~ Cours ! ~

Il était très tôt et personne n'était encore debout à cette heure-ci. Dehors, le soleil n'était même pas encore levé.

Pourtant, Gabin Morel était déjà en train de préparer le petit déjeuner pour tout le monde. Il avait très mal dormi cette nuit et sentait réveillé brusquement sur le coup des quatre heures. Il n'avait pas réussi à se rendormir.

Cela lui arrivait quelques fois. Le plus souvent, c'était quand il avait beaucoup sollicité sa particularité dans la journée.

Il arrêta le feu sous la casserole dans laquelle bouillait le thé pour Miss Ramier et Dorothy puis la posa sur un plateau. Il l'emmena dans le salon et installa lentement la table.

En temps normal, il n'aimait pas devoir agir au même rythme que les autres mais le matin, utiliser sa particularité lui donnait mal à la tête alors il préférait s'abstenir.

Quand il eu fini de placer chaque élément sur la table -ce qui lui sembla durer une éternité-, il regarda l'horloge murale placée au dessus de la porte de la salle à manger. Il était 5h 28. Généralement, personne ne levait avant 8h, mis à part Miss Ramier.

Désespéré, il décida d'aller faire un petit footing pour se réveiller.

Il enfila sa paire de chaussures spéciale pour les longs trajets, celle qui avait des semelles en métal et sortit de la maison.

Il prit le chemin du parc où il de rendait habituellement sur un petit 100km/h pour se mettre en jambes. Il accélèra en arrivant sur la route. Bientôt, il courrait tellement vite que rien ni personne ne pouvait le voir passer.

C'était une sensation toujours aussi grisante que celle de fendre le vent à la vitesse des plus rapide avions de chasse du présent.

Gabin eu fini son tour avant même d'avoir eu le temps de se rendre compte qu'il l'avait commencé.

Frusté, il le refit une bonne centaine de fois avant de décider de rentrer au manoir. En chemin, il passa devant l'entrée de la boucle.

Il dut tenté d'y entrer pour aller faire un petit tour dans les années 2000. Il hésita. Il savait que Miss Ramier n'aurait pas approuvé cette idée mais il mourrait d'envie d'aller se renseigner sur l'actualité du présent. Comme il lui restait encore une bonne heure devant lui, il décida de prendre le risque de passer de l'autre côté.

***

L'air était nettement plus frais de ce côté-ci mais le garçon ne se formalisa pas. Au moins, ça changeait.

Il fit un rapide tour de la ville, histoire de voir à quoi elle ressemblait, presque cent ans après l'époque où il vivait.

Tout semblait plus grand, plus oppressant. De nombreuses automobiles roulaient déjà dans les rues de Paris, malgré l'heure matinale, projetant des nuages de fumée noire.

Des piétons se pressaient sur les trottoirs, marchant d'un bon pas sans adresser un seul regard à ce qui les entourait.

En passant devant un petit bureau de tabac, le regard du jeune homme fut attiré par un magazine de sport. En dessous du titre, s'étalait un article vantant une course à pieds réputée à laquelle tout le monde était invité à participer.

Très intéressé, Gabin entra dans le petit commerce et récupéra le document. Le vendeur, qui était en train de ranger quelques articles, lui fit remarqué qu'ils étaient fermés et qu'il faudrait attendre l'ouverture du magasin pour acheter quoi que se soit.

Le garçon fusée lui jeta un regard blasé, sourit, puis s'enfuit en courant, sous les yeux médusés du pauvre homme qui mit une bonne minute à réaliser ce qui venait de se passer.

Pendant ce temps, Gabin avait déjà rejoint sa boucle et était bien à l'abri dans sa chambre, à feuilleter son précieux magazine.

La plupart des articles parlaient de sportifs que le garçon ne connaissait pas ou bien de matchs ayant déjà eu lieu ou non.

Gabin reporta donc son attention sur le premier texte. La course devait avoir lieu le mois suivant. Elle était ouverte à tous mais la plupart de ses participants étaient de grands sportifs.

Une idée germa alors dans l'esprit du jeune homme. Une idée qui n'aurait pas du tout plu à Miss Ramier, ni sûrement à aucun des particuliers de la boucle mais qui lui, le remplissait d'excitation.

Il allait s'inscrire à cette course. Il allait y participer et mieux encore, il allait la gagner.

***

Le lendemain, Gabin avait écrit sa lettre de demande d'inscription et le surlendemain, il la postait. Il avait pioché dans la réserve d'argent de poche qu'il économisait depuis des mois pour pouvoir payer.

La réponse lui fut apportée dans un bar dont il avait donné l'adresse. Elle l'informait que tout était bon et qu'il faudrait qu'il se pointe à sept heures à la date de la course.

