12 - Failure


Petit rappel : Isaiah a confié qu'il soupçonnait les coordinateurs de droguer les jeunes du centre. Il a alors voulu que Leander demande de l'aide à sa psychiatre et celui-ci s'apprête à le faire. 

Les passages entre  ~  ~ sont des flashbacks.

_______________________________________________



Après avoir attrapé un papier à toute vitesse - pour ne pas hésiter plus longtemps - je retournai m'asseoir face à Mme Jenson. Ses yeux auparavant animés de peur étaient maintenant ahuris. Elle s'empressa de me donner un stylo, avec un mi-sourire encourageant. Une fois que je l'eus en mains, je me mis tout de suite à trembler. J'essayais de l'ignorer, de ne fixer que le papier, de ne pas prendre en compte la chaleur qui venait de m'envahir... Je me persuadai que c'était utile, que ce n'était pas pour m'aider seulement moi, mais tous les autres gars de ce camp.

Je soufflai une dernière fois et resserrai le stylo entre mes doigts.


Ma main continuait de trembler contre le papier, provoquant un petit bruit agaçant. Je repensai aux paroles de Isaiah, presque une supplication. Je devais les aider, je devais tous nous aider. C'était pour la bonne cause. C'était voulu. Mais le simple fait d'y penser ne parvenait pas à me convaincre. Mes émotions étaient trop fortes, tellement plus fortes que moi, elles me submergeaient et finiraient par gagner. J'avais perdu d'avance. Je serrai de plus en plus le crayon de papier alors que des souvenirs me comprimaient le cœur.




~ Je terminai d'écrire sur le morceau de papier qu'une camarade de classe m'avait fait parvenir puis m'apprêtai à le faire passer, quand une main brutale me le prit des mains. Je relevai les yeux et croisai ceux de Jack, toujours lui. Celui qui faisait tout pour me mener la vie dure. Après ses coups et ses insultes balancés, il pensait sans doute qu'à cause de lui, je pleurais chaque soir dans mon lit. Mais ce n'était pas le cas. J'étais en colère, certes, mais pas triste car je ne pouvais répondre à aucune de ses provocations sans prendre le risque de passer en conseil et de retourner en véritable enfer, les centres de redressement. Alors tous les jours, face à lui, je faisais ce que je savais faire de mieux : me taire et encaisser.

- L'autiste envoie des petits mots ? rigola-t-il avec ses trois amis.

Ignorant les remarques du surveillant qui lui demandait de retourner s'asseoir, le tyran déplia le bout de papier. Il éclata alors de rire alors qu'il n'y était pourtant pas marqué grand chose. Cette fille, Emma, me demandait seulement si on pouvait se voir après cette heure de colle - sans préciser que c'était pour notre devoir en commun. Et je lui avais répondu que l'on pouvait aller chez moi, ce qui évidemment prêtait à confusion et ça ne leur échappa pas.

- Hollingfiotte veut se taper une fille ! s'écria Jack.

Toutes les personnes présentes dans la salle éclatèrent de rire, hormis Emma qui se contenta de baisser la tête. Je n'osais imaginer ce à quoi elle pensait maintenant. S'ils savaient... Elle était le dernier de mes soucis et très loin d'être dans mon centre d'intérêt. Mais je me foutais de me défendre. Je les laissai rigoler et crier comme des porcs agonisants, sous les réprimandes du surveillant.

- Qui a écrit ce mot ? Avec qui tu parles ? Qui accepterait de traîner avec toi, tout seul, sale taré ?

Je secouai la tête puis tentai de continuer mes devoirs sans me soucier de lui. Ses mots ne me touchaient plus, ils n'avaient plus d'effet sur mon humeur. J'avais tout intériorisé, tout assimilé au plus profond de moi-même, alors ses paroles ne me paraissaient plus comme des méchancetés mais comme des vérités. Et comme une chose n'arrivait jamais seule, j'étais persuadé de mériter tout cela. Mes parents étaient morts à cause de moi, je me devais de le regretter chaque jour.

- Tu t'écrivais à toi-même ?

- Ce serait bien possible, surenchérit un de ses moutons.

- Bah dis nous, s'énerva de plus en plus le brun, quand il s'agit d'écrire des mots tu le fais alors écris vas-y ! A qui tu écrivais ?

Il déposa le papier sur la table, dans un infernal bruit, et rapprocha sa seule gueule de mon visage. Je pouvais sentir sa désagréable haleine mentholée et ses bruits de mastication. Je faisais de mon mieux pour ne pas craquer, pas maintenant, pas pour un stupide chewing-gum. Pour en finir le plus vite possible, j'attrapai le mot et répondis à sa question : « A ta mère ». C'était facile mais tellement amusant que je pris plaisir à observer sa réaction.

Un peu moins de plaisir lorsque son poing cogna le coin de mon œil, éveillant aussitôt une terrible douleur. J'eus l'impression d'être ébloui et de perdre le contrôle de mon propre corps. Je tombai de ma chaise alors qu'il en profitait pour se jeter sur moi. Il y eût un énorme raffut autour de nous, je voyais vaguement les dizaines de visage penchés au dessus de nous... Mais aucun surveillant pour empêcher Jack de m'infliger tous ces coups de poing et pied déchaînés ; aucun adolescent pour le séparer de moi. Aucune personne pour poser des limites.

