~14~ Notre lieu secret

-Marco! Est-ce vraiment toi ou es-tu un imposteur?

Thomas me saute dans les bras dès que j'entre dans le chalet avant de me fixer avec interrogation. Un petit sourire amusé se dessine sur mes lèvres, heureux de voir que ma visite fait plaisir. Ils m'ont manqué... Les autres joueurs approchent pour me voir, laissant voir la surprise sur certains visages.

-C'est bien moi, ne t'en fais pas, répondis-je.

-Ça me rassure! sourit Thomas, je commençais à croire que tu ne reviendrais jamais... Reiner et moi avions mis au point pour te kidnapper pendant ton sommeil. T'inquiètes, on aurait été de bons ravisseurs très courtois.

Le blond me lâche pour donner une tape amicale dans mon dos alors que Armin s'empresse de me bombarder de questions. Même s'il n'est pas mon meilleur ami, ce gentil garçon a fait l'effort de m'appeler chaque jour pour s'informer de mon état. C'est quelqu'un d'exceptionnel et je lui en suis reconnaissant. Si un jour il a aussi besoin de mon aide, il me fera plaisir de lui rendre la pareille.

L'ambiance au chalet n'a pas changé depuis mon départ. La guerre entre Mike et Thomas fait toujours rage, donc le plus grand n'est pas présent, tout comme Livai qui est resté avec lui. J'avais pourtant espoir qu'ils aient tourné la page depuis le temps... Même s'ils ont de bonnes raisons de se détester, rien n'est plus important que la paix. Leur dispute fait mal à tout le monde et ça brise les liens solides que nous avions créés.

Jean et moi passons la journée au chalet avec le reste de l'équipe présente. Les garçons jouent comme auparavant à un jeu vidéo nommé « Super Smash Bros » et je m'amuse à les regarder tout en discutant avec quiconque m'adresse la parole. Sortir, ça fait du bien. J'arrive pendant un court instant à ne pas penser à Floch et à son départ prématuré vers la vie éternelle. C'est dommage qu'il n'ait pas eu l'occasion de mieux connaitre mes amis.

Reiner commande des pizzas pour tout le monde et il est tard lorsque les gens commencent tranquillement à rentrer chez eux. Il est surement l'heure pour moi aussi, cependant, je me souviens que Jean m'a parlé d'un endroit où il souhaite m'amener. Peut-être a-t-il oublié? Assis sur le canapé jaune à motifs fleuris, mon meilleur ami n'a toujours pas lâché la manette de jeux vidéo. Sa langue est sortie alors qu'il se concentre sur un rude combat contre Eren. Les deux garçons ont tendance à tout prendre trop au sérieux lorsqu'ils sont rivaux.

-Jean? m'enquis-je, tu ne voulais pas m'amener quelque part?

Le brun sort son téléphone pour regarder l'heure, puis il se lève en s'étirant. Son personnage à l'écran se fait éjecter par Eren qui lève les bras d'un air victorieux, fier de sa réussite. Jean aurait pu attendre d'avoir fini sa partie avant de tout arrêter. Causer sa perte n'était pas mon but.

-JE SUIS LE MEILLEUR JOUEUR, hurle fièrement Eren.

Jean l'ignore et il se contente de me sourire. Ça ne lui ressemble pas de ne pas insulter Eren alors que ce dernier prend la grosse tête. 

-Merci de me le rappeler, me remercie Jean, c'est le temps d'y aller.

-Tu ne veux pas me dire où on va?

-Nope, c'est une surprise. Ne t'en fais pas, tu vas apprécier.

Nous saluons nos amis restants, puis nous retournons dans ma voiture. Cette fois cependant, je laisse le volant à Jean puisqu'il refuse de m'indiquer le trajet. Il attise ma curiosité. J'observe à travers la fenêtre le paysage qui défile, cherchant à prédire la destination de notre petite escapade. J'ai beau chercher dans ma tête, aucune idée ne me vient, même quand mon ami stationne la voiture près d'une forêt. Les arbres font peur dans l'obscurité.

-Terminus, s'exclame joyeusement Jean, c'est ici.

-Hum... Je ne veux pas te décevoir, mais je ne vois qu'une forêt et je ne suis pas très motivé par les randonnées nocturnes.

-Notre destination est juste l'autre côté de ce boisé! On a deux minutes de marche à faire seulement. Serais-tu une mauviette, Marco Bodt?

