~ À l'école ~

Je tiens à préciser que lorsque j'ai écris cette nouvelle, je n'avais pas lu le tome 4 de Miss Peregrine, donc si il y a quelques similitudes entre les deux, ce n'est pas de ma faute. 😇

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« Pourquoi moi j'ai pas droit de y aller, moi aussi ? se plaignit pour la millième fois Bronwyn en voyant ses camarades s'activer joyeusement pour se préparer.

- Nous vous l'avons déjà expliqué plusieurs fois, Mademoiselle Bruntley, c'est parce que vous êtes trop jeune et surtout parce que vous ne contrôler pas assez votre particularité. Et nous ne savons que trop bien ce que vous êtes capable de faire lorsque vous vous énervez.

- C'est pas juste ! Je suis pas la seule dont la particularité est voyante ! Regardez Hugh ou Millard, ils vont faire comment eux ?

Miss Peregrine soupira et se pinça l'arrête du nez, désespérée par sa pupille.

- Monsieur Nullings portera des vêtements sur l'intégralité du corps et prétextera souffrir de la maladie du Xeroderma Pigmentosum qui n'empêche d'être exposé aux rayons du soleil. Monsieur Apiston lui, gardera la bouche fermé et fera mine d'être muet. N'est-ce pas Monsieur Apiston ?

Elle tourna son regard de faucon vers son protégé au ventre grouillant d'insectes qui était en train de crier après Enoch. Et pour cause : l'intéressé venait de confondre leur deux sacs et avait rempli celui de son camarade de cœurs et autres organes gluant.

- Quoi ? demanda-t-il en s'arrêtant tout net. Oui, bien sûr.

- Fort bien. Monsieur O'connor, veuillez reposer cela sur-le-champ ! Ce n'est pas convenable d'emmener pareilles immondices à l'école !

Enoch serra ses bocaux un peu plus fort contre lui et bougonnant.

- Je ne vois pas en quoi. Ce n'est pas de ma faute si tout le monde est une petite nature. Et puis ce ne sont pas des immondices.

- Peu importe ! Dépêchez-vous le bus scolaire arrive dans cinq minutes ! »

Les autres enfants, tout excités d'aller pour la première fois à l'école, étaient déjà prêts depuis deux jours. Ils avaient hâte de découvrir le fonctionnement des établissements du présent et surtout, de se faire de nouveau amis.

Seul Enoch traînait les pieds : il aurait largement préféré rester enfermé dans son laboratoire au fond du jardin plutôt que devoir aller se mélanger à ces « abrutis de normaux ».

Un bruit de klaxonne retentit et les enfants quittèrent la maison après avoir salué Miss Peregrine. Un à un, ils montèrent à bord du bus jaune arrêté dans l'allée.

***

En arrivant devant le collège, les enfants furent surpris de voir que tant de monde était présent devant le portail. Ils ne pensaient pas que la population serait si nombreuse dans un tel endroit.

Ils étaient également un peu perdu. Ne sachant pas où se rendre, ils attendirent jusqu'à ce que la grosse voix du directeur vint procéder à la répartition des classes.

Millard fût envoyé en 4°3, Olive et Fiona en 3°2 et enfin Hugh en 3°4. Emma, Horace et Enoch n'avaient pas été appelés. Inquiets, ils allèrent demander à Jacob si cela était normal et ce dernier les réorienta vers le lycée qui se trouvait dans un autre bâtiment non loin.

Juste avant de quitter ses amis pour aller rejoindre son professeur principal, Fiona souffla :

« Bonne chance. J'espère que ça se passera bien pour vous.

- De même, lui répondit Millard. Espérons que nous allons vite sous sociabiliser avec les autres, même si ça ne va pas être simple pour moi... »

***

« Les 3°4, suivez-moi ! On va en salle 112.

Hugh, cherchant à se faire le plus discret possible - une fois n'est pas coutume -, traînait le pas derrière sa classe. Il fût donc le dernier à entrer dans la salle où les autres adolescents avaient déjà trouvé leurs places. La seule qui restait de libre était au premier rang, juste à côté d'une fille brune aux cheveux raides comme des baguettes.

« Tout le monde est installé ? demanda le professeur. Bien. Je me présente je suis Monsieur Iron et je serais le prof référant de votre classe. Si vous avez des questions concernant la vie de la classe ou bien des problèmes avec les autres instituteurs, c'est à moi que vous pouvez venir vous adresser.

