Chapitre 74

Tout est prêt. Le repas, l'apéro, les invités, les cadeaux... L'organisation a été bien ficelée, surtout que cette année, on fait passer le Père Noël. Matthew ne va pas tarder à avoir deux ans, il comprend assez de choses pour qu'on commence à le lancer dans la magie de Noël.

C'est un peu étrange de se dire que, cette fois, nous le fêterons en décalé avec la famille de Tom. Après tout, les deux années précédentes, nous avons fait le réveillon à Londres, réunissant nos deux familles. Néanmoins, je sais de source sûre qu'ils ne seront pas seuls ce soir : si j'ai bien compris, Diana est avec Emma et Jack chez la famille de ce dernier. Je suppose qu'ils vont profiter de la petite Lucy.

Pour le moment, Matthew est le seul petit-fils, d'un côté comme de l'autre. De mon côté parce que ma sœur n'a que vingt ans donc pas encore d'enfants, de l'autre parce que Sarah a une fille plus âgée, et maintenant Emma aussi.

J'aimerais avoir une fille, moi aussi. Évidemment, tant que le bébé arrive en bonne santé, ce sera parfait, mais... J'ai toujours rêvé de mini robes de princesses, de séances de coiffure et de jolies bouclettes ! Et je sais que ça plairait à Tom, également.

Comme je n'en suis qu'au début de mon troisième mois de grossesse, il est encore impossible de savoir le sexe du bébé ; j'ai hâte. Tom et moi n'avons pas encore trop commencé à réfléchir à des idées de prénoms, toutefois nous sommes d'accord sur une chose : si c'est une fille, on ne l'appellera pas Charlotte. Le prénom nous plaisait, pour ma première grossesse, mais nous aurions trop l'impression de nous servir du deuxième bébé pour remplacer la fille qu'on aurait pu avoir alors.

– Laura, vas-tu lâcher ton téléphone ?, s'exclame ma mère, me ramenant au moment présent.

Ma sœur lève les yeux de l'écran en poussant un soupir.

– Désolée, marmonne-t-elle.

Évidemment, elle n'a pas l'air désolée du tout. Son léger sourire en coin indique qu'elle doit probablement discuter avec son petit ami, ce que je peux comprendre.

– Comment va Kévin ?, je lance en me glissant à côté d'elle.

Ma sœur hausse les épaules.

– Ça va. Il a envie de se tirer une balle parce que son frère vient de débarquer ivre chez ses parents encore une fois, mais sinon, tout va bien !

Je fronce les sourcils sans pour autant demander plus de détails. Je sais que Kévin a quelques soucis avec son frère aîné – si j'ai bien lu entre les lignes, un problème de dépendance à l'alcool et aussi au cannabis –, néanmoins ça ne me regarde pas.

J'ai eu le privilège de rencontrer le fameux Kévin de ma sœur quelques jours auparavant, avec qui je me suis tout de suite bien entendue. Évidemment, quand il a su que j'étais mariée à Tom Hiddleston, il a failli faire un infarctus dû à son extrême adoration pour les Marvel, mais à part ça, tout s'est bien passé. Laura a l'air heureuse avec lui, tant que c'est le cas, c'est parfait.

En rentrant à la maison, j'ai plaisanté sur le fait que ma sœur avait choisi son petit ami parce qu'il me ressemblait dans sa manière d'être et dans ses goûts. Je lui ai dit qu'elle l'avait très certainement choisi parce que je lui manquais trop, ce à quoi elle m'a répondu en me tirant la langue avec un rictus moqueur. Typique de Laura, donc – et de moi-même aussi, parfois.

À présent, nous voilà mes parents, ma sœur, Tom, Matthew et moi à la maison pour fêter Noël ensemble. Ce soir, on fait en petit comité, mais demain... Eh bien, demain midi, nous irons chez ma grand-mère maternelle, où seront mon oncle, ma tante, Anne-Lise et Romain, ainsi que mes cousins de Normandie. Et demain soir, rebelote : on ira cette fois chez ma grand-mère paternelle, où je serai obligée de supporter mes effroyables cousins démoniaques. Je ne les ai pas vus souvent depuis mon déménagement à Londres, il y a de ça trois ans, mais je m'en contente très bien. D'après ce que j'ai compris, ils n'ont pas changé ; heureusement pour moi, il y aura Tom, Matthew et ma sœur pour me sauver d'eux.