Avec un sourire moqueur, Jean sort de la voiture. S'il dit qu'il sait où nous allons, il n'y a aucune raison pour que je refuse de l'accompagner. Dans une grande inspiration, je quitte le confort du véhicule.

-Personne ne me traite de mauviette!

Jean rigole face à cette réplique culte, puis il active la lumière de son téléphone avant de pénétrer entre les hauts arbres. C'est sans grande motivation que je lui enjambe le pas, priant pour qu'aucun animal sauvage ne tente de nous attaquer. S'il y avait un ours? Chaque craquement me fait frissonner d'angoisse, m'incitant à me coller davantage contre mon meilleur ami pour me protéger de potentiels dangers. La lune éclaire les branches qui reflètent sur le sol tel des griffes acérées cherchant à m'attraper. Je n'aime pas ça.

Les végétaux ne tardent pas à nous laisser déboucher sur du sable. C'est avec surprise que j'observe l'immense lac qui trône un peu plus loin, reconnaissant peu à peu l'endroit. Nous nous trouvons sur une plage artificielle où il faut habituellement payer pour venir se baigner. Comme il n'y a pas d'océan près de la ville, c'est l'endroit le plus près pour gouter au plaisir vacancier sans faire des heures de route ou prendre l'avion.

-Jean, soufflai-je, je crois qu'on n'a pas le droit d'être là de nuit... Il faut payer et il y a un propriétaire.

-Et alors? Je croyais que tu commençais à chasser ta peur de l'illégalité, non?

Amusé, Jean commence à retirer ses vêtements qu'il pose sur un gros rocher à l'entrée de la forêt. Désormais simplement vêtu d'un caleçon gris, il court se jeter dans l'eau sans m'attendre. Que dois-je faire? Je mordille ma lèvre avec embarras, terrifié à l'idée que le propriétaire arrive avec des policiers. Pouvons-nous finir en prison pour nous être baignés sur une plage privée?

-Marco, détends-toi et viens dans l'eau! Cri Jean depuis le lac, elle est bonne!

-Ne cri pas ou tu vas attirer l'attention! Je... J'arrive.

Mon cœur bat atrocement vite alors que je retire mes vêtements. Mes yeux ne font que vagabonder vers la clôture verrouillée où les gens arrivent habituellement, craignant de voir les lumières d'une voiture. Ce stress est atroce. Je prends de grandes respirations, puis une fois en caleçon je m'empresse de rejoindre mon meilleur dans l'eau. C'est froid!

-Tu vois que ce n'était pas si difficile, rigole Jean.

Le garçon envoie un peu d'eau sur mon torse pour me taquiner, ce qui me fait frissonner. Habituellement, je déteste être à moitié nu devant les gens. Même à la piscine de l'école, c'est une humiliation pour moi de me retrouver en maillot de bain. Je hais mon corps couvert de tache de rousseur et ce petit ventre qui manque d'abdominaux. Floch est la première personne au monde à m'avoir fait sentir beau.

Parfois, il s'amusait à embrasser chaque petite tache en roucoulant des compliments. Dans ces moments, j'arrivais à me voir à travers ses yeux et me sentir désirable. Mon roux savait comment me montrer son amour.

Malgré la température désagréable, je m'enfonce sous l'eau pour nager, m'habituant rapidement au froid. Jean et moi nous nous amusons tels des gamins pendants plus d'une heure avant de sortir. Comme nous n'avons pas de serviette, nous nous installons sur le sable pour nous laisser sécher. Heureusement que le mois de mai débute avec des nuits chaudes. Les étoiles sont magnifiques ce soir... J'aime penser que là-haut, quelque part, mon Floch m'observe et prend soin de moi.

-Ça me manquait de passer du temps avec toi, avoue Jean, l'école était terrible... Je me sentais atrocement seul en classe ou à la table. 

-Je suis désolé. Je n'ai jamais voulu que tu souffres.

-Je sais... Rassure-moi, tu vas revenir en classe pour les examens finaux? C'est terrible sans toi.

Le garçon me regarde avec inquiétude, craignant que je refuse de retourner en classe. C'est touchant de voir que malgré toutes ces épreuves, il reste mon meilleur ami et il tient à moi plus qu'à quiconque. Je souris sincèrement.

-Je reviens, avouai-je.

Jean soupire de soulagement, reportant son attention sur le magnifique ciel étoilé.

-Et on reviendra ici souvent, souffle-t-il, ce sera notre coin secret.

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