Chapitre 15: Rapprochements?

Depuis la bagarre, moi et Thomas ne nous adressons plus la parole. Même que nous nous évitons.

Par notre faute, l'équipe se retrouve divisée en deux clans. D'un côté, Livai, Hansi et Auruo sont mes fidèles alors que Reiner et Thomas sont seuls. Les autres sont neutres et alternent, ne voulant pas se mêler à ce conflit qui ne les concerne pas. Je les comprends, car à leur place, je ferais la même chose.

Même les pratiques de baseball sont difficiles, puisque nous ne pouvons pas nous retrouver à la même. Erwin nous a fait un horaire différent pour éviter que nous nous croisons, mais pour les parties, nous n'aurons pas le choix de coopérer. Je ne suis pas impatient d'arriver là. Mon entraineur n'est-il pas adorable d'être aussi compréhensif?

Moi et Erwin continuons de nous voir afin qu'il puisse me tenir informé des recherches qu'il fait dans le but de faire éclater la vérité d'un point de vue juridique. Son père n'ayant pas le temps de l'aider à cause de son travail, mon blond doit se débrouiller seul. La plupart du temps, il me parle de l'accident uniquement les deux premières minutes avant de changer de sujet. Nous finissons toujours par discuter de n'importe quoi devant un bon café.

Une semaine après mon combat à sens unique contre Thomas, je sors de l'école pour retrouver Erwin qui m'attend chaque soir. La victime de ma rage a encore un œil au bord noir, mais j'ai du mal à ressentir une quelconque culpabilité devant son air piteux. Il l'a bien cherché.

Alors que je me dirige vers la voiture blanche de mon entraineur favori, la voix de Reiner m'interpelle :

-Mike, je peux te parler?

Depuis quand ne nous sommes pas parlés? Je me retourne vers lui. Il est seul, sans son fidèle maitre qu'il suit habituellement partout. Je ne me souviens même pas de la dernière fois que je les ai vus l'un sans l'autre.

-Fait vite, je suis attendu.

-Je... je sais que tu m'en veux d'avoir aidé Thomas, mais ton amitié me manque beaucoup, Mike. J'aimerais que tu pardonnes mon erreur.

Lui aussi, il me manque. J'ai toujours beaucoup aimé lui parler, mais il a suivi Thomas comme son chien et il m'a aussi trahi... Qui est le plus coupable? Celui qui mène ou celui qui suit? Je n'aime pas être en colère contre les gens à qui je tiens, mais dois réfléchir.

-Je ne sais pas, répondis-je, tu l'as aidé et tu m'as menti...

-Je sais et je t'assure que je regrette terriblement de l'avoir suivi. Quand c'est arrivé, que Tom m'a demandé de le faire, il était tellement paniqué. Je ne pouvais pas lui dire non, pas à lui. Tu dois me comprendre, Mike. Si Erwin te demandait quelque chose, n'importe quoi, je suis certain que tu le ferais sans hésiter si ça peut l'aider. Il me demanderait la lune et je lui décrocherais.

Je sais qu'il est sincère, car c'est lisible dans ses yeux. Cependant, je ne comprends pas sa comparaison avec Erwin. Ce genre de conversation trop sérieuse est ce que je hais le plus.

-Je ne comprends pas pourquoi tu le suis partout alors que ce n'est qu'un profiteur. Avant, je ne le voyais pas, mais maintenant si et c'est de toi qu'il profite le plus.

-Il ne profite pas de moi...

-Bon, disons que c'est faux. Sérieusement, Reiner, pourquoi tu es son pantin? Tu peux bien être son meilleur ami, mais si Livai me demandait l'impossible, je le remettrais vite à sa place.

-Tu te poses vraiment la question?

Il me regarde droit dans les yeux en prononçant cette phrase. Oui je me pose vraiment la question, car il n'est pas... Oh. Je crois que je comprends.

-Tu es amoureux de lui? Essayai-je.

-Il faut croire qu'on ne choisit pas de qui l'on tombe amoureux. J'aime le mec le plus hétéro que je connais. N'est-ce pas ironique? À toi, je l'avoue, car je sais que tu comprends ce que je vis. Tu es pareil avec Erwin que moi avec Thomas et ne me mens pas, car tu sais que je dis vrai.

Il marque un point. D'ailleurs, plus je passe de temps avec mon beau blond, plus je suis persuadé des sentiments qui se développent pour lui. Voir Reiner amoureux d'un garçon qui le traite comme un chien de poche est triste. Au fond, c'est un bon garçon quand Thomas n'est pas là. Il mériterait quelqu'un qui l'aime réellement.

Si l'an prochain il est toujours célibataire, je pourrais peut-être l'aider en jouant le Cupidon?

