CHAPITRE XIV

Mina ne comprenait pas ce qu'elle faisait là. Elle ne comprenait surtout pas pourquoi son ami avait les pensées aussi lunatiques aujourd'hui. Elle avait beau chercher dans sa cervelle, elle ne trouvait aucune raison. Ou peut-être avait-il trouvé quelqu'un qui l'intéressait ? A cette pensée, les iris dorés de la rose scintillèrent avant que la lueur d'intérêt ne disparaisse pour laisser place à la déception. C'était de Shoto dont on parlait. Cet homme ne savait pas ce que signifiait le mot « séduction ».

« Tout va bien Shoto ? »

Le jeune Todoroki tourna la tête pour lui faire face. Ses yeux étaient légèrement plus cernés que d'habitude et ses traits étaient fatigués. Cela faisait déjà quelques temps qu'elle avait remarqué le manque de sommeil de son ami. Mina avait toujours eu ce don de remarquer les choses importantes comme inutiles, contrairement... Contrairement à Rui. En pensant à son amie, le regard de la jeune fille s'assombrit un petit peu. Son sourire resta néanmoins figé sur son visage, un rituel qu'elle s'était habituée à effectuer.

Rui lui manquait. Enormément. Et même si la douleur s'était peu à peu estompée avec le temps, elle restait toujours présente. Mina avait toujours été très douée aussi pour cacher sa peine. Etant d'une humeur très joyeuse, elle avait très vite appris à manier l'art du sourire et du masque. Cela lui avait énormément servi au collège notamment. Au lycée, les choses étaient allées beaucoup plus tranquillement. La seule fois, à cette époque, où elle n'avait pas su garder le sourire fut lors de l'enlèvement de sa meilleure amie. Son inquiétude avait été à un tel niveau que l'idée de sourire ne lui était même plus venu à l'esprit.

« Je vais bien. »

La voix du jeune homme la sortit subitement de ses pensées.

« Ne mens pas Shoto. »

Quelle hypocrite elle était. Elle lui en voulait de lui cacher ses peurs, de lui cacher sa tristesse qu'elle connaissait par cœur, mais elle, elle lui mentait honteusement en le regardant droit dans les yeux.

Les pupilles de l'étudiant s'encrèrent dans les siennes. Shoto ne voulait pas lui mentir. Pas à Mina, elle qui avait été à ses côtés depuis tout ce temps. Sans qu'il ne s'en rende compte, la rose était devenue une personne indispensable dans sa vie. Elle était devenue sa meilleure amie, celle sur qui il savait qu'il pourrait toujours compter. Mina était ainsi. Mais ce sujet-là était... délicat. Et cela ne l'étonnerait pas qu'elle ne le croit pas et qu'elle lui en veuille. Cela était normal. Cependant, il ne pouvait pas lui cacher ça. Car il n'aurait pas aimé qu'on le lui cache. Alors prenant une longue respiration, il finit par tout avouer :

« Je pense... Rui est en vie. »

Le fait qu'il ait changé ses mots transformait tout le sens de sa phrase. Et quand il dit ces mots, rempli d'un espoir et d'une certitude sourde, quelque chose se brisa en Mina. Il fut un instant avant qu'elle ne comprenne la portée destructrice des mots du jeune homme. Elle entrouvrit les lèvres, réalisant doucement, de surprise. Elle était sans voix.

Pourquoi ? Pourquoi lui faisait-il ça ? Ses yeux de Mina s'ouvrirent brusquement de consternation. Ses sourcils se froncèrent et ses doigts se renfermèrent avec force. Pourquoi mettait-il autant de vérité dans ses voix ? Pourquoi ses mots se voulaient si sûrs ? Pourquoi il faisait ça ? Elle pensait qu'il avait réussi à faire son deuil. Elle pensait qu'il avait avancé. Elle pensait qu'il avait ouvert les yeux. Alors pourquoi lui faisait-il ça ?

