Chapitre 6: Fais un vœu

Et voilà, je viens de terminer ma première semaine en tant que célibataire et c'est terriblement bizarre. Je m'étais habitué à sortir avec Nanaba, donc la croiser dans les couloirs de l'école sans qu'elle me regarde et ne plus lui adresser la parole, c'est quelque chose de désagréablement nouveau.

Dire qu'elle voulait soi-disant rester amie...

L'équipe a essayé de me consoler lorsqu'ils ont appris pour ma séparation, mais curieusement, je ne me sens pas triste. Je suis uniquement perdu dans cette solitude après plusieurs mois de couple. Ne dit-on pas que le premier amour nous brise le cœur? C'est bien moins pire que ce à quoi je m'attendais.

Assis à notre table habituelle, je suis pour une rare fois seul avec Reiner et Thomas en ce jeudi matin insignifiant. Parmi tous les membres de la bande, ces deux-là font partie de mes favoris. Toujours drôles, avec eux, il n'y a jamais de drame. Ce sont des amis en or qui aident à mettre de l'humour dans chaque instant de la journée.

À première vue, Thomas peut sembler être une personne à l'humour cru et méchant, mais en le connaissant, les gens comprennent vite qu'il est fort sympathique. Ayant toujours trop d'entrain, cela doit avoir un rapport avec sa consommation de sucre excessive... Alors que certains prennent un café le matin, lui, il a besoin d'un dessert que Reiner plus paie à 99% du temps.

En ce moment, il n'est même pas encore neuf heures du matin et le garçon aux cheveux platine dévore déjà un gâteau double chocolat à l'apparence succulent.

-J'ai tellement hâte à samedi, affirme Thomas en souriant, dernier party au chalet avant les vacances! J'ai déjà hâte de... LÂCHE TOUT DE SUITE CETTE CUILLÈRE!

Reiner, qui s'apprêtait visiblement à prendre une bouchée de son précieux, lâche l'ustensile dans un sursaut sous le regard terrifiant de son meilleur ami.

-Je voulais simplement gouter, se défend-il, et d'abord, c'est moi qui te l'ai payé!

-Hum... puisque tu es mon meilleur pote, tu peux tremper ton doigt dans le crémage, mais rien de plus.

-Mais d'où vous vient un tel élan de gentillesse, monsieur Wagner?

-Je me suis levé du bon pied ce matin. Bon, où en étais-je... ah oui! Samedi, cette fête va être de la bombe! J'ai mis au point la musique, j'ai été choisir les bouteilles de fort et j'ai fait les invitations. J'ai encore de bons souvenirs de la fête d'Halloween qu'on avait faite.

Reiner, qui lèche son doigt couvert de crémage, rigole en entendant son ami parler de cette fête. Moi-même, je ne peux m'empêcher de m'esclaffer à ces souvenirs hilarants que j'en ai. Avec Livai, nous nous sommes retrouvés costumés en Luigi et Mario tandis que nos copines ont pris les rôles de Peach et Daisy.

-Tom, sourit Reiner, tu étais tellement bourré, que je doute que tu t'en souviennes. Toute la soirée, tu as flirté avec Armin en pensant qu'il était une fille. Quand il t'a dit qu'il était un garçon, tu t'es fâché et tu l'as obstiné. Tu l'accusais qu'il se trompait et qu'il n'acceptait simplement pas sa féminité!

-C'est vrai, répond calmement Thomas en fixant avec un sourire le plafond, ah, les souvenirs de veillée...

Je ris davantage. Avec ces deux-là, pas besoin de parler pour être de bonne humeur! Il faudrait que je passe des moments en leur compagnie plus souvent. Leur présence fait du bien.

J'ai déjà hâte à samedi!

***

Samedi est finalement arrivé.

