Chapitre 14
Je joue distraitement avec les bracelets autour de mon poignet droit. En plus de ma montre, ces derniers ne m'ont pas quittée depuis qu'on me les a offerts. Le premier, alternant bleu clair, bleu marine, gris et rouge, est un cadeau de Marine lorsqu'elle est revenue de son voyageà Bali, il y a deux ans. Le deuxième, croisillons roses, violets et blancs, a été réalisé par ma tante de Normandie pour mon anniversaire, l'été dernier. Celui de Marine peut s'enlever, pas l'autre, toutefois je les garde depuis que je les ai placés là.
Nous sommes samedi soir, Tom est rentré la veille, me contactant pour me proposer un nouveau rendez-vous. C'est pourquoi nous sommes actuellement dans les rues de Londres, marchant d'un pas léger à la recherche d'un but pour la soirée.
– These bracelets..., lance Tom en pointant du doigt vers lesdits bracelets. Do you ever take them off ? I think I saw them on your wrist every time we met.
[Ces bracelets... Tu ne les enlèves jamais ? Je crois les avoir vus à ton poignet chaque fois qu'on s'est rencontrés.]
Je secoue la tête en souriant. A-t-il aussi remarqué que, par gêne, je tripotais le moindre objet à ma portée ?
– No. They're gifts from friends and family, I've never taken them off since I've had them.
[Non. Ce sont des cadeaux d'amis et de ma famille, je ne les ai jamais enlevés depuis que je les ai.]
– How long have you had them ?
[Tu les as depuis combien de temps ?]
Je pointe du doigt le rose, le plus récent.
– One year for this one. And two years for the other, je complète en désignant l'autre, le bleu.
[Un an pour celui là, et deux ans pour l'autre.]
– And you're telling me you've never taken them off ? Like, really never ?
[Et tu dis que tu ne les as jamais enlevés, genre, vraiment jamais ?]
Je retourne mon poignet pour montrer les attaches des bracelets, plus particulièrement du rose.
–Actually, I can't take off this one, or I'll never be able to put it back on. Besides, it's a Brazilian bracelet : I have to wait for it to break before my wish come true. If I cut it, my wish will never come true.
[En fait, je ne peux pas enlever celui-ci, ou je ne pourrai jamais le remettre. En plus, c'est un bracelet brésilien : je dois attendre qu'il se casse pour que mon voeu se réalise. si je le coupe, mon souhait ne se réalisera jamais.]
– Is that a French legend ?, questionne Tom.
[Est-ce que c'est une légende française ?]
Je hausse les épaules.
– French, I don't know, but sure it's a legend.
[Française, je sais pas, mais oui c'est une légende.]
– I learn about France with you every day, I like it.
[J'en apprends tous les jours sur la France avec toi, ça me plaît.]
Je souris.
– Well, I learned about England too. Like, your weird expressions ! I'll probably never get over ''break a leg'', or ''pull someone's leg''. What's wrong with your legs, seriously ?
[Ben, j'ai appris sur l'Angleterre aussi. Comme vos expressions bizarres ! Je ne me remettrai probablement jamais de ''break a leg'' ou ''pull someone's leg''. Qu'est-ce que vous avez avec les jambes, sérieusement ?]
– And you, rétorque Tom, what's your problem with animals ? ''Poser un lapin'', ''avoir le cafard'', ''avoir un chat dans la gorge'', is that all or should I go on ?
[Et vous, c'est quoi votre problème avec les animaux ? ''Poser un lapin'', ''avoir le cafard'', ''avoir un chat dans la gorge'', est-ce que c'est tout ou je dois continuer ?]
J'éclate aussitôt de rire.
– You put them out of context !
[Tu les places hors contexte !]
– Oh, I'm sorry, se moque l'acteur. Do you rather talk about your food-based expressions, then ?
[Oh, excuse-moi, tu préfères parler de vos expressions basées sur la nourriture, dans ce cas ?]
