Chapitre 21 - Les tourments de Calion (partie 2)
Ni l'un ni l'autre n'osait faire le moindre geste. La présence funeste du Seigneur de la Mort au sein du Royaumes les pétrifiait.
Calion sentit une profonde douleur à la poitrine et il tomba à genoux au sol. Son regard se brouilla et la seule chose qu'il aperçut fut Aegnor se dirigeant vers lui. Il ne marchait pas, il flottait, comme une ombre macabre. Son visage était camouflé sous la capuche de son manteau noire. Il tenait la puissante épée mortelle entre ses mains et la faisait grincer sur le sol de la pièce.
Circeï ne fit pas un geste. Son regard traduisait sa terreur. Même si elle faisait partie des sorcières les plus puissantes d'Hidden World, la magie avait ses limites. L'une d'entre elles était qu'elle ne pouvait défier Aegnor sans craindre d'horribles conséquences.
— Calion.
La voix du Seigneur de la mort semblait provenir des abysses de l'enfer. Son ton caverneux et grave faisait vibrer les neurones du jeune Demonsfire. Plus il approchait, plus la souffrance était insupportable.
— Tu es devenu tellement faible... Regarde-toi, agenouillé devant moi alors que tu aurais pu être à mes côtés.
— Je n'ai rien à voir avec vous.
Calion avait réussi à sortir cette simple phrase. Le souffle court, il avait de plus en plus de mal à respirer.
Aegnor se tourna vers Circeï. Elle essayait de rester solide et fière, malgré la peur qu'elle ressentait.
— Comment es-tu...
— Sorti de la prison funeste dans laquelle vous m'avez enfermé ? C'est simple, quelqu'un que vous connaissez très bien m'a libéré. Il m'a chargé de vous prévenir qu'il ne fait que commencer et que tôt ou tard vous périrez les uns derrière les autres. Le Royaume d'Hidden World suivra le même chemin. Il est temps d'arrêter l'hypocrisie qu'ont installés Elerinna et Tulkas dans vos esprits.
— Tu ne peux pas reprendre la pierre.
Aegnor se mit à rire mais cela ressemblait plus à un son tout droit sorti des tréfonds de l'enfer. Calion releva lentement la tête vers son ennemi, et tenta de croiser son regard dans la fumée noire qui lui servait de visage. Comme la douleur ne faisait que s'intensifier, il fut obligé de courber l'échine. La jeune sorcière ravala un cri et se contint de se jeter auprès de Calion pour l'aider. Elle préféra interroger Aegnor :
— C'est Alvara qui t'a libéré ?
La vois de Circeï n'était plus qu'un murmure. Soudain, le Seigneur se rua sur la sorcière pour s'arrêter à seulement quelques centimètres de son visage. Calion était incapable de faire quoi que ce soit. Aegnor contrôlait son esprit et l'obligeait à souffrir le martyre. Il s'en voulait, il était inutile et faible. La voix de leur ennemi retentit à nouveau :
— C'est cela qui vous perdra tous. Vous êtes tellement persuadés de l'aspect mauvais et corrompu de certaines personnes que vous oubliez tous les autres sentiments. Pensez-vous réellement que tous ceux qui vous entourent sont loyaux ? À votre avis, comment suis-je entré sans encombre au sein même du Palais du Royaume d'Hidden World ? Vous êtes trop sûrs de vous et de vos préceptes d'antan pour voir que le monde est en train de changer. C'est uniquement votre faute si l'apocalypse arrive. Vous ne pourrez pas l'empêcher. En réalité, vous avez déjà perdu.
Circeï n'eut pas le temps de répliquer que déjà un brouillard sombre remplit la pièce. Il était parti, laissant les deux amis en proie à de nouvelles interrogations.
— Il faut que je parte.
Calion savait qu'il avait besoin de s'isoler pour reprendre ses esprits et éviter de tomber dans la folie. Il disparut pour se retrouver dans le parc qui bordait l'École « The Emerald Sanctum ». Il s'assit au bord de la fontaine en pierre et observa les minuscules poissons qui y nageaient. La vie de ces petits animaux était si simple, il se prit à les envier rien qu'un instant.
Il se frotta les yeux pour essayer d'enlever son mal au crâne et il ne remarqua pas tout de suite que quelqu'un l'observait. Astal était juste de l'autre côté de la fontaine et n'osait pas bouger. Calion admirait ses grands yeux marrons remplis de compassion et son doux sourire. Elle était la gentillesse incarnée et était toujours sur le qui-vive dès qu'une personne autour d'elle n'allait pas bien.
— Je sais que tu en as bavé pendant notre mission. Tu as beau être un puissant Demonsfire, tu as une sale tête.
À ces mots, elle se rapprocha du jeune homme et vint s'accouder à la fontaine, juste à côté de lui. Ses cheveux, aussi blancs que la neige, lui tombaient sur les épaules et encadraient son visage de poupée. Calion essaya d'esquisser un sourire mais cela faisait bien longtemps qu'une telle expression n'était pas apparue sur son visage. Côté « sentiments », il était sacrément rouillé.
— Il y a quelque chose que je pourrais faire pour toi ?
— M'enlever ce mal de tête atroce ?
Calion se voulait ironique mais la jeune princesse le prit aux mots et se posta juste en face de lui. Elle l'obligea à se laisser faire alors qu'il allait se dérober. Elle posa ses deux mains délicates sur ses tempes et ferma les yeux. Calion sentit le froid irriguer ses synapses et resserrer les vaisseaux de son cerveau. Enfin, son sang arrêtait de bouillir et il sentait un léger apaisement. C'était si agréable qu'il se mit, lui aussi, à baisser les paupières.
Il se concentra sur la magie qu'était en train d'opérer Astal. Il n'avait plus autant mal et il se sentait étrangement « bien ». Soudain, prenant conscience de leur proximité, il attrapa brusquement les deux poignets de la jeune femme et l'éloigna.
Ses yeux caramel le regardèrent sans comprendre mais il n'eut pas le temps de voir plus en détail sa réflexion, il disparut. Il fuyait, c'était son activité favorite.
À présent Calion était allongé sur son lit. Son mal de crâne avait disparu mais la douleur qu'il ressentait dans la poitrine et le feu qui lui brûlait les veines, n'avaient pas dit leur dernier mot.
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