6. 17 Ans☑️
Le Starbucks est noir de monde aussi j'essaye de me frayer un chemin pour rejoindre l'extérieur. J'ai l'impression d'étouffer parmi tout ces gens, comme si une crise de claustrophobie me guettait. Ma respiration s'accélère à mesure que je traverse l'immense salle. Merde. Mon cœur s'emballe alors que j'atteins enfin la porte.
Une fois à l'extérieur, je relâche enfin le souffle que je retenais jusque là. Je m'appuie contre le mur et souris; je me sens mieux. Fouinant dans mon sac, je récupère mon paquet de clope et m'en grille une. En si peu de temps, je suis devenue accro à la nicotine. Ma mère pèterait sans doute les plombs, mais ce qu'elle ne sait pas, ne peut pas la mettre en colère.
Aujourd'hui, j'ai 17 ans, et quoi de plus normal que de fêter son anniversaire seule ? Maman m'a envoyé un message ce matin, ainsi que Jason. Malgré son départ pour New-York, il ne m'a pas oublié.
Chez les Joseph, tout le monde me l'a souhaité, hormis Tyler. Est-ce une surprise ? Absolument pas. On ne se parle toujours pas, et ses tentatives pour essayer de s'excuser après avoir eu une conversation avec Zack, enfin, c'est ce que je pense, sont restées vaines. Je ne veux plus rien savoir de lui.
Je prends le chemin menant chez Joshua, où il m'attend pour m'offrir mon cadeau. C'est quand même la meilleure, c'est mon anniversaire, mais c'est moi qui suis dans l'obligation d'aller récupérer mon présent.
Sur ces pensées, je tourne sur ma droite et m'arrête quelques minutes devant le portail du jardin botanique. Tout est recouvert de neige. J'irai peut-être y faire un tour avant de rentrer.
Reprenant mon chemin, je me faufile sur les trottoirs bondés et arrive enfin après 20 minutes de marche devant chez Josh. Avant de sonner, je lui envoie un message pour le prévenir que je suis là. Je ne comprends pas pourquoi je dois l'en avertir, alors que je dois forcément sonner.
Une fois dans le grand hall, j'emprunte l'ascenseur et monte jusqu'au 10ème étage.
Devant la porte, je n'ai pas le temps de toquer quelle s'ouvre en grand, pour voir apparaître un Joshua gêné.
- Salut ! Tu vois, je suis à l'heure !
- Salut Mel. Entre je t'en prie.
Je le remercie et pénètre dans son appartement. Ce n'est pas la première fois que je pose le pied ici, mais je remarque tout de suite que quelque chose cloche. Sur un tabouret près de la fenêtre, se trouve une veste noire que je jure être à Tyler. Sur la table basse devant l'écran de télévision, des partitions de guitare et une sacoche rouge et noire appartenant à...
C'est quoi ce plan foireux ?
- Josh ! Qu'est-ce que...
Je me tais en me tournant. Tyler.
- Salut Melody.
**
Ce que je déteste le plus dans la vie, hormis le mensonge, c'est que l'on me prenne pour une conne. Qu'est-ce qu'il fout là ? Où est passé Josh ? Je vais le tuer. Un ami ? Un gros connard oui ! Il sait mieux que quiconque que je ne veux plus jamais croiser ce regard noisette, ce visage si beau, ce corps aussi appétissant soit-il. Pourquoi me faire ça ?
- Mel... Tyler fait un pas vers moi, main tendu.
- Ne t'approche pas de moi Tyler.
Il s'arrête, pose son regard sur moi; je peux y lire de la peine tandis qu'une pointe de vexation apparaît sur son beau visage. Jamais Tyler ne lèverait la main sur moi, j'en suis certaine, mais j'ai besoin de cette distance entre nous. Ne pas être troublée, ne pas risquer qu'un flot d'émotions ne me prennent en traître.
- Où est Josh ? Il soupire avant de passer une main dans ses cheveux. Volontairement je suppose, il ne me répond pas. Josh ?
Mon ex ami semble avoir disparu de la circulation. Il ne perd rien pour attendre.
- Il faut que je te parle.
- Désolée, mais j'ai pas de temps à perdre. Mes poupées m'attendent, je rétorque en attrapant ma veste et mon sac.
Je traverse le salon, tenant fermemant mes affaires contre moi. Alors que j'arrive près de la porte d'entrée, la main du brun attrape la mienne. Désespérément, je tente de la retirer, mais là pression est trop forte. Beaucoup trop forte. Ne te retourne pas. Ne te retourne pas.
Bien évidemment, je me retourne et à mon grand désarroi, je suis bouleversée par l'émotion figée sur le visage de l'homme que je suis sensée détester.