Hugh n'avait pas tout compris mais il n'osa pas poser de questions, craignant que cela ne semble louche. Et puis il était muet.

Monsieur Iron commença à faire l'appel. Hugh fût le premier à devoir lever la main. Le professeur lui demanda de dire quelques mots sur lui mais le garçon lui montra sa bouche et l'autre paru comprendre.

- Ah... Vous ne pouvez pas parler Monsieur Apiston ? »

Hugh hocha la tête. Il sortit une ardoise de son sac et écrivit en lettres majuscules dessus : JE SUIS MUET MAIS PAS SOURD.

Monsieur Iron paru un peu mal à l'aise et se dépêcha de finir son appel.

***

« Je vais à présent vous distribuer vos carnets de correspondance, déclara Monsieur Iron un peu plus tard avant de s'exécuter.

- Vous pouvez remplir la page consacrée aux noms de vos autres professeurs. »

Une liste s'afficha au tableau et les élèves la lurent tous avidement, poussant de temps en temps des soupirs de résignations.

Hugh lui, se contentait d'écrire sans rien dire. À un moment, il sentit que l'une de ses abeilles tentait de sortir de sa bouche. Paniqué, le garçon se dépêcha de la ravaler mais dans son empressement, il faillit s'étouffer et fut se mit à tousser. L'abeille rebelle en profita pour sortir à l'air libre.

Le jeune particulier regarda autour de lui pour s'assurer que personne ne s'était rendu compte de rien. Ce n'était pas le cas. Rassuré, Hugh reprit sa rédaction.

Le garçon avait déjà oublié l'incident depuis un bon bout de temps quand soudain, sa voisine de table, Kate, se mit à crier :

« Attention Hugh ! Il y a une guêpe qui tourne autour de toi ! »

Par réflexe, Hugh faillit lui expliquer qu'il n'y avait pas de quoi s'inquiéter, que c'était normal et surtout, surtout, que ce n'était pas une guêpe mais une abeille. Heureusement, il se souvint juste à temps qu'il n'était pas censé pouvoir parler et se tût donc.

Hélas sa camarade ne semblait pas décidée à vouloir l'imiter. Elle brailla de toutes ses forces lorsque l'insecte jaune et noir s'approcha d'elle. La classe, alertée par ses beuglements, commença à s'agiter.

Les filles criaient à chaque fois que la petite bête effectuait un mouvement dans leur direction, les garçons voulaient être le premier à la capturer... Hugh n'avait jamais vu des enfants normaux si agités.

Monsieur Iron hurla à ses élèves de se calmer mais sa voix était étouffée par la cohue ambiante.

Quand Max se mit debout sur sa table pour essayer de claquer l'abeille, Hugh commença à paniquer. Il fallait absolument qu'il les empêche de tuer sa protégée.

Le garçon aux abeilles connecta alors son esprit avec celui de l'insecte et lui indiqua de revenir vers lui. Une fois que l'instruction fût enregistrée, il se leva, s'approcha calmement de la cause de chahut, tendit les bras et attrapa son abeille entre ses deux mains. De l'extérieur, on aurait pu croire qu'il venait de la claquer entre ses paumes alors qu'elle était en vérité venu s'y poser délicatement.

Les trente-trois élèves de la classe restèrent muets de stupeur. Ils regardèrent Hugh avec des yeux ronds, à la fois impressionnés par son « acte de bravoure » et un peu déçus qu'il ai détruit leur seule distraction de l'heure.

Le professeur profita de cet instant de repris pour déclarer :

« Bon, maintenant que l'incident est clos, pouvons reprendre notre cour là où nous l'avons laissé ? »

Les enfants grognèrent mais reprirent tout de même leurs places respectives. Hugh alla à la fenêtre et fit mine de jeter le cadavre de l'abeille au dehors avant de la reposer discrètement sur sa langue et de l'envoyer rejoindre ses sœurs dans son estomac.

***

Quand la cloche annonçant la fin des cours retentit, tous les élèves de la 3°4 se précipitèrent hors de leur salle de classe pour se ruer vers le réfectoire.

Hugh ne les suivit pas tout de suite. Il alla attendre devant la salle 206 dans laquelle Olive et Fiona étaient censées se trouver. Une marée d'adolescents en sortir, criant et se bousculant, plaquant au passage le particulier contre un mur.

