~17~ Brave comme un héros
Sous la table, je tremble comme une feuille en tenant fermement Jean contre moi. Je le serre avec force, incapable de me calmer à la suite de cette bagarre. Tout s'est enchainé si rapidement. Le coup de poing, le combat, les policiers... Je n'ai rien fait à l'exception de protéger mon meilleur ami! Vais-je finir en prison? Je suis dans un bar avec une fausse carte d'identité, encore mineur. Toute cette illégalité me donne mal au cœur. Je voudrais fuir, mais c'est impossible.
-Marco, qu'est-ce qui se passe? Souffle Jean dont le sang de son nez a cessé de couler.
-La police est là, répondis-je en chuchotant.
-La police? Merde...
Jean fronce les sourcils, pas du tout rassuré par mon affirmation. S'il savait à quel point je suis terrifié. Ma peur de l'interdit existe pour une bonne raison et c'est justement afin de me protéger contre des situations comme celles-ci. Pourquoi n'ai-je pas écouté la voix dans ma tête qui me conseillait de rentrer chez moi plutôt que de mettre les pieds dans cet endroit? Je n'avais pas envie d'être ici. Je n'ai frappé personne.
Une policière aux cheveux platine, qui semble être la chef des deux hommes qui l'accompagnent, regroupe mes amis dans un coin du bar afin de voir leur carte d'identité et de prendre une décision sur leur sort. Les joueurs sont obéissants, probablement inquiets à l'idée de finir derrière les barreaux. Certains sont salement amochés, comme Eren qui parait s'être fait frapper par un grizzli atteint de la rage. Ses deux yeux sont atrocement enflés, lui donnant l'air d'un poisson bêta.
-Je crois qu'il en reste deux ici, affirme un policier.
Je sursaute lorsqu'il se penche devant la table où nous sommes cachés afin de sévèrement regarder Jean et moi. Mes yeux se remplissent d'eau. Je veux rentrer à la maison. Pour tenter de me rassurer, mon meilleur ami serre fort ma main dans la sienne.
-Allez vous mettre avec les autres, les jeunes, ordonne l'officier.
Sans envie, je quitte le confort de ma cachette pour aller rejoindre le reste de mon équipe, les doigts de Jean toujours fermement enlacés avec les miens. Je souhaite que tout s'arrête. Je m'assois près de Thomas qui pose une main rassurante sur mon épaule en voyant que je vais mal. S'il veut aller étudier aux États-Unis, il ne peut pas avoir de dossier criminel, surtout pas en lien avec la violence. Je refuse que certains de mes amis gâchent leur vie pour une simple bagarre dans un bar!
La policière commence à énumérer les accusations possibles contre nous. Trouble de l'ordre public, voie de fait... Pourquoi est-ce que nous devons payer pour tout alors que le groupe adverse a réussi à fuir? C'est eux qui ont commencé.
-C'est injuste, soufflai-je sans le réaliser.
La femme fait une pause, surprise d'entendre quelqu'un l'interrompre. En réalisant que j'ai parlé à voix haute, je blanchis. Tous les regards se braquent sur moi, faisant de ma personne le centre de l'attention.
-Je vous demande pardon? S'étonne la femme.
Elle est très intimidante avec ses grands yeux couleur ciel et ses lèvres volumineuses. Je déglutis, craignant d'avoir empiré mon cas en lâchant ces mots. Cependant, l'officière attend que j'argumente avec patience. C'est peut-être le moment de venir en aide à mes camarades? Malgré ma peur, je prends une grande inspiration et je me lance :
-C'est injuste, parce que ce n'est pas mes amis qui ont commencé. Ils ne faisaient rien et Jean discutait simplement avec une fille lorsqu'un garçon l'a frappé. C'était de la violence gratuite et je crois que c'est ce qui a engendré la suite des évènements. Cet homme était accompagné par ses amis, donc ceux de Jean ont voulu le défendre. Vous comprenez, avec de l'alcool dans le corps, c'est plus facile de se laisser emporter par ses émotions. Même si je n'approuve en rien la violence, je ne crois pas que ce soit juste d'arrêter des jeunes qui cherchaient seulement à défendre leur ami alors que ceux qui ont tout commencé ont réussi à fuir. Il y a eu voie de fait des deux côtés.
La policière hausse un sourcil, intéressée par mon point de vue. C'est si stressant de faire part de son opinion devant les forces de l'ordre. Jean serre fort ma main pour m'encourager, ce qui me donne davantage de courage.
-Même si ce que tu dis est vrai, on doit faire notre travail, répond calmement la femme, cependant, le propriétaire de ce bar refuse de porter plainte et comme les gens contre qui vous vous êtes battus ont fui, ils ne porteront pas plainte non plus. Vous êtes chanceux, les jeunes. La prochaine fois, évitez les problèmes. D'accord? Sur ce, retournez chez vous et je vous souhaite une bonne soirée. Soyez prudent.
