4 - Tears

        J'arrivais dans le hall, à peine essoufflé mais le cœur comprimé. Je bousculai quelques personnes et ne leur lançai qu'un bref regard en guise d'excuse. Lorsque j'aperçus mon orthophoniste - une dame âgée avec un sourire énervant, en compagnie d'un quelconque coordinateur, je finis par ralentir ma cadence. Je repris peu à peu mon souffle alors que j'entendis soudainement la porte d'escalier claquer, loin derrière moi. Par curiosité et surtout par provocation, je me retournai pour faire un geste de la main à un Jeff qui, rouge de colère ou d'épuisement, se lançait déjà dans ma direction. Je rejoignis la vieille Tatiana ; elle me salua avec une gaieté qui me semblait déplacée. Depuis plusieurs mois qu'elle me suivait, jamais elle n'avait arrêté de sourire. Même face à moi, à mon silence, au mur infranchissable que je représentais. Et je n'aimais pas ça, je n'aimais pas car je ne comprenais pas. Comment était-ce possible de garder une bonne humeur face aux épreuves de la vie ?

- Bah alors qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? s'enquit-elle en passant son pouce sur ma joue.

Je tournai la tête pour ne plus avoir à supporter son toucher. Je détestais déjà le fait d'être toujours obligé de la voir, même ici. J'allais aussi continuer de voir ma psychiatre de dehors puisque lors de mon jugement, j'avais été considéré comme « spécial ». Il ne faut pas lui enlever ses repères, ça détruirait tout le progrès qu'on a fait jusque là, avaient-ils dit. Ils étaient les seuls à le voir ce soit-disant progrès car pour moi je restais toujours au même point. Toujours la même rancœur, la même haine, la même douleur qui creusait le fond de ma poitrine. Toujours aucun mot pour le décrire.

- Allez viens avec moi, Leander.

Je commençai à avancer quand la voix du diable nous retint tous les deux :

- Pars pas gamin, corvée de cantine !

Quel con ! Nous étions seulement obligés de faire la vaisselle, nettoyer la salle ou encore préparer les tables pour les repas après s'être mal comporté... Sous les yeux éberlués de Tatiana, je me retournai lentement fermant mes mains en poings sous la colère. Le blond au regard espiègle était toujours teinté d'une couleur rougeâtre qui me rappela le coup que je lui avais justement administré et dont il allait à présent se servir.

- Il ne peut pas ! intervint l'autre coordinateur pourtant resté silencieux jusque là. Sa séance avec l'orthophoniste est obligatoire.

- Il a refusé de m'obéir et vient de me frapper, il doit cesser toute activité, être sanctionné et regagner sa chambre ! C'est la règle n'est-ce pas ? siffla Jeff les dents serrés.

Je vis le coordinateur secouer sa tête, d'un air de désaccord. Il ne devait pas être au centre depuis très longtemps étant donné son jeune âge et son expression un peu perdue mais, au moins, il n'avait pas peur de contredire l'avis de mon bourreau.

- Et puis... honnêtement, un orthophoniste ? Il ne parle même pas, je vois pas ce qu'elle peut faire pour lui.

- Vous ne savez pas en quoi consiste mon métier alors ! allégua Tatiana en posant une main frêle sur mon bras. Mais ça ne vous donne pas pour autant le droit de faire l'impasse sur son entretien avec moi qui est obligatoire comme l'a si bien précisé votre collègue.

Il fit un pas en avant, croisa ses bras sur son torse musclé, et passa une main sur sa barbe de quelques jours. Il souffla finalement avec agacement puis laissa tomber ses bras le long de ses bras en signe d'abandon.

- Ok, il fait sa séance mais après il est consigné au réfectoire pour le nettoyage de sol. A 21h pétante, je veux le voir dans cette foutue cantine, compris ? cria-t-il.