Alors, je me fis tabasser pour un simple et stupide mot. ~


Ça n'avait pas été la première fois où j'avais regretté d'écrire ; ça ne m'avait pas tant touché sur le moment, c'était maintenant que j'y repensais. Tout me sautait au visage et j'avais cette colère en moi qui ne cessait de grandir. Surtout l'idée bien forgée que je ne devais plus recommencer. Toutes mes tentatives de communiquer avaient été réduites à néant par mon entourage.


~ Je fermai les yeux, me préparant à le sentir atterrir contre mon visage. Et il vint. Le carnet frappa fortement ma joue, les spirales cognèrent contre mon nez tandis que les pages me griffèrent légèrement. Ce n'était pas tant le coup qui me faisait mal que l'intention de ce geste, porté par mon propre frère. Garrett. Il se montrait indifférent pour bien des choses mais lorsqu'il était question de mon mutisme, il se mettait toujours dans des états nerveux impressionnants. Il m'en voulait terriblement de ne plus dire un mot, me tenait encore pour responsable sans comprendre que c'était quelque chose qui me dépassait aussi.

C'était un blocage que j'essayais de dépasser, par tous les moyens. Mais il ne voyait pas les efforts que je faisais, que j'avais fait jusque là. J'étais passé d'un silence total au langage des signes puis à l'écriture. Et chaque fois que je posais une pointe de stylo sur un papier, chaque fois que je levai les mains pour effectuer un signe, il n'imaginait pas une seule seconde comme je prenais sur moi. Ce qui me paraissait si simple auparavant m'était désormais un énorme challenge. Et lui pétait un plomb alors que j'étais bien celui qui avait cette forte envie de crier.

- Je m'en fous de ton foutu cahier de merde, hurlait-il, tu comprends pas que c'est pas ton écriture de gamin qu'on veut lire ? On veut entendre ta voix Lean, ta voix qui me gueulait dans les oreilles très tôt le matin juste pour me faire chier ! Ou celle qui improvisait des raps pourris, qui râlait quand quelque chose n'allait pas dans ton sens ! Putain mais je m'en fous de ton écriture, garde la j'en veux pas. Personne n'en veut. Ça vaut rien, tu comprends ? C'est inutile. ~

C'était inutile...

En s'éloignant de moi ce jour-là, après m'avoir braillé dessus, Garrett m'avait fait bien plus de mal que Jack et sa violence physique. Je m'étais définitivement senti seul, sans plus trop de raisons de me surpasser. Ça m'angoissait davantage d'y repenser. Je me crispai encore plus sur moi-même tandis que la voix de ma psychiatre me paraissait à des kilomètres. Dans ces instants où je perdais le contrôle, j'avais cet étrange besoin de me débarrasser de moi-même. J'avais l'impression que ma peau me brûlait, c'était désagréable d'être là, d'être moi... C'était douloureux.

C'est inutile... Sale taré... Ça vaut rien... Personne n'en veut... Autiste... C'est inutile...

T'es inutile.

Tu ne vaux rien.

Sale taré. 


La voix de Mme Jenson n'était qu'une sorte de blabla flou puis elle devint de plus en plus claire. Je sentais la chaleur quitter mon corps, mes muscles se décrispaient lentement. La situation ne me semblait plus si dramatique, ni affolante.

- Leander, tu m'entends ? Tu entends ce que je te dis ? Ce n'est pas grave... Tu le feras lorsque tu le sentiras, on a plusieurs séances pour cela. D'accord ?

Elle se tenait près de moi, pour la première fois depuis que l'on se connaissait. Elle ne s'était jamais approchée et surtout, ne m'avait jamais offert aucun geste de réconfort. Maintenant, elle tenait ma main libre et lorsqu'elle toucha l'autre, une douleur apparût dans ma paume. Elle déplia ma main droite avec précaution, dévoilant un stylo brisé en deux dont quelques bouts de plastique étaient venus se planter dans ma peau.

- Tu ne dois pas te faire du mal par frustration.

Sous le stress, j'avais perdu la maîtrise. Je ne m'étais pas rendu compte de l'état dans lequel j'étais entré. Je perdais la tête, je devenais fou ; c'était certain. J'avais peur de retrouver le même esprit que ce soir-là. Et la vérité était que je m'effrayais moi-même.

Je ne savais plus vraiment ce que je faisais, ce que je ressentais... ce que je devenais.


***



Deux jours plus tard, quand je vis arriver Isaiah dans le préau puis se diriger vers moi, je devinai aussitôt quel sujet il allait aborder en premier. Étant donné que nous ne nous étions pas vu depuis Lundi, il ne savait pas encore que je n'avais pas été capable de répondre à la seule demande qu'il m'avait faite. Je n'avais pas été assez fort, malgré ce que je me répétais à longueur de journée. Je savais encaisser les coups mais mon mental lui craquait à la moindre émotion négative. J'étais faible. Il ne fallait pas compter sur moi pour aider qui que ce soit dans ce centre.

Il serait déçu de l'apprendre mais j'espérais qu'en dépit de mon silence, il saurait voir ma propre déception dans mes yeux. J'espérais que lui saurait comprendre que confronté à nos démons, il nous était bien impossible de faire face.