Enfin, après quelques dizaines d'élèves surexcités, Fiona émergea de la salle. Elle se dirigea directement vers son ami et l'informa qu'Olive arrivait. Ensuite, elle partit rejoindre Millard et Enoch un peu plus loin.

Hugh s'approcha de la porte. Olive était bien là, marchant vers lui en discutant avec un garçon inconnu pour notre ami. Dans un premier temps, elle ne le remarqua pas puis elle l'apercu et lui fit un signe de main avant d'entraîner son nouvel ami vers son camarade.

« Alex, je te présente Hugh, un ami de longue date.

Elle adressa un clin d'œil complice au garçon aux abeilles mais celui-ci ne le lui rendit pas, trop occupé qu'il était à fusiller l'autre du regard.

- Salut mec, enchanté, dit le dénommé Alex en tendant une main au jeune particulier.

Hugh la regarda sans bouger. Finalement, Alex fit retomber son bras le long de son corps avant de déclarer :

- Bon ben je crois que je vais vous laisser... On se voit tout à l'heure Live. »

Les deux autres le regardèrent partir. Dès qu'il fût hors de porter de voix, Hugh demanda, en chuchotant plus agressivement qu'il ne l'aurait voulu :

« C'était qui, lui ?

La jeune fille perdit aussitôt son sourire. Elle avait comme l'impression d'avoir fait quelque chose de mal.

- Qui ça ? Alex ? C'est un copain. Il est super sympa. Il m'a aidée à comprendre tout ce que disait notre prof : j'étais un peu perdue.

- Et il a besoin de te donner un surnom pour t'aider à suivre ?

Olive leva les yeux au ciel.

- Ce que tu peux être coincé ! Qu'est ce que ça peut bien te faire qu'il m'appelle Olive, Live ou je ne sais quoi ?

Hugh croisa les bras.

- Rien. C'est juste que... Heu... Je... je ne voudrais pas qu'il te fasse du mal.

- Oh tu t'inquiète pour moi ! Comme c'est chou ! »

Hugh, surpris qu'elle le prit comme ça, s'abstint bien de démentir. La fille plume, qui ne semblait plus du tout agacée, rit de bon cœur et déposa un petit bisous sur sa joue avant de lui prendre la main pour l'emmener retrouver leurs amis au réfectoire.

***

Deux mois avaient passés. Les enfants de la boucle de Miss Peregrine avaient doucement prit leurs marques dans leur nouvel environnement et pouvaient à présent presque se faire passer pour des élèves normaux. Presque. 

Chacun s'épanouissait dans son domaine de prédilection. Hugh, Fiona et Enoch s'étaient découvert un don pour la SVT, les deux premiers quand elle portait sur la faune et la flore et le second quand il était question du corps humain. Emma se passionnait pour les maths tandis qu'Olive était plutôt branchée français. Horace désespérait de ne pas avoir de cours de musique et Millard, bien sûr, excellait dans tous les domaines. 

« Et vous avez quoi comme cours juste après ? demanda Millard à l'adresse de ses amis. 

Mêmes si ils avaient commencé à ses faire de nouveaux amis, les pupilles de l'ancienne boucle du 3 septembre 1940 avaient tendance à rester en un groupe isolé du reste des écoliers lors des récréations ou autres pauses quelconques. C'était donc exactement ce qu'ils étaient en train de faire, assis en cercle parterre dans l'ombre d'un arbre. Seuls Emma, Enoch, Horace et Jacob manquaient à l'appel : ils étaient dans la cour du lycée. 

- Français, super, marmonna Hugh en prenant bien garde à ne pas laisser s'échapper les abeilles surexcitées qui s'agitaient dans sa gorge. 

Si le garçon avait réussi à cacher sa particularité aux yeux des humains normaux pendant tant de temps, ce n'était pas sans peine et ses amis devaient en payer les conséquences une fois rentrés à la maison. Quand il revenait des cours, Hugh ne prenait même pas le temps de poser son cartable qu'il ouvrait en grand la bouche et faisait sortir tout son essaim en vociférant contre son mutisme imposé. 

Enoch et Horace qui partageaient sa chambre, se plaignaient souvent d'insomnies dues au bourdonnement que faisaient les insectes du garçon durant la nuit mais se dernier refusait de faire quoi que ce soit pour y remédier, prétextant qu'elles avaient besoin de se défouler. 