L'intonation de sa voix ne m'effrayait pas mais elle me mettait dans tous mes états. Mon sang chauffait, mes muscles se crispaient et mes doigts tremblaient de fureur. Je ne supportais pas de voir la manière dont il s'emportait pour un rien, enfin surtout la manière dont il détestait ne pas avoir le contrôle sur quelqu'un ou quelque chose. Apparemment, j'étais sa nouvelle proie, son nouvel objet... la nouvelle recrue du Sergent Blondie.

Nous lui tournâmes le dos sans lui donner de réponses puis nous nous dirigeâmes là où nous devrions déjà être depuis dix bonnes minutes.

- Il passe son temps à crier comme ça ? quémanda la dame qui m'avait sauvé la mise.

Je lui adressai un léger mouvement d'épaules ainsi qu'un discret sourire en coin. Grâce à elle, j'échappai tout de même à une demi-heure de plonge en compagnie des autres adolescents rebelles et d'un taré encore plus colérique que nous tous réunis. Elle ouvrit l'une des pièces dans laquelle nous avions cours tous les matins et s'installa devant un ordinateur, tout en tirant une chaise pour moi à ses côtés.

- Tu sais quoi ? Je pense que c'est pour compenser ton silence, c'est tellement plus facile de crier sur une personne qui ne nous répondra pas. Enfin ne répondra pas directement car je sais que tu t'en dis des choses là-dedans.

Elle accompagna ses paroles en martelant son crane de son index. Ma seule réaction fût de lever les yeux au ciel... Même si elle continuait de me parler avec une voix niaise, il y avait quelque chose de changé dans son comportement. Comme si elle avait appris quelque chose de plus et que dorénavant elle me comprenait.

Je pris place à ses côtés tandis qu'elle était occupée sur l'ordinateur. Je m'accoudais à la table et la tête posée contre ma main, j'observai la dame qui se trouvait à mes côtés. N'avait-elle rien de mieux à faire que de faire le trajet jusqu'ici un dimanche soir ? Et de devoir le faire chaque jour de la semaine ? Juste pour trente minutes ? A en juger ses mains démunies de bagues, elle n'était pas mariée ou peut-être laissait-elle ses bijoux de côté lorsqu'elle était avec ses patients... J'étais curieux de savoir si elle n'avait pas quelqu'un, un copain ou un enfant qui l'attendait, plutôt que de combattre mon silence.

- Je me suis rappelée de ce que ta tante m'avait dit, tu connais le langage de signe ! Même si tu ne l'as pas utilisé depuis, tu n'as pas oublié n'est-ce pas ?!

Je baissai les yeux, me détachant totalement de la conversation. Je ne voulais pas utiliser cette langue non plus... Rares avaient été les personnes avec lesquelles j'avais communiqué, soit ma tante et une amie qui avait fait l'effort d'apprendre pour me parler. C'était celle-ci qui sans le savoir m'avait d'ailleurs motivé à continuer d'apprendre de plus en plus de signes pour pouvoir lui dire exactement ce que je pensais sur le moment. Mais maintenant, je n'avais plus aucune nouvelles d'elle après ce que j'avais causé. Cela me donnait une raison supplémentaire pour ne plus communiquer.

- Oh allez Leander, fais des efforts ! Il ne nous reste que dix minutes, insista-t-elle.

Elle fit de grands gestes de la main devant mes yeux alors je me redressai et la fixai d'un œil mauvais. Ses doigts se mirent ensuite à bouger avec aisance ; je sentis une boule grossir dans ma gorge ainsi qu'une chaleur remonter mon corps et me procurer de puissants frissons. « Est-ce que ta famille te manque ? Et tes amis ?» venait-elle de me demander.

- A te voir blanchir, j'en déduis que tu comprends toujours.