Le métis s'avachit sur le canapé, à mes côtés, le visage neutre. Vide de toutes expressions. Il n'était plus vraiment lui-même depuis le décès de sa mère, perdant son entrain naturel. Plus rien ne semblait être suffisant pour le motiver à avancer, à sourire, à prendre plaisir dans de petites choses comme il le faisait une semaine plus tôt.

- Ta coloration est en train de se barrer, tu sais ? me dit-il sans même m'accorder un regard.

Dans un réflexe stupide, je portais ma main à mes cheveux qui devenaient aussi trop longs. Si Jeff ne s'était pas amusé à renverser mon tube alors j'aurais pu refaire ma couleur noire. Et le simple fait de savoir que mes cheveux châtains, fades et sans vie, refaisaient surface m'énervait. J'avais envie de tout couper. Ça emmerderait bien mon entourage et moi de mon côté, j'aurais au moins l'impression de me séparer d'une partie de moi, rien qu'une toute petite.

- Alors, qu'est-ce qu'elle a dit ta psy ? enchaîna Isaiah.

Je détournai le regard, regrettant aussitôt car je venais de me trahir. J'aurais pu profiter de mon mutisme pour ne pas lui apporter de réponses concrètes mais ma réaction corporelle s'était empressée de montrer le contraire. Et mon ami réagit tout de suite, il sauta sur ses pieds et se posta devant moi.

- Tu lui as, commença-t-il fortement avant de baisser la voix, tu lui as rien dit ?

Je déclinai d'un vif mouvement de tête.

- Fait chier mec !

Il fit plusieurs pas de long en large alors que la rage gagnait peu à peu son corps. Il revint soudainement vers moi. Je n'avais pas tellement peur de sa colère car je savais qu'il ne me ferait pas de mal, il y avait seulement sa proximité qui m'agaçait. Était-il vraiment obligé de me parler d'aussi près ? Lorsqu'on me touchait ou que l'on s'approchait trop de moi, je me sentais toujours oppressé. La cage qui se trouvait constamment autour de moi se rétrécissait alors. C'était ces sentiments là que je ne comprenais pas et qui étaient pourtant une grande partie constituante de ma vie depuis des mois. L'angoisse, la solitude, le sentiment de ne plus avoir assez de place...

- Putain pourquoi tu l'as pas fait ? On a besoin de sortir d'ici ! râlait-il. Faut qu'on sorte de cet endroit de fou. Pourquoi t'es pas capable de rendre ce petit service ? Tu veux pas t'en sortir toi ?

Si, c'était tout ce que j'avais toujours souhaité. Mais je n'avais jamais pu et je n'étais pas sur de le mériter.

- Tu m'emmerdes mec... Je me débrouillerai sans toi, reste enfermé dans ta tête.

Sur ce, il s'en alla... Il s'éloigna de moi comme tout mon entourage avait fini par le faire. On me reprochait souvent de ne rien faire, de baisser les bras trop vite, tandis que eux me tournaient le dos au moindre échec. S'ils ne me regardaient pas comment voulaient-ils me voir triompher ?

Je savais qu'Isaiah ne m'abandonnait pas totalement, il était uniquement déçu et sans doute aussi désespéré  de se trouver dans une telle impasse. Je l'étais aussi. Et il n'était même plus question de nous deux, combien d'autres jeunes subissaient les piqûres de drogue ? Combien de personnes se trouvaient dans l'aile Z ? À quel point s'étendait la gravité de cette situation ?  Même pour une aussi bonne raison je n'avais pas été apte à refouler mes peurs, à vaincre mes traumatismes.

Mais l'on devait tout de même trouver un autre moyen.



***


Assis sur les gradins, j'attendais que toute l'équipe de rugby finisse le match d'entraînement. J'étais resté de côté dans le but de relever les tactiques de jeu, mais je devais avoué préférer être sur le terrain. Après avoir connu l'action de ce sport, je ne pouvais plus m'en passer. Être « sur le banc » à les regarder, m'ennuyait encore plus.

Je m'étais alors mis à observer les autres groupes de sport. Football, Baseball, Musculation... Nous nous partagions tous ce terrain d'une taille moyenne, ne possédant plus qu'une petite part ridicule. Mais nous nous en contentions tous apparemment. Le choix ne nous était pas donné de toute façon, nous n'étions pas là pour une colonie de vacances mais pour réparer nos conneries. Ou en faire davantage, pour ma part.

Je descendis boire, sur les côtés, et suspendis mon geste en entendant une voix familière. Une voix de connard, celle de Ben. Il se trouvait au bord des gradins, entouré d'un petit groupe de jeunes, pile dans mon angle de vue sans que je sois visible.

- Regarde ce que j'ai dans ma poche ! ricana le garçon bedonnant. J'avais oublié ce truc !

- Ah, les yeux du babouin, s'exclama l'un d'entre eux.

Ils rigolèrent tous à cette médiocre blague sans qu'aucun ne relève la remarque raciste qui venait tout juste d'être faite. Je me doutais qu'ils parlaient de Isaiah, et que Ben possédait bel et bien ses lentilles. Et j'y vis là l'occasion de faire au moins un petit geste, une bonne action. Aider mon ami pour me rattraper de mon précédent échec.

