➳ ❝ pas d'alliance sur le couffin, mais un ultimatum ❞

Dehors, dans la rue, tombait la brume en même temps que la nuit. 

— Je sais ce que vous avez fait, miss Edwards. 

Le deal était simple : elle l'épousait, et lui, il l'aidait à étouffer la vérité. Alors Cleo sut qu'il lui faudrait choisir entre le risque de gâcher le plan de sa vie et celui de passer d'héroïne à femme mariée aux ambitions fanées. 

— Je ne ferai jamais une bonne compagne. 

— Je le sais. 

— Alors, pourquoi vouloir m'épouser ? 

Il s'approcha, saisit une de ses mèches brunes qu'il fit valser entre ses doigts. Son souffle l'effleura comme un doux effluve de luxure.

— Parce que tu es... intéressante. 

La jeune femme plissa les lèvres dans une moue réprobatrice. Lui ne semblait pas vouloir détacher son regard bleu luciole de ses pupilles abyssales.

Depuis le début jusqu'à la demande en mariage lors du dîner, Cleo l'avait pris pour un ange sous ses mèches d'albâtre. Grave erreur ; il était en réalité comme un centaure, sourire de biais révélant ses lubriques projets.

La créature s'approcha d'elle, si près que Cleo pouvait à présent observer les éclats d'opale dispersés un peu partout dans ses iris ; plus concentrés au centre et se faisant rares en périphérie, c'était comme si l'univers criait dans chacune de ces petites taches colorées.

Il enroula ses bras autour de sa taille fine, marquée d'une ceinture en soie par-dessus un chemisier vert prune. L'étreinte était froide, mais vibrante. Elle n'appréciait guère la sensation.

 — Dis-moi oui. 

Cleo clôt ses paupières, incapable d'être happée plus longtemps par ces yeux si captivants. Aussitôt, deux lippes chaudes se posèrent sur ses lèvres et son âme fut bientôt aspirée dans le néant. Il faisait frais dans le salon mais les vêtements encombraient. Ils tombèrent comme des caresses sur les corps fumants de désir, les soupirs n'incarnaient qu'une fougue sans passion.

Entre chaque langoureux baiser, les draps frissonnaient craintivement. Lorsque les bouches se séparaient par manque d'air, le froid les prenait aux tripes et les langues s'empressaient de se retrouver dans leur étreinte embrasée. La nuit était à l'épreuve du feu, elle dissipait les râles sinueux de ces amants qui ne s'aimaient pas encore. Les yeux du Centaure roulaient, comme ses hanches, dans un mouvement lascif sur les courbes fines et dentelées de sa partenaire.

Pendant ce temps, le regard charbon de la jeune femme se perdait dans la faible lueur d'une bougie solitaire, posée sur le haut d'une étagère. Elle venait finalement de perdre la partie.