance un regard avant de fouiller dans le sachet. Je récupère quelques déco et les accrochent aux branches.
Pendant plusieurs minutes, pas un seul mot ne résonne dans le réfectoire, et, étonnamment, cela me fait du bien. D'habitude, j'ai besoin d'entendre un son, enfin, depuis que je suis ici, puisqu'à la maison, ce n'était pas la même histoire.
- Je crois que vous êtes sur le bon chemin ma chère Mélody.
- De la guérison ?
- Je n'irai pas jusque là, mais vous avez fait un grand pas en avant. Il me sourit, et pour la première fois depuis plusieurs semaines maintenant, je le lui rends. J'ai envie de sourire. Ça me fait très plaisir de voir votre visage s'illuminer !
Je me sens rougir jusqu'à la racine des cheveux, et, pour cacher ma gène, je plonge à nouveau dans le sac. J'en sors des petites décorations toutes mignonnes, que je mets de côté.
Noël est sensée être une période magique, où seul compte la joie de se retrouver en famille, de partager un moment de convivialité, de fous rires.
Cela aurait dû être notre premier Noël à Tyler et moi. On avait prévu de le passer ensemble, mais... Ne pas y penser, ne pas y penser..
- Est-ce que votre père vous a rappelé Mélody ?
Je fronce les sourcils. Jeb ? Non, aucune nouvelle depuis que je suis enfermée ici, mais il faut dire que, après avoir délaissé son boulot pour être auprès de moi, il a dû reprendre le travail et s'envoler pour l'Angleterre.
- Non, pourquoi cette question ? D'ailleurs, je ne savais même pas qu'il m'avait appelé !
Adam s'approche de moi et me sourit gentiment avant de m'inviter à m'asseoir.
- Il a appelé presque tous les jours depuis votre hospitalisation. Vous ne vous en rappelez plus ?
J'ai beau fouiller dans ma mémoire, je n'en ai pas le souvenir. Je finis par faire non de la tête avant d'attraper un morceau de papier traînant sur la table et le triture dans tous les sens.
Je sens le regard du médecin posé sur moi, mais je ne relève pas la tête vers lui pour autant.
- Pourquoi stressez-vous Mélody ? Me demande t'il en posant ses mains sur les miennes.
- Je ne stresse pas.
- Vous croyez ne pas stresser. Ce morceau de papier, qu'est-ce qu'il vous a fait ?
Je ne réponds pas, mais j'arrête immédiatement de m'amuser avec et finis par fixer les yeux noisettes d'Adam.
- Vous savez, il libère mes mains, vous avez le droit d'être en colère, d'être énervée par mes questions ou tout autre chose. C'est normal. Mais mentir, ne vous fera pas vous sentir mieux.
Sur ces mots, il me fait un clin d'œil, tapote mon nez de son index, puis retourne près du sapin. Je l'observe s'activer sans un mot.
Adam est étrange comme médecin. Il n'est pas comme tous les psychiatres que j'ai pu croiser. Pas que j'en ai consulté des tas, mais maman m'avait obligé à en voir un, car je grandissais sans père.
Cela ne m'a jamais vraiment été bénéfique, puisque, ce que je ne connaissais pas, ne pouvait clairement pas me manquer.
- Pourquoi je ne me souviens pas que mon père m'ait appelé ? Je finis par demander en allant l'aider à mettre des boules de Noël sur le roi des forêts.
- Donnez-moi une rouge. Merci. Pour répondre à votre question, je n'en ai pas la moindre idée.
- Vous être psy pourtant.
- Oui, mais pas devin !
Je me mets à rire avant d'accrocher un ange bleu.
On passe plus d'une heure à mettre des décorations un peu partout. Satisfait de notre travail, on s'octroie une pause café clope bien mérité.
Nous sommes rejoins par deux infirmières et quelques patients. Comme à mon habitude, je ne parle à personne et me renferme. Néanmoins, j'écoute les bavardages en tirant sur ma cigarette. Adam discute avec tout le monde, et j'apprends qu'un repas de Noël est prévu pour le 24 décembre.
Tout le monde semble ravi, mais pas moi. Je n'ai vraiment pas envie de passer le réveillon dans cette clinique.
- Je retourne dans ma chambre.