Je sortis de ma petite cachette et me dirigeai vers eux, avec détermination. Je me foutais de savoir que je n'avais aucun poids face à eux, étant donné leur nombre et leur corpulence physique. J'avançai quand même dans le seul but d'effectuer la vengeance que mon ami méritait. Ça me rendait fou de voir que c'était ce genre de connards qui faisaient la loi, partout où ils se trouvaient. Ben n'était finalement pas bien différent de mon tyran du lycée, Jack. Je n'avais plus à me retenir, maintenant. Plus rien à redouter. 

Quand j'arrivai à leurs côtés, le gros blond commençait à ouvrir la petite boîte de lentilles de ses doigts maladroits. Je me précipitai aussitôt puis lui arrachai des mains. Il me jaugea, les yeux ronds et la bouche mi-ouverte. 

- Qu'est-ce que tu fous, toi ? 

Je secouai la boîte sous ses yeux avant de la glisser dans la poche de mon jogging. Une fine tension venait de s'instaurer, en une poignée de secondes. Sa petite bande nous observait tour à tour ; tous attendaient patiemment que l'un de nous réagisse. Ce fût moi qui décocha une puissante droite à Ben, dans la mâchoire. Juste une seule alors qu'il en méritait bien plusieurs... Pour avoir volé ces lentilles, pour ses insultes racistes et son esprit retardé. 

Il recula sur un bon mètre, lâchant un profond juron. Je lui tournai ensuite le dos. J'avais presque atteint le terrain quand un coup prévisible s'abattit contre mon dos. Je m'écroulai par terre, sous un poids destructeur. Il allait finir par m'exploser tous les os s'il restait sur moi une seconde de plus. Je voulus m'en débarrasser cependant il m'asséna plusieurs coups dans la tête. 

Je réussis à m'extirper de son emprise au bout d'un long moment alors que les cris résonnaient autour de nous. Encouragé par tous les autres, Ben ne faisait que frapper plus fort pourtant je repris le contrôle. Une fois sur pieds, je maintins les coups de poings contre lui. Je tentai d'atteindre la moindre partie de son corps et à chaque fois que je heurtai sa tête, son torse, son cou, son épaule, je respirais un peu plus. Je me défoulai, me libérai ainsi. Ma sensation d'étouffer s'estompait ; mon cœur n'était plus comprimé. 

Si l'on ne m'avait pas éloigné, j'aurais probablement tenu encore longtemps. Toutefois je me retrouvai emprisonné dans des bras qui me tirèrent avec force. Croyant faire face à un coordinateur, je repoussai la personne et pris de la distance. Ce n'était que Isaiah et un autre équipier de rugby.

- Tu peux pas tenir une journée sans faire parler de toi ? vociféra soudain une voix grave.

Cette fois c'était bel et bien un coordinateur que je connaissais vaguement de vue. Il était venu en courant, le visage rouge. Je l'ignorai et examinai l'attroupement à une dizaine de mètres. Ben commençait seulement à se relever maintenant ; il pestiférait en même temps contre moi, je l'entendais d'ici. Bientôt il fût mis de côté par un éducateur et moi de même. Avant cela, j'avais pris soin de remettre ses lentilles à mon ami. Il m'avait regardé avec un semblant de reconnaissance qui me faisait chaud au cœur. Je l'avais vengé, je ne le regrettai pas. 

- Encore le merdeux, quelle surprise ! ironisa Sergent Blondie qui arrivait à mes côtés. Je m'en occupe. 

Sa main claqua contre l'arrière de mon crâne. Ses doigts attrapèrent une poignée de mes cheveux puis il me tira sur le côté. Il m'entraîna le long du chemin sans me lâcher, ni détendre sa poigne. Au contraire, il ne faisait que de me secouer brusquement de temps à autre. 

- Je sais pas ce qu'il te faut pour comprendre mais tu vas en bouffer des corvées, des leçons, jusqu'à devenir le gosse le plus sage de cet endroit ! m'avertit-il. Retiens bien ça, je vais pas te lâcher ! Et si tu veux jouer au plus méchant, tu verras que je suis aussi très fort à ce jeu là.

Ses menaces continuèrent tout le long du trajet jusqu'à ma chambre, où il me poussa. Il me prévint que j'y resterai toute la journée et qu'on ne viendrait me chercher que pour ma séance de groupe et la corvée de cuisine, ce soir. Au moment où je pensais qu'il allait enfin partir, il revint sur ses pas, renversa le mince sommier de lit, s'empara du matelas et m'enferma dans la pièce. Evidemment, ça aurait trop simple qu'il me laisse dormir durant les prochaines heures. 

Je me laissai glisser le long du mur, épris de fatigue aussi mentale que physique. 

Après réflexion, je ne comprenais pas pourquoi j'étais prêt à sauter dans la gueule du loup, à me battre pour un rien mais j'étais bien incapable d'écrire sur un foutu papier. Je redoutais bien plus le fait de devoir m'exprimer que de subir la violence. Fort du corps, si faible de l'esprit.

Si facilement destructible... 



***





La lourde porte battante se referma derrière moi et je compris en voyant la grande cuisine vide que la corvée vaisselle se transformait en véritable enfer. J'étais seul, avec le Sergent Blondie. Premièrement, il me faudrait des heures pour rincer cet amont d'assiettes et couverts. Deuxièmement, en présence du Diable lui-même, il me faudrait toute une nuit. Sans compter les extinctions de lumière dans une heure et demi.

