CHAPITRE VIII

Shoto n'était pas très proches de son frère. Son père l'avait pratiquement isolé, il n'avait créé des liens avec Natsuo et Fuyumi qu'après la supposée mort de Touya. Il se souvenait avoir été triste d'avoir perdu un frère, mais il n'avait jamais vraiment eu à faire un deuil. Ils ne se connaissaient pas et n'avaient pour lien que celui du sang. Pourtant, quand il avait découvert qu'il était toujours en vie, Shoto n'avait pas voulu l'abattre pour être devenu un vilain. Il avait simplement voulu éviter de le croiser, évitant toute confrontation avec lui et surtout, ne voulant pas commencer ce combat qui devait se terminer par la défaite et la capture de l'autre.

Mais aujourd'hui, c'était différent. Aujourd'hui, la colère qui l'habitait depuis tant de temps refaisait de nouveau surface, ivre de vengeance et de réponses. Il souhaitait seulement lui faire payer tout le mal qu'il lui avait causé en prenant la vie de Rui, peu importe que cela ait été lui ou un autre qui l'ait abattu. Il réclamait simplement une compensation. Il voulait simplement qu'il paie pour elle.

Sa colère était si ardente que ses flammes s'étaient activées d'elles-mêmes, enflammant entièrement son côté gauche du corps tandis que sa glace recouvrait son côté droit. Il s'était élancé vers son aîné avec rage, se propulsant au-dessus du sol pour le rejoindre sur le haut de ce bâtiment vide. Très vite, il engagea le combat à coup de poings enflammés.

Les étincelles bleus et rouges se mélangèrent dans un chaos total, créant des éclats de couleurs ardentes s'entrechoquant avec violence et sans retenue. La ville si animée plus tôt laissait à présent passer un silence de mort dans ses rues, entrecoupé par les coups de ces deux adversaires si étroitement liés et pourtant si inconnu l'un à l'autre.

L'air s'alourdissait à chaque coup porté, les étouffant un peu plus chaque seconde qui s'écoulait. Le ciel auparavant d'un bleu éclatait était dès à présent recouvert par d'énormes nuages gris.

Le pied de Shoto fendit l'air pour rencontrer brutalement la joue de celui qu'il appelait son ennemi. Les yeux plissés et les pupilles dilatées, il enflamma son poing avant de le balancer contre le ventre du noiraud. Celui-ci se cambra en deux, mais au lieu de gémir de douleur, son corps se recouvra de flammes bleues et un sourire narquois vint prendre possession de ses lèvres. L'homme aux nombreuses cicatrices releva un regard froid vers son petit-frère qui se décala de lui avec vitesse, la méfiance envahissant son être entier. Dabi se releva sans mal, passant une main sereine entre ses mèches noires.

« C'est tout ce que tu peux faire ? »

Partant au quart de tour, le demi-rouquin fonça de nouveau sur le noiraud pour lui asséner une suite de coups violents et sans retenu. Ce dernier les para un à un, sans réel difficulté, n'activant son Alter à aucun moment.

Dabi n'avait jamais été spécialement proche de Shoto. Après l'avoir maltraité lui, ce fut au tour de son jeune frère de subir les assauts de colère leur géniteur. Ainsi, il n'avait jamais vraiment eu l'occasion de se rapprocher de son petit-frère. Mais c'était sûrement pour le mieux. Dabi n'aurait jamais pu se résoudre à se rapprocher de Shoto comme il s'était rapproché de Natsuo. Cela aurait été impossible.

Touya avait énormément souffert pour satisfaire son père. Etant le seul enfant Todoroki à avoir hérité de l'Alter de feu du grand et célèbre Enji Todoroki, en plus d'être l'aîné de cette famille, il avait dû supporter de lourdes responsabilités depuis son plus jeune âge. Il ne s'était jamais plaint, avait supporter sans jamais rien dire. Il avait tout fait pour satisfaire celui qu'il considérait comme son père, il s'était entraîné jusqu'à ce que fatigue s'en suive, s'était démené à la tâche pour pouvoir rendre sa famille fière. Sa ressemblance avec son père avait conduit sa mère à rester quelque peu distante avec lui. Bien qu'il vît qu'elle l'aimait de tout son cœur, Rei Todoroki n'avait jamais su cacher le dégoût et la peur dans son regard quand celui-ci se portait sur son enfant et qu'elle voyait en lui l'homme qui la faisait souffrir chaque jour depuis que leur vie était liée par les liens du mariage. C'était pour l'amour et la reconnaissance que Touya s'était entraîné si fort. Pour cet amour qu'il souhaitait tant recevoir de ses parents qu'il avait péri dans ses propres flammes.

Touya avait énormément souffert à la naissance de son frère. Tout ce qu'il avait recherché lui avait été volé par lui, son propre frère, Shoto. De suite, sa mère l'avait aimé lui, car une part d'elle se reflétait dans le petit dernier de la famille. De suite, son père avait tracé son avenir et lui avait dédié chacun de ses instants, délaissant le rouquin. Shoto avait reçu toute l'affection qu'il avait tant voulu acquérir par sa simple naissance. Et à cet instant précis, Touya avait su que jamais il ne pourrait le considérer comme un des siens.

Dabi ne souffrait plus aujourd'hui. Il s'était détaché de tout ça, lui, Dabi. Il savait à présent, avec la maturité qu'il avait acquis rapidement malgré lui, que rien n'était de la faute de Shoto. Au contraire, il n'avait fait que de naître. Tout ça, tout était arrivé par la faute de son père. Son enfance cauchemardesque, son manque d'amour, son enlèvement, son adolescence tortueuse... Tout était de sa faute pour ne pas avoir su les élever, pour l'avoir cru mort, pour ne pas l'avoir cherché. Shoto n'avait fait que naître dans la mauvaise famille. Tout était de la faute d'Endeavor et de son ambition grotesque et destructrice.

Il n'était plus Touya Todoroki, fils du célèbre héros numéro deux Endeavor, mais Dabi, membre de la Ligue, l'une des plus grandes organisations criminelles du Japon.

Le noirâtre balança son pied sur le côté, puis dans une synchronisation quasiment parfaite, leurs deux Alters de feu s'activèrent de nouveau. Ils se toisèrent un instant du regard, un simple instant qui sembla durée des siècles pour les deux frères. Ils se séparèrent brusquement, toujours le regard ancré dans l'autre. Les pupilles vairons de Shoto communiquaient toute sa rage à celles bleus turquoises du vilain. Esquissant un sourire suffisant et relevant le menton, le corps couvert de blessures comme celui qui lui faisait face, Crématorium s'exclama d'une voix calme et posée :

« Tant de colère dans tes yeux... Mais dis-moi, petit-frère, qu'ai-je donc bien pu faire pour recevoir toute ta haine ? »

La mâchoire du jeune héros se contracta, et son corps vibra tout entier.

« Comme si tu ne savais pas. »

Sa voix tremblante de fureur fit lever la tête de Dabi qu'il inclina légèrement vers l'arrière, comme pour le regarder de haut.

« Développe, vas-y.
-Tu l'as tué, enfoiré... Tu l'as tué ! »

Bien qu'il ne sût pas du tout de qui Shoto pouvait bien parler, il jugea tout de même bon de rajouter :

« Ce n'est pas comme si tu ne savais pas de quel côté j'étais, dit-il d'une voix froide. Ça ne devrait même pas t'étonner que j'aie pu tuer un de tes petits camarades d'héros.
-Elle n'avait rien à avoir avec ça ! Elle n'était même plus reliée à All Might, elle ne voulait même pas être héroïne ! Tu as tué une innocente, tu l'as tué ! »

Les poings du dernier Todoroki se serrèrent jusqu'à rendre blanches ses jointures. De son côté, le vilain ne broncha pas face à ses accusations.

« De qui tu me parles ? »

Les yeux révulsés d'incrédulité, le jeune homme s'écria à plein poumons :

« De Rui Suzuki ! Tu as tué Rui Suzuki et son cousin, Riku Yamada !
-Et qui sont-ils ? »

Shoto ne répondit pas, un peu abasourdi par cette réponse. Elle n'était clairement pas celle qu'il attendait.

« Nous n'avons tué aucun Suzuki, ni de Riku, Dabi sourit narquoisement. Je le saurais sinon ; les louanges, ce n'est pas de ça qui manque à la Ligue.
-C'est vous qui l'avez tué ! il reprit avec plus d'aplombs. Vous étiez là, le 16 avril, vous avez attaquez Tokyo. C'est ce jour-là que vous l'avez tué.
-On ne connaît pas de Suzuki, Yamada. Même si la Ligue est une des organisations les plus connus et médiatisés, que nous étions sur place ce jour-là, ça ne veut pas dire que nous avons tué tous les innocents morts ce 16 avril-là. »

Il eu un sourire ironique face à l'incrédulité qu'affichait son frère. Qu'est-ce que les héros pouvaient être naïfs parfois. Shoto observait son frère, dans le but de déceler la moindre trace de mensonge, de sarcasme. Mais Dabi restait neutre face à lui, avec un sérieux évident. Et soudainement, le doute s'insinua en lui. Il ne savait pas pourquoi ce doute persistait. Il n'était pas sensé croire en les paroles de cet individu qui lui faisait face. Pourtant, une partie de lui croyait en ses mots. Avec toutes les révélations qu'il avait découvert avec Rui, cela ne l'étonnerait même pas que le gouvernement ait employé quelqu'un pour tuer sa copine. Mais il restait encore bien trop d'ombres sur le tableau à éclaircir. Pourquoi avoir agi aussi tardivement ? Pourquoi maintenant ? Personne ne savait tout ce qu'ils avaient découvert. Et il n'y avait que des membres de la Ligue présent lors du massacre du 16 avril. Il ne comprenait plus rien, des doutes remettaient en question tout ce dont il avait été certain jusque-là. Tout ce qu'il pensait clairs s'assombrissaient à vue d'œil dans son esprit.

« Si tu veux des réponses, petit-frère, tu sais où me trouver. »

Sans crier gare, Dabi s'envola sous ses yeux alors que Shoto restait plus perplexe que jamais, complètement perdu. Il voulait des réponses. Mais où voulait-il qu'il le trouve ? Shoto se sentait largué et la frustration l'envahit. Pourquoi était-il toujours celui qu'on laissait dans le flou ?

Dabi et son voile de mystère... Alala vous êtes pas prêts pour la suite...

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