Comme j'ai eu mon permis de conduire il y a deux semaines, mon beau père n'est plus obligé de se déplacer pour jouer les taxis. Accompagnés de Livai et Hansi sur la banquette arrière de ma magnifique Toyota Tercel d'occasion, nous nous dirigeons vers le chalet où se déroule la fête. Ça, c'est l'un des avantages d'être le plus âgé de ma classe. Vive les gens nés en octobre!

Lorsque nous arrivons à destination, je renifle rapidement mes aisselles pour m'assurer que je sens bon, puis je sors en souriant de la voiture. Je devrais remercier ma mère pour toutes les eaux de Cologne qu'elle m'offre chaque Noël.

-Tu es certain que tu vas assez bien pour sortir aujourd'hui? S'inquiète Livai en arrivant près de la porte d'entrée, je ne sais pas ce que ça fait de se faire larguer, mais j'imagine que ça fait mal.

-Je t'assure que je vais bien! C'est gentil de t'inquiéter pour moi.

-Je suis certain que tu trouveras quelqu'un davantage pour toi.

Depuis quand mon meilleur ami se montre-t-il si doux? C'est presque effrayant.

Nous pénétrons avec habitude à l'intérieur du chalet où la fête est visiblement déjà bien commencée. La foule est déjà dense, me permettant tout de même de reconnaitre la plupart des visages. Je suis heureux de ne pas porter une tenue hawaïenne cette fois, même si cette jupe était plutôt aérée aux bons endroits...

Accompagnés de mes amis, nous allons nous servir à boire, puis nous discutons avec Jean et Marco que nous croisons. Les gens arrivent de plus en plus nombreux, puis mon cœur se sert quand je remarque la grande silhouette blonde d'Erwin qui discute dans un coin avec cette Marie. Comment Nanaba a-t-elle pu croire que je la trompais avec lui?

Je veux dire, c'est vrai qu'il est très séduisant et que depuis que je l'ai vue, je suis fasciné chaque fois que mon regard croise le sien. Je regarde ses magnifiques fesses, mais ça ne reste que de l'admiration? Je n'ai jamais eu encore d'attirance de ce genre envers un autre garçon... sauf envers Legolas dans le seigneur des anneaux, mais ça ne compte pas. Je ne comprends pas ce que je veux de lui. Est-ce possible que je le désire? Oui, j'aimerais beaucoup le posséder pour une nuit, caresser son corps et effleurer ses lèvres. Je mentirais si je disais que dernièrement, je n'ai jamais pensé à lui de manière assez osée... J'ai honte!

Je détourne le regard pour recommencer à siroter ma bière, les joues rouges sous ces pensées saugrenues. Je dois cesser de le regarder comme un pervers.

-Silence s'il vous plait, hurle quelqu'un, écoutez-moi! On fait une partie de je n'ai jamais!

-Merde, Thomas, descends de la table...

-Je n'écoute pas les gorilles blonds.

La personne qui a parlé est Thomas, debout sur une table avec une bouteille de Mojo Shot presque vide dans les mains. Il est probablement ivre depuis longtemps. Reiner essaie désespérément de le faire descendre de son perchoir. Après avoir insisté, le plus petit se laisse enfin faire à la manière d'un enfant, ce qui fait rire les témoins de cette scène cocasse.

Cette idée de jeu n'est pas mal.

Moi et Hansi mettons toute notre énergie à convaincre Livai de participer à cette partie de je n'ai jamais. Malgré sa réticence, il finit par céder, puis nous prenons tous place en rond dans le salon, une bière à la main. Plusieurs invités que je ne connais pas se joignent à nous. Un large sourire s'étend sur mes lèvres lorsque je vois Erwin arriver, malheureusement accompagné par cette sangsue de Marie... Je ne l'aime pas! Il suffit de regarder pour voir que cette fille joue les agaces avec Erwin et Nile en même temps.

Jouer entre deux amis, c'est inhumain!

-Je commence doucement, déclare Reiner, donc, je n'ai jamais embrassé quelqu'un.

Sans aucune surprise, tout le monde boit, excepté Marco et Armin.

-Je n'ai jamais couché avec quelqu'un, reprend Eren.