- Le repas va être servie dans le self 2, d'ici une demi-heure.
- Merci, mais je n'ai pas vraiment faim.
- D'accord. Si jamais vous avez un petit creux, n'hésitez pas à nous rejoindre. On se revoit tout à l'heure, me dit Adam alors que je m'éloigne.
**
Moi
Coucou Nathan. Tu me manques. J'ai besoin de te voir.
C'est le cinquième messages que j'envoie à mon meilleur ami. Comme les précédents, je suppose que je n'aurai pas de réponse. J'ai beaucoup réfléchi, et je crois que je lui dois des excuses. Il ne méritait pas de souffrir à cause de moi, ni de se faire autant de souci par ma faute.
Zack m'a assuré qu'il allait bien, mais j'aimerai vraiment me l'entendre dire de vive voix. Et puis, j'ai besoin de lui à mes côtés. Je soupire en naviguant sur mon téléphone. Les informations me donnent la nausée, alors je files sur les réseaux. Malgré moi, je clique sur la page officiel de Tyler et fais défiler les photos et vidéos. Je m'arrête sur celle postée juste avant... Juste avant...
Ne pas pleurer. Ne pas pleurer.
J'essaie de sourire, mais c'est difficile. Les larmes dévalent mes joues sans que je ne m'en rende compte. J'ai besoin de Tyler, besoin de l'entendre, de le voir !
Je clique sur le prénom de Tyler ; j'ai besoin d'en ta voix.
Salut ! T'es bien sur le portable de Tyler Joseph ! Je suis trop occupé pour te répondre, donc laisse un message ! Et si c'est l'amour de ma vie, je t'aime !
Je rappelle encore et encore pour entendre la voix de mon cœur, puis je finis par laisser un message. Je sais, c'est idiot, mais j'en ai besoin.
Mon cœur, je t'aime, tu me manques. La vie est difficile sans toi. Je sais que tu voudrais que je me relève, que je sois heureuse, mais je ne peux pas, c'est beaucoup trop difficile. Donne moi la force Tyler ! Donne moi la force !
Je coupe l'appel et balance mon portable à travers la pièce, descends du lit et file prendre une douche. Ma décision est prise, il faut que je me casse d'ici ! Je rentre chez moi, dans mon cocon où tout me raccroche à Tyler.
Une fois séchée et habillée, je récupère le sac à dos que m'avait ramené Zack, et y fous en boule toutes mes affaires.
Après tout, personne ne peut m'obliger à rester ici. Je fous mon paquet de clopes dans la poche de mon manteau, l'enfile et mets mes baskets.
Avant de sortir, je récupère finalement mon portable et vérifie qu'il fonctionne toujours, renvoie un message à Nathan pour lui dire que je quitte cette satanée clinique pour rentrer à la maison.
Avec mes affaires, je sors de la chambre, et longe le couloir rapidement pour me diriger vers l'ascenseur.
J'appuie plusieurs fois sur le bouton d'appel, comme si il allait arriver plus vite.
- Allez, dépêche toi putain !
Enfin les portes s'ouvrent ! J'appuie sur la touche zéro. J'ai l'impression que ce tas de ferraille fonctionne au ralenti !
- Plus vite !!
Arrivée au rez-de-chaussée, je traverse le hall et...
- Vous nous quittez Mélody ? Je m'arrête net. Et ce, sans même me dire au-revoir.
Je reste la main sur la poignée de porte et tourne légèrement la tête.
- Je rentre chez moi, dis-je d'une petite voix.
- Ah, d'accord. Vous voulez que je vous y dépose ?
Cette fois-ci, je me tourne complètement vers Adam.
- Vous voulez-bien...?
- Venez. Il passe à côté de moi et me tend le bras. J'hésite, puis finis par l'entourer.
Nous sortons de la clinique pour rejoindre le parking où est garée la voiture du médecin.
Une fois à l'intérieur du véhicule, j'attache ma ceinture et patiente jusqu'à ce que le moteur tourne. Je donne l'adresse à Adam puis, sans un mot, il quitte le parking.
On roule quelques kilomètres, mais il tourne à gauche au lieu de tourner sur la droite.
- Ce n'est pas la bonne direction.
- Je sais.