Je lève les yeux au ciel en riant.
– It's not my fault that French is a superior language, je commente avec un sourire en coin.
[C'est pas ma faute si le français est une langue supérieure.]
– You forget that English is the most spoken language in the world, darling.
[Tu oublies que l'anglais est la langue la plus parlée au monde, darling.]
– That is unfair, je fais mine de bouder.
[Ça, c'est déloyal.]
La main de Tom se pose sur mon épaule, ses doigts s'étalant jusqu'à ma clavicule, et je frissonne aussitôt.
– You're pretty cute when you sulk.
[T'es plutôt mignonne quand tu boudes.]
Les doigts de l'acteur s'attardent un peu trop sur le pourtour de mon cou pour que ce soit complètement naturel. Bon sang, a-t-il seulement consciente d'à quel point ce contact m'électrise ? Je n'ai pas l'habitude qu'on me touche, surtout pas à cet endroit là.
Je ne sais pas comment réagir, je ne sais pas quoi faire. Mon corps se crispe automatiquement, et je tente du mieux que je peux de respirer. C'est à croire que j'ai oublié comment on fait.
Non, ce ne peut pas être une coïncidence. Je crois que Tom s'amuse à me lancer des signaux, et je ne sais pas quoi en penser. Est-ce que j'ai envie d'y répondre ? Absolument. Est-ce que je suis sûre que c'est une bonne idée ? Absolument pas.
– You know what ? I have an idea, lance Tom en raffermissant sa prise sur mon épaule. Why don't we go ice skating ? I know a nice rink, it's open up to 11 pm.
[Tu sais quoi ? J'ai une idée. Pourquoi on irait pas faire du patin à glace ? Je connais une bonne patinoire, elle est ouverte jusqu'à vingt-trois heures.]
Du patin à glace ? Est-ce que c'est délibérément cliché, ou est-ce moi qui me fais des idées ?
– Don't you think people might recognize you ?, je demande.
[Tu ne crois pas qu'on pourrait te reconnaître ?]
Bien que j'apprécie énormément la compagnie de l'acteur, je n'ai aucune envie de me retrouver sous les feux des projecteurs, surtout qu'il ne se passe rien de concret entre nous.
– Not if I put my hood on like this, look.
[Pas si je mets ma capuche comme ça, regarde.]
Joignant le geste à la parole, il rabat la capuche de sa veste en sweat sur sa tête. Quelques boucles dépassent, et ces yeux d'un bleu reconnaissable entre mille, toutefois je dois avouer que si on ne se concentre pas sur son visage, il y a de quoi passer inaperçu.
– You remind me of Chris Hemsworth in Thor Ragnarök, je ris.
[Tu me fais penser à Chris Hemsworth, dans Thor Ragnarök.]
– Ha, but Chris doest it better.
[Ha, mais Chris le fait beaucoup mieux.]
– Of course.
[Bien sûr.]
– So, up for ice skating ?
[Alors, partante pour aller patiner ?]
Je hoche la tête. Peut-être qu'on risque de reconnaître Tom, mais peut-être pas. Après tout, je ne suis qu'une fille lambda, personne ne va s'attarder sur moi, et par conséquent, personne ne s'attardera sur mon compagnon.
– Great ! Just let me make a phone call first.
[Génial ! Laisse-moi juste passer un coup de fil d'abord.]
L'acteur s'éloigne un peu et sort son téléphone de la poche. Je le vois discuter avec quelqu'un à l'autre bout du fil, à l'aide de grands gestes. C'est marrant quand même, cette manie qu'on a tous de parler avec les mains, encore plus quand on passe un appel !
Moins d'une minute plus tard, Tom revient vers moi, un grand sourire sur les lèvres.
– Dave pick us up and takes us straight to the rink. Dave is my driver, ajoute Tom en croisant mon regard interrogateur.
[Dave vient nous chercher et nous emmène directement à la patinoire. Dave est mon chauffeur.]