Gabin était aux anges. Il allait enfin pouvoir faire quelque chose de sa particularité ! Autre que la vaisselle et le ménage !

Bien sûr, il n'en avait parlé à personne, même s'il en mourrait d'envie. Il avait bien trop peur que quelqu'un ne tente de l'empêcher de participer.

Pourtant, un jour, l'information filtra auprès d'Océane. Gabin n'avait pas fait exprès mais sa langue avait fourché alors qu'il se trouvait avec elle dans sa chambre pour faire leurs devoirs.

Elle l'avait tout de suite forcé à en dire plus mais il avait refusé.

Depuis, il la sentait qui le guettait. Bon, ça ne changeait pas beaucoup de d'habitude. En vrai, Gabin avait l'impression qu'Océane le suivait de partout et surveillait ses moindres faits et gestes.

Bien sûr, ce n'était qu'une impression mais il n'empêchait que c'était très désagréable.

***

Quand vint le jour de la course, Gabin était fin prêt. Il trépignait et avait eu énormément de difficultés à cacher ce qu'il allait faire à ses amis.

A six heures, il était debout. Il sortit à pas de loup de la maison en prenant bien garde à ne pas se faire repérer, surtout par Océane, puis prit le chemin du lieu de la course en se retournant de temps à autre pour vérifier qu'il était bien seul, même si il y avait peu de chances que quelqu'un ai pu le suivre, vu l'allure à laquelle il se déplaçait.

La place sur où se trouvait le départ de la course était bondée. Gabin eu du mal à se frayer un passage jusqu'à la table où l'on prenait les inscriptions.

« Votre nom, demanda l'homme chargé de noter les présences.

Il avait la face rougeâtre et l'air antipathique.

- Morel. Gabin Morel.

L'autre chercha rapidement dans sa liste puis mit une croix en face de son nom. De la graisse tressautait sous son bras lorsqu'il le bougeait.

- C'est bon, vous pouvez y aller.

- Merci, bonne journée. »

Il y avait bien mille participants, tous aglutinés derrière la ligne.

Parmis tous ses hommes et ses femmes en tenues de sport élastiques et ultra- sophistiquées, Gabin se sentit un peu bête dans sa culotte en gros tissu et sa chemise à carreaux.

Il se résonna en se disant que de toutes façons, si quelqu'un faisait le moindre commentaire, il aurait sa vengeance à la fin de la course, quand il aurait gagné.

Tout devant du convoi, un petit groupe de sportifs agéris sautillait pour se mettre en jambes ou bien faisait des exercices de respiration.

Gabin se sentit un peu malhonnête de laisser ses gens croire qu'ils avaient une chance de gagner mais après tout, ce n'était pas tous les jours qu'il avait une occasion comme celle-ci, il n'allait pas se la gâcher avec des prises de tête inutiles.

Quand le premier coup de sifflet retentit, Gabin était prêt. Il s'était promis de ne pas dépasser une vitesse de course normale, même si cela serait dur pour lui.

L'homme chargé de lancer le départ commença un compte à rebours. Les spectateurs reprirent tous en chœur avec lui.

« 5...

4...

3...

2...

1...

Partez ! »

Les 1426 participants démarrèrent. Gabin remarqua que certain sprintaient dès le départ alors que les autres prenaient leur temps. Il songea que les premiers n'iraient pas bien loin.

Au départ, le jeune particulier décida d'y aller mollo. Il trottina tranquillement en fin de peloton, regardant le paysage autour de lui. Il était serein.

La course fairait 45 km, autant dire une promenade de santé pour notre jeune ami.

Pourtant, au bout d'un moment, Gabin en eu assez de jouer la comédie. Sans pour autour montrer ses vrais talents, il fit une vive accélération et arriva rapidement en tête.

Les autres coureurs ne semblaièrent pas s'en préoccuper. Ils devaient penser que Gabin se fatiguerait.

Bien sûr, ce ne fut pas le cas et lorsqu'il lui ne lui resta que quelques mètres, il piqua un sprint. Grisé à l'idée de sa victoire prochaine, il ne se rendit pas compte qu'il accélèrait un peu trop la cadence.

C'est pour cela qu'il ne comprit pas pourquoi, après avoir franchit la ligne d'arrivée en premier, les gens le regardaient avec des yeux ronds comme des soucoupes.

Au début, il se dit que cet étonnement général venait de son jeune âge mais ensuite, il se rendit compte qu'en fait, il avait fini sa course à prêt de 200km/h !

Le garçon était estomaqué. Il s'était fait avoir à son propre jeu. Il avait visé trop haut, une fois de plus. Il avait voulut se persuader qu'il pouvait être comme quelqu'un de normal pour une fois mais il avait échoué. Il ne pouvait pas contrôler sa propre particularité. Ou alors, c'était juste qu'il avait trop l'habitude de l'utiliser. Dans tous les cas, il avait été lamentable. Quand les autres l'apprendraient... Une larme coula sur sa joue. Il se sentait si stupide...