Il ne dit rien de plus, et je commence à prendre peur. Où est-ce qu'il m'emmène ?
Je regarde par la fenêtre, et vois défiler des dizaine de maisons avant qu'il ne s'arrête devant l'une d'elle.
- Venez, il faut que je sorte Bella.
Je ne fais aucune commentaire et suis Adam jusque dans sa maison.
Je fronce les sourcils en ne voyant pas de chien et en entendant aucun jappement.
Qu'est-ce qu'il va m'arriver putain ?
**
Mon fou rire s'éternise, impossible de m'arrêter. Je n'en peux plus, j'ai des crampes d'estomac tellement je rigole.
Je sens le regard du brun sur moi, mais je suis incapable de croiser ses iris, de peur de rire encore plus, si c'est encore possible.
Je pleure à présent, mais c'est plus fort que moi, c'est beaucoup trop drôle.
- Bon, ça va durer encore longtemps ? Me dit-il, faussement vexé.
Ça, je n'en sais rien, mais qu'est-ce que ça fait du bien de rigoler ! J'essaie de me calmer, mais c'est très compliqué, je dois l'avouer.
Je l'entends soupirer avant de quitter le salon. Je m'essuie le visage pour effacer mes larmes et, enfin, mon fou rire cesse.
J'en profite pour me lever du canapé et me diriger vers cette fameuse Bella, couchée sous la table basse avec sa carotte.
- Donc, Bella, tu es une lapine. Moi qui m'attendait à un toutou !
Je caresse la tête de l'animal en souriant. Si je m'attendais ! Franchement !
- Ça va mieux ?
Je me relève et ose un regard vers Adam.
- Je... Hum, ouais. Désolée.
Il se met à sourire avant de m'offrir une tasse de café.
- Ne vous excusez pas de rire Mélody ! Je suis content d'entendre ce son ! Et heureux d'être là cause de ce fou rire.
J'étire légèrement mes lèvres en me sentant à nouveau rougir.
- Je m'attendais à un chien. Pas à un lapin. Avouez que c'est drôle non ?
- Ce n'est pas faux. Les gens sont souvent étonnés de voir un lapin. Venez, allons nous asseoir sur le canapé.
Je m'installe dans le sofa, tasse en main. Je pose mon regard sur le dessus de la cheminée. Y trône un immense cadre d'une femme brune, souriant à l'objectif, assise sur un banc.
- Eleanor ? Je demande d'une petite voix.
- Oui, ma femme. N'est-elle pas magnifique ?
J'avoue. Une pure beauté avec ses grands yeux verts amandes.
- Superbe en effet. Comment vous vous êtes rencontrés ?
- Une rencontre banale. Un accident de caddie.
- De caddie ?
- Ouais ! Je ne regardais pas où j'allais. Et arriva ce qu'il devait arriver.
- Vous vous être rentrés dedans ! Je dis à sa place.
- On ne peut rien vous cacher Mélody ! Il accompagne sa phrase d'un clin d'œil.
- Elle avait l'air très gentille.
Adam se lève, pose sa tasse et se dirige vers la cheminée, en fixant le grand tableau.
- Elle l'était. Trop parfois. Elle avait bon cœur, prête à aider tout le monde.
- C'est tellement rare les personnes gentilles de nos jours. Tyler aussi était gentil. Enfin, à sa façon.
Il se tourne vers moi en fronçant les sourcils.
- A sa façon ? Je hoche la tête. Que voulez-vous dire par là ?
Il revient s'asseoir à côté de moi, et sors de la poche de sa chemise son paquet de clopes. Il m'en tend une, ainsi que son briquet.
- Merci. Tyler était spécial, je commence à lui dire après avoir allumé ma cigarette. Surtout lorsqu'il était plus jeune.
Je me tais quelques instants pour tirer une taffe et choisir ce que je vais lui dire. Mon amoureux était étrange parfois ! Souvent, je me suis demandée si il n'avait pas un problème dans sa tête pour avoir un caractère aussi... Merdique.
- En faite, il pouvait se montrer très sympa, et dans les secondes qui suivaient... Bref, il était le jour et la nuit.
- Vous savez pourquoi ?
Je me tourne vers Adam.