Comme s'il attendait pas loin, ledit chauffeur s'arrête devant nous et descend sa fenêtre. Tom, en parfait gentleman, ouvre la porte arrière du véhicule pour m'y faire rentrer. Il entre à la suite et, tandis que j'attache ma ceinture de sécurité, referme la porte.
– Dave, this is Axelle. She's a... friend.
[Dave, je te présente Axelle. C'est une... amie.]
Si j'avais des doutes sur le fait que Tom m'envoie des signaux, à présent je n'en ai plus. Rien que sa façon de prendre le temps d emettre un mot sur ce que je suis pour lui... Eh bien, il est évident que nous sommes amis, mais qu'il espère plus.
– Nice to meet you, miss, répond sombrement le chauffeur.
[Ravi de vous rencontrer, mademoiselle.]
Le trajet qui suit se déroule dans le silence, seulement troublé par les quelques indications que Tom donne à Dave. Si j'ai bien compris, il doit nous déposer un peu plus loin, pour qu'on ne se fasse pas remarquer à descendre d'une voiture avec chauffeur.
Même de loin et dans le soleil couchant, il est impossible de manquer Alexandra Palace : l'endroit est si grand et si imposant qu'il ferait passer nos maigres cathédrales françaises pour de la pacotille.
Dave fait le tour du palace et stoppe la voiture à l'arrière, dans un coin assez sombre pour qu'on passe inaperçus. De nouveau, Tom ouvre la porte et m'aide à descendre, me donnant son bras.
– I call you when we get out, annonce l'acteur en faisant un vague signe de la main à son chauffeur, qui hoche la tête.
[Je t'appellerai quand on sortira.]
Ma main accrochée à son bras, nous faisons le tour du palace pour en trouver l'entrée. Tom a rabattu sa capuche sur la tête, lui donnant un peu l'air d'un gars des cités de par chez moi. Je me garde cependant d'en faire la remarque : toute chose n'est pas bonne à dire, et je n'ai pas envie de renforcer le cliché de Marseille et ses caïds.
Par chance, il n'y a pas de queue pour accéder à la patinoire. Nous sommes sûrement arrivés à une heure creuse, ce qui n'est pas plus mal.
Un homme d'une trentaine d'années se tient derrière le guichet, l'air épuisé. Son regard glisse sur Tom et moi et il soupire.
– Two tickets, I suppose ?, demande-t-il, l'air blasé.
[Deux tickets, je suppose ?]
– Yes, thank you, répond Tom en souriant.
[Oui, merci.]
Il sort sa carte pour payer, et je me sens un peu mal de le voir faire. Je pourrais payer ma part, il le sait, mais il a assez insisté les autres fois pour que je n'aie rien à payer, aussi je le laisse faire. Après tout, se faire inviter a quelques avantages.
– I'm sorry, can you take off you hood, please ? I need to see your face to let you in.
[Je suis désolé, pouvez-vous enlever votre capuche s'il vous plaît ? J'ai besoin de voir votre visage pour vous laisser entrer.]
À cet instant, j'adresse deux prières simultanément à tous les dieux que je connais, ainsi qu'à ceux que je ne connais pas. La première, que le guichetier ne reconnaisse pas Tom. La deuxième, dans le cas où il reconnaîtrait l'acteur, qu'il ne fasse pas s'ébruiter le fait qu'il se trouve ici.
Avec un soupir, mon compagnon s'exécute.
– I'm here incognito, annonce-t-il en même temps.
[Je suis là incognito.]
– Oh my gosh, you're Tom Hiddleston !, s'exclame l'homme en ouvrant de grands yeux.
[Oh mon dieu, vous êtes Tom Hiddleston !]
Je lance un regard inquiet à la ronde, vérifiant que personne ne nous entende. Heureusement, il n'y a personne en vue.
– Can I... can I get a picture ?
[Est-ce que... est-ce que je peux prendre une photo ?]