Je soupire longuement en songeant que, cette fois, je vais apprendre ma grossesse à toute ma famille en face. Pour Matthew, je n'avais eu à le faire qu'avec mes parents et ma sœur, qui s'étaient chargés de relayer l'information.

Avec un petit rire intérieur, je réalise que pour la deuxième fois, je fais une annonce importante le jour du réveillon de Noël. Il y a deux ans, c'était pour indiquer le sexe du bébé. Cette fois, c'est pour dire que j'en attends un deuxième. Le même schéma se répète, suis-je destinée à faire ça à chaque fois ?

– Un peu de champagne ?, demande mon père en levant la bouteille dans ma direction.

Je souris et secoue la tête. Il m'a tendu une perche, là, que je m'empresse de saisir à deux mains.

– Non, je te remercie. L'alcool, c'est pas bon pour le bébé.

Mon père acquiesce et retourne à ses flûtes. Une demi-seconde plus tard, je vois la réalisation s'imprimer sur son visage et il lâche d'une voix blanche :

– Attends, qu'est-ce que tu viens de dire ?

Je m'étonne que ma mère n'ait pas relevé, ni ma sœur d'ailleurs. Est-ce qu'elles ont trop bu ? Non, probablement pas, premièrement parce que c'est ma mère qui conduit, deuxièmement parce que Laura ne touche pas à l'alcool. Jamais.

– J'ai dit : l'alcool est pas bon pour le bébé, je répète en articulant les mots comme si je parlais à un idiot.

– T'es enceinte ?!

Les réactions ne se font pas attendre. Ma mère qui, visiblement, vient d'entendre les derniers mots de mon père, se lève aussitôt et hurle :

– Quoi ?!

Ma sœur ouvre de grands yeux étonnés et en lâche son téléphone avec un glapissement. Quant à moi, je souris fièrement à mes parents, consciente qu'ils ont été pris de court ; dans la cuisine, Tom m'adresse un clin d'oeil.

– Je suis enceinte, je reprends une troisième fois.

– Mais t'en as déjà un !, s'exclame Laura.

J'éclate aussitôt de rire. Estime-t-elle qu'après avoir eu un enfant, on ne peut pas en avoir d'autres ? Elle ne serait pas née, si on appliquait cette technique.

– Déjà, c'est pas j'ai un enfant, c'est on a un enfant, je dis en lançant un coup d'oeil à Tom. Au cas où tu te poses la question, il faut être deux pour ça. Ensuite, c'est pas parce qu'on a Matthew qu'on a pas le droit d'en vouloir d'autres, tu sais.

– Elle en veut trois !, lance l'acteur en français depuis la cuisine, où il s'est nonchalamment appuyé sur le comptoir.

Je lève les yeux au ciel en riant.

– Tu m'affiches, là, mon cœur !, je réplique.

Si au début je n'arrivais pas à lui donner de surnoms affectifs en présence de ma famille, avec le temps, j'ai fini par m'y habituer. Aujourd'hui, ça ne choque plus personne : ni moi, ni ma sœur, ni même mes parents.

– Mais comment ça t'es enceinte ?, bredouille ma mère. Depuis combien de temps ?

– Relax, ça fait à peine plus de deux mois, j'explique. Le terme est prévu pour mi-juillet, t'as le temps de te préparer mentalement, maman.

– Vous vous êtes concertés pour faire des gosses qui naissent le même mois que vous ou ça se passe comment ?, raille ma sœur.

Je hausse un sourcil, prenant quelques secondes pour décrypter sa phrase, avant de me tourner vers Tom.

– Eh mais c'est vrai ça ! Matthew est né en février, comme toi, et là...

– J'avais pas fait attention, avant, commente mon mari. Écoute, on aura chacun notre cadeau d'anniversaire, du coup !

Je m'esclaffe doucement ; il n'a pas tort.

– Et si c'est une fille, cette fois, continue Laura d'une voix forte, ça sera encore plus raccord. Oh, pitié, dites-moi que c'est une fille ! Ça serait beaucoup trop marrant.

– On n'en sait rien pour le moment. En plus, si ça...

– Qui va être la marraine ?, me coupe Laura sans paraître gênée ne serait-ce qu'un minimum.

Je jette un coup d'oeil à Tom, qui se tient à présent à côté de moi. Sa main se pose délicatement sur mon épaule et il sourit. On n'a pas beaucoup discuté des détails concernant ce deuxième enfant, mais la première chose dont nous avons convenu était la suivante : nous savions dès le début à qui nous allions demander d'être le parrain et la marraine. Le parrain a déjà accepté, quant à la marraine...

