Chapitre 19 - Le secret de Thalion (partie 1)
Pendant que nos trois héros finissent d'anéantir le Loup de Fenrir, Circeï aide Lucy à maîtriser ses pouvoirs. Thalion est aussi à ses côtés pour veiller à son entraînement.
Siltiama, Calion, Astal et Valendir reviennent avec la Pierre de Lune Blanche et leurs diverses observations sur la situation.
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— Ton bras Lucy ! Ça fait dix fois que je te dis que tu ne dois pas baisser ta garde même quand tu crois avoir anéanti ton adversaire.
Je me relevai péniblement sous les cris de Thalion qui prenait un malin plaisir à me rabaisser dès qu'il le pouvait. C'était la troisième fois qu'il me mettait à terre en un tour de bras. Si les créatures que j'allais devoir affronter étaient plus puissantes que lui, je ne ferais pas long feu.
— Remets-toi en position.
— J'ai besoin d'un peu de repos...
— Oh ! Alors c'est ça que tu vas dire au monstre qui se trouvera en face de toi en plein combat ?
— Non mais...
— Et qu'est-ce que tu diras quand il fera ça !
À ces mots, Thalion me projeta dans les airs avec une force herculéenne. Il avait utilisé la magie des éléments pour m'éjecter dans un souffle puissant. Je retombai lourdement sur le sol et j'entendis un craquement désagréable. J'en avais marre d'encaisser les coups sans pouvoir me défendre. J'étais épuisée et tous mes muscles me faisaient souffrir. Je n'en pouvais plus et, comme si cela ne suffisait pas, Thalion recommença à me provoquer :
— Quand j'étais petit on m'a raconté des histoires sur ta prophétie : la puissante Caliawen qui ramènerait l'équilibre du monde. Tu me fais pitié sérieusement ! C'est avec toi que l'on va sauver le monde ? Laisse-moi rire ! Tu abandonnes à la première difficulté !
Thalion fit surgir autour de moi des racines qui enveloppèrent mes jambes et mes bras. Les branches me maintenaient au sol sans que je puisse bouger. La nature se resserrait autour de mon corps frêle et les épines des ronces m'entamaient la chair. Je le suppliai de me laisser tranquille mais il préféra rire à mes tentatives de le stopper dans ses attaques. J'avais du mal à respirer et mon souffle était court. Ma poitrine était compressée sous le poids des branches qui m'enfonçaient dans le sol de la Forêt.
Cette fois, mon entraîneur amplifia la douleur en faisant brûler le bois des racines qui étaient en train de me ronger la peau. La douleur était insupportable et je me voyais déjà six pieds sous terre.
— Concentre-toi Lucy ! Bats-toi !
« Respirer », « se concentrer », « piocher dans ses réserves », les préceptes de Thalion martelaient mon esprit pour l'obliger à se réveiller.
Je poussai un hurlement et tentai de me dégager des tentacules de terre. Au début, cela n'apportait rien et Thalion en rajouta en utilisant cette fois l'eau pour tenter de me noyer. C'est à cet instant précis que mon instinct de survie prit le dessus.
La chaleur se répandit dans mon corps et la magie se fraya un chemin jusqu'à mon esprit. De minuscules étincelles sortirent de l'extrémité de mes doigts endoloris. Je sentais une sorte de pression envahir ma poitrine en même temps que mes muscles se contractèrent. Je poussai un cri de rage et les branches explosèrent sous l'impulsion de mes pouvoirs. J'utilisai le vent pour les lancer loin de moi et atténuer les flammes qui me brûlaient la peau. Je contrai les attaques aquatiques de Thalion en utilisant moi aussi cet élément.
Mes mains tournoyaient devant moi pour pousser la masse d'eau qui formait une grosse goutte de pluie, dans sa direction. Je rajoutai de l'électricité pour mener une attaque plus puissante et je me sentis voler. J'étais à un mètre du sol et mes cheveux virevoltaient autour de moi. Je me concentrai pour bloquer les chevilles de Thalion entre les serfs de racines d'arbres. À peine le jeune homme fut déconcentré que je transformai l'immense goutte d'eau en boule de feu électrisée et la lançai dans sa direction.