Tom hoche la tête.
– Only if you don't tell anyone we're here. I really need to be anonymous, tonight, okay ? It's really important.
[Seulement si tu ne dis à personne que nous sommes là. J'ai vraiment besoin d'être un anonyme, ce soir, d'accord ? C'est très important.]
L'homme acquiesce avec vigueur et sort son téléphone. L'acteur se met en position, sourit, et en quelques secondes, le selfie est pris. Tom replace aussitôt sa capuche sur sa tête.
– Thank you !, s'exclame le guichetier. My girlfriend's gonna be so happy !
[Merci ! Ma petite amie va être super contente !]
– You're welcome.
[Pas de quoi.]
Passant un bras autour de mes épaules, Tom m'entraîne vers la zone de glisse. Je suis sidérée par les décors, par la taille de l'espace ; nous chaussons nos patins en riant.
– Ready ?, demande l'acteur en m'aidant à me relever.
[Prête ?]
Je hoche la tête en souriant et suit Tom jusqu'à la glace. Il est le premier à y mettre les pieds, et je dois avouer qu'il est plutôt doué. Pour ma part, bien que j'adore aller à la patinoire à Marseille, je ne suis pas capable de grand chose mis à part tenir debout et ne pas m'écrouler. Toutes mes années de danse me servent énormément, niveau équilibre.
Tom attrape mes mains dans les siennes et me tire en reculant sur la glace. J'ai un peu de mal avec les patins, qui ne sont pas du tout comme ceux qu'on nous prête chez moi, mais je m'y fais rapidement. Toutefois, je ne lâche pas pour autant les doigts de l'acteur : j'aime sentir son contact.
– You're pretty good at it !, s'enthousiasme-t-il.
[T'es plutôt douée !]
Je ris.
– What do you think ? We have a great ice rink, in Marseille, I often go there with my friends.
[Qu'est-ce que tu crois ? On a une super patinoire, à Marseille, j'y vais souvent avec mes amis.]
– You don't play it fair, you cheater !, se moque Tom.
[Ce n'est pas très fairplay, tricheuse !]
– Do you want me to be sorry ? 'Cause I'm not.
[Tu t'attends à ce que je sois désolée ? Parce que ce n'est pas le cas.]
C'est au tour de l'acteur de s'esclaffer.
– Careful, I could push you and make you fall, darling.
[Fais gaffe, je pourrais te pousser et te faire tomber, darling.]
– Why do you always call me darling ?
[Pourquoi m'appelles-tu toujours ''darling'' ?]
Tom esquisse un sourire.
– Because I really like you, Axelle. Isn't it obvious ? I thought I was pretty clear, actually.
[Parce que je t'apprécie énormément, Axelle. N'est-ce pas évident ? Je pensais être plutôt clair, en fait.]
Je me fige aussitôt. Je ne m'attendais pas à ce genre de déclaration, pas aujourd'hui en tout cas, et encore moins alors que nous sommes au beau milieu d'une patinoire.
– You... what ?
[Tu... quoi ?]
– You heard me.
[Tu m'as bien entendu.]
Mes entrailles se serrent automatiquement et je sens mon souffle se hacher. Oh non, pitié, pas maintenant ! Je n'ai pas besoin de faire une crise de panique alors que nous venons à peine de monter sur la glace !
Malheureusement, je n'ai aucune prise sur mon corps dans ce genre de situation, et mes muscles se raidissent tandis que je peine à reprendre mon souffle.
– Are you okay ?, s'inquiète Tom. [
Est-ce que ça va ?]
– I... I can't breathe, j'ânonne.
[Je... je n'arrive pas à respirer.]
Je vois le regard de l'acteur s'agrandir sous l'effet de la surprise. Je suppose qu'il ne s'attendait pas à ce que je réagisse à son aveu en faisant une crise d'angoisse.
Je commence à trembler et la prise de Tom sur mes mains se raffermit.