- Arrête, c'est trop bien le français, le contredit Olive. Nous on travaille sur les lettres que s'envoyaient les soldats pendant la guerre. Je suis super forte. 

- Pas la peine de te la ramener ! Moi aussi j'ai des bonnes notes. Meilleures que toi même peut-être !

- Ouais en envoyant tes abeilles regarder les copies de tes camarades pendant les contrôles, s'esclaffa Millard. 

Hugh rougit.

- Comment tu sais ça ?

- Tu parles pendant ton sommeil. Et puis tu faisais déjà ça quand on était dans la boucle.

- C'est faux, se renfrogna le garçon. Et puis de toutes façons... »

La cloche retentit à cet instant, l'empêchant de terminer sa phrase. 

***

« Oh non, bougonna Horace en se levant du banc sur lequel il était assis en compagnie d'Enoch. J'ai un contrôle...

- En quelle matière, voulut savoir son ami à l'air morose. 

-Maths. 

Enoch prit un air blasé.

- Ah ok. Bon ben, bonne chance, mec. »

Puis il partit. Horace rejoignit sa classe au pas de course et alla s'asseoir à sa place habituelle, au premier rang. Un garçon aux cheveux noirs le bouscula. 

« Alors petite tapette, lui lança-t-il méchamment. Tu t'es toujours pas décidé à t'habiller comme tout le monde ? Non mais franchement, tes fringues ressemblent à celle de mon grand-père. On dirait que tu sors d'une autre époque. C'est ridicule, franchement.   

- Il me semble que je ne t'ai pas demandé ton avis, Jack, lui répondit poliment le devin en sortant ses livres et cahiers de son cartable en cuir. Et puis pour ta gouverne je préfère mille fois donner l'impression de sortir d'une autre époque plutôt que d'une benne à ordures. 

Jack resta muet face à une telle répartie. Pourtant, il aurait dû s'y être habitué : depuis le début de l'année, il essayait de jouer les durs en martyrisant ceux qui lui paraissaient plus faibles et depuis le début de l'année, le particulier en redingote lui tenait tête et trouvait à chaque fois le moyen de l'envoyer bouler.

- Non mais franchement » lâcha faiblement le jeune kaïra en herbe.

Horace ne daigna même pas lui adresser un regard et l'autre finit par se rendre et partir s'asseoir à sa table, dans le fond. Une fois qu'il se fut débarrassé de ce gêneur, Horace se tourna vers Lorie et Stéphanie, ses voisines de derrière. 

« Vous avez révisé pour le contrôle ? leur demanda-t-il. 

Les deux filles écarquillèrent les yeux. 

- Quel contrôle ? répondirent-elle en chœur. 

- Celui que l'on va avoir juste maintenant, sur les fréquences et les intervalles... 

- On a un contrôle ? » brailla Lorie en se tournant vers le reste de la classe. 

Un concert de protestation lui répondit. Personne ne semblait au courant. Horace se sentit soudain bien stupide d'avoir passé trois heures la veille au soir à réviser pour rien. 

Soudain, Madame Larsen entra dans la salle, tout sourire comme souvent, et déclara haut et fort : « Sortez une feuille s'il-vous-plaît : évaluation surprise. J'espère que vous avez bien réviser vos cours sur les fréquences et les intervalles car vous en aurez besoin ici ! »

Trente-quatre paires de regards médusés se tournèrent alors vers Horace.

***

« Comment tu as sû ? le pressèrent une fois de plus ses camarades de classe à la sortie du cours. 

Aucun d'entre eux ne s'attendait à ce contrôle et bien sûr, aucun n'avait révisé. Seul le particulier était serein quand à la note qu'il allait récolter.  

- A vrai dire, je n'en sais rien. Madame Larsen n'y a pas fait allusion au cours dernier ?

Les autres hochèrent négativement la tête. 

- Alors ce doit être mon instinct qui me l'a soufflé.

- Ouais, sûrement ! »

Les élèves semblaient septiques. Ils étaient persuadés que le garçon leur cachait quelque chose et au fond, ils n'avaient pas tord. Par trois fois, Horace avait rêvé de ce test surprise et comme ses rêves mentaient rarement, il avait donc su qu'il aurait bien lieu. Sauf que cette explication était tout simplement impossible à révéler aux autres. Et cela n'était pas pour améliorer la réputation déjà assez atypique qui lui collait au corps.