Mais il s'était attendu à mon attaque et il l'évita de justesse en plongeant sur le côté. Je m'attendais à ce qu'il part mon assaut. Je décidai de lui asséner le coup final en l'emprisonnant dans une puissante tornade. Je l'élevai dans les airs comme une simple marionnette et abattait violemment mon bras pour qu'il s'affaisse lourdement sur le sol. Il heurta la terre avec violence et au même moment, mes pieds retouchèrent le sol et mes cheveux retombèrent dans mon dos.
— Alors c'est qui le faible maintenant !
Ma phrase n'eut pas l'effet escomptée car Thalion ne bougea pas. Une peur s'empara de moi et je me précipitai à ses côtés. Il avait les yeux fermés, ses vêtements étaient déchirés par endroit, et ses beaux cheveux bruns cachaient une bonne partie de son visage angélique. Je dégageai une mèche de son front et m'empressait de prendre son pouls. Il ne respirait plus !
Je m'affolai et pris son visage entre mes mains en le suppliant de se réveiller, ce qui se révéla parfaitement inutile. Peut-être que je pouvais utiliser les méthodes humaines sur des êtres d'Hidden World ? J'entamai le massage cardiaque mais soudain, une main puissante interrompit mon mouvement. J'entendis un rire et je surpris le visage souriant de Thalion qui semblait se moquer de moi. Je le frappai violemment sur l'épaule, lui faisant échapper une grimace :
— Abruti ! Tu m'as fait une de ces peurs ! Ne me refait plus jamais ça !
— Tu vois quand tu veux tu peux terrasser n'importe qui !
Il continua à rire et moi à chahuter avec lui pour tenter de lui ôter ce sourire mesquin de son visage. L'heure n'était pas à la plaisanterie et Thalion n'était pas toujours de bonne compagnie mais il avait ses moments. Parfois, il pouvait être adorable et rieur quand d'autres fois il pouvait s'avérer acariâtre et cruel.
Sans que je m'en rende compte, nous nous retrouvâmes l'un sur l'autre. Lui était dos au sol pendant que mon visage n'était qu'à quelques centimètres du sien. Mes longs cheveux noirs formaient un rideau autour de lui et je me pris à regarder ses lèvres pleines et ses yeux magnifiques. Aussi profond que la nuit, ils m'hypnotisaient.
Je me repris bien vite en levant la tête car Circeï nous observait d'un œil taquin. Je me dégageai rapidement des bras puissants de Thalion et me remis debout. Je devais avoir les joues cramoisies car je sentais la chaleur de la honte envahir mon visage.
Le jeune homme resta assis à regarder le sol, les yeux perdus dans le vague.
Sans plus de formalité Circeï s'empressa d'annoncer la raison de sa présence :
— J'ai une bonne nouvelle à vous annoncer. Astal, Siltiama, Valendir et Calion sont revenus du Territoire des Glaces. Ils ont réussi à obtenir la pierre.
— Fantastique !
J'étais peut-être un peu trop enthousiaste mais je faisais tout pour que l'on ne voit pas à quel point j'étais troublée par mon entraîneur.
— Lucy, il va falloir que tu m'accompagnes au Royaume pour que nous puissions enfermer la pierre en lieu sûr.
— Bien sûr.
— Thalion ? Tu nous accompagnes ?
— Non. Je vais rester ici pour peaufiner les séances d'entraînement de Lucy.
Il faisait comme si j'étais invisible et préférait regarder le sol plutôt que Circeï. Sans que la jeune sorcière puisse ajouter quoi que ce soit, il disparut dans un écran de fumée. Il était redevenu froid et inatteignable. Cela me faisait mal de l'admettre mais j'avais la nette impression que lui aussi avait été troublé par notre « moment ». J'avais eu le temps de lire des ouvrages sur les créatures d'Hidden World. Je savais exactement ce que l'on faisait subir aux Bloodcat pour qu'ils ne puissent plus ressentir quoi que ce soit. J'avais été horrifiée devant ces techniques de tortures qui dataient d'un autre temps. Il avait sûrement peur de se rapprocher des sentiments humains, ceux qu'on lui avait interdit d'éprouver.
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