Des policiers, normalement là pour s'assurer que tout se passait bien, l'embarquèrent dans leur voiture. Il les suivis sans discuter, encore trop sonné par sa propre défaite pour réagir.

Il eu juste le temps d'entendre une voix de fille crier dans l'assistance : « Attendez, je peux tout vous expliquer ! », avant que la portière ne se claque.

***

Il arriva au poste dans le même état d'hébétitude.

Les policier le firent s'asseoir sur une chaise et commencèrent à lui poser des questions. Il ne les entendait pas. Il avait l'impression de flotter au dessus de son corps.

Finalement, agacés par son manque de coopération, les gendarmes décidèrent de lui faire passer une nuit en cellule, histoire de lui « remettre les idées en place ».

***

Cette dernière était petite, humide et froide. Elle était équipée d'un lit de fortune et d'une minuscule salle de bain qui ressemblait plus à une douche à cheval qu'autre chose.

Ce ne fut qu'une fois seul dans la lumière vacillante de l'ampoule fixée au plafond qu'il comprit qu'il venait d'encore plus s'enfoncer dans sa bêtise.

Maintenant, Miss Ramier s'inquiéterait de ne pas le voir rentrer. Elle partirait à sa recherche et quand elle le retrouverait, elle serait furieuse contre lui. Il devrait tout lui expliquer et il serait puni, en plus d'être humilié. Ses camarades de moqueraient à coup sûr de sa défaite et il faudrait des années avant qu'ils ne l'oublie.

Gabin se laissa tomber son le lit poussiéreux et sûrement pleins de parasites. Il regarda l'ampoule crachoter.

Soudain, il entendit quelqu'un l'appeler depuis la porte de sa cellule. Il ne bougea pas, persuadé qu'il s'agissait d'un des garde de service mais le chuchotement persista tellement qu'il fini par se lever et aller voir pour avoir la paix ensuite.

« Gabin, enfin ! Tu en as mis du temps ! T'es bouché où tu l'as fait exprès ?

- Océane ? Mais qu'est-ce que tu fais ici ?

- Je t'ais suivi ce matin. Quand je t'ai vu tu lever si tôt, je me suis dit que c'était aujourd'hui le grand jour.

- Quel grand jour ? Comment étais-tu au courant ? D'où tu savais où se déroulerait la course ? Ne me dis pas que tu m'a pisté je ne te croirais pas.

La jeune fille baissa la tête. Ses longs cheveux de feu tombèrent devant son visage, cachant la rougeur de ses joues.

- Après que tu m'ai laissé entendre que tu allais participer à une course, comme tu ne voulais pas m'en dire plus, je suis aller fouiller dans tes affaires en quête de quelques informations pouvant m'être utiles. C'est là que j'ai découvert ton magazine du présent et l'article parlant de la course.

- Tu es allée fouiller dans mes affaires ! s'exclama Gabin, outré.

- Oui bon, c'est passé. Maintenant, estime-toi heureux que je l'ai fait parce que sans ça, tu passais la nuit à croupir ici.

- Qu'est-ce que tu vas faire ? Aller prévenir Miss Ramier ? Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure des choses à faire : ce qu'elle me fairait subir une fois revenu à la maison serait sûrement dix fois pire que ce que je pourrais endurer en prison.

- Mais non, crétin. Je vais te faire sortir de là. Par contre, j'aurais besoin que tu m'aide.

- Je pense que je n'ai pas le choix. En quoi as-tu besoin de moi ?

- Une fois que j'aurais paralysé les gardes occupés à surveiller la prison, je le serais également. Il faudrait donc que tu trouve un moyen de me ramener à la boucle. Mais je te préviens, si tu me laisse derrière toi alors que je viens de te sauver la mise, tu vas comprendre ce que signifie le mot douleur, Gabin Morel ! J'ai été assez claire ?

- Parfaitement. C'est quand tu veux. Mais, Océane, j'ai une dernière question. Comment es-tu entrée dans la prison ?

- De la même façon qu'on va en sortir : par la porte. »

Gabin n'était pas satisfait par cette réponse mais s'abstint de tout commentaire.

Océane s'éloigna d le la porte de la geôle et s'avança vers l'un des gardes posté devant une cellule non loin.

D'une simple pichenette mentale, elle le rendit raide comme un piquet et vint lui arracher le trousseau de clef qu'il tenait à sa ceinture. La jeune fille avait maintenant une jambe inutilisable mais elle pouvait encore marcher, bien que plus difficilement.