J'étais sûr qu'une joie intense pouvait se lire sur mon visage. En tout cas c'est ce que j'essayais de faire croire en gratifiant mon coordinateur préféré d'un sourire. D'une certaine manière, j'étais content car tant que je restais ici, lui aussi. Mes insomnies m'avaient habitué aux courtes nuit de sommeil ou aux nuits blanches entières ; j'étais prêt pour la cuisine party.

Je commençai donc à m'exécuter, sentant le regard de Jeff qui me perçait le dos. De temps à autre, j'entendais aussi ses pas derrière moi, ses raclements de gorge puis ses claquements de langue. Mais aucune remarque, aucune intervention de sa part. Il me laissa faire ma corvée ainsi je pus rincer une centaine d'assiettes ce qui correspondait à une aile. Il en manquait encore plus de trois cent et j'avais déjà mal aux mains. J'étais aussi trempé à cause du jet d'eau. Le tout était plus insupportable encore en ayant le regard jouissif du coordinateur vissé sur moi.

Sans me dépiter, je gardai le même rythme quand le Sergent Blondie se pointa à mes côtés. Il gardait les yeux fixés sur les piles d'assiettes.

- Attends, me dit-il, nous allons voir si tu es une bonne fée du logis.

Elles étaient encore mouillées néanmoins propres et il allait trouver quelque chose à redire. Au lieu de réagir au quart de tour, je me promis d'obéir. De tout faire pour ne pas craquer.

- Là, il reste un truc ! releva-t-il en effet.

Il me tendit l'assiette concernée et je constatai avec stupeur que son affirmation avait le mérite d'être vrai. Je lavai alors à nouveau et lui tendis avec un grand et faux sourire. Il laissa échapper un rire rauque, surtout menaçant. Puis il me donna une autre assiette, encore une, et il finit par toutes les remettre dans la bassine de lavage. Je n'avais plus qu'à recommencer, avec calme, malgré la haine qui bouillonnait en moi. Il me prenait pour un con, c'était tout ce que je détestais.

Être rabaissé une énième fois. Je préférais encore que l'on me tape plutôt que ça. Mais si je répliquais, je ne ferais que relancer le cycle sans fin de bataille entre lui et moi. Il n'attendait que ce moment, là où je craquerai, pour qu'il puisse de nouveau s'en prendre à moi. Donc je me fermai totalement. J'ignorai ses rires cinglants non loin de mon oreille et ses remarques incessantes. Je nettoyai la pile pour la deuxième fois, sans me presser.

- Qu'est ce que je vois là ? dit-il en prenant celle que je venais tout juste de poser. Mais c'est pas vrai, tu sais vraiment rien faire, sale gosse !

Je fronçai les sourcils, ne voyant absolument pas de quoi il parlait. Il approcha l'assiette de son visage et cracha dessus avant de me la tendre. Quand mes yeux se posèrent dans les siens, quelque chose se déconnecta sans doute en moi car la seule idée qui me traversa l'esprit c'est de lui enfoncer l'objet dans le crâne. Éclater sa putain de gueule de con, avec des bouts de verre. La haine qui n'avait fait que croître jusque là explosa maintenant. En une fraction de secondes, je m'emparai de l'assiette et la balançai dans sa direction.

Mon geste avait été si brusque qu'elle voltigea avec force, frôla le visage de Jeff et partit s'écraser plus loin. Ma respiration était déchaînée, rapide et bruyante. Mon cœur, lui, subissait de fortes palpitations. Mes yeux colériques ne lâchaient pas le coordinateur qui eût l'air étonné.

- Tu vas me nettoyer ça illico ! beugla-t-il à mon visage.

Poussé par un élan de colère, avec toute la force qu'il m'était permis d'avoir, je fis valser les trois piles d'assiettes. Il eût tout juste le temps de faire un pas en arrière que tout s'effondra à ses pieds, dans un vacarme énorme. Moi j'avais adoré cela car pendant un moment, le bruit avait recouvert mon brouhaha intérieur. Il avait été plus fort que tout, mes pensées obscures, mes peurs...

Sergent Blondie qui reprit rapidement ses esprits traversa la petite dune de céramiques brisés et me saisit par le cou de sa main épaisse. J'eus l'idée de résister mais face à sa force je ne pus rien faire. Je me retrouvai la tête, dans la bassine d'eau savonneuse. Paniqué, j'eus la sensation de m'étouffer dès les premières secondes. Ça me comprimait tous les muscles, ça me faisait mal. Et le moment durait tant que je crus qu'il ne comptait pas m'enlever de là.

Je donnai alors un coup de pied en arrière, l'atteignant au hasard et je réussis à m'éloigner des grands lavabos. Ma gorge me brûlait à présent ; je peinais à reprendre ma respiration. En croisant son regard noir, je compris qu'il n'allait pas s'en arrêter là.  Soudain, je plongeai sur les débris d'assiette et me munis d'un énorme morceau pointu.

Je devais paraître ridicule, moi et mon petit corps, mes cheveux mouillés, menaçant un gros tas de muscles avec un vulgaire bout d'assiettes. Mais au fond de moi, se trouvait toujours ce désir fou de me déchaîner. Ne plus rien contrôler. Et laisser mes pulsions me contrôler. J'étais tant hargneux, j'étais prêt à tout à cet instant.