– Come here.
[Viens là.]
Lentement, avec des gestes doux et précautionneux, l'acteur me tire vers la sortie de la patinoire. Je sens mon pouls qui s'emballe, ma poitrine se soulève et s'abaisse à un rythme trop rapide, et je commence à avoir chaud. J'ai envie de pleurer, mais je me force à ne pas le faire.
Tom me guide jusqu'aux vestiaires et m'aide à m'assoir sur un banc.
– Do you have panic attacks frequently ?
[Est-ce que tu fais des crises d'angoisse fréquemment ?]
Je hoche la tête tout en essayant de respirer normalement. Je suis étonnée de sa réaction, la plupart des gens n'étant que peu informés sur la nature même des crises de panique. Toutefois, Tom a eu la bonne réaction en m'emmenant loin des gens : je ne supporte pas qu'on me voie dans cet état.
Accroupi devant moi, l'acteur a une main posée sur mon épaule, comme pour me retenir et éviter que je ne tombe en avant. Son autre main est à côté de ma cuisse, sur le banc, appui inébranlable.
– Okay, so..., dit doucement Tom. Focus on my voice, right ? I need you to listen to my voice, jus my voice. Do you think you can do that ?
[Ok, alors... Concentre-toi sur ma voix, d'accord ? J'ai besoin que tu écoutes ma voix, juste ma voix. Tu penses que tu peux faire ça ?]
De nouveau, je hoche la tête, incapable de prononcer le moindre mot.
– Hear me out. It's alright, okay ? Everything's gonna be okay, don't repress your emotions, just let them out. You need to breathe as calmly as possible, like that : inhale, and exhale. Inhale, and exhale.
[Écoute-moi. Tout va bien, d'accord ? Tout va bien se passer, ne refoule pas tes émotions, laisse-les sortir. Tu dois respirer aussi calmement que possible, comme ça : inspire, et expire. Inspire, et expire.]
Je ferme les yeux et me laisse porter par la voix de l'acteur. Je suis à la lettre ce qu'il me dit, et après quelques respirations, je commence déjà à me détendre. Je tremble toujours, mais petit à petit, ma respiration reprend son cours normal.
Je continue de prendre de puissantes inspirations par le nez, puis de souffler par la bouche. Cela faisait vraiment longtemps que je n'avais pas fait de crise d'angoisse, j'avais perdu l'habitude de cette sensation d'écrasement intérieur couplée à celle d'étouffement.
Lorsque je sens que je vais mieux, j'ouvre les yeux. Devant moi, Tom a enlevé sa capuche et m'observe d'un œil inquiet.
– Are you alright ?, demande-t-il en posant une main sur mon genou.
[Est-ce que ça va ?]
– I'm sorry, I didn't mean to...
[Je suis désolée, je ne voulais pas...]
– You have no reason to apologize, coupe l'acteur en pressant mon genou entre ses doigts. It's okay, it's not something you can control.
[Tu n'as aucune raison de t'excuser. Ça va, ce n'est pas quelque chose que tu peux contrôler.]
Je soupire longuement.
– I know, but... I hate it.
[Je sais, mais... Je déteste ça.]
– You definitely shouldn't.
[Tu ne devrais vraiment pas.]
Un léger sourire s'étire sur mes lèvres et je réprime l'envie de fondre en larmes. Tom est beaucoup trop adorable, c'en est presque douloureux. Personne, je dis bien personne, n'a jamais géré une de mes crises d'angoisse. J'adore mes amis, mais ils ne sont pas du genre à se poser avec moi pour me forcer à me calmer comme l'a fait Tom.
– Thank you, je murmure alors.
[Merci.]
– Do you want me to take you home right now ?
[Tu veux que je te ramène chez toi maintenant ?]
Je secoue la tête.
– Could we walk a little ? I think it would help me.
[Est-ce qu'on pourrait marcher un peu ? Je pense que ça m'aiderait.]