Elle venait d'aborder mes deux sujets tabous : d'un côté ma famille qui ne m'appartenait pas totalement puisque j'étais chez mon oncle et ma tante depuis le décès de mes parents. Et de l'autre mes amis qui ne l'étaient plus depuis l'incident. J'avais réussi à trouver un groupe de personnes qui m'acceptait tel que j'étais, qui me soutenait dans mes moments particulièrement difficiles pourtant j'avais tout détruit de moi-même. Même si je détestais avouer mes regrets, je devais admettre qu'avec eux, j'avais appris à laisser ma tendance à la solitude de côté, ils me manquaient pas mal... Et le plus dur était de savoir que jamais plus je ne les retrouverai. Parmi eux, j'avais aussi perdu cette amie particulière - celle avec qui je pratiquais le langage des signes -, cette perle qui m'avait introduit à ses côtés, qui ne m'avait pas lâché malgré les hauts et les bas. Celle qui traversait tout un tas de chose mais qui s'assurait toujours de savoir comment j'allais. Alors que je n'avais jamais vraiment pris la peine de le faire en retour, c'était mon frère qui s'en était chargé en réalité. Moi de mon côté, comment je l'avais remercié ? Avec la seule chose que je semblais faire à la perfection, détruire son monde. Sa haine n'était certainement pas plus grande que ma culpabilité. Je m'en voulais de leur avoir fait ça, je m'en voulais tellement putain !

***

20h58 - d'après l'horloge de la cour, j'entrai dans le réfectoire qui sentait moins mauvais maintenant. Quelques adolescents sortaient des cuisines et se dirigeaient vers moi, étant à présent libre tandis que sept personnes étaient rassemblés autour d'un coordinateur, plus loin. Il y avait des seaux et des balais alors j'imaginais que c'était mon groupe. Nous devions nettoyer le sol, les tables et les chaises de cette salle plutôt ample le plus vite possible pour finir avant l'extinction des lumières à 21h30. J'allais enfin dormir, j'en avais besoin après cette journée interminable. On disait souvent à Burket que notre première journée déterminait le reste de notre séjour mais j'espérais que cette fois cela se révélerait être faux. Rien que d'envisager le fait d'avoir Jeff sur mon dos pendant les prochains mois m'irritait.

- Toi là-bas, t'es pas venu pour visiter ! s'écria une grosse voix.

Tout le petit groupe était retourné vers moi alors je ne traînai pas plus longtemps, les rejoignant à grandes enjambées. Le coordinateur était un grand homme à la peau bronzée, il arborait une expression neutre déjà moins menaçante que celle de Jeff qui n'était heureusement pas là pour le moment. Les autres garçons me regardèrent étrangement, se demandant peut-être ce qui m'avait mené à Burket ou même ce que j'avais pu faire pour être de corvée. Je croisai le regard de tous et finis par tomber dans celui faussement verdâtre du mystérieux mec, venu s'installer à ma table lors du dîner. A présent, il me disait vaguement quelque chose... Mais je n'avais dû le croiser ou lui parler très peu la dernière fois que j'étais venu au camp, autrement je me souviendrais de lui.

- Ok les mecs, au boulot ! Et ne bâclez pas votre boulot sinon vous revenez tous ici demain, à l'aube !

Nous nous avançâmes un par un vers lui au fur et à mesure qu'il donnait à l'un, une éponge et à l'autre un seau et un balai. Avec la chance qui m'accompagnait depuis mon entrée, je tombais bien évidemment sur le boulot le plus chiant : la serpillière ! Le seau rempli d'eau savonneuse était d'une lourdeur démesurée, à se demander s'ils n'avaient pas rajouté des cailloux dedans pour nous rendre la tâche encore plus emmerdante. Le Sergent Blondie était peut-être passé par là !

Néanmoins, je fis comme tout le monde, je pris le matériel que l'on me donna sans me plaindre - je ne le pouvais pas de toute façon, et me dirigeai à l'endroit indiqué. Je m'occupais du fond de la salle, là où je m'étais assis plus tôt... Pas difficile de deviner que c'était en plus l'endroit le plus sale de toute la pièce, surtout vers ma place où traînait la nourriture que certains avaient gaspillé.