- J'ai vraiment besoin que tu m'écoutes Melody. S'il te plaît.
Sa supplique me touche profondément et bien que cela soit une terrible erreur, je consens à l'écouter.
- Lâche-moi, je tire ma main, dis-moi ce que tu as à me dire et je m'en vais.
Il soupire, gonfle ses joues, passe une nouvelle fois sa main dans ses cheveux. Quant à moi, mon dos se colle contre la porte, mes bras se croisent, tandis que mon pied droit bas la mesure sur le carrelage, en signe d'impatience.
- Je te demande pardon. Pour tout ce que je t'ai dit, tout ce que je t'ai fait. Je ne sais pas pourquoi j'ai... Il souffle, pourquoi j'ai été...
- Aussi con? Méchant ? Je ne le laisse pas finir, tu te rends compte de ce que tu m'as dit ? A quel point tu m'as fait !mal Tyler ? Ma voix se brise, je te déteste !
Mes mains se posent sur mon visage, pour cacher ma tristesse.
- Mel... Il chuchote me mettant ses mains sur les miennes, Mel, s'il te plaît.
Mon corps frissonne à ma plus grande honte. Sentir se peau contre la mienne, entendre le murmure de sa voix, son souffle... Je ne veux pas ressentir ça, je ne dois pas ressentir cela. Mon corps me trahi de la pire des façons. Le brun tente de me faire enlever les mains de mon visage, mais je résiste.
- Regarde-moi.
C'est un supplice de ne pas plonger dans ses yeux, mais je ne dois pas céder, il ne doit pas m'amadouer, surtout pas !
Il soupire avant de s'éloigner, me permettant de relâcher le souffle que je retenais. J'ose alors enlever mes mains. Une grossière erreur. Il en profite pour accourir et son corps se colle au mien, son regard plonge dans le mien, tandis que nos nez se touchent. Ma respiration s'accélère, mon cœur s'emballe, j'ai froid, j'ai chaud.
Je tente de le pousser, mais il est plus fort que moi, et ne bouge pas d'un pouce. Je ferme alors les yeux pour ne plus voir mon reflet dans les iris qui me scrutent, pour ne pas voir la mine triste de Tyler.
- Je te demande pardon Melody. Tu peux fermer les yeux, tu peux me repousser, me frapper même. Ça n'enlève rien au fait que je suis terriblement désolé.
**
Ma tête me fait un mal de chien tellement j'ai pleuré ; d'ailleurs, je ne sais pas quel miracle mes larmes ont cessé de couler, ni comment j'ai réussi à quitter l'appartement de Joshua, ni comment je suis rentrée. Tout ce que je sais, c'est que mon lit douillet ne me réconforte pas.
Je suis tellement désolé. À cette phrase, j'ai littéralement pété un câble. Rien de ce qui ne pouvait me dire, ne m'aurait calmé.
Je lui ai renvoyé tout ce qu'il m'avait dit en pleine figure, tout le mal qu'il m'avait fait en dehors de cette maudite soirée du nouvel an. Il m'a laissé crier, le pousser, l'insulter sans broncher un seul instant. Son regard, bien que triste, n'a pas réussi à me calmer, ni à me faire taire, bien au contraire. Ça n'a fait que décupler ma colère.
Et puis, le fait qu'il ne s'est pas défendu, m'a tapé sur les nerfs. D'accord, il s'est confondu en excuse quelques minutes avant, mais tout de même !
Je frappe mon matelas de mes mains, puis me lève et quitte la chambre. J'ai besoin d'une clope.
J'arrive dans la cuisine et remarque un petit mot; reconnaissant l'écriture de Kelly, je lis.
"Ma puce, Chris et moi sommes sortis pour la soirée. Jay est avec Zack pour le week-end. Si tu as faim, il y a de la pizza au congélateur. À demain !"
Genial. C'est mon anniversaire, ma mère est à des milliers de miles de Columbus, et je me retrouve toute seule. Remarque, ce n'est pas une mauvaise chose, vu mon humeur massacrante.
J'ouvre la porte de la cuisine et vais m'installer dans la balancelle pour griller ma clope.
**
Avec ma pizza, je me vautre dans le sofa du salon et zappe jusqu'à tomber sur un reportage sur les rois de France. Étant passionnée d'histoire, le laisse la chaîne et mange sans appétit.
Je n'arrive pas à me concentrer sur ce qui se raconte, tant mes pensées se tournent vers Tyler. Pourquoi ne peut-il pas quitter mon esprit ?
Je soupire en balançant mon reste dans l'assiette, éteint la télé et quitte le salon. Autant aller dans mon lit.