***

De onze heures à midi, Millard avait une heure de trou. Comme il ne voulait pas rentrer tout seul, il décida de rester en permanence le temps que ses amis finissent leurs propres cours. La salle de travail était presque vide. Seul un garçon de la classe de l'invisible se trouvait là. Justin, si ses souvenirs étaient bons. Millard n'y prêta pas attention.

N'ayant rien de plus palpitant à faire, Millard entreprit de s'avancer dans ses devoirs. En regardant dans son agenda, il vit qu'il avait des exercices de maths à faire pour le lendemain ainsi qu'un contrôle d'Histoire à réviser. Il décida de commencer par les maths.

Millard avait le nez plongé dans son manuel et réfléchissait à un problème mettant en scène des melons et des chewing-gum quand subitement, le garçon de sa classe se leva de sa chaise et vint à sa rencontre. Justin se plaça juste devant le particulier et bomba le torse dans une attitude de défi. Étant donné sa toute petite taille et ses épaules fines, cela n'était pas très impressionnant. 

« T'es trop bizarre, lui dit-il sans préambule.

- Quoi ? 

- Pourquoi tu restes toujours tout seul et tu viens pas parler aux gens ? Ou alors juste à ta bande copains pas nets. Vous nous cachez quoi ? Je suis sûr que vous nous cachez quelque chose. 

- Mais non, qu'est-ce qui te fait croire ça ? 

- Je suis pas débile, tu sais. J'ai bien remarqué que vous n'étiez pas comme les autres. Il y a toi déjà, qui montre jamais ta tête, et puis ton pote là, celui qui est en troisième. Il est dans la classe de mon frère et il m'a dit qu'il était muet. Pourquoi je l'ai vu parler et rigoler avec vous tout à l'heure, alors ? 

Aïe, la demi-portion avait vu juste. Ils n'avaient pas été assez prudents. 

- Je crois que tu te trompes, protesta faiblement Millard qui avait soudain trop chaud sous sa capuche. Hugh ne parle pas, même avec nous. Tu as dû confondre. Et moi, j'ai déjà expliqué que je ne pouvais pas être exposé aux rayons du soleil.

- Mais il n'y a pas de soleil ici : on est à l'intérieur.

Millard ne savait plus quoi dire. Pressé de se débrasser de ce pot de colle, il lâcha :

- Ça ne marche pas comme ça. Et si tu ne me crois pas, tu n'as qu'à venir manger avec nous demain à midi, tu verras bien que nous sommes des humains comme toi. »

***

« Les gars, commença Millard le lendemain, alors que ses amis et lui-même se rendaient au self pour prendre leur repas. Je crois que j'ai fait quelque chose qu'il ne fallait pas... J'ai, comment dire, malencontreusement invité quelqu'un à se joindre à nous pour manger.

- Ah bon ? s'étonna Olive. C'est trop fort ! Figure-toi que j'ai justement proposé à Alex de venir manger avec nous ! 

Hugh faillit faire tomber son plateau et se retourna vers la jeune fille, le regard noir. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais s'arrêta juste à temps. 

- Ouf, je me sens moins mal vis-à-vis de vous » se réjouit Millard. 

Il déposa son plateau sur une table libre et les autres l'imitèrent. Ils furent vite rejoints par Alex et Justin, le premier souriant de toutes ses dents et le second leur faisant de grands signes de la mains au risque de faire tomber sa nourriture parterre. 

« Salut, ça boum ? lança Alex à la cantonade en prenant place à la gauche d'Olive.

- Oui, comme tu vois. Et toi, comment ça va depuis tout à l'heure ? Eh ! Fais attention : tu as failli renverser mon verre ! 

- Désolé Live, j'ai pas fait exprès ! »

Alex cligna de l'œil en direction de son amie et elle rit. Hugh, assis de l'autre côté d'Olive, ne les lâchait pas du regard. 

« Alors comme ça vous habitez tous dans la même maison, Live m'a dit. Ca ne doit pas être facile tous les jours, je me trompe ? 

- Oui, en effet, confirma Millard. Surtout quand cet abruti passe la nuit à ronfler et refuse de l'avouer le lendemain matin. »

Le garçon au ventre rempli d'abeilles lui envoya un coup de pied sous la table. Il ne pouvait rien dire pour sa défense et l'invisible, parfaitement conscient de ce fait, en profitait. 