A l'instar d'un robot, avec pour seule motivation d'aller me reposer, je m'appliquais pour nettoyer le sol jaune plutôt ancien. Tant concentré que j'avais décidé de passer au-dessus des remarques des deux mecs, à quelques pas de moi. M'insulter d'attardé et d'autiste, ce n'était pas quelque chose que les autres n'avaient pas déjà fait. C'était presque devenu une habitude si bien que ça ne me mettait plus en colère, grâce à mes chers camarades lycéens j'avais appris à encaisser, subir en enfouissant toutes mes mauvaises idées. Enfin c'était ce que je pensais car depuis la nuit où j'avais dérapé, une ridicule phrase, un geste ou encore un regard pouvaient me mettre dans une rage incontrôlée. C'était bien pour cela que j'étais là de toute manière car j'étais devenu « incontrôlable » autant par les autres que par moi-même.

La porte claqua soudainement, nous faisant tous relever la tête. Je vis avec horreur Jeff remplacer le coordinateur présent, c'était une blague ? Il prenait réellement un malin plaisir à venir nous emmerder. Plus tôt, j'avais fini et plus tôt on se barrait d'ici. Je replongeai alors ma balayette dans l'eau devenue dégueulasse et entrepris de nettoyer les derniers mètres qu'il me restait. J'entendis Jeff inspecter le travail des autres, leur faire des remarques de con du genre :

- Il reste une miette là !

On n'était pas venu ici pour faire le ménage derrière ta bouche de porc. De plus, je savais que même si tout était bien fait de mon côté, il trouverait tout de même quelque chose à redire ! Une excuse pour me faire revenir ici le lendemain. A cette pensée, je frottai plus fort espérant rendre le sol davantage brillant qu'il n'était au début.

- Regardez-moi ça, le gamin est une vraie fée du logis ! brailla-t-il avec des ricanements déchirants.

Il y eût un grand claquement près de lui alors qu'il lâchait un « oups » exagéré. Je regardai dans sa direction et l'aperçus, décoré de son stupide sourire, avec mon seau dans les mains. Il venait d'en renverser à l'endroit que je venais tout juste de nettoyer. Mes doigts serrèrent de toute leur force le manche en plastique que j'aurais bien voulu abattre sur sa tête de con.

- C'est dommage, tu vas devoir repasser ici. Et là, ajouta-t-il en balançant de l'eau plus loin.

Je fermai les yeux en même temps que je sentais ma respiration se couper et donc, s'accélérer. Ne pas s'énerver... C'était tout ce qu'il attendait de moi, que je pète les plombs pour qu'il puisse me le reprocher. J'étais bien plus fort que ça. Plus haut que ses provocations puériles.

Pourtant lorsque je l'entendis s'avancer, puis d'autres vagues d'eau détruire mon travail, je balançai le balai à mes côtés avant de me précipiter comme un fou vers lui. Je vis que certains mecs se rapprochèrent aussitôt mais je les ignorai et à peine arrivé devant Jeff, je le bousculai. J'essayai ensuite de retirer ce foutu seau de ses mains, j'avais juste envie d'aller dormir bordel !

- Recule ! m'ordonna-t-il maintes fois. Retourne travailler !

Mais comme je ne reculais toujours pas malgré ses ordres divins, il poussa un cri rauque qui nous détruit à tous les tympans. Puis il tira franchement sur le seau et en un geste sec, me le vida entièrement dessus en continuant de grogner des mots qui ne me parvenaient plus. J'étais bien trop déchaîné par la troisième humiliation qu'il me faisait subir à ce jour. La froideur de l'eau m'avait claqué le visage et contrastait finalement avec mon corps bouillonnant. Je luttais toujours contre mon désir de lui sauter dessus quand il me tourna le dos et longea le réfectoire en avertissant :

- Vous ne sortirez pas de cet endroit tant qu'il n'aura pas tout nettoyé ! Et même si les lumières s'éteignent, je m'en fiche, vous resterez dans le noir ! termina-t-il en sortant de la pièce.

Comme je sentais le regard de tous sur moi, j'essorai aussitôt mon t-shirt, repoussai mes cheveux en arrière et allai chercher la serpillière pour commencer à éponger. Mais quand je me penchai pour attraper le bâton, un coup s'abattit sur mon dos et me fit tomber sur les genoux.

