~19~ Visite sur la ferme

Ce chapitre était censé sortir plus tôt, mais j'ai pas eu le temps d'écrire avant. J'espère qu'il vous plairas! ^^

-Marco.... Cesse de pleurer comme ça! Je ne meurs pas, d'accord? Je fais juste partir vers un autre pays. On pourra se parler par téléphone, par messages et par FaceTime. Hum... Ne fais pas cette tête où je vais aussi pleurer!

Thomas pose ses mains devant mes yeux afin de les cacher, l'empêchant ainsi de voir les larmes qui dévalent sur mes joues. Je me sens idiot de pleurer comme une fontaine, mais c'est plus fort que moi. Aujourd'hui, mon ami part vers les États-Unis. Il va se créer une nouvelle vie, un nouveau cercle de connaissances. Même s'il dit que nous resterons en contact, d'ici deux mois il nous aura oubliés et les messages commenceront à se distancer. Reiner aussi passera aux oubliettes. Lorsqu'ils se reverront dans quelques années, la chimie qui opérait entre eux sera envolée, laissant place à des discussions banales accompagnées par des malaises.

-Désolé, soufflai-je, je sais que je ne devrais pas pleurer.

-Ce n'est rien, sourit Thomas, au contraire, ça me touche. Sérieusement Marco, tu es un mec en or. Si un jour quelqu'un ose te faire mal, appelle-moi et je saute dans le premier avion pour venir lui botter le cul.

Le blond éloigne sa main de mes yeux pour m'étreindre affectueusement. Notre relation n'a pas très bien commencé lorsque je suis rentrée dans l'équipe, mais aujourd'hui il est un de mes meilleurs amis. Je le serre avec force contre mon corps alors que Reiner mordille sa lèvre inférieure. Son visage est décomposé, dénué de joie. Bien qu'il se retienne pour ne pas pleurer, la douleur est lisible dans ses yeux couleur ciel. Son cœur doit être en miette. Thomas a peut-être rejeté ses sentiments, mais ils restent aussi complices que des frères.

Thomas me lâche pour aller dans les bras de Reiner. Ce dernier est d'abord surpris, mais il répond au câlin. Dès qu'il est contre son ami, une larme coule sur la joue de l'amoureux et ses mains s'accrochent à son chandail, comme pour le supplier de ne pas l'abandonner. C'est si difficile de dire au revoir à un ami.

Une femme annonce dans le haut-parleur que le vol pour New York va bientôt s'envoler, donc nous devons à contrecœur laisser partir le futur universitaire.

Le garçon se force à sourire pour ne pas montrer sa propre peine. Il nous salue une dernière fois d'un signe de main, puis il part vers l'avion qui l'attend. Ça y est, il est parti. L'équipe sera vide sans sa grande gueule.

***

Maintenant que les cours sont terminés, je passe tout mon temps libre dans la boutique de mangas pour aider au travail. Ça me fait beaucoup d'argent de poche et ma présence permet aux propriétaires de se reposer un peu. La tristesse est encore lisible sur le visage des parents de Floch. Même s'ils tentent de le cacher, leur motivation n'est plus la même qu'autrefois et chaque moment leur parait pénible. Le roux était le cœur de cet endroit, donc son absence crée un vide énorme. Madame Forster fond parfois en larmes devant des mangas que son fils appréciait, rapidement calmée par son mari qui doit rester fort.

-Tu vas voir, ma grand-mère va t'adorer, affirme fièrement Jean, ça va te faire du bien de prendre quelques jours de congés. Je vois bien que ta tristesse est revenue... Tu devrais peut-être changer de travail?

-Hors de question que j'abandonne la famille de Floch, répliquai-je, ils ont besoin de moi. Si je pars, j'ai peur qu'ils n'aient plus la motivation de continuer et qu'ils mettent la clé dans la porte.

-Tu te mets trop de pressions sur les épaules...

Assis à l'arrière de la voiture familiale de Jean, ce dernier est près de moi pour le trajet vers la ferme à ses grands-parents où nous allons passer quelques jours. Mon meilleur ami y va chaque année, mais cette fois il n'avait pas envie de s'y retrouver seul. Mon patron est très gentil de m'accorder un congé pour des vacances bien méritées. L'air pur de la campagne ne peut que m'être bénéfique et m'aider à penser à autre chose qu'à l'amour que j'ai perdu.

Par la fenêtre, j'admire les champs à perte de vue. Loin de la ville, tout est beaucoup moins bruyant. J'aperçois des vaches paitre, des granges et même des tracteurs qui tirent des chars remplis de foins. Nous ne croisons presque plus de voiture à l'exception de quelques pick-up. Depuis quand n'ai-je pas mis les pieds en campagne? Ce monde qui s'étend sous mes yeux est fascinant.