***

Elle mit une bonne dizaine de minutes avant de trouver la clef ouvrant la cellule de Gabin. Il faut dire que le trousseau en contenait au moins un trentaine !

Quand enfin elle y parvint, son ami déboula dans le couloir. Il remercia brièvement Océane puis la pria de lui montrer le chemin de la sortie.

Elle ne se fit pas prier et les conduisit à travers le dédale de couloirs du lieu. Elle n'était venue ici qu'une seule fois mais semblait connaître l'endroit sur le bout des doigts.

A l'entrée, plusieurs gardes les attendaient de pieds fermes. Océane libéra de son emprise l'homme à qui elle avait pris les clefs et paralysa ses adversaires sans chercher à discuter.

Gabin, lui, se servait de sa super-vitesse pour les assommer sans qu'ils ne puissent riposter.

Bientôt, il ne resta plus personne pour les empêcher de s'enfuir.

Océane avait paralysé cinq hommes, se qui faisait qu'il ne lui restait plus que sa tête de valide.

Sans réfléchir, Gabin la prit dans ses bras comme un bébé et commença à courir vers la boucle. Le poids de la jeune fille le ralentissait considérablement mais il refusait de le laisser paraître.

Arrivés dans la boucle, il reposera Océane par terre et elle libéra les geôliers, retrouvant ainsi l'usage de ses membres.

Gabin la regarda se frictionner les jambes comme pour y faire circuler le sang, gêné.

« Merci, lui dit-il en baissant les yeux.

- Tais-toi. Tu sais très bien que je déteste qu'on me remercie.

- Je prends vais prendre ça pour un « de rien Gabin, ça m'a fait plaisir de t'aider ! ».

Elle souffla. Il lui sourit. Elle détourna la tête pour lui cacher ses joues rosies.

Il restèrent un moment sans parler puis, Gabin posa enfin la question qui lui brûlait les lèvres depuis qu'il avait vu Océane derrière sa porte de prison.

« Pourquoi tu es venue m'aider ?

- Je ne sais pas.

- Je pensais que tu me détestait. Tu aurais dû être contente que je ne sois plus là...

- Et bien, comme dit le proverbe, il n'y a que les abrutis qui ne changent pas d'avis, n'est-ce pas Gabin ? »

Il approuva. Ils se sourirent puis réalisèrent ce que signifiait ses paroles et Océane se prit la tête dans les mains. Elle bafouilla une excuse puis s'enfuit en courant vers la maison.

Gabin la regarda faire. Il souriait.

***

Au grand étonnement de Gabin, Océane ne dit rien à personne sur ce qui s'était passé.

Par contre, elle s'enferma encore plus dans sa bulle de solitude, refusant catégoriquement de lui adresser la parole. Il devina que cela était dû à sa sorte de déclaration camouflée et involontaire.

Il n'insista donc pas, la laissa seule, mais regrettait un peu de n'a pas pouvoir échanger avec elle. Il aimait bien parler avec la jeune fille. Elle connaissait beaucoup de choses et pouvait se montrer très sympathique, quand elle le voulait.

Malheureusement, elle ne le voulait pas.

Un jour, Gabin lui proposa d'aller faire leurs devoirs ensemble, comme ils le faisaient quelques infos avant la course mais elle refusa.

Peiné, le garçon décida que cette histoire avait assez duré. Il alla donc toquer à la porte de sa chambre.

« Entrez, marmonna Océane de l'autre côté.

Il la trouva avachie sur son lit, en train de jouer avec une balle en mousse.

- Qu'est-ce que tu fais là, toi ? Je croyais avoir été assez claire : je ne veux pas te parler.

- Océane, ça suffit.

- De quoi tu parle ?

- Tu le sais très bien. On va continuer à s'éviter éternellement.

- Et pourquoi pas ?

- Déjà parce que c'est impossible et ensuite parce que ça ne va nous emmener à rien.

- Je n'ai pas envie que ça nous emmène à quelque chose.

- Océane, c'est bon. Arrête de faire ta gamine. Le passé est le passé, maintenant, passe à autre chose.

La jeune fille de redressa sur son lit. Gabin vint s'asseoir prêt d'elle.

- D'accord mais on oubli tout depuis le moment où on est rentrés dans la boucle après ton évasion de prison.

- On ne peut pas aussi oublie ce qu'il y a eu juste avant ? C'est à dire mon idée idiote de vouloir participer à une course ?

Elle rit.

- Si tu veux. Alors c'est d'accord ?

- De quoi tu parles ? Il s'est passé quelque chose ? »

Elle lui envoya un coup de coude dans les côtes et il lui tira gentillement les cheveux.

« Alors on les fait ces devoirs ? »

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Voilà une nouvelle mettant en scène Gabin et Océane, vous en dites quoi ?

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