- C'est marrant comme silencieux, tu peux foutre autant la merde ! râla mon agresseur derrière moi.

- Ton premier jour en plus, ajouta un deuxième.

- En fin de compte, je ne trouve pas ça si marrant quand ton comportement retombe sur nous.

L'un d'eux me donna un coup dans la côte ; je tombai carrément allongé sur le sol. J'avais encore assez de force pour me défendre alors c'était maintenant ou jamais... Cependant au moment où j'ouvris les yeux, je ne vis pas uniquement deux personnes autour de moi mais 5. C'était tellement simple de s'attaquer à quelqu'un à plusieurs. N'abandonnant jamais, je me redressai lentement et fis face avec ma gueule de chien mouillé au mec le plus avancé. C'était un garçon à la peau extrêmement pâle, aux cheveux aussi noirs que moi et c'était amusant de constater qu'aux premiers abords il avait l'air sympathique. Mais il venait de me taper au lieu de me laisser nettoyer !

Je fis un petit pas vers lui dans l'espoir de me défendre toutefois n'avançai pas plus loin car je me reçus un coup de poing monumental au coin de l'œil. Des mains s'agrippèrent ensuite à mes bras avec une poigne féroce et me collèrent contre les portes de sortie derrière moi. Une douleur éclata dans mon estomac lorsque l'un tapa dedans avec le bout du balai. En voulant regarder le petit chef de cette équipe, je vis que l'énigmatique métisse ne faisait pas partie du groupe mais me fixait plus loin, le regard dur... A sa place, je ne serai pas intervenu non plus car nous savions que ça n'arrangeait pas la situation, ça ne faisait que l'empirer !

- Tu as bien l'air de t'ennuyer ! souligna un de mes agresseurs.

La seconde d'après, un pied vint me taper le torse avec puissance. Ma respiration fût totalement coupée pendant de longues secondes alors qu'une douleur se propageait tout autour de mes côtes. Je me pliais sous les coups qui se faisaient de plus en plus nombreux, plus en plus fréquents et forts. Si j'avais pu crier, hurler ma haine et ma souffrance, je l'aurais fait. Chaque coup était un peu plus atroce que le précédent. Leur vengeance paraissait si colossal pour une si ridicule situation.

Ils me balancèrent finalement au sol et me donnèrent un dernier coup dans le bas de mon dos, pinçant cette fois un nerf. Je me repliai de douleur mais ne m'agitai pas, je me concentrai sur ma respiration afin de retrouver un rythme normal et de ne plus penser à l'élancement qui réveillait tout mon corps.

- Dépêche-toi d'enlever toute cette eau, mongole ! me dit une voix étriquée.

J'ignorai mes muscles qui me tiraient, j'ignorai la difficulté à me relever, je ravalai mes larmes sur le point de couler et la tête baissée, je fis ce que tout le monde attendait de moi. Mais pas pour eux, pour moi. A chaque fois que mes mains enroulaient la serpillière, la comprimaient pour en sortir toute l'eau, je me promettais qu'ils allaient tous me le payer. Je n'avais pas eu d'autres choix que de faire profil bas face à ces cinq gabarits mais je n'acceptais pas pour autant de m'être fait traité de la sorte. J'avais du mal à déglutir tant ma gorge était serrée. Et j'étais sûr que tout le monde pouvait percevoir les battements déchaînés de mon cœur à des kilomètres à la ronde. En tout cas, moi je n'entendais que ça et c'était tout ce qui comptait. Mon cœur martelait ma colère ; il marquait le compte à rebours qui menait à ma vengeance. 

***

Au moment où j'essuyais la dernière flaque d'eau, toutes les lumières s'éteignirent et nous ne fûmes plus qu'éclairés par les lumières de la cour qui s'infiltraient par les petites fenêtres en hauteur. Je ramenai ce qui m'avait été donné près des cuisines pour leur faire comprendre que c'était terminé puis marchai vers la sortie. Jeff nous attendait devant l'entrée du préau ; il ne dit rien quand il nous vit arriver, non plus quand je passai à côté de lui et quand j'entrai dans le bâtiment. Le cœur battant toujours d'une manière folle, je rejoignis mon aile en sentant le Sergent Blondie me suivre.