« Millard non plus n'est pas mal en terme de créateur de problème, attaqua Fiona en volant à la rescousse de son ami apiculteur. Surtout quand il profite de son handicape pour nous esclavager ! 

- C'est faux, j'ai jamais fait ça ! » se défendit le garçon en croisant les bras.

Voyant que la conversation était petit à petit en train de s transformer en règlement de comptes et donc en dispute, Olive se dépêcha de l'orienter vers un autre sujet plus pacifique, comme les passions de chacun. 

Millard parla de ses lectures pendant un peu trop longtemps pour que ce soit agréable et les autres finirent par lui demander poliment de se taire. Fiona déballa un nombre impressionnant de types de fleurs différents et Hugh se leva pour aller remplir le pot d'eau, autant pour résister à l'envie d'intervenir que pour ne pas avoir à supporter la vue de Alex qui s'appliquait à faire rire Olive autant qu'il le pouvait. 

Ce dernier d'ailleurs, se montra très ouvert aux autres et tout le monde finit par l'apprécier, Hugh mit à part, bien évidemment. Justin pour sa part, resta plutôt discret pendant tout le temps du repas. Il semblait ausculter chaque personne à la recherche de détails susceptibles de trahir quelconque anomalie. Il s'arrêta un long moment sur les chaussures d'Olive mais cette dernière s'en aperçu rapidement et s'arrangea pour faire finement dévier la discussion sur les vêtements et déclarer qu'elle était fan de tout ce qui était voyant et étrange. 

***

Quand les adolescents eurent terminé de manger, ils se levèrent et allèrent débarasser leurs plateaux. 

Une fois que ce fut chose faite, ils décidèrent de tous se rendre dans la cour en attendant le début des cours. Justin s'excusa et prétexta un rendez-vous important pour s'éclipser.

« Il faut que je passe aux toilettes » indiqua Olive alors qu'ils passaient devant ceux des filles.

Elle sourit et partit en coup de vent s'enfermer dans une des petites cabines aux portes vertes. Une fille sortit de celle voisine. Deux minutes plus tard, la jeune fille plume refit sous apparition et après s'être lavé les mains, courut rejoindre ses amis. Malheureusement, elle dérapa sur le sol mouillé et l'un des corchets retenant ses chaussures fermées sauta. Son pied, plus assez maintenu à présent, commença à s'élever lentement et inexorablement vers le ciel. 

Hugh qui se trouvait le plus proche d'elle, écrasa sa propre semelle sur la chaussure de son amie puis se pencha pour arranger les choses pendant qu'elle s'agrippait à ses cheveux. Il se releva enfin et elle se jeta dans ses bras en le remerciant à voix basse. Un peu surpris, le garçon finit par lui rendre son étreinte en adressant un sourire de triomphe à Alex qui ne semblait pas s'en apercevoir. 

La jeune fille resta blotti contre son ami jusqu'à ce que la sonnerie ne se déclenche. Alors seulement, elle le lacha et monta dans sa salle. Alex la suivit. En passant près de Hugh, il lui chuchota à l'oreille : 

« Elle est vraiment sympa. Et très belle. C'est une perle rare cette fille, prends-en soin, mec. »

Le garçon aux abeilles en resta sonné. Il aurait voulu interroger l'autre sur le sens de ses paroles mais c'était trop tard : il avait déjà disparu en haut des escaliers. 

***

« Vous pensez qu'on va finir par s'habituer à cette vie ? demanda Hugh le soir venu, alors que les huit particuliers rentraient dans le quartier où vivaient les Portman, songeur.

- Évidemment, lui répondit Olive en levant les yeux au ciel comme s'il venait de proférer une absurdité. On a toujours fini par s'habituer.

- On est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds, renchéri Millard.

- C'est en partie ce qui fait de nous des gens si étranges, déclara Horace.

- On n'est pas étranges, on est particuliers, expliqua Fiona.

- Oui, tu as raison. »

Les enfants échangèrent tous un regard qui en disait long. En cet instant, ils étaient pleinement eux-mêmes, entourés de ceux qui les aimaient pour ce qu'ils étaient.

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C'était la dernière nouvelle de cette partie, qu'en avez-vous pensé ? J'espère qu'elle vous a plu... 

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