HISTOIRE D'UN HANDICAP QUI NE SE VOIT PAS : DYSPRAXIE (témoignage)

INTRODUCTION :

Parfois, nous avons des handicaps qui ne sont pas clairement perceptibles ou identifiables par les autres. Parfois, nous ne le savons pas nous-mêmes. Le diagnostic de ces handicaps et la recherche de leur cause peut mettre jusqu'à plusieurs dizaines d'années avant d'être fait, si tant est que cela soit fait. En ce qui me concerne, à la suite de certains examens de médecins et spécialistes, en réunissant les éléments factuels de mon histoire et le témoignage de proches et notamment celui de ma mère,  la cause et l'histoire de mes handicaps a pu être trouvée. En attendant, je n'ai pas le choix. Je dois faire face en permanence à ceci :
- un déficit de mémoire immédiate et de travail
- un déficit d'apprentissage,
- un déficit attentionnel
- une mauvaise coordination corporelle.

Pourtant, aucun de mes déficits n'est perceptible. On me juge généralement intelligent, cultivé et doué. Mais ce n'est pas ce que vont dire les tests qui nécessitent de bonnes performances de ces fameuses aptitudes qui me ralentissent épouvantablement et qui s'acquièrent très tôt dans notre développement cérébral. Par chance pour moi, à mes 4 ans, on a trouvé la malformation à l'origine de ces retards. Et par la suite, j'ai alors pu compenser si parfaitement mes handicaps que personne ne s'en rend compte SAUF quand il faut faire des tests à la con basé sur le par cœur, par exemple. En fait, pour réussir aussi bien voire mieux que les autres, il m'a fallut développer d'autres capacités au dessus de la moyenne :
- la détermination,
- l'adaptabilité,
- la créativité,
- la logique,
Certains de ces mécanismes d'adaptation m'ont même rendu bien meilleur que la moyenne dans tout un tas d'autres domaines. Pourtant, régulièrement, je me retrouve confronté à mes handicaps et aux éternels jugements et dénigrement que les imbéciles portent sur moi, qu'ils soient profs, formateurs ou supérieurs hiérarchiques. Ils jugent par rapport aux critères dits normaux, ou disons moyens, conventionnels, standards, avec des tests que j'oserais dire de merde !

Chers lecteurs, n'oubliez jamais que ceux qui vont juger de vos compétences ne sont ni neurologues ni neuro-psychologue, ou spécialistes du développement, ou de quoi que ce soit qui vous obligent à plus de travail que les autres. Il n'est pas rare ( c'est même assez fréquent ) que, parce que vous avez un handicap intellectuel quelconque, vous ayez pu développer des capacités très au dessus de la moyenne dans certains autres domaines et qui feront votre plu valu et votre excellence dans des métiers que certains vous jugent incapable d'exercer. Je me suis battu pour surmonter mes handicaps. Je ne me suis pas laissé abattre, ni rabaisser par des gens dont la faculté de jugement est au final inférieure à la mienne. Ça m'a coûté et me coûte encore en énergie. Mais je suis fier d'avoir réussi à aller au delà de ce que la plupart de ceux qui m'ont jugé incapable d'aller jusqu'où je suis capable d'aller.

Le jour où j'ai écrit le texte qui vient après, je venait de me faire humilier (une fois de plus) par un formateur qui m'estimait incapable d'obtenir le diplôme correspondant au métier que j'ai exercé pendant plus de dix ans avec beaucoup de reconnaissance. Tout d'abord abattu et hébété par les insultes, j'ai sentis naître en moi la rage et ma détermination de continuer, malgré la gifle qu'on m'avait donnée.

C'est le message que je vous adresse. Faites-vous plus confiance à vous-même pour réussir ce que vous voulez vraiment qu'au jugement des médiocres. J'ai eu de la chance. Des personnes brillantes et bienveillantes ont vu en moi ce que la moyenne ne voyait pas. Ce sont ces bonnes personnes qui m'ont donné un peu plus confiance en moi et permis de réussir. Je vous souhaite de telles rencontres si vous vous sentez mal jugé. Ce que vous voulez doit faire loi. Et si nécessaire, recherchez ces personnes bienveillantes qui vous aideront à vous dépasser. Elles existent. Soyez en sûr.

Cela vaut ce que cela vaut, mais voici mon témoignage. J'espère qu'il pourra vous donner foi en vous.

GO :

Ce soir je pleure comme au temps ou bébé, j'avais faim et pas assez à manger.
Et quand venait mon heure, j'aspirais jusqu'à son sang le mamelon à téter...
pour seulement un peu de lait... un peu de lait, mais pas assez.

Je ne grandissais pas aussi bien que j'aurais dû. Et tout le jour et toute la nuit, j'appelais comme au secours. Mais maman, les mamelons arrachés, comment lui en vouloir, rechignait à m'allaiter.

Le bon docteur qu'on avait appelé me fit sevrer. Les seins de maman purent guérir. Mais moi, je continuais de toujours pleurer.

Le bon docteur, de bon conseil, et diplômé,
Lui dit : Madame, vous n'avez qu'à l'attacher. Il finira bien par se calmer !
Mais, le médecin ne posa pas son regard sur l'enfant, malgré son retard.
Il vient un temps où même un bébé finit par se résigner. Et j'ai cessé de pleurer.

Le biberon, pourtant, ne se vidait pas. Les adultes se dirent que, sans doute, je n'avais guère besoin de plus pour me nourrir puisqu'a toute peine, je n'arrivais pas souvent à finir le biberon. Qui aurait pu savoir l'effort que cela me coûtait ?

Mais de retard en retard, sans assez de ce qu'il faut, il est un organe qui souffrait dans son silence plus que les autres.
Un an puis l'autre, et plus encore, je ne marchais toujours pas.
Qu'on s'en inquiète ? Non ! L'enfant est obstiné. Bien sûr que c'est la faute de l'enfant. Ma sœur aînée, persuadée que c'était le mieux à faire, dit à ma mère : mets le dehors, et attends, il finira bien par marcher. C'est à genoux, sur les cailloux, que je suis rentré.
Cailloux, genoux ensanglantés.

Mais que peut dire un enfant quand il est trop tôt pour qu'il puisse parler ?
Comment l'aurait-il pu d'ailleurs ? Car même plus tard, toujours en retard, Cet enfant ce fit attendre pour parler. Mais quand je le pu, je vous l'assure, je le fit bien.
Mais, maladie sur maladie, de bonne tradition médicale, on m'amena à l'hôpital pour opérer et enlever les amygdales.

Pour la première fois, un médecin mit son nez dans ma bouche.
Ce fut une surprise que de trouver que ma langue était attaché à ma mâchoire.
Une malformation presqu'insignifiante du fil sublingual fut pour la première fois observée. Le fil sublingual, cette si petite chose, était trop court, bien trop court. C'est lui qui ne m'avait pas permit de téter, ni plus le sein que la tétine, pas plus que du solide d'ailleurs. Car la langue ainsi attachée ne me permettait pas de déglutir. Je ne pouvais que désespérément aspirer jusqu'à l'épuisement. Voilà qui avait fait de moi un enfant malnutri ! Ce petit fil sublingual fut sectionné d'un simple petit coup de scalpel de rien du tout. Mais énorme pour moi !
Mais, cet organe qui souffrit trop longtemps d'être trop peu nourri, c'était mon cerveau, l'organe qui ordonne et coordonne. 4 ans ! Mais ces 4 ans là sont ceux dont il a le plus besoin pour se développer. Une insignifiante malformation et tant de conséquences ! Personne ne s'était penché sur ce retard psychomoteur qui m'avait retardé pour marcher. Aussi insignifiant d'apparence, le retard pris pour que se construise la brique fondamentale de l'édifice cérébral qui permet d'apprendre et de mémoriser. Cet enfant est lent. Était-il simple d'esprit ? Non, simplement lent. Lent pour tout, lent pour apprendre, même à l'école, surtout à l'école. Lent dirent les carnets scolaires. Il y a des retards qui ne se rattrapent pas ! Mais de savoir pourquoi, ça, personne ne s'en préoccupa.

Qui su jamais pourquoi j'étais si lent ? À cette époque, ni parents, ni médecins, ni enseignants ne s'en préoccupèrent. A quoi bon ! C'est comme ça. Il est lent.
Qui sait quels efforts j'ai du développer pour arriver plus loin que les autres pour compenser ? Qui sait quels efforts je dois encore faire pour compenser mon déficit d'apprentissage, ma lenteur de lecture, ma difficulté d'écrire rapidement, la maladresse de mes mouvements ? Et pourtant, parce que j'ai du faire plus d'effort que les autres pour à peine suffire à mes besoins alimentaires, j'ai appris à m'acharner, à résister, à être plus combatif, plus créatif par la suite, plus observateur aussi.

Et merde à ceux qui m'ont tous jugé comme lent, traînard, retardataire, tétu, récalcitrant, qui ne travaillait pas assez, et d'autres adjectifs péjoratifs. J'ai même entendu menteur ! Je n'ai, dès mes premiers jours, pas eu le choix pour survivre ! Une bonne fois pour toute, NON DE DIEU, oui, je jure, VOS GUEULES !

Pour arriver là où je veux, je dois faire plus d'efforts que vous. Je dois me concentrer sur tout, et en particulier sur ce que vous faites par évidence !

Oui, je dois me concentrer pour ne pas me cogner partout ! Oui, pour lire, je dois faire plus d'efforts que vous. Oui, pour écrire ou faire un travail minutieux, je dois être faire plus d'effort pour contrôler mes doigts. Oui, tout me coûte et tout m'épuise plus que vous ! Mais, je me maltraite jusqu'à y arriver mieux aussi souvent que je le peux. Oui, je fais des choix. Je ne peux pas me battre sur trop de fronts à la fois. Pour les choix que je fais, je me fous du temps que ça me prendra ! J'arriverais là où je veux aller sans me soucier de ce que vous penser de mes aptitudes.

Oui, je suis handicapé. Et oui, ça ne se voit pas. Il m'a fallut tant d'efforts pour que j'en arrive là !

Non, personne ne décidera à ma place si je suis suffisamment doué pour faire ceci ou cela.

J'aime savoir. J'aime comprendre. Ça me coûte ce que ça me coûte. C'est toujours un efforts plus grand pour moi que pour la moyenne. Mais JE ME FOUS DE LA MOYENNE !

J'ai appris plus que bien d'autres. J'ai fais plus de ma vie que bien d'autres. Et si parfois, je cède à la fatigue de cette lutte incessante, que je désespère, que je suis blessé par les jugements hâtifs des ignorants, je m'obstinerais jusqu'au bout du possible ! Quand bien même je n'aurais pas l'attention et l'aide que j'aimerais tant qu'on me donne et dont j'aurais besoin ; autant qu'il m'a fallut d'efforts pour me nourrir le ventre, je continuerai de nourrir mon cerveau handicapé mais avide de tout ! Mon esprit a soif de tout.

Cela est dit ! Et j'ai fini de pleurer.

Ceux qui m'ont lu jusque là savent désormais combien je paye de tribut à mon handicap. Et les autres... ils ne font que la démonstration de ce que j'ai tant observé. Ils se découragent avant moi !

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