Quand Jeff me fonça dedans, je ne réfléchis plus et une folle énergie m'anima tout à coup. Je voulais le massacrer, je voulais en finir avec lui, ne plus jamais avoir à le confronter. Je voulais lui faire du mal, le faire souffrir. Et être en position de force pour une seule fois. Mais il réussit à me faire lâcher ma seule arme, en me bloquant le bras.

Je ripostai quand même et décidai de me servir de la seule chose qu'il me restait, mes poings. J'enchaînai les coups sur lui. D'abord, Jeff ne me rendit rien ; il se contenta de me garder à distance puis comme moi, il mit de côté toutes les règles du centre et m'attaqua. Il m'administra plusieurs coups de poings, digne d'un boxeur, auxquels je résistai tant bien que mal. Soudain, je me retrouvai au sol écrasé par une immense force ; l'instant d'après, des craquements retentirent et une insupportable souffrance se logea dans ma main, remontant doucement le long de mon bras.

J'entendis mes piètres cris étriqués mais je n'avais pas l'impression qu'ils m'appartenaient. Je ne sentais plus que la douleur. Tous mes autres sens paraissaient avoir été coupés car il n'y avait plus que ce mal qui me lançait au moindre geste. Je portai mon bras contre moi et me recroquevillai, dans un dernier instinct de défense. La douleur s'amplifiait toutes les secondes, comme si l'on ne cessait de creuser dans une plaie ouverte.

- Quel con, quel con, mais quel con ! rugissait Jeff contre lui-même apparemment. Bouge pas.

Il quitta la pièce à grands pas. Par pur esprit de contradiction je mourrais d'envie de quitter ce lieu, d'aller arpenter tout le centre, mais j'avais trop mal pour cela. Je ne demandais qu'à être soigné. Ce connard venait quand même de me casser quelque chose.

J'aurais dû le planter.

J'aurais dû laisser déborder ma haine comme lui avait laissé agir la sienne.

- Leander ? m'appela une voix inquiétante.

Très utile d'appeler une personne qui ne pouvait pas répondre. Alors j'attendis que la personne me trouve. La porte s'ouvrit quelques secondes plus tard, sur le coordinateur Hunter. Il regarda avec effroi l'état de la pièce puis se précipita à mes côtés. Il me prit la main sans grande délicatesse, me faisant tordre de douleur.

- Désolé,  grimaça-t-il. T'arrives pas du tout à bouger ta main ?

Je secouai la tête, je ne préférais même pas essayer. Sans bouger quoique ce soit, ça me tuait bien assez. Les yeux de Hunter se grossirent lorsqu'ils tombèrent sur ma main gauche. Je baissai aussi les yeux et remarquai comme mes doigts avaient maintenant enflés. Une légère rougeur commençait aussi à se répandre. 

- Urgences ? me questionna-t-il.

Je levai les yeux au ciel en même temps que je me redressai. Peut-être m'étais-je habitué à la sensation mais, je n'avais plus aussi mal qu'au début. Il me suffisait juste de ne pas faire bouger ma main et ça allait, un peu. Je ne savais même plus ce qui me faisait vraiment mal, maintenant, ma main ou le fait d'avoir encore une fois péter un plomb. Je devenais de plus en plus incontrôlable, pour les autres et pour moi-même.

La colère, la tristesse, l'anxiété, la souffrance me faisaient passer dans une sorte de bulle protectrice. Surtout prisonnière car elle me rendait inapte à reprendre mes esprits. Dans ces moments-là, il n'y avait plus que mon corps, guidé par les sentiments qui le traversaient. Ma raison s'éteignait et mes horribles sentiments, sombres et moches, dégoulinaient... J'étais capable des plus grandes méchancetés, je le sentais.

Tout ce que j'avais encaissé durant ces dernières années semblait ne plus pouvoir tenir dans un corps aussi frêle que le mien. Dans l'esprit d'un mec de 16 ans. Je n'étais pas fait pour endurer cela, personne ne l'était. Je voulais retourner au temps où je parvenais à passer au-dessus des insultes, des chutes, des douleurs...

Au temps où j'étais encore persuadé que moi, Leander, je serai toujours plus fort que la vie et ses emmerdes.


***


Doigts cassés... Si ça ce n'était pas un signe !

Je fixai mon annulaire et auriculaire stabilisés par deux attelles et recouverts d'un bandage qui descendait jusque sous le poignet. C'était moche mais au moins j'avais évité le plâtre. En compagnie de Hunter et d'une poche de glace, j'avais passé une bonne partie de la nuit aux urgences avant qu'une infirmière ne me prenne en charge. Malgré le mal qui m'avait tiraillé, ça ne m'avait pas dérangé car nous avions retardé notre retour au centre. Et la sanction qui m'attendait... Jeff m'avait pété les doigts et défiguré mais c'était moi qui allait en payer les conséquences.

La nuit passa trop vite à mon goût, le trajet de retour aussi. Je n'avais fait qu'ignorer mon reflet afin de ne pas voir mon visage tuméfié que j'avais rapidement aperçu à l'hôpital. La tête de l'infirmière en avait également dit long. Elle s'était empressée de me demander ce qu'il m'était arrivé et évidemment, je ne lui avais apporté aucune réponse.