Le père de Jean fait tourner la voiture dans une immense cour au bout de laquelle se trouve une petite maison blanche, dont les volets verts paraissent anciens, usés par le temps. Une grande étable lui sert de voisine et dès que notre véhicule s'y arrête, je parviens à entendre le meuglement des vaches à l'intérieur. Quand j'étais petit, j'ai déjà visité une fermette avec l'école, mais ça remonte à longtemps.

-Nous y sommes, s'exclame fièrement monsieur Kirstein, j'espère que la vie de ferme va te plaire, Marco. Je me souviens que quand Jean était petit, il adorait venir ici. Il voulait donner des noms à toutes les vaches. C'était adorable.

-Papa, grogne Jean.

Mon ami quitte la voiture, puis je le suis timidement. L'odeur du fumier fraichement étendu s'incruste dans mon nez, me faisant grimacer de dégout. J'imagine que je vais m'y habituer avec le temps, car Jean ne parait aucunement choqué par cette puanteur. J'aide la famille à sortir les valises, puis nous nous dirigeons vers le balcon de la maison. Des chats partent en courant à notre venue, créant un sourire d'admiration sur mon visage. J'adore les animaux.

C'est une vieille femme qui vient ouvrir la porte. Petite et replète, ses cheveux gris sont attachés en chignon sur le sommet de sa tête. Malgré son âge avancé, elle semble en bonne santé et son regard s'illumine en voyant ses visiteurs. Ça doit être difficile de ne pas souvent fréquenter ses enfants ainsi que leur descendance.

La grand-mère jette d'abord son dévolu sur son fils avant de porter son attention vers Jean. Elle serre le garçon contre son corps avant de poser avec curiosité son regard sur moi.

-C'est l'ami dont tu m'avais parlé? S'enquiert la dame, ça me fait plaisir de te rencontrer, jeune homme.

-Tout le plaisir est pour moi, madame. Merci de m'accueillir.

-Tu es très poli, mais n'hésite pas à me tutoyer. Marco, c'est ça?

La femme me fait poliment la bise, attisant ma gêne. Je n'aime pas m'imposer quelque part, mais au moins, elle parait très gentille.

Nous pénétrons dans la maison qui est propre, même si la décoration parait dater d'une autre époque avec ses murs vert pastel et son plancher couvert de tapis. Tous les meubles en bois sont remplis de bibelots divers ou de poteries faites à la main. Un gros matou blanc aux poils moutonneux vient se frotter contre mes jambes en ronronnant, m'encourageant à le caresser. C'est dommage que mon appartement n'accepte pas les animaux, car j'aurais adoré en adopter un.

Jean me guide vers le second étage, habitué à cet endroit. L'escalier est très étroit, ce qui rend la montée de ma valise difficile. Au sommet se trouve un simple corridor entouré de portes derrière lesquelles doivent se trouver des chambres et mon ami entre dans la première. La pièce est simplette, mais chaleureuse. Les murs peints à l'éponge sont atrocement démodés, tout comme le plafond en voute. Heureusement, ici il y a moins de décorations qu'au rez-de-chaussée.

-C'est ici qu'on va dormir, affirme Jean, je sais que c'est laid, mais ma grand-mère refuse de repeindre. Elle dit qu'un jour ça redeviendra à la mode... Bref, tu vois le genre?

-Ne t'en fais pas, je ne suis pas ici pour la beauté de l'endroit. Ce n'est pas mon genre, mais j'aime bien voir une maison différente. C'est original.

-Tu trouves qu'une collection de porcelaine en forme de chat, c'est original? C'est toi qui vois. Bon, direction la visite!

Avec un large sourire, le brun me fait signe de le suivre. Il cri rapidement à sa famille que nous sortons, puis nous quittons la maison. Déjà, l'odeur du fumier semble moins imposante. Est-ce que je vais absorber cette puanteur? En revenant chez moi, il faudra que je lave tous mes vêtements avec beaucoup de détergent.

-On va aller dans la ferme plus tard, affirme Jean, car il faudra se mettre de vieux vêtements pour ne pas empester par la suite. Tu vas apprendre à faire le train! Il y a un employé, mais il n'aime pas les visiteurs fainéants. Ma grand-mère non plus, d'ailleurs. J'avais neuf ans et elle me faisait déjà conduire le tracteur.

-Neuf ans ?! Ce n'est pas trop jeune?

-Nope, pas pour les agriculteurs. Ici, c'est totalement un autre monde.

Même à mon âge, m'imaginer conduire un tracteur me parait une mission impossible. Ces engins sont énormes comparés à ma petite voiture. Ce n'est pas rien!