La femme sourit gentiment, ce qui me surprend. Il n'y a aucune conséquence? Mes amis chuchotent, étonnés, puis nous remercions tous les policiers avant de quitter le bar. Je n'arrive pas à croire qu'on s'en soit tiré si facilement... Toute la peur dans mon corps commence à retomber, laissant place au soulagement.
-MARCO, NOTRE HÉROS!
Je sursaute lorsque Thomas se jette sur mon dos pour s'y accrocher, me faisant presque tomber vers l'avant. Il est beaucoup plus lourd qu'il en a l'air! Le garçon pince ma joue avec un large sourire, ce qui me fait rougir. Il empeste l'alcool à plein nez.
-Je ne suis pas un héros, répliquai-je, elle avait déjà choisi de nous laisser partir avant que j'ouvre la bouche.
-Je suis sûr que ton petit discours l'a convaincu, affirme Thomas, ou alors, c'est ton joli sourire d'ange pur qui l'a charmé. Ne sois pas si humble. À partir de maintenant, tu seras Marco le héros. Le héros, le héros, le héros.
Le garçon commence à chanter : « le héros », rapidement imité par Eren, Farlan et Auruo. C'est terriblement gênant. Mes joues s'embrasent et Reiner me vient en aide en décrochant Thomas de mon dos. Parfois, le dragueur ressemble à un gros bébé de qui il faut s'occuper. Il se tait une fois sur le sol.
-Tu le gênes, soupire Reiner, on a été simplement chanceux que la policière soit gentille. Dans d'autres circonstances, on aurait pu finir en garde à vue au poste de police. Je suis heureux que ça ne soit pas arrivé.
-C'est eux qui ont commencés, se mêle Eren, on aurait été des faibles de laisser notre ami se faire frapper sans raison. Une équipe, ça se soutient! Tu n'as pas hésité à sauter dans le tas aussi, je te signale.
-Mon but, c'était juste de retenir Thomas avant qu'il se mette dans la merde.
-Je te croyais plus courageux, Reiner.
Le grand blond pince les lèvres avec agacement alors que Eren part vers sa voiture en compagnie de Armin qui est sobre. Le plus petit n'a pas dit un mot depuis la bataille, probablement aussi effrayé que je l'ai été. Lui aussi, c'est un pacifiste. Il a dû s'inquiéter pour son meilleur ami lorsque les policiers sont rentrés dans la bâtisse.
-On rentre aussi, grogne Reiner, j'ai mal partout. Bonne nuit à tous.
Il pousse son meilleur ami vers sa voiture avec mauvaise humeur. Ce dernier nous salue de la main avec un large sourire, peinant à tenir sur ses pieds à cause de la grande quantité d'alcool dans son corps. C'est la première fois que je vois Reiner aussi fâché. Avoir affaire à la police doit cruellement lui rappeler ce que Thomas et lui ont fait subir à Mike lors de l'accident qu'ils ont causé. Il doit culpabiliser, et avec raison.
Avec Jean, nous retournons aussi à mon véhicule. C'est seulement une fois devant la portière que je réalise que nous nous tenons encore la main. Légèrement gêné, je m'empresse de rompre le contact avant de monter derrière le volant. Mon cœur bat encore très vite, mais je suis assez calme pour conduire. Le brun s'installe près de moi dans une grimace de douleur. Il attache sa ceinture avant de tourner son visage meurtri vers le mien. Voir tout ce sang séché autour de son nez m'inquiète.
-Marco, souffle-t-il, est-ce qu'on peut aller à l'hôpital?
-L'hôpital?
Je tourne avec inquiétude la tête vers Jean. Depuis le départ de Floch, ce simple mot est une horreur pour mes oreilles. L'immense bâtisse moderne me terrifie, tout comme l'odeur de désinfectant trop prononcé qui trône dans les couloirs. Ça sent la maladie, la mort. J'y suis allé trop souvent avec mon amoureux et chaque fois, c'était pour recevoir des nouvelles pires que les précédentes, pour voir la détérioration de son cœur.
-Je crois que j'ai le nez cassé, avoue Jean, désolé.
-C-cassé? D'accord... On va y aller si tu crois que c'est grave.
Mordillant ma lèvre inférieure sous l'angoisse, je mets en marche ma voiture avant de me diriger vers ce lieu maudit. Savoir que Jean souffre est terrible. J'aurais volontiers pris le coup à sa place pour le protéger. Je ne supporterais pas de le perdre lui aussi.
Cette soirée est une horreur, mais au moins, mon meilleur ami est à mes côtés.
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