Moins de personnes boivent, mais étrangement, je suis déçu de voir Erwin porter sa canette à ses lèvres. Qu'est-ce que j'espérais? Il est en terminal, quand même. Quand je vois Livai boire lui aussi, les joues rouges, je le regarde avec surprise. Il va falloir qu'on ait une discussion!

-Je ne me suis jamais touché en pensant à une personne du même sexe, déclare une fille que je ne connais pas.

C'est quoi cette question humiliante? Je regarde autour de moi, songeant à la possibilité de mentir, mais je vois Reiner boire. Ah oui? Je fais finalement la même chose, mais rapidement en espérant que personne ne le remarque.

-Petit coquin, ce Reirei, rigole Thomas, tu sais, on pourrait se créer une magnifique technique de drague à deux la prochaine fois qu'on va dans un bar! S'il y a une jolie fille en couple, tu dragues son copain pendant que je m'occupe d'elle.

-Ta gueule Tom. Tu es saoul.

-Totalement. Je n'ai jamais fait un plan à trois!

Seul lui boit sous nos regards surpris. Je suis presque certain qu'il bluffe, car il faut se l'avouer, il n'est pas vraiment beau ni charismatique avec ses cheveux moutonneux et ses débuts de rouflaquettes. Plusieurs tentent de lui faire admettre qu'il ment, mais Thomas reste borné dans son mensonge.

-Moi aussi j'ai déjà failli avoir un coup à trois, réplique Jean.

-C'est vrai? S'étonne Marco, pourquoi as-tu simplement failli?

-Car il manquait deux personnes.

Nous rions tous à sa plaisanterie avant de reprendre le jeu avec des questions allant de simples à osés. C'est agréable et cela me permet de noter chaque réponse d'Erwin dans ma mémoire. Les gens commencent à quitter la partie pour diversifier leurs occupations, ce que je fais aussi lorsque le beau blond s'en va, toujours en compagnie de cette Marie.

Mes joues commencent à brûler et mon corps se ramollit à cause de l'alcool que j'ai bu trop rapidement en grande quantité. Je commence à être sérieusement pompette. Livai et Hansi me quittent pour partir je-ne-sais-où, puis je me retrouve seul et entouré de gens que je ne connais pas. Ennuyant.

Voyant que la soirée s'est arrêtée pour moi, je décide d'aller prendre l'air en solitaire dans la cour arrière. J'aime la vue sur la forêt et je n'ai pas peur de m'assoir sur le gazon douillet. Avec un sourire, je sors de ma poche mon papier à joint, ainsi qu'un petit sachet d'herbe que j'ai acheté à l'oncle de Livai. Il fait de la bonne qualité, puisqu'il plante ses produits directement dans son jardin. Un jour, il se fera surement arrêter par la police. 

Alors que je place doucement l'herbe sur un papier pour ne pas en faire tomber sur le sol, je sursaute en entendant parler fort dans la maison. Puis un gros BANG et enfin le bruit de la porte qui s'ouvre. Je préfère ne pas y porter attention, même quand j'entends quelqu'un marcher près de moi en marmonnant un petit : « connard ».

Je peux rouler et enfin allumer le joint avec mon biquet.

-Est-ce que c'est ce que je pense? S'enquiert une voix masculine.

-Je ne sais pas à quoi tu penses, mais j'imagine.

Maintenant curieux, j'éloigne le joint pour regarder le visiteur. Mon cœur fait un bon quand je tombe face à Erwin qui a l'air vraiment énervé. C'est lui qui a crié? Dans un grognement, le blond s'assoit près de moi en passant la main dans ses magnifiques cheveux. Pourquoi il s'assoit là? Je n'ai pas à me plaindre.

-Tu me fais essayer? Demande-t-il.

-Euh... Tu es certain de toi? Je veux dire, tu as bien compris que ce n'est pas du simple tabac.

-Tu me prends pour un con ou quoi? Bien sûr que j'ai compris! J'ai envie de me calmer.