-Le village est à quinze minutes de marche, explique mon ami, à vélo, c'est plus rapide. Demain, on ira se chercher une glace, si tu veux? Elles sont délicieuses.

-Je ne dis jamais non à une glace.

***

Mon pantalon troué est un peu trop grand, tout comme le large t-shirt rouge que m'a prêté la grand-mère de Jean. Afin de protéger mes cheveux de l'odeur pestilentielle du purin, une tuque hideuse trône sur ma tête alors que je pousse une brouette dans l'allée à l'avant des vaches. C'est lourd et épuisant, mais sous le regard intimidant de l'homme engagé qui semble détester les gens inexpérimentés, je fais mon possible pour donner la moulée d'un geste répétitif.

Il n'y a pas beaucoup de bovins dans la ferme, seulement une cinquantaine de vaches à lait. Quelques génisses se trouvent dans un enclos à l'extérieur, prêtes à procréer avec l'un des quatre bœufs qui servent de père pour les tous les veaux. Même si ces animaux sont imposants à première vue, ils semblent gentils et certains tentent de me lécher lorsque je passe devant eux.

-Hey, la bleusaille, donne un peu plus de moulée, ordonne l'employé, essaie de mieux la centrer pas qu'il en tombe sous le bol d'eau et surtout, remplis bien le pot. Tu veux qu'elles aient des portions inégales ou quoi? Franchement, mets un peu plus de cœur à l'ouvrage... Rah, les jeunes n'aiment plus se salir les mains.

Je grimace au commentaire, baissant les yeux de honte. Ne voit-il pas que je n'ai pas l'habitude de faire tant de sport? Bien que je fasse partie d'une équipe de baseball, pousser de lourdes charges sur de longues distances n'est pas de tout repos. L'homme engagé ne parait pourtant pas beaucoup plus vieux que moi. Dans la vingtaine, j'ai été impressionné par sa beauté au premier regard. Ses cheveux blonds bouclés, ses yeux perçants et son corps bien bâtis rappellent agréablement le physique d'un prince. Dommage que son caractère vienne tout gâcher.

-Niccolo, soit un peu compatissant, recommande Jean, c'est sa première fois sur une ferme. Marco est juste un invité, donc il est déjà gentil d'aider.

Le dénommé Niccolo fait claquer avec agacement sa langue contre son palais.

-Mouais, grogne-t-il, s'il a envie de flemmarder sur une balle de foins, c'est son choix. Je ne le force à rien.

Sur cette phrase remplie de mépris, l'homme engagé retourne à sa besogne, me laissant avec un gout amer. Ça fait mal d'être ainsi traité, surtout que je fais de mon mieux pour me montrer utile. Mon cœur s'alourdit douloureusement tandis que sans un mot, je continue ma distribution de moulée. Jean remarque ma douleur, car sa main se pose avec réconfort sur mon dos couvert de sueur.

-Ne t'en fais pas pour lui, déclare-t-il, il a toujours été comme ça. Niccolo aime que tout soit parfait et il a du mal avec les étrangers, surtout avec les gens de la ville.

-Peut-être, mais la façon dont il me parle est douloureuse. Je fais vraiment de mon mieux.

-Je le sais, ne t'en fais pas! Il est particulier, mais ma grand-mère le considère comme son petit-fils. Avec elle, il est au petit oignon et il prépare tous les repas. Ça ne parait pas à première vue, mais c'est un cordon bleu. Tu auras surement l'occasion de gouter à sa cuisine.

Mon meilleur ami m'aide à terminer ma tâche, me donnant ainsi l'occasion de me reposer un instant. Au loin, Niccolo est très productif. Il fait son labeur avec précision et rapidité, clairement habitué à travailler dans cet environnement. Cette ferme est son territoire, ça se sent.

-Je peux t'avouer un secret, chuchote Jean, s'il est grognon, c'est peut-être parce que tous ses potes sont en tôle. Quand il était plus jeune, il faisait partie d'un gang. Yep, un vrai gang! Ils s'appelaient les Mahrs, je crois... bref, un truc du genre! Il parait qu'ils ont fait un truc horrible et Niccolo s'en est sortis parce qu'il était mineur. En sortant de la maison de correction, ma grand-mère l'a embauché. Elle est gentille, car dans le coin, personne ne voulait de lui. C'est un petit village, donc ça se répète rapidement. Tu vois?

-Un gang dans un village? M'étonnais-je, ça n'a pas de sens!

-Je sais. Ils devaient se penser cool et rebelles. Je ne comprendrai jamais le délire de certaines personnes.

Avec surprise, j'observe de loin l'homme engagé. Comment un si beau garçon a pu tomber si bas?

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top