Nous étions dans le noir mais je dirigeai assez bien grâce aux petites lumières vertes, accrochées au dessus des portes de secours. Après trois bonnes minutes de marche pénible, j'arrivais à ma chambre, entrai à toute vitesse et allai fermer ma porte quand celle-ci revint vers moi sans que je m'y attende. Le rebord du bois me cogna brusquement la pommette, ajoutant une énième douleur à mon corps meurti. Je reculai surpris et sur mes gardes puis entendis le coordinateur de l'enfer me souhaiter une bonne nuit avant de claquer la porte.

C'était un petit geste, un détail ridicule comparé à son comportement tout au long de la journée. Mais c'était celui de trop. Je me sentis trembler et j'avais l'impression que mes jambes ne tarderaient pas à me laisser tomber elles aussi. Alors je me mis à faire les cent pas, épris de longues vagues de chaleur.Mes vêtements me collaient à la peau et accentuaient mon impression d'étouffer. J'avais chaud. Je retirai rapidement mon t-shirt et mon pantalon trempés avant de les envoyer valser à travers la pièce. J'étais seul, dans le noir ; confrontéà moi-même. Je devais faire face, je devais me surpasser.

Démuni, je me collai contre le mur le plus proche alors qu'une sorte de fièvre me secouait le corps. Un sanglot que j'essayais tant bien que mal de couvrir. Je fermai intensément les yeux, pensant ainsi empêcher les larmes de passer. Mais un autre sanglot m'arracha pourtant une goutte qui entama sa course d'abord sur ma joue puis qui rebondit sur mes lèvres. De sa chaleur, elle avait marqué la trace de son passage. Et je m'en voulais terriblement de craquer de la sorte aussi je me promis que c'était la dernière fois avant un long moment.

Et je ne pleurais pas parce que j'avais mal, que j'avais peur ou que j'étais triste. Je pleurais parce que ce lieu ne montrait que ce qu'il y avait de pire dans ce monde : la méchanceté pure et gratuite. La bestialité. Le déchaînement de toutes nos envies malsaines. Et que dorénavant j'en faisais partie. J'étais semblable à toutes ces personnes ; quelque part, d'une quelconque manière et à un certain moment j'avais répandu le mal autour de moi. Alors, nous étions tous là rassemblés ; nous étions des déchets humains à qui l'on proposait soit-disant une seconde chance.

Mais putain, comment voulaient-ils qu'on devienne meilleur en enfer ?

Prenant peu à peu sur moi, je passai une main sur mon visage et m'allongeai, livide, sur le lit. Je n'avais pas vécu le pire, c'était surmontable. Demain je n'allais pas me laisser abattre, demain j'allais sourire et leur montrer qu'il en fallait bien plus pour me mettre à terre.

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Voilà nouveau chapitre ! Il vous plait ? Oui, non, un peu beaucoup, à la folie... Ok, c'est nul. Je me tais. Bref, je voulais juste vous dire que je vais peut-être attendre un peu plus longtemps pour le prochain chapitre car j'attends d'avoir d'autres avis quand même. Savoir si ça vaut vraiment la peine que je publie cette histoire sur Watt :)

Merci en tout cas à ceux qui me lisent et me donnent leur avis, ça me fait un peu plus plaisir à chaque fois.

Byeeee



  /!\ EDIT ( 09: 05.15 ) : Un compte pour Ayden & Lieth vient d'être créé @GallagherTwins ; j'ai trouvé que c'était une bonne idée de "faire vivre" les personnages ( comme certains mangakas le font avec leurs persos ). Vous pouvez jouer le jeu, en allant leur poser des questions etc. Peut-être apprendrez-vous quelques secrets, qui sait ? & pour ceux qui ne les connaissent pas encore c'est le moment de les découvrir ! :)

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