– Of course we can. Take your skates off, we'll go. Dave will pick us up when you feel better, okay ?
[Bien sûr qu'on peut. Enlève tes patins, on y va. Dave nous récupèrera quand tu te sentiras mieux, d'accord ?]
– Okay.
Je m'exécute alors, remettant mes chaussures. Tom récupère mes patins ainsi que les siens, puis m'aide à me lever. Nous sortons finalement, déposant les patins au guichetier, qui semble déçu de nous voir partir si vite mais ne fait aucune remarque.
Dehors, la nuit est tombée et l'air s'est rafraîchi. Je ferme ma veste pour ne pas attraper mal.
– I'm sorry I triggered a panic attack, s'excuse platement Tom.
[Je suis désolé d'avoir déclenché une crise d'angoisse.]
– It's not your fault, it's just... I don't really understand my brain, sometimes.
[Ce n'est pas de ta faute, c'est juste que... Je ne comprends pas vraiment mon cerveau, parfois.]
– The brain, what a fascinating organ !, rit l'acteur.
[Le cerveau, quel organe fascinant !]
– As you say !, je renchéris.
[Comme tu dis !]
Je me sens beaucoup mieux, à présent, et mes pas sont légers. Je le fais d'ailleurs remarquer à Tom, en le remerciant au passage pour son extraordinaire prise en charge. C'est agréable de tomber sur des gens compétents.
Comme je commence à avoir vraiment froid, nous appelons Dave pour qu'il vienne nous récupérer. Une fois dans la voiture, je pose ma tête contre la vitre et ferme les yeux. Ma crise m'a épuisée, je pourrais très bien m'endormir avant d'arriver ; Tom respecte mon silence, se contentant d'un regard bienveillant de temps en temps.
Lorsqu'enfin la maison est en vue, il fait signe à Dave de s'arrêter et descend pour me raccompagner.
Nous faisons quelques mètres en silence, jusqu'au moment où Tom me retient par le bras et me tourne pour me placer face à lui. Ses yeux bleus luisent d'un éclat particulier avec la lumière orangée des réverbères.
– I don't want you to panic again, but I really need to ask you something, lance Tom alors que nous nous arrêtons devant la maison.
[Je ne veux pas te faire paniquer encore une fois, mais j'ai vraiment besoin de te demander quelque chose.]
Je sais déjà quelle va être ladite question, et je sais aussi que je n'ai aucune réponse satisfaisante à lui apporter, parce que je n'ai aucune idée de ce que j'ai envie de faire ou non.
– I'm listening.
[Je t'écoute.]
Tom prend une grande inspiration avant de se lancer. On dirait un adolescent sur le point d'avouer ses sentiments à la fille qui lui plaît, c'est adorable et perturbant à la fois. Alors comme ça, qu'on ait quinze ou quarante ans, c'est toujours aussi dur de déclarer sa flemme ?
– I don't want to make you uncomfortable or anything, but... I really like you, Axelle, and I'm sure you do, too.
[Je ne veux pas te rendre mal à l'aise ou quoi, mais... Je t'apprécie vraiment Axelle, et je suis sûr que toi aussi.]
Évidemment. Si je ne suis pas aveugle sur la manière qu'il a d'agir avec moi, il n'est pas aveugle sur ma façon d'agir avec lui non plus.
– I... Let me think about it, please. I need time to...
[Je... Laisse-moi y réfléchir, s'il te plaît. J'ai besoin de temps pour...]
– Take your time, I'll be waiting, annonce doucement l'acteur.
[Prends ton temps, j'attendrai.]
Je ferme les yeux tandis que Tom embrasse mon front. C'est si dur de ne pas le retenir, de ne pas lui dire de faire demi-tour alors qu'il s'éloigne ! Toutefois, je ne peux pas agir de la sorte : j'ai réellement besoin d'un temps de réflexion, maintenant que toutes les cartes ont été déposées à plat sur la table.
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