Nous terminons cette discussion par une accolade amicale qui met un terme à notre conflit. Lui, il mérite mon pardon.

***

Les mois s'écoulent et déjà, il ne me reste plus que deux examens à passer avant les vacances d'été. J'ai une fois de plus été accepté comme animateur au camp de jour de la ville, ce qui me rend impatient. Ces enfants m'ont manqué et j'ai hâte de rencontrer les nouveaux.

Erwin passe me chercher après l'école, comme chaque jour. Cette routine continue avec le temps et je pense qu'il me voit désormais comme un ami proche. Nous parlons ensemble de n'importe quoi et lorsqu'il trouve des images drôles sur internet, il me les envoie. C'est fou à quel point nous nous sommes rapprochés. Tout ça, uniquement parce que j'ai donné son numéro au policier, ce soir-là. Mon blond n'a pas vraiment d'ami excepté moi, donc je pense que notre lien lui tient à cœur.

J'embarque dans sa voiture avec un large sourire, heureux de le voir.

-Alors, la dernière journée d'université? Demandai-je.

-J'ai enfin terminé une année complète! Tu ne sais pas à quel point je rêve de pouvoir dormir sans devoir penser aux travaux à venir. Toi, tu n'avais pas un examen de mathématique aujourd'hui?

-Ne m'en parle pas... L'unique question à laquelle j'ai su répondre, c'est mon nom. J'ai dû copier sur mon voisin de bureau comme j'ai fait pendant toute l'année. Je pense que son prénom est Berlot... il est doué en math et le professeur n'a jamais rien remarqué.

-C'est moche comme prénom, Berlot. Tu es certain qu'il s'appelle comme ça?

-Absolument pas. En fait, je n'ai jamais eu besoin de vérifier son nom.

Erwin rigole avant d'entamer le chemin vers notre Tim Horton habituel où nous buvons un café en discutant de n'importe quoi. Une fois notre breuvage terminé, le blond m'apprend qu'il m'amène dans un lieu spécial, mais il refuse de me dire où. J'adore les surprises!

Avec un sourire, je le laisse me conduire pendant presque une heure, admirant le paysage diversifié. Nous pénétrons finalement dans un chemin de terre en forêt, ce qui attise davantage ma curiosité. Je me demande vraiment où nous allons... Le soleil au loin commence sa longue descente, colorant le ciel de ses douces couleurs. C'est tellement romantique.

Erwin finit par arrêter sa voiture devant un précipice. À travers le pare-brise, j'aperçois la ville au loin qui commence tranquillement à s'illuminer. C'est si beau que j'en suis bouche bée. Cet endroit est exactement le genre où je viendrais avec mon petit ami pour un rendez-vous. Est-ce à ça qu'a pensé mon ami en m'amenant ici?

-J'adore ce lieu, affirme Erwin, la vue est belle et il n'y a jamais personne. J'ai apporté des chips et quelques bières pour fêter la fin de l'année scolaire.

Mon adorable blond sort de la voiture en m'invitant à le suivre. Il sort une petite glacière, puis deux sacs de croustilles de saveur différente. Avec aisance, Erwin s'assit sur le capot de sa voiture.

-Tu n'as pas peur de la briser? Rigolai-je.

-Non. À quoi sert une voiture d'occasion si je ne peux pas m'assoir dessus? Prends une bière et assieds-toi.

Je souris et je lui obéis docilement. Une fois assis à côté du garçon, j'ai l'occasion d'admirer le magnifique spectacle sous nos yeux. Nous sommes tellement bien ensemble, surtout depuis que nous nous sommes rapprochés. Je l'admire quand il rit et je l'écoute commenter les édifices qu'il voit au loin. Erwin est tellement beau... Soudainement, il regarde sa bière avec embarras.

-Je ne me suis jamais excusé, avoue-t-il.

-Excuser pour quoi? M'étonnai-je.

-Tu le sais très bien. J'ai été dégueulasse avec toi quand tu as amené Sieg au chalet. C'est juste que... comprend moi, mon père m'a toujours montré les pédés... désolé... homosexuels comme quelque chose de hors nature. Si tu entendais tout ce qu'il dit à ce sujet, toute la haine qu'il leur porte, tu serais choqué.

Cela fait longtemps que je ne pense plus à tout ça. Cependant, l'entendre s'excuser me fait chaud au cœur.

-Ce n'est rien, c'est du passé maintenant, souris-je.

-Si tu le dis. Au fait, je me demandais s'il y a d'autres personnes qui ont été aussi méchantes avec toi? Comment tu as fait pour supporter le regard des autres?