Son cœur cognait dangereusement dans sa cage thoracique. La colère et la douleur pulsèrent dans ses veines. Était-il fou ? Mina se demandait ce qu'il s'était passé dans la tête de son ami pour qu'il en arrive à là. Une douleur vive pris possession de son corps.

Rui était morte.

Rui était morte. Elle n'était plus là. Ils ne l'entendraient plus jamais se plaindre. Ils ne l'entendraient plus jamais les remettre à leur place. Ils ne la verraient plus jamais lire ses livres préférés et si rares. Ils ne la reverraient pas. C'était fini. Elle n'était plus là. Alors pourquoi lui disait-il ça ?

« Arrête... Arrête tout, tout de suite..., elle dit d'une voix basse à peine audible.
-Rui est en vie, je suis sûr qu'elle l'ait, il s'entêta.
-Et quelles preuves as-tu ? Dis-moi.
-Dabi et Rosemarie-
-Dabi et Rosemarie ? Ces vilains ? »

Le ton incrédule et froide qu'elle prit stoppa un instant Todoroki. Et avant qu'il n'ait pu ajouter quoique ce soit, la jeune Ashido poursuivit toujours plus sèchement :

« Tu crois en la parole de vilains ? Tu es fou ? Tu dis que Rui est vivante, simplement parce que des vilains te l'ont dit ?
-Ecoute Mina-
-Non ! Non, je ne t'écoute pas ! elle hurla presque. Tu vas croire les paroles de vilains ? De personnes qui répandent le mal autour d'eux pour une idéologie complètement grotesque, de celle qui a torturé Rui, de celui qui l'a sûrement tué ce jour-là ?! Mais ouvre les yeux bon sang ! Rui n'est plus là, tu comprends ?! Elle n'est plus là ! Elle est morte ! »

Sa voix se brisa à la fin de sa phrase, et les larmes vinrent très vite mouiller ses yeux. Elle ne lui demandait pas grand-chose, n'est-ce pas ? Tout ce qu'elle voulait, c'était qu'il fasse enfin son deuil ! Tout ce qu'elle voulait, c'était d'oublier la douleur que lui causait la mort de sa meilleure amie ! Était-ce trop demandé ?

Son sang se réchauffait dans toutes les parties de son corps. Pourquoi cela faisait-il si mal ? Pourquoi cela lui faisait-il toujours aussi mal ? La rose avait pensé qu'elle avait pu faire son deuil. Pendant tous ces mois, elle avait pensé avoir réussi à avancer. Alors pourquoi avait-il toujours aussi mal que le premier jour ? Son cœur débordait de désespoir. Elle ne pouvait stopper ces perles d'eau salées de couler le long de ses joues. Là, devant Shoto, elle pleurait toute sa peine à chaudes larmes. Mina avait poursuivi sa vie, elle avait ri, elle avait été heureuse, elle n'avait pas pensé à Rui. Pendant tous ces mois, Mina avait tenté d'avancer. Elle avait épaulé Shoto. Elle était partie voir de nombreuses fois Monsieur Suzuki. Elle était allée sur sa tombe. Elle avait fait son deuil !

Menteuse.

Elle mentait. Pendant tout ce temps, Mina n'avait fait que mentir au monde entier. A Shoto et Eijiro en premier. Tout ce temps, elle n'avait que menti en souriant avec gaieté. Elle n'allait pas bien. Elle n'avait pas avancé. Elle était restée désespérément bloquer sur ce jour fatidique où elle avait appris la mort de sa meilleure amie. Elle avait fait taire sa tristesse, et elle avait souri, chose qu'elle savait tellement bien faire. Elle s'était étouffée de l'intérieure, enfermant à double tour la souffrance que lui avait causé cette perte. Elle avait menti, et la vérité... Et la vérité était qu'elle n'avait toujours pas eu le courage de faire son deuil.

Elle n'était pas aller une seule fois sur sa tombe pour se recueillir.

La peur l'attrapa par les tripes. Elle n'était pas prête, et surtout elle était terrifiée à l'idée de faire son deuil. Elle ne le pouvait toujours pas. Alors avec précipitation, Mina pris ses affaires et s'enfuit loin de l'homme qui ne tenta même pas de la rattraper. Le souffle erratique, elle marcha dans la rue avec rapidité. Elle s'enfuyait, loin de cet homme qui lui rappelait bien trop son malheur. Loin de lui, elle voulait continuer à faire comme si tout allait bien. Comme si Rui n'était pas partie. Elle ferma les yeux en soufflant doucement pour se calmer. Ça va aller. Eijiro était à la maison. Elle allait le rejoindre, et tout irait bien. Elle renfermerait encore une fois ses démons dans un coin de son cœur, et cette fois-ci, elle fermerait la cage à double tour.

Shoto avait laissé la rose partir, sans chercher à la rattraper. Son cœur, à ce moment, avait cesser de battre. Il savait. Il savait qu'il venait peut-être de perdre son amie. Il avait compris, à l'instant où cette flamme avait brillé à l'intérieur de son regard jaune, dans quelle situation se trouvait Ashido.

Sans un mot, il finit néanmoins par lui aussi quitter le parc silencieusement. Son pas gracieux le fit marcher jusqu'à Yuei, là où il pourrait trouver toutes les réponses à ses questions. Il rattraperait bien ses cours un autre jour. Sa priorité était à présent de lui soutirer des informations. Il marcha dans les couloirs de son ancien lycée, un endroit qui fut pour lui un endroit rempli de souvenirs aussi doux qu'amers. Il ne pensait pas devoir revenir ici avant un certain temps. Mais le voilà, marchant droit et fier.

Le professeur Aizawa se rendait à la salle des enseignants, dans l'espoir de pouvoir un peu se reposer, les yeux rouges et l'air hagard. Il n'avait pas très bien dormi la nuit précédente. Un étrange pressentiment l'avait tenu éveillé la quasi-totalité de la nuit. Entre les murs de l'école, il bailla avec disgrâce. Sa marche lente le fit néanmoins enfin arriver à sa destination. Il remarqua que la porte de la salle était fermée, étrangement. Il haussa un sourcil et approcha un e main vers la poignée. Il esquissa un mouvement pour l'ouvrir quand il entendit soudainement une voix familière s'élever jusqu'à lui. Inconsciemment, il stoppa son geste et se figea pour écouter la conversation.

« Todoroki...
-Professeur All Might. Midoriya. »

Aisément, Aizawa pu parfaitement reconnaître la voix grave de son ancien élève. Il se demanda ce qu'il pouvait bien faire ici.

« Que fais-tu ici ? la voix de Midoriya sonnait comme attristé et curieux. »

Un court silence interrompit leur conversation, puis enfin, Todoroki dit d'une voix neutre :

« J'aimerais vous demander un service. Vous me devez bien ça, après ce qu'il s'est passé avec Rui. »

A sa réplique, les traits de l'enseignant derrière la porte se firent interrogateur. De quoi parlait Shoto ? Pourquoi parlait-il soudainement de Suzuki ? Et à qui adressait-il ces mots ? Aizawa affina encore plus son ouïe si tant que cela était encore possible.

« De quoi, il entendit Midoriya commencé avant qu'il ne se fasse brusquement couper.
-En quoi veux-tu que je t'aide, Todoroki ? »

La voix de l'ancien numéro un semblait complètement résigné. De la peine et de la fatigue se mélangeaient aussi.

« Je veux que vous m'aidiez à chercher des informations sur l'Elite.
-L'Elite ? Pourquoi cela ?
-Celui qui l'a tué faisait partie de cette organisation.
-Mais Todoroki, cette organisation ne-
-Je sais qu'elle existe. Quelqu'un me l'a dit, et je sais que cette personne n'a pas pu me mentir. Et avec votre position, votre nom, vous pouvez m'aider à trouver des réponses. »

Après un moment de silence, Eraser Head entendit des pas venir en sa direction. Il se décala donc et se cacha juste à temps pour que Shoto ne le voit pas en sortant de la salle. Suite à son départ, le professeur n'entra pas de suite dans la pièce. Les paroles qu'il entendit après tout ceci l'empêchèrent de faire un seul mouvement, tant la déception et la surprise l'avaient stoppé dans sa démarche.

« Que s'est-il passé ? Que s'est-il passé avec Rui ?
-Je savais que tu me demanderais ceci, All Might soupira longuement avant de poursuivre. Ce jour-là, lorsque Rui mourut... Si Rui est morte, c'est de ma faute. C'est parce que j'ai choisi de te sauver toi et de ne pas la secourir elle qu'elle a fini par succomber à ses blessures. »

oOo

Rui était allongée dans un lit moelleux. Elle ne voulait pas se réveiller. La nuit précédente fut extrêmement éprouvante, si bien qu'ils avaient finit par rester au lit jusqu'au milieu de l'après-midi. Ils n'avaient pas pu se reposer tout de suite. Kaori n'arrivait pas à croire que son amie, censé être décédée, se trouvait devant elle. Bien vivante. Elle avait pleuré, avait sauté dans ses bras et elles étaient tombées au sol et y sont restées un moment. Ils ont énormément discuté la veille, et ils lui avaient expliqué toute la situation, ou du moins tout ce qu'elle pouvait savoir. Kaori avait eut du mal à croire qu'elle était bien là, vivante, chez elle. Par chance, ses parents étaient en déplacement à Kyoto depuis jeudi et ne revenaient qu'une semaine plus tard. De ce fait, Kaori s'était retrouvée seule à la maison. Il y avait bien son grand-frère avec elle, mais celui-ci était partie chez sa petite-amie passer le week-end, évidement dans le dos de leurs parents.

Ils s'étaient couchés très tard. La jeune femme n'arrivait toujours spas à croire à ce miracle. Compréhensive de leur situation, elle ne leur avait pas demandé de tout lui expliquer dans les moindres détails et avait respecté leur silence à quelques-unes de ses questions.

La noiraude tenta de se lever en sentant son ventre lui crier famine, mais s'arrêta aussitôt lorsqu'elle sentit un poids la retenir par les hanches. Elle se rallongea et se tourna vers la silhouette encore endormi de Shun et se cala contre lui. Kaori les avait installés dans deux chambres d'amis, en plus de la chambre de son frère qu'ils pouvaient emprunter. Cependant, Rui n'avait pas lâcher Shun et les deux s'étaient finalement endormis ensemble. Doucement, elle lui embrassa la joue. Il grimaça à son geste, ce qui l'amusa un instant. Elle finit néanmoins par se relever pour descendre à la cuisine. Elle pouvait entendre la musique de Kaori battre à son plein dans sa chambre et se demanda une seconde comment Shun et elle n'avaient pu se réveiller avec tout ce bruit. Surtout alors qu'ils se trouvaient dans la chambre près de la sienne.

En arrivant dans la cuisine, la jeune Suzuki pu y retrouver Xavier qui mangeait sur la table. Le vert la salua rapidement d'un geste de la tête qu'elle lui rendit. La jeune fille se prépara une assiette et le rejoignit pour déjeuner-goûter. Puis soudainement, alors que le silence planait autour d'eux, Rui lui demanda :

« Je sais qu'on devrait éviter de sortir... et de se faire remarquer. Mais je dois vraiment aller voir quelqu'un... »

Xavier l'examina un instant du regard. Il voulu refuser fermement, mais en la voyant si déterminée, il se dit que cela devait vraiment être important. Il lui demanda tout de même le nom, pour éviter les quelconques situations surprises. Cependant, lorsque le nom glissa entre ses lèvres, Xavier écarquilla les yeux de stupeur avant prononcer doucement :

« Comment connais-tu cet homme ?
-Qui ? elle questionna.
-Mashiro Yagi.
-Il était le coéquipier de mon cousin.
-Comment s'appelait ton cousin ? »

A ces mots, Mochiba sentit une boule se former dans le creux de sa gorge. Rui le regarda étrangement puis confia dans un souffle le nom de son défunt cousin :

« Riku. Riku Yamada. »

Et ça fait bim-

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