- En toute franchise, je n'ai jamais cherché à savoir le pourquoi du comment, j'en culpabilise d'ailleurs. J'aurai pu, il est vrai, fouiller dans sa vie pourquoi il état comme ça.
- Il n'est jamais trop tard Mélody. Pourquoi ne pas essayer de comprendre son comportement ?
- A quoi bon, il est mort ! Ça ne servirait à rien ! J'ai déjà du mal à accepter de vivre sans lui, alors pour le reste !
Adam se tait, déguste son café, écrase sa clope, puis croise les bras en me fixant droit dans les yeux, me mettant mal à l'aise. Son regard tente de me percer à jour, et je déteste ça !
- Je voudrai rentrer chez moi.
Je jette mon mégot dans le cendrier, me lève et file récupérer mes affaires. Faut que je sorte d'ici.
- Pourquoi vous fuyez Mélody ?
- Je ne fuis pas ! Je veux juste... Rentrer chez moi, dis-je d'une voix pleine de sanglots.
- Mélody, tant que vous n'aurez pas trouver le pourquoi du comment, vous ne serez jamais en paix avec vous-même et...
- Putain ! Mais qu'est-ce que vous voulez que je comprenne ? Tyler était Tyler, c'est tout ce qui compte !
- Vous l'aimez, pour ce qu'il était, je ne le nie pas ! Mais vous vous en voulez à mort parce que jamais, je dis bien jamais, vous n'avez voulu savoir pourquoi il était ce qu'il était ! Vous vous dites que si vous aviez su, il serait certainement encore là, parce qu'il aurait fait un autre choix.
- Quoi ? Mais de quoi vous parlez ? On s'éloigne du sujet ! Vous racontez n'importe quoi! C'est vous qui avez besoin d'un bon psy !
- Non, c'est le sujet justement ! Quant à un bon psy, j'en ai déjà un !
- C'est faux ! Vous me dites que je culpabilise de ne pas connaître les raisons de ses sautes d'humeur, qu'il aurait sans doute fait un autre choix que de celui de prendre un putain bateau pour aller crever sans moi ! Il m'a abandonné, je suis vivante alors qu'il est mort ! Il m'avait juré de m'aimer, de rester avec moi jusqu'à ce que la mort nous sépare ! Il m'a menti, il...il ne savait faire que ça ! Me mentir ! Me faire du mal ! Il voulait me blesser, que je souffre comme je l'ai fait souffrir !
Je hurle ces derniers mots, avant de me laisser tomber sur le sol du salon, en larmes.
Je n'arrive pas à me calmer jusqu'à ce que je sente des bras s'enrouler autour de moi.
- Il fallait que ça sorte Mélody. Il le fallait. Excusez-moi. Excusez-moi.
Ses mains caressent mes cheveux, doucement. Il ne prononce plus un seul mot, pas un son, mais me berce d'une tendre manière. Et progressivement, je me calme.
**
Il fallait que ça sorte. Il le fallait.
Je culpabilise. Encore. Penser que Tyler a voulu me blesser, me faire du mal parce que je lui en avais fait. Se venger de ce que j'aurais pu lui dire ou faire ?
C'est n'importe quoi. Mon homme était tout, sauf rancunier.
Adam a réussi à me faire reconnaître que, je lui en veux à Tyler, de m'avoir abandonné. C'est stupide. Il n'a pas choisi de m'abandonner, ce n'est pas de sa faute. Ni de la mienne.
Mais je ne peux guère m'empêcher d'y penser.
J'ai passé la nuit à parler, encore et encore. De mon enfance, de ma rencontre avec Tyler alors qu'on venait d'emménager avec maman. Ses moqueries, ses coups en douce, nos fous rires, mes larmes, ses larmes.
Notre premier baiser, ses rejets, notre première fois... Le plus difficile, a été de lui raconter le mauvais coup que nous a joué Jenna. Aujourd'hui encore, mon ressentiment envers elle est à son paroxysme. Jamais je ne pourrais lui pardonner tout le mal qu'elle nous a fait.
Jamais.
Adam pense qu'elle est sincère dans l'aide qu'elle veut m'apporter, qu'elle essaie de se racheter, mais, en toute honnêteté, je n'y crois pas. Peut-être que je me trompe, mais j'en doute.