Si on m'avait dit qu'Erwin Smith me demanderait un joint un jour, je ne l'aurais pas cru. Voyant son air énervé, le lui tend le bâton qu'il agrippe à la manière d'une simple cigarette avant de l'apporter à ses lèvres. J'allume le rouleau à même sa bouche, puis le blond en prend une longue inspiration avant de tousser bruyamment. Cela me fait rigoler.

-C'est dégueulasse, affirme-t-il, je viens de me souvenir pourquoi je ne fume pas.

-Ouais, ça l'est. Je fume uniquement une fois de temps en temps. Habituellement, c'est avec Livai. Ce soir, j'en avais envie.

Il me tend le joint que je reprends, puis avec habitude, je le porte à mon tour à mes lèvres avant qu'il me le vol à nouveau. Je croyais qu'il trouvait ça dégueulasse? Au moins, il ne s'étouffe pas cette fois. Comme c'est la première fois que nous sommes seuls, j'en profite pour apprendre à mieux connaitre ce garçon qui me fascine.

-Tu as l'air fâché, remarquai-je calmement, qu'est-ce qui s'est passé là-dedans?

-Ce connard de Nile est arrivé et m'a accusé d'essayer de lui voler sa petite amie. Comme si je draguais Marie, alors qu'elle sort avec mon meilleur pote! Je lui ai fait comprendre qu'il n'est qu'un imbécile, mais il s'est mis à gueuler et il a essayé de me frapper.

-Il n'a pas réussi?

-Nan, il est lent comme une tortue, ce mec. Je me suis poussé de sa trajectoire et il a frappé ce pauvre mur. Ensuite je suis sortie et là, je suis assis ici à raconter ma soirée à un type que je connais à peine.

Je souris malgré moi. Ainsi donc, Marie sort avec Nile? Je me sens rassuré pour une raison qui m'échappe. Erwin continue à parler de n'importe quoi, comme de son départ pour l'université l'année prochaine et je bois ses mots. Une fois qu'il finit le premier joint, il m'en demande un deuxième. Même si j'ai peur qu'il abuse pour une première fois, j'obéis docilement.

Le blond l'agrippe, puis il se couche sur le dos pour regarder le ciel, les bras sous sa tête. Est-ce que je dois le copier? Je me décide à me coucher aussi. Les étoiles sont belles, ce soir.

-Tu sais quoi, déclare Erwin, tu n'es pas aussi con et sans intérêt comme je le pensais.

-Euh, c'est censé être un compliment, ça?

-Venant de moi, ça en est un gros. Tu es même agréable à côtoyer.

Heureusement qu'il ne peut pas me voir, car mes joues doivent rougir.

-Tu es aussi agréable à côtoyer. Je passe un bon moment.

Erwin sourit en continuant de fixer le ciel. Ce sourire me fait fondre. Si beau. Comme si nous étions de bons amis, il recommence à me parler de tout et de rien, et ce, pendant deux bonnes heures. J'entends des voitures quitter la fête, la musique s'arrêter, mais nous, nous restons sur cette herbe humide à discuter. Cette nuit sera à jamais gravée dans ma mémoire.

-Regarde, une étoile filante, s'exclame soudainement Erwin en me pointant une direction, tu dois fermer les yeux et faire un vœu.

Voyant qu'il insiste, je décide de l'écouter avec un sourire pour lui faire plaisir. Mon unique souhait est que chaque soirée ressemble à celle-ci. Quand j'ouvre à nouveau les yeux, je constate qu'Erwin n'a pas ouvert les siens. Vient-il de s'endormir? Il est tellement détendu... Je me dis que je devrais le réveiller pour qu'il se couche dans le chalet, mais je préfère profiter de la situation en fermant moi aussi les yeux pour la nuit.

-Bonne nuit, Erwin.

J'ai le cœur qui bat si rapidement... Même si c'est rapidement dit, je pense que je viens de tomber amoureux.

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