– En fait, on aurait voulu te demander à toi, annonce l'acteur d'une voix douce.

La réaction de ma sœur ne se fait pas attendre : elle pousse un véritable hurlement de joie, qui fait sursauter Matthew. Ce dernier lance un regard sévère à sa tante, qui ne semble pas le remarquer, avant de retourner jouer.

– C'est pas une blague, hein ?

Sa remarque me fait pouffer. Croit-elle vraiment qu'on lui ferait une telle farce ? Je veux dire, je ne dis jamais non à enquiquiner un peu Laura, c'est vrai, mais tout de même, je ne plaisanterais pas sur un tel sujet.

– Ce n'est pas une blague, je confirme.

Avec un ''yes'' retentissant, ma sœur ramène ses poings vers elle dans un geste victorieux. Elle enchaîne même sur une danse de la joie qui n'a rien de gracieux ; mes parents sourient d'un air entendu, l'air vaguement attendris.

– Attends une seconde..., s'arrête Laura en se tournant vers moi. C'est qui qui va être le parrain ?

Je ris.

– Laura, je ne parle peut-être plus beaucoup français avec des français, mais je suis presque sûre que la tournure de phrase ''c'est qui qui'' n'est pas correcte !

Ma sœur pousse un soupir exagéré tout en levant les yeux au ciel.

– On s'en fout, tu m'as comprise ! Réponds à la question, s'il te plaît.

– D'accord, d'accord. C'est Chris qui sera le parrain.

Un sourire diabolique s'étire sur mes lèvres ; c'est encore plus drôle quand on sait que je la laisse délibérément sans plus de détails.

– Chris ?, hurle Laura en face de moi. Mais lequel, de Chris, putain !

J'éclate de rire, consciente que je la fais poireauter exprès. Je connais son attachement aux Marvel, surtout à certains acteurs, dont un Chris en particulier : je sais déjà que la suite va lui plaire.

– Hemsworth, je lâche enfin.

Les cris de ma sœur me vrillent aussitôt les tympans et je suis obligée de me reculer de quelques pas. Elle a beau avoir vingt ans à présent, elle est toujours aussi fan de Marvel, et en particulier du beau Thor.

Quand, enfin, Laura s'est calmée, je peux reprendre la conversation sans manquer perdre l'audition.

– La question se posait même pas, en vrai. Tom est pas proche de Chris Evans au point de lui demander d'être le parrain d'un de ses enfants, tu sais.

Ma sœur hoche la tête.

– Ouais, mais sait-on jamais !

Je pouffe. Quand on en vient aux choses qu'elle aime, Laura peut être sacrément naïve des fois. C'est attendrissant, en quelque sorte.

Laura semble sur le point de dire quelque chose mais est aussitôt interrompue par Matthew, qui lui tapote la jambe.

– Tata ?

Je réprime un gloussement tandis que les yeux de ma sœur se baissent sur mon fils, avant de se lever vers moi. Elle a l'air catastrophée, je le vois à son haussement de sourcils.

– Tu lui as appris à m'appeler Tata ?, s'étrangle-t-elle.

– Je ne lui ai rien appris du tout, il sait juste pas encore parler correctement, je nuance.

Pour le coup, c'est la vérité : je n'ai pas forcé Matthew à appeler ma sœur Tata juste pour l'embêter, c'est simplement qu'il ne prononce que la première syllabe du mot Tatie, qu'il double dans la foulée.

– Je m'appelle Laura, lance ma sœur à l'enfant, ou au pire tu peux m'appeler Tatie, mais certainement pas Tata.

Matthew fronce les sourcils, l'air de réfléchir, puis, avec un grand sourire, il s'écrie :

– Tata !

Je ne peux pas me retenir, j'éclate de rire, et j'entends Tom qui fait pareil à côté de moi.

– Finalement, je ne suis pas certaine qu'être marraine est une bonne idée, marmonne ma sœur. Si c'est pour qu'on m'appelle Tata...

Sa phrase nous fait d'autant plus rire, et même elle finit par esquisser un petit sourire en coin. Tout compte fait, nous n'avons peut-être plus la complicité que nous avions avant : nous en avons acquise une nouvelle. Ça ne me déplaît pas. 

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