Il était exactement 8h15 quand nous arrivâmes dans la grande entrée du centre, au niveau de l'accueil, où nous attendaient M. Perrin et les deux autres coordinateurs de mon aile, Julien et Sergent Blondie. Le premier se tenait près du chef tandis que l'autre était à l'écart, occupé à m'observer d'un mauvais œil. Il était encore menaçant, nerveux, comme s'il ne s'était passez défoulé sur moi.

- Il n'a que des fractures aux deux doigts et des torsions à deux autres, expliqua Hunter en leur désignant. Il doit garder ces attelles au moins trois semaines où une nouvelle visite à l'hôpital s'imposera.

- Que des fractures ? releva Julien, alors que je pensais pareil.

Il posa sa main contre mon épaule, dans un élan affectif, mais je me retirai aussitôt. Depuis l'histoire des piqûres, je ne devais plus faire confiance à quiconque du personnel. Pas même lui qui m'avait pourtant aidé avant.

- Et Jeff, comment t'expliques la gueule qu'il a ? attaqua-t-il ensuite.

Le coordinateur blond, plus loin, se contenta d'un mince mouvement d'épaules, à peine perceptible.

- Sa bagarre avec Ben ?

- Non, il n'avait presque...

- Bah on dira qu'il les avait, coupa leur chef. Il tient ses marques de son altercation avec l'autre jeune et il s'est blessé la main en tombant dans la cuisine, lors de sa corvée. Maintenant, isolement jusqu'à ce que je vous dise le contraire.

Ils eurent tous l'air étonnés mais ne dirent pourtant rien. Je partageai un long regard colérique avec M. Perrin tout en me laissant amener dans le couloir. Julien me poussait doucement dans la bonne direction et Hunter nous suivait mollement.

- Si t'arrêtais un peu tes conneries, Jeff serait moins sur ton dos ! argua le coordinateur amical.

- Il en fait quand même trop, allégua l'autre derrière nous.

Julien lança un regard à l'homme roux, à la fois empli d'approbation et de réprimandes. Il avait l'air de vouloir lui dire qu'il était d'accord mais qu'il ne devait pas en dire davantage sur sa manière de penser. Non devant moi. Il avança alors : 

- Ce n'est pas le pire, tu as déjà vu comment se comportent les autres dans leur aile ?! Hollington, estime toi chanceux de te trouver avec nous. 

Ses paroles se voulaient rassurantes, je l'entendais bien, mais je ne comprenais pas. Il n'y avait aucune chance dans le fait de se trouver ici. Et je ne me plaignais pas d'être tombé face à Jeff, je ne faisais que récolter ce que j'avais semé. Je me devais d'endurer toute cette peine. Il ne se rendait même pas compte qu'en me détruisant, il me poussait à me reconstruire et à devenir plus fort. Je perdais un peu la tête cependant je survivais, c'était suffisant. 

Ils ouvrirent une porte grise abîmée puis je m'engouffrai dans une pièce que j'avais déjà connu quelques semaines plus tôt. Celle qui ressemblait à une salle d'interrogatoire, uniquement remplie d'une table et d'une chaise bancale. Dedans régnait une fraîcheur que j'avais trouvé désagréable la dernière fois ; elle avait quelque chose d'apaisant désormais. 

- Si tu as faim, je peux peut-être me débrouiller pour t'apporter quelque chose, avança Julien avec un sourire rassurant.

Je refusai et partis m'asseoir sur la chaise sans qu'ils n'eurent besoin de me le demander. Je croisai mes bras sur la table avant de plonger ma tête dedans, collant ma peau au métal froid. Ça avait au moins le don d'apaiser mes hématomes et autres blessures. La sensation contrastait avec celle que je ressentais constamment, celle qui m'habitait tous les jours et me brûlait de l'intérieur. 

- Toutes tes activités sont suspendus jusqu'à nouvelle ordre. On passe te voir toutes les heures.

Hunter continua de me réciter les règles comme il se devait de le faire néanmoins je ne lui prêtai pas plus d'attention. Je les connaissais aussi par cœur depuis le temps. J'écoutai seulement la porte claquer, le verrou se fermer et puis, le silence. 

Certains détestaient l'isolement car ils étaient coupés des autres, rataient les activités et étaient en quelque sorte oubliés. Pour ma part, je la détestais pour plein de raisons mais pas celles-là. Ça ne me dérangeait pas d'être mis de côté alors que les autres continuaient de vivre, j'en avais l'habitude. Je n'aimais seulement pas comme la salle était représentative de mon esprit. J'étais enfermé dans une pièce sans couleurs, sans mouvements et sans bruits, coupé du monde. Confronté à moi-même. C'était l'image parfaite de mes pensées.

Mais si je haïssais le silence de ce lieu, je l'appréciais aussi. Il m'apportait le calme dont j'avais tant besoin. Plus aucun bruits agaçants, aucunes voix pénibles, plus aucune présence non voulue. Le souci était que dans un grand boucan, je ne m'entendais plus, et que dans le silence total, je m'entendais trop. Les deux avaient leur part d'avantages et d'inconvénients. 