-En fait, avec la mentalité d'aujourd'hui, les gens ont été beaucoup plus compréhensifs. J'ai entendu certaines personnes me faire des blagues à ce sujet, mais je n'y porte pas attention. Même mes parents l'ont très bien pris. J'admets que quand je leur ai appris, Sieg était présent, donc ils ne pouvaient pas vraiment mal réagir. Ma mère m'en a reparlé par la suite et elle l'accepte. Je pense qu'en étant à l'aise avec moi-même, les gens n'arriveraient pas à se moquer de moi.

-Eh bien. J'étais certain que ça aurait été plus difficile pour toi.

Un faible silence s'installe, comme si Erwin regrette d'avoir mis le sujet sur table. Moi, je suis très à l'aise avec moi-même et ce sujet ne m'embarrasse en rien. Le blond parvient à changer le sujet, puis nous commençons à admirer les étoiles. Ça me rappelle agréablement cette nuit où nous avons discuté pour la première fois, mais en presque mieux.

Je tourne doucement la tête vers lui pour mieux le regarder. Erwin a le bras derrière sa tête pour être plus confortable et il sourit. J'aimerais tellement lui dire ce que je ressens pour lui, l'embrasser... Peut-être est-ce le bon moment? L'endroit est romantique, nous sommes bien.

Quand l'entraineur sent mon regard posé sur lui, il se retourne à son tour. Nos visages sont très près, mais il ne s'éloigne pas, ce qui fait accélérer les battements de mon cœur.

-Pourquoi tu me regardes de cette façon? Sourit-il, j'ai quelque chose sur le visage?

-Non, c'est simplement que j'aime te regarder.

Il lève un sourcil, ne semblant pas comprendre l'étendue de mon aveu. Doucement, je me glisse vers lui pour me retrouver encore plus près. Ses yeux bleus m'hypnotisent.

-Je t'aime Erwin Smith, soufflai-je.

Sans lui laisser le temps de répondre, je me penche pour poser mes lèvres sur les siennes. Je rêve de cet instant depuis si longtemps que je crains de me réveiller. Sa bouche est chaude, me donnant d'agréables frissons dans tout le corps. Affectueusement, ma main se glisse sur sa joue douce.

Alors que je profite de ce succulent baiser, deux mains puissantes me repoussent. Avant même que je réalise ce qui se passe, je me retrouve assis sur le sol, les fesses douloureuses. Je grimace sous le choc, puis je lève la tête vers Erwin pour comprendre ce qui ne va pas. Le blond est désormais debout, le visage à la fois paniqué et dégouté.

-Comment as-tu pu faire ça! Crache-t-il, tu me répugnes d'avoir pu croire que moi, je pouvais être comme toi.

-Mais, j'ai cru... il y avait des signes.

-Tu as vraiment tout gâché, Mike. Tu ne pouvais pas te contenter de mon amitié?

Je ne comprends rien. Pourquoi est-il triste? Il a répondu à mon baiser une bonne trentaine de secondes avant de décider de me jeter au sol. Sans rien ajouter, Erwin monte dans sa voiture et la met en marche. Je dois me pousser rapidement quand il se recule. Attends, il ne va pas partir sans moi? Je me lève en panique.

-Erwin! Je ne sais pas où je suis!

Bien sûr, il ne m'écoute pas et il part en faisant grincer ses pneus pour montrer sa colère. Je tente de courir après le véhicule, histoire de ne pas me retrouver seul dans une forêt inconnue, mais il ne s'arrête pas et je finis par le perdre de vue.

C'est quoi son problème ?!

Je regarde mon téléphone dans l'espoir d'avoir assez de réseaux pour appeler mon beau père, mais il n'y a aucun signal. Génial! Tout se passait merveilleusement bien avant que je l'embrasse. Pourquoi ai-je fait ça? Je passe avec inquiétude ma main dans mes cheveux. Je sens que je vais devoir marcher...

Je marche depuis une trentaine de minutes avant d'arriver devant une station-service. Une antiquité appelée « cabine téléphonique » se trouve devant et je cours dans la petite cabine. Je cherche de la monnaie, puis je compose le numéro de la maison. Ça sonne...

-Allô? Fait ma mère.

-Maman! C'est Mike... je ne sais pas où je suis et j'ai besoin que Richard vienne me chercher.

-Il est déjà parti depuis une bonne demi-heure. Je n'ai pas compris ce qui se passe. Un jeune homme nous a appelés pour nous dire de venir te chercher là-bas. As-tu eu des problèmes?

Au moins, Erwin a eu la gentillesse de m'appeler un transport. Je rassure rapidement ma mère avant d'aller m'assoir au bord de la route pour attendre mon beau père. Il n'y a presque aucune circulation, ce qui me donne l'occasion de réfléchir à ma situation, de comprendre où j'ai merdé. Ces temps-ci nous étions pourtant vraiment proches...

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