Je pousse un cri en voyant le brun dans le couloir.
- Putain tu m'as fait peur ! Qu'est-ce tu fais là ?
- J'habite ici je te rappelle.
Oui, que je suis bête. Comme si je pouvais l'ignorer. Je tourne les talons et jette la pizza dans la poubelle et me tourne pour me cogner sur le torse de Tyler. Ses yeux plongent dans les miens et je prends peur.
- Melody... Il enlève l'assiette de mes mains pour la poser sur la table avant de m'attraper par la taille. Tu ne m'as toujours pas répondu.
Hein ? De quoi il parle. Je fronce les sourcils, ne comprenant pas. Un sourire en coin se dessine sur ses lèvres.
- Je t'ai demandé tout à l'heure si tu me pardonnais.
- Non.
- Tu es sûre ? Sa voix n'est plus qu'un murmure alors que sa bouche se rapproche dangereusement de la mienne. Tu es sûre ?
Je ne suis plus sûre de rien. Je ne voix que ses lèvres à quelques centimètres des miennes. Qu'est-ce qu'il lui prend ? Il ne va tout de même pas m'embrasser ? Si ?
Je devrais me défaire de ses mains, mais j'en suis incapable. Je ne peux plus penser, impossible de prononcer un non, parce que je ne suis plus sûre de rien. Mes pensées se mélangent, ne sachant plus quoi faire.
Merde. Je suis perdue là.
- Je ne veux pas que tu me déteste Mel.
Et je tombe.
Sa bouche s'écrase sur la mienne pour un baiser qui n'a rien de tendre. Il me dévore comme si sa vie en dépendait. Je n'arrive pas le repousser, ni à répondre à sa demande.
Petit à petit, son étreinte se fait plus tendre, ses lèvres plus douce. Contre elles, il murmure:
- Je m'excuse encore, pour tout. Mais pas pour ça. Pas pour ce baiser. Joyeux anniversaire, il chuchote.
- Je.. Mais.. Pourquoi tu as fait ça ?
Voilà que je bégaye comme une gourde.
- J'en avais envie. Mais je crois que tu ne m'aimes pas, me dit-il irrité. J'avais raison.
- Quoi ?
Il me relâche, et m'accroche à la table pour ne pas tomber. Mes jambes ne me portent plus.
- Si tu étais amoureuse de moi, tu aurais répondu à ce putain de baiser !
Alors c'est ça ? Il est énervé parce que je ne l'ai pas embrassé ? Il se fout de ma gueule là ! La colère qui était retombée, menace d'éclater à nouveau.
- C'est ça ton problème Tyler ? Tu vas hurler parce que j'ai pas roulé une pelle à ta bouche ?
Il me foudroie de son regard noir mais ne répond pas. Alors c'est ça !
- Pourquoi j'aurai dû me forcer à faire quelque chose que je... Arrgh! Putain Tyler, je t'ai dit que je t'aimais et ça n'a pas changé !
- Alors pourquoi ?
- Pourquoi ? Non mais attends. Tu me déteste, tu me repousses, t' hésites pas à me rabaisser, et maintenant, tu m'embrasses ? Et tu as le culot de me demander pourquoi je ne t'ai pas embrassé ?
- Pourquoi, répète-t-il.
Je ne peux pas lui dire. Je ne peux pas. J'ai déjà assez honte comme ça !
Son regard me dit qu'il ne lâchera pas l'affaire. Je soupire.
- Tu veux que je te dises ? Je suis une gamine, je suis affreuse, j'ai l'âge de jouer à la poupée, trop grosse, tu es fiancé, tu veux que je continue ?
- Je t'ai dit que je m'excusais !
- Et moi je te dis que tu as une fiancée Tyler ! Et si tu veux tout savoir, j'ai jamais embrassé personne ! Je ne sais pas comment m'y prendre !
Il relève la tête vers moi, les yeux exorbités et le visage étonné. Moi je suis rouge de honte d'avoir osé lui avouer que personne ne m'avait encore embrassé. Enfin plusieurs ont essayé, mais je n'ai pas pu.
- Tu... Wouah.
Wouah ? C'est tout ce qu'il a à dire ? Et le voilà qui rigole maintenant ! Ce n'est plus de la peine que je ressens, mais de la haine, surtout de la haine. Me mordant sur la langue pour ne pas rétorquer une cinglante réplique, je quitte la cuisine, tête baissée, en essayant de ne pas presser le pas. Déjà humiliée, je n'ai vraiment pas envie de prendre mes jambes à mon cou, en signe de faiblesse.
Derrière moi, j'entends Tyler m'appeler, mais même si j'en meurs d'envie, je ne me retourne pas et rejoins ma chambre.
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