*** 


~ Il venait à peine de toquer à la porte de ma chambre qu'il était déjà entré, se souciant peu de ce que je voulais. Je fixai mon frère, qui n'avait rien à voir avec moi mis à part les cheveux châtains et les yeux bleus. Sinon, Garrett était grand, je n'étais pas le plus grand des adolescents ; il était musclé, j'étais chétif ; il plaisait, je faisais fuir les gens  ; il profitait de la vie, je m'en plaignais. Même dans notre jeunesse, avant "tout ça", nous n'avions jamais eu grand chose en commun. Nous n'étions pas les frères les plus proches au monde, l'on s'entendait seulement bien. 

C'était dur à dire mais la mort de nos parents nous avait rapproché. Enfin plus ou moins. Elle nous avait changé. Lui qui avait toujours été indifférent à notre égard, Billie et moi, il s'était trouvé une âme de frère protecteur. Il s'était occupé de nous, je le reconnaissais, mais je lui reprochais d'avoir voulu nous tirer trop vite vers le haut. Il ne nous avait pas laissé le temps de faire notre deuil convenablement, ma sœur semblait bien le vivre mais pas moi. Il était dans cette optique de vie optimiste, positive, qui ne me plaisait pas et face à laquelle je m'opposai de plus en plus.

- Ce que j'ai dit tout à l'heure, c'était sous le coup de la colère, m'expliqua-t-il d'une voix neutre. J'en suis désolé. J'aurais tellement voulu que tu m'en parles à haute voix mais... C'était bête de dire que c'est inutile.

Mais il l'avait tout de même dit et même si c'était par colère, il l'avait pensé à ce moment ou même plusieurs fois. Il n'avait fait que dire la vérité. Comme je ne réagissais toujours pas, il souffla et ne chercha pas à en dire plus. Il déposa un tout nouveau carnet au bord de mon lit puis s'en alla. J'attendis qu'il ferme la porte derrière lui pour saisir le cahier à spirale et l'ouvrir.

Sur la toute première page, d'une écriture peu soignée, était inscrit : « Je serai toujours là pour entendre ce que tu as à me dire » ~ 


Garrett l'avait dit mais ne l'avait pas vraiment été par la suite. Et très vite, j'avais arrêté de me tourner vers lui. J'avais cessé d'avoir besoin de m'exprimer auprès de qui que ce soit.  

Ma main douloureuse me tira de mes rêveries. Je redressai la tête de la table. Je ne savais pas combien de temps était passé mais j'imaginais que ce n'était pas autant que je le pensais. Ça passait lentement ici. 

Je fus attiré par des voix camouflés derrière la porte alors je me levai et me dirigeai vers la porte pour y coller mon oreille. S'ils parlaient de moi, je voulais savoir. Peut-être hésitait-il à me retirer de l'isolement, après tout j'avais bien assez souffert. La porte était trop épaisse pour que je puisse reconnaître les propriétaires des deux voix qui dialoguaient avec vivacité. Je dus user de toutes mes forces pour les entendre et compris plus ou moins ce qu'ils disaient : 

- Je suis quand même persuadé qu'on devrait l'y mettre !

- Pas encore, il est surveillé comme un prince, affirma l'autre. Ses proches s'inquiéteraient de rester sans nouvelles.

- Mais il correspond aux critères et ça le calmerait. 

Il y eût un court silence avant que la personne qui paraissait décider n'affirme : 

- Je t'ai dit non. 

J'étais certain à présent qu'ils parlaient de m'envoyer dans l'aile Z, ça ne pouvait être que ça. Mais de quels critères parlaient-ils ? C'était donc quelque chose de réglementé et apparemment bien dirigé par une personne. Ça pouvait être n'importe qui dans le centre... M. Perrin, les coordinateurs ou bien les agents de la sécurité. Tous ceux qui avaient ne serait-ce qu'une once de pouvoir et qui en abusaient sans doute. Mais pourquoi cet homme hésitait-il à m'envoyer maintenant ? Il avait dit « pas encore », qu'attendait-il ?


_____________________________________


Ayez, me revoilà avec cette histoire ! Je ne vais pas présenter mes excuses pour la longue pause, je l'ai déjà assez fait, je préfère plutôt vous demander votre avis. Je sais que j'attends des avis à chaque chapitre mais maintenant, encore plus ! Ne serait-ce qu'un petit mot pour me signaler que vous lisez toujours, me persuader que j'ai une bonne raison de continuer de poster. 

Pour ce chapitre, pas beaucoup d'avancée concernant l'aile Z mais beaucoup d'éléments sur la personnalité de Lean. Je voulais aussi parler de la violence ! En relisant ce chapitre, et les précédents, j'ai remarqué que ça avait une énorme place dans l'histoire et que ça pouvait même paraître "gratuit". Mais je veux vraiment montrer que le seul rapport à la réalité, pour Leander, c'est cette violence.  Il a reçu des coups, il en donne maintenant. Et cela aura ses conséquences...

En tout cas, la pause m'aura servi à retravailler l'histoire. J'y ai attachée des valeurs, des messages que j'ai hâte de vous partager ! Et j'ai vraiment l'impression que HCW pourra contenir une idée aussi importante que dans OTW ou LIB ( pour ceux qui ont lu ). 

Comme je l'avais dit, l'histoire se divise en deux parties - que je finirai peut-être par marquer distinctement - et j'espère que vous resterez jusqu'à la fin pour voir ce que vous réserve l'histoire de Leander. ;)

Encore merci pour toutes les réponses que vous m'avez apporté lorsque j'hésitais à "abandonner" cette histoire ! ♥ 



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top