Également, je lui ai expliqué nos retrouvailles avec Tyler à New-York, et étonnamment, je me suis surprise à rire de certains événements.
Tyler me manque. J'ai dû mal à m'y faire, mais comme le dit Adam, il va me falloir du temps pour l'accepter, ça ne peut pas se faire un quelque jours....
J'ai mal de me sentir un peu mieux.
J'ai mal de sentir mon cœur battre alors que le sien...
C'est tellement difficile cette vie sans lui ! Comment vais-je réussir à avancer, sans sa présence à mes côtés ?
Pourquoi lui, et pas moi ? J'aurais dû accepter de partir avec lui, nous serions toujours ensemble aujourd'hui.
Toujours.
Mélody ! Ta voix. J'entends ta voix.
**
- Bonjour Mélody ! Vous avez bien dormi ?
Je m'installe devant lui, en souriant poliment.
- J'ai dormi comme un bébé. Et vous ?
Il me tend une tasse de café. Café vanille.
- On va dire oui. Vous voulez manger quelque chose ?
- Non merci, je n'ai pas faim Adam. Est-ce que vous allez me ramener ce matin ?
Adam vide sa tasse, recule légèrement sa chaise et croise les bras en me fixant.
- Vous devriez manger un peu. Servez-vous. J'ai quelque chose à vous proposer.
- Quoi donc, je demande, méfiante en attrapant une tranche de brioche.
- Votre place n'est pas à l'hôpital Mélody. Mais vous n'êtes pas prête à rester seule chez vous.
- Mais...
- Laissez-moi terminer s'il vous plaît. Je hoche la tête et mange un petit morceau de la brioche. La journée, vous m'accompagnez à l'hôpital, pour suivre votre thérapie, et en fin d'après-midi, vous venez ici. Qu'en pensez-vous ?
- Ce que j'en pense ? C'est hors de question que je squatte chez mon psy ! Cette nuit, c'était exceptionnel parce que j'étais épuisée et que j'avais très mal à la tête. Et pourquoi vous voulez que je dorme ici plutôt qu'à l'hôpital ? Si vous croyez que vous allez pouvoir me sauter, vous rêvez !
- Je n'ai pas d'idée malsaine derrière la tête Mélody, il rétorque doucement. La raison est toute simple. Je n'ai pas envie de vous retrouver morte Mélody. Je sais que vous pensez que mourir, n'est plus à l'ordre du jour, que vous avez l'impression d'aller beaucoup mieux. Mais ce n'est pas le cas. Vous êtes en pleine dépression. Et j'ai peur que vous fassiez une énorme bêtise. A l'Hôpital ou chez vous, je ne pourrais pas avoir toujours un œil sur vous, mais ici, oui.
- Et pourquoi moi et pas un autre de vos patients ? Après tout, je ne suis pas la seule à aller mal.
Il inspire un grand coup, avant de me tendre une clope que j'accepte volontiers, j'ai trop besoin de nicotine.
- Parce que je veux vous sauver. Je veux te sauver Mélody. Je veux nous sauver.
- Nous sauver ? Je questionne, étonnée. Pourquoi nous sauver ?
Il ferme les yeux quelques instants, avant de les rouvrir. Des larmes apparaissent, se mettant à dévaler ses joues. Mon cœur se serre.
- Je crois au destin Mélody. Tu es tombée sur ma route, ce n'est pas pour rien. Ce que je parais, et ce que j'ai vraiment là, il pose ses mains sur son cœur, est différent.
Je n'arrive pas à comprendre où il veut en venir. Il n'est pas guéri de la perte de sa femme ? Je n'ose pas poser la question, de peur de le mettre mal à l'aise.
- Tu te questionnes Mélody, il me sourit. Toi et moi, nous sommes perdus, nous avons du mal à avancer. Mais à nous deux, nous serons plus forts, tu comprends ? Le psy que je suis, va bien. Mais l'homme que tu vois, souffre encore. Souffre de trop.
Il est sincère. Les yeux ne mentent jamais. La tristesse que je lis dans son regard me fait trop de peine, se mélangeant à celle que je ressens pour Tyler. J'ai mal pour lui, pour moi, pour nous.
J'écrase ma clope, recule ma chaise pour me lever et attrape les mains d'Adam pour l'obliger à se mettre debout.
