Souvenirs d'enfance... ou presque
Jacques réajusta son col de chemise pour la cinquième fois. Il n'était pas particulièrement méticuleux, ni coquet, mais l'occasion se prêtait à l'être. Il retrouvait sa mère après quatre ans.
La dernière fois qu'elle leur avait fait l'honneur de sa visite, c'était à contre cœur, pour l'enterrement de Paul, son ex-mari, le papa de Jacques et Émeline. César et Victoria venaient alors d'avoir deux ans. Depuis, elle n'avait plus donné signe de vie que par téléphone et encore ! C'était lorsqu'elle ne prétextait pas un problème de connexion et Jacques avait dû lourdement insisté pour qu'elle se manifeste. Si sa mère était entêtée, il l'était deux fois plus. Et si Madeleine n'avait pas été une mère très présente, Jacques s'était juré d'en faire une grand-mère exemplaire ! Ainsi était-il satisfait qu'évoquer César et Victoria ait finit par convaincre sa mère de leur rendre visite. Madeleine avait toujours eut un faible pour les enfants mais ne s'était pour autant jamais occupé des siens, partagée entre le désir de liberté et celui de fonder une famille. La liberté avait finit par gagner mais trop tard: Émeline et Jacques avaient déjà vu le jour, chacun leur tour. Malgré cela, Madeleine était partie, car, dans son désir de fonder une famille, elle avait raté la case « mari aimé et aimant ». Jacques lui en avait voulu un temps mais, en grandissant, il s'était rendu compte qu'il préférait voir sa mère heureuse, même loin de lui, plutôt que regrettant toute sa vie un mariage précoce et malheureux, coincée dans une routine infernale de femme au foyer car Madeleine avait sacrifié ses études pour épouser Paul qu'elle croyait alors aimer éperdument et avec lequel elle ne doutait pas de vouloir faire sa vie, fonder une famille.
Mais le père de Jacques avait été un homme bourru, colérique, que l'alcool et le temps n'arrangèrent pas. Jacques aurait souhaité avoir sa mère à ses côtés et à ceux d'Emeline au moins ces soirs où Paul ouvrait et vidait plusieurs bouteilles de Whisky à lui seul.
Jacques avait également pardonné à son père, qui durant sa brève carrière militaire avait été envoyé sur le front en Indochine et y avait vécu l'enfer. Et puis Paul n'avait jamais levé la main sur lui et sa sœur, bien que ses mots crus et cruels avaient souvent été tout comme.
Ressassant ainsi son enfance, Jacques réajusta une dernière fois sa cravate, puis, après avoir embrassé sa femme et ses enfants, il quitta la maison, direction la gare.
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