ʏᴏᴜɴɢ ᴀᴍᴇʀɪᴄᴀɴs, part.53

Il y a quelqu'un dans la maison qui ne devrait pas être là. Maman me serre fort dans ses bras comme si j'étais de nouveau enfant. Papa a laissé tomber sa baguette sur le sol, maintenant il dit quelque chose que je ne peux pas entendre, les mains en l'air. Je laisse mes yeux s'affoler contre les murs à la recherche d'une issue alors que sais qu'il n'y en a pas ; c'est ma maison.

Un homme en cape noire nous menace. Il tord son nez dans une grimace sadique. Il nous a eu∙es. Il rit. Je ne saurai dire depuis combien de temps il est là ou depuis combien de temps j'y pense. Je veux qu'il fasse vite, avoir moins de temps pour penser à comment ce type va me tuer. Non, je veux qu'il mette une éternité, qu'il nous laisse une chance de nous échapper et que je puisse trouver la meilleure des dernières pensées.

Trop tôt ou trop tard, le flash vert frappe. Je ferme les yeux et serre maman fort.

Et je me r éveille.

Déboussolée d'être encore en vie, je mets un moment à comprendre où je suis. La lumière nocturne vient de la gauche, les formes des lits se découpent dans l'obscurité. Je suis dans le dortoir, à l'école.

Ce n'est pas la première fois que je fais ce rêve. Je suis toujours surprise quand il est terminée parce qu'il y a quelque chose qui le différencie des autres. Celui-ci n'est pas un enchainement d'éléments clairs qui deviennent absurdes au réveil, il se rapproche davantage d'un fragment inventé de ma vie.

Je crois savoir ce dont il s'agit et je n'ai pas envie d'y penser même si mon cerveau veut que à l'évidence que j'y pense. Il m'envoie des images de rappel à chaque fois que je ferme les yeux. Si je laisse dériver mes pensés, je retombe dedans la tête la première.

Pour ne pas penser, donc, je pars trainer dans la salle commune en quête d'une distraction. Sans succès. Il n'y a rien qui puisse me faire oublier ma tragédie. Les endroits calmes sont riches en souvenirs, les endroits animés me fatigue comme si je dépensais l'énergie de tous∙tes celleux qui les habitaient en même temps.

Avant que l'ambivalence ne détruise ce qui reste de mon esprit, Sirius arrive pour me sauver.

Ça ne m'étonne pas — il ne dort jamais.

J'ai eu le béguin pour lui pendant longtemps, tout le monde le sait. C'est toujours comme ça avec les personnes très belles, avec un certain sens du style, une personnalité explosive et une aura de mystère. Tout le monde tombe amoureux d'elles avant que leurs santé mentale brisée ne nous fasse fuir.

Il fut un temps où ne pas dormir de la nuit était quelque chose de cool, un joli jeux avec la mort. Depuis mes cauchemars, je comprends qu'il n'y a rien de beaux dans les démons qui nous dévorent de l'intérieur au point de nous priver de sommeil. Et je ressens davantage de compassion pour Sirius que d'admiration.

Il me salut d'un coup de menton, s'installant à mes cotés, l'air de rien. Je sens tout ses tourments et, par respect, je ne prends pas la peine de demander comment il va. Je ne veux pas lui infliger ce mensonge. Il a une lueur sombre dans les yeux, colérique et triste comme des nuages d'orages.

Il sort une plume et un parchemin pour recopier le devoir qu'il tient dans sa main. Devoir à rendre pour ce matin. Je ne l'ai pas fait non plus.

Je ne travaille plus.

Je veux remplir ma tête de tout sauf de pensées.

Je veux de la musique mais y a pas moyen d'en faire venir jusqu'ici. Pas de feuilles pour écrire mes paroles alors je les chante dans ma tête en m'imaginant sur une scène avec des instruments et un public. Ce ne sont pas mes mélodies qui me viennent mais celles d'autres, familières. Je ne les ai pourtant jamais entendues.

You lock the door

And throw away the key

And there's someone in my head, but it's not me

Je crois que j'arrive aussi à entendre les pensés. Les plus simples, pas celles sur lesquelles ont ne peut pas mettre de mot. Et avant que je ne m'en rende compte je suis de nouveau endormie sur l'un des canapés rouges. Quelque chose se pose sur mes épaules. Je sens la présence de Sirius même après son départ.

À mon réveil il fait jour. Matin d'école. Le silence et la mélancolie sont mort∙es quand les autres ce sont réveillé∙es.

Je voudrais ne pas avoir à me lever. Retourner à la nuit, espace hors du temps.

J'échange un regard avec un nouveau Sirius qui a troqué sa tristesse contre une euphorie provocatrice. Lui s'est déjà ré-adapté au monde. Il me sourit. Je fais en sorte de lui sourire en retour je ne peux pas. Quelque chose essaye encore de s'infiltrer dans ma tête. Une chanson que je ne connais pas en arrière plan, la présence d'une personne, un rêve qui veut se rejouer en plein jour.

Je dois me concentrer pour garder les yeux ouverts et ne pas les perdre dans le vide.

Lily m'intercepte, pétillante. Elle a l'air de pouvoir combattre une armée de dragons si l'occasion se présente. Elle étincelle comme un soleil, racontant de sa voix douce une histoire dont je ne saisi pas le moindre mot. Il y a déjà assez de mots comme ça. Je crois qu'elle pose une question alors je hoche la tête.

Fermez-la je ne peux pas me concentrer !

Mais je sais que personne ne parle.

Une main touche la peau de mon bras et me procure une sensation électrique. Dorcas plante ses yeux dans les miens s'exprime d'un ton clair. Les grésillements s'arrêtent. Morgane, merci.

« On a cours de potions dans dix minutes. »

Je ne sais pas par quel miracle j'atteins les cachots.

Une fois debout devant la table de bois faisant tourner un liquide visqueux du bout de ma baguette, je sens une barrière, comme un carré de givre fait de picotements de peine tout du long entre Dorcas et moi. Elle s'inquiète et je déteste ça. Je me détourne de la potion pour croiser de nouveau les iris noires de ma meilleure amie qui pose son regard ailleurs. Elle griffonne du bout de la plume des notes sur une page déjà bien trop remplie.

« Quoi ?

- À toi de me le dire. Tu dors pas et t'as l'air déboussolée depuis un petit moment déjà. »

Comme tout le monde, non ? Les choses m'échappent.

Le temps est distordu. Je ne sais jamais si je vis dans le présent ou dans le futur et c'est pas une métaphore. Je ne sais jamais si je suis encore Marlène McKinnon. Je jurerai d'avoir des souvenirs qui appartiennent à un∙e autre.

Mais je veux pas de pitié ou d'aide. Je veux pas qu'on me triture le cerveau. Même si c'est insoutenable. C'est pire après chaque réveils

depuis que je vis ma mort toutes les nuits.

J'ai vu l'avenir et il ne restait plus qu'une poignée d'entre nous. Je n'ai pas encore eu le courage de le dire aux autres. Je ne crois pas que je devrai. Je n'ai même pas encore eu le courage de me l'avouer à moi-même. Ce sont les dernières années de ma vie et les premières années à Poudlard commencent déjà à s'effacer de ma mémoire. Que restera-t-il de moi à la fin ? Tout est passé si vite. 

.

Rien ne s'arrangea pour Marlène, quand, au déjeuner, Lily brandit le nouveau numéro de la Gazette du Sorcier dans lequel il était fait mention d'une nouvelle attaque par des loups-garous et des mangemorts. Marlène vit trouble, Remus se figea, les maraudeurs furent réduits au silence.

Lily répéta ce qu'elle savait sur les loups-garous, à savoir peu de choses et peu de choses vraies. Un mur de fausses rumeurs que tout les élèves se mirent à construire se dressa autour de la table. Chacun∙e y allait de son anecdote sur les allié∙es de Voldemort ou les bêtes nocturnes, exceptés celleux qui étaient concerné∙es de trop près. L'un rebondit sur une lointaine cousine tuée lors d'une attaque, l'autre parla de mort lente plutôt que de malédiction. Sirius serra les dents. 

« Qui deviendra mangemort, vous pensez ?

- Les Serpentards, sans nul doute. Iels le sont déjà pour beaucoup.

- Je partirais sur Mulciber, Avery, Rosier et Black. J'ai encore des doutes sur Rogue et Croupton, leurs familles ne viennent pas du même milieu, ils y échapperont peut-être.

- Pas de Gryffondor ou de Pouffsouffle c'est sûr. Des Serdaigles peut-être. 

- Sauf s'il y a des maledictus, des loups garous ou des vampires parmi elleux. Celleux-là vont direct dans le camp des forces du mal. Vous-savez-qui adore récupérer les marginales∙aux. »

Frank tenta une défense juste au moment où sonna la faim du repas. Marlène n'avait rien touché et elle ignora le cours d'astronomie alors que ses amies y filent. Seule Dorcas resta avec elle. Elle ne parlait pas mais sa présence suffisait. Elle proposa un tour à l'infirmerie, aux toilettes de Mimi Geignarde, au Cromlech ou près du lac noir pour ne pas se faire prendre. Marlène répondit seulement qu'elle n'en savait rien, qu'elle allait peut-être juste retourner au dortoir. Elle entendit à peine sa réponse. 

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