Doucement, je relève la tête vers le médecin et plonge mon regard dans le sien. Les yeux ne mentent jamais.
J'enroule mes bras autour de sa nuque et pose ma tête contre son cœur. Adam me serre alors contre lui, très fort et sa tête se colle à la mienne.
- On se sauvera Adam. Je te le promets, je murmure.
**
- Je n'ai toujours pas de nouvelles de Nathan, cela m'inquiète, dis-je à Adam alors que nous sommes en voiture pour se rendre à la clinique.
- Tu veux que j'essaie de le contacter ?
- Oui merci! Même si il ne veut pas me parler, j'aimerais au moins savoir si il va bien.
- Je l'appellerai depuis mon bureau.
- Merci Adam !
On discute de choses et d'autres jusqu'à ce que mon ami se gare devant l'hôpital. J'ai appris que lui aussi était en pleine dépression, mais que son boulot l'aider à tenir la tête hors de l'eau. Lui aussi a énormément eu du mal à accepter le décès de sa femme, et qu'il a eu envie de mourir plus d'une fois. J'ai honte de moi, mais cela m'a rassuré de savoir que je n'étais pas toute seule dans cet état.
- A quelle heure commence la séance ?
Adam passe sa carte magnétique pour ouvrir la porte et nous entrant dans le hall.
- À 13h30. Ce n'est pas moi qui l'animera, mais Lisbeth.
La déception doit se lire sur mon visage, car mon ami m'attrape la main, la relève et y dépose ses lèvres.
- Tout se passera bien Mélody. Tu ne seras pas obligée de parler si tu n'en as pas envie. D'accord ?
- D'accord. Mais j'aurai préféré que ça soit toi.
- Nous sommes vendredi, et c'est la journée paperasse.
- T'as l'air vachement motivé, je me mets à rire en remettant droite sa cravate.
- A mort.
**
Je ressors le cœur lourd de la thérapie de groupe. Je croyais être là seule à vraiment souffrir de la perte d'un être cher, je me trompais lourdement. Je ne sais vraiment pas comment toutes ces personnes arrivent à avancer sans exploser.
Toutes les histoires que j'ai pu entendre, ont toutes été un déchirement pour mon cœur, mais le pire, cela a été d'entendre Mia. Après un incendie, elle perdu son mari et ses trois enfants.
Elle force l'admiration, car elle est joviale et remercie Dieu chaque jour d'être encore en vie. Être toujours en vie...
Où elle a-t-elle réussi à puiser cette force ?
Perdre Tyler, a sans doute été la pire des épreuves à laquelle je dois apprendre à survivre. Mais avoir perdu son mari, et ses enfants... Je serai morte de chagrin.
Si cette femme, tellement forte a réussi à s'en sortir, je devrais m'en sortir aussi, non ?
Je soupire en tirant sur ma clope.
Je suis un peu moins triste, mais mon cœur à mal. Bien trop mal. J'ai envie de pleurer et en même temps... En même temps j'ai envie d'être heureuse. Juste heureuse, même si cela doit ne durer qu'une journée.
Je donnerai tout, absolument tout, pour revoir le sourire de Tyler, sentir son cœur battre sous ma main...
Juste une fois. Rien qu'une fois...
- Ça va Mélody ?
Je me tourne vers Adam, un sourire triste flottant sur mes lèvres.
- Trop d'émotions cette thérapie.
- Ce n'est jamais facile, je veux bien le reconnaître. Entendre des histoires poignantes... On en ressort pas indemne.
- J'aimerais avoir sa force tu sais.
- Ça viendra. On mettra le temps qu'il faudra. Mais on y arrivera.
On se sourit, puis Adam s'installe sur la chaise face à moi.
- J'ai eu ton ami au téléphone.
- Qu'est-ce qu'il a dit ?
- Qu'il allait bien et que tu lui manquais.
- Alors pourquoi il ne me répond pas ?
Adam ne répond rien et allume sa cigarette. Il lève la tête pour fixer les nuages, avant de souffler la fumer.
- Il m'en veut, c'est ça ?
- Il n'est juste pas prêt. Laisse lui le temps Mélody.
Lui